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04/06/2019 | FRANCE | N°18NT00366

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 04 juin 2019, 18NT00366


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme F...ont demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner la commune de Landunvez à leur verser la somme de 194 884 euros en réparation du préjudice qu'ils estiment avoir subi du fait des illégalités fautives commises concernant les parcelles cadastrées B 1018 et 1019, avec intérêts au taux légal à compter du 13 décembre 2014 et capitalisation des intérêts.

Par un jugement n° 1503256 du 15 décembre 2017, le tribunal administratif de Rennes a condamné la commune de Landunvez

à verser à M. et Mme F...la somme de 180 730, 24 euros, avec intérêts au taux légal à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme F...ont demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner la commune de Landunvez à leur verser la somme de 194 884 euros en réparation du préjudice qu'ils estiment avoir subi du fait des illégalités fautives commises concernant les parcelles cadastrées B 1018 et 1019, avec intérêts au taux légal à compter du 13 décembre 2014 et capitalisation des intérêts.

Par un jugement n° 1503256 du 15 décembre 2017, le tribunal administratif de Rennes a condamné la commune de Landunvez à verser à M. et Mme F...la somme de 180 730, 24 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 13 décembre 2014 et capitalisation des intérêts à compter du 13 décembre 2015, a rejeté le surplus des conclusions de M. et Mme F...et a condamné la société Groupama Loire Bretagne à garantir la commune de Landunvez à hauteur de la somme précitée.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 29 janvier 2018, 30 novembre 2018 et 21 janvier 2019, la caisse Régionale d'assurances mutuelles agricoles de Loire-Bretagne, dite Groupama Loire Bretagne, représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler ce jugement du 15 décembre 2017 et de rejeter l'appel en garantie formé par la commune de Landunvez ;

2°) à titre subsidiaire, d'annuler ce jugement et de rejeter les demandes de M. et MmeF... ;

3°) de mettre à la charge des parties perdantes une somme globale de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'il n'est pas suffisamment motivé s'agissant de l'absence de faute lourde de l'Etat et sur la circonstance que la commune était à l'origine d'une faute dommageable qui aurait dû exclure la garantie par Groupama Loire Bretagne à hauteur de la totalité de la somme ;

- la commune a éliminé l'influence du hasard et supprimé le caractère aléatoire du contrat, en commettant une faute lourde assimilable à la faute dolosive, de sorte que l'exclusion de garantie opposée par Groupama est tout à fait justifiée, alors même que la commune n'a pas recherché les conséquences dommageables de ses décisions ;

- aucun préjudice ni lien de causalité n'existe ;

- en tout état de cause, la responsabilité de la commune doit être écartée en raison des causes exonératoires des fautes des victimes, du notaire et du préfet.

Par des mémoires, enregistrés les 4 octobre 2018 et 14 janvier 2019, la commune de Landunvez, représentée par MeD..., demande à la cour de rejeter la requête et de mettre à la charge de Groupama Loire Bretagne la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

Par un mémoire, enregistré le 19 novembre 2018, M. et Mme A...F..., représentés par MeH..., demandent à la cour :

1°) par la voie de l'appel incident, de réformer le jugement en condamnant la commune de Landunvez au paiement de la somme de 22 605 euros au titre du coût d'immobilisation du capital, de la taxe locale d'équipement, de la taxe foncière, des troubles dans les conditions d'existence et du préjudice moral ;

2°) de confirmer le jugement pour le surplus et de rejeter la requête ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Landunvez la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

- aucun des moyens soulevés par la société Groupama n'est fondé ;

- la commune a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

- aucune faute exonératoire de la victime ou du notaire ou du préfet n'a été commise ;

- ils ont subi des préjudices matériels, des troubles dans leurs conditions d'existence et un préjudice moral.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 5 février 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code des assurances ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Picquet,

- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,

- et les observations de MeG..., représentant Groupama Loire-Bretagne, de Me E...représentant M. et Mme F...et de MeB..., représentant la commune de Landunvez.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme F...ont acquis, par acte authentique du 22 mai 2006, les parcelles cadastrées section B n° 1018 et 1019 d'une superficie globale de 1 463 m², situées au lieu-dit " Trémazan " sur le territoire de la commune de Landunvez. La partie de cet acte authentique consacrée à l'urbanisme mentionnait tant le certificat d'urbanisme délivré le 26 juillet 2005 s'agissant de ces parcelles, suivant lequel elles étaient classées en zone constructible UHb dans le plan local d'urbanisme, que la prorogation de ce certificat pour une durée d'un an à compter du 26 juillet 2006. Par un arrêté du 26 novembre 2007, le maire de Landunvez a délivré un permis de construire à M. et Mme F...en vue de l'édification d'une maison d'habitation sur cette unité foncière. Les intéressés n'ayant pas mis en oeuvre ce permis, il a été atteint de péremption. M. et Mme F...ont sollicité un certificat d'urbanisme opérationnel le 16 avril 2014. Le 12 juin 2014, le maire de Landunvez leur a délivré un certificat d'urbanisme négatif fondé sur les dispositions des I et III de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme. M. et Mme F...ont demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner la commune de Landunvez à leur verser la somme de 194 884 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait des illégalités fautives commises par la commune de Landunvez s'agissant des parcelles cadastrées B 1018 et 1019 situées au lieu-dit Trémazan. Par un jugement du 15 décembre 2017, le tribunal administratif de Rennes a condamné la commune de Landunvez à verser à M. et Mme F...la somme de 180 730, 24 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 13 décembre 2014 et capitalisation des intérêts à compter du 13 décembre 2015, a rejeté le surplus des conclusions de M. et Mme F...et a condamné la société Groupama Loire Bretagne à garantir la commune de Landunvez à hauteur de la somme précitée. La société Groupama Loire Bretagne ainsi que, par la voie de l'appel incident, M. et MmeF..., font appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".

3. D'une part, le jugement attaqué a jugé que " si la société Groupama Loire Bretagne invoque la faute commise par le préfet en ne déférant pas le certificat d'urbanisme en cause, ni le document d'urbanisme ayant classé une partie des parcelles en cause en zone constructible, il ne résulte pas de l'instruction que les services préfectoraux auraient commis ce faisant une faute lourde, seule de nature à engager la responsabilité de l'Etat ". Dès lors, le jugement a indiqué, de manière suffisamment motivée, que les fautes commises par l'Etat ne pouvaient pas être regardées comme des fautes lourdes. D'autre part, si la société Groupama reproche au tribunal de l'avoir condamnée à garantir la commune de Landunvez à hauteur de la totalité de la condamnation sans avoir pris en considération des éléments de preuve qu'elle avait apportés, le tribunal n'avait pas l'obligation de répondre à l'ensemble des arguments de la requérante. Ce jugement est, dès lors, conforme aux dispositions précitées de l'article L. 9 du code de justice administrative.

Sur le bien fondé du jugement :

En ce qui concerne la responsabilité :

4. En premier lieu, il ressort des écritures des parties que la faute commise par la commune de Landunvez en délivrant un certificat d'urbanisme positif le 26 juillet 2005, qui a été prorogé pour une durée d'un an et un permis de construire le 26 novembre 2007, alors que la loi littoral s'opposait au projet de construction, n'est plus contestée en appel.

5. En deuxième lieu, M. et MmeF..., qui ne sont pas des professionnels de l'immobilier, n'ont pas commis d'imprudence fautive en accordant du crédit au certificat illégal délivré par la commune, attestant de la faisabilité de leur projet et sur la base duquel ils ont acquis les parcelles litigieuses en vue d'y réaliser une construction. Le certificat d'urbanisme litigieux ne portait aucune mention de nature à laisser penser que le terrain ne serait pas constructible et au contraire, il permettait expressément la réalisation de l'opération projetée. Dans ces conditions, la société Groupama Loire Bretagne ne saurait, pour soustraire la commune de Landunvez à sa responsabilité, se prévaloir de la faute qu'aurait commise M. et Mme F...en n'ayant pas subordonné l'acquisition des parcelles en cause à la " condition suspensive " de l'obtention d'un permis de construire. Il en est de même des circonstances qu'ils n'ont pas exécuté le permis de construire qui leur avait été délivré le 26 novembre 2007 dans son délai de validité et qu'ils n'ont pas sollicité l'annulation de la vente conclue le 22 mai 2006. Ainsi le moyen tiré de la faute exonératoire de M. et Mme F...doit être écarté.

6. En troisième lieu, la responsabilité de la commune de Landunvez ne peut être atténuée, contrairement à ce que soutient la société Groupama Loire Bretagne, par la faute qu'aurait commise le notaire rédacteur de l'acte de vente du 22 mai 2006 des terrains en cause en ne vérifiant pas le bien-fondé des renseignements fournis dans le certificat d'urbanisme. En outre, la procédure contentieuse engagée contre le plan local d'urbanisme de la commune n'a été engagée que plusieurs années après la vente. Dans ces conditions, le moyen tiré de la faute exonératoire du notaire ne peut qu'être écarté.

7. En quatrième et dernier lieu qu'aux termes de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés au paragraphe II de l'article précédent qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission (...) ". Les carences de l'Etat dans l'exercice du contrôle de légalité des actes des collectivités territoriales prévu par les dispositions précitées ne sont susceptibles d'engager la responsabilité de l'Etat que si elles constituent une faute lourde. Il n'en va pas différemment dans le cas où ces actes seraient entachés d'illégalité au regard des dispositions du code de l'urbanisme issues de la loi du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral dites " loi littoral " et notamment de celles figurant à l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme.

8. Il ne résulte pas de l'instruction que la commune, lors de l'élaboration du document d'urbanisme finalement annulé par le jugement du tribunal administratif de Rennes, ait suivi la procédure prévue par le II de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, impliquant une demande de sa part et la possibilité pour le préfet de donner son accord ou non, pour ouvrir à l'urbanisation le secteur du lieudit " Trémazan ". La circonstance que le préfet du Finistère se soit abstenu d'exercer son contrôle de légalité, malgré la transmission à la commune d'un premier courrier le 18 juin 2005, puis d'un courrier du 27 juillet 2005 et d'une correspondance du 18 septembre 2007, portant sur les risques juridiques du classement du secteur en litige, deux de ces courriers étant d'ailleurs postérieurs au certificat d'urbanisme en cause du 26 juillet 2005, ne revêt pas le caractère d'une faute lourde. Dans ces conditions, la société Groupama Loire Bretagne n'est pas fondée à soutenir que la commune de Landunvez devrait être exonérée de sa responsabilité en raison d'une faute des services de l'Etat.

En ce qui concerne les préjudices :

9. En premier lieu, il résulte de l'instruction que M. et Mme F...ont, par un acte notarié du 22 mai 2006, acquis les terrains en cause au prix de 120 000 euros. Ils produisent une attestation notariée évaluant les terrains devenus inconstructibles à la somme de 700 euros, sur la base du prix d'un terrain agricole. La commune de Landunvez a produit, quant à elle, en première instance, une attestation notariée certifiant que la valeur de la parcelle cadastrée section B n° 1018 peut être estimée dans une fourchette de 6 à 10 euros le mètre carré dès lors qu'elle pourrait être utilisée comme terrain à usage de loisir sans aménagement fixe pendant trois mois de l'année. Toutefois, s'il résulte de l'instruction que les dispositions du document d'urbanisme local applicable aux terrains en cause n'interdisent pas ce type d'utilisation, les terrains en cause sont situés dans une bande littorale de 100 mètres à compter de la limite haute du rivage, les dispositions de l'ancien article L. 146-5 du code de l'urbanisme codifiées à présent à l'article L. 121-9 du même code excluant l'installation de caravanes dans une telle bande. Dans ces conditions, il y a lieu d'estimer la valeur des parcelles en cause à 700 euros. Ainsi la perte subie par M. et Mme F...du fait de l'acquisition à un prix de 120 000 euros de ces biens comme terrain constructible peut être évaluée à 119 300 euros TTC, comme l'ont indiqué les premiers juges.

10. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que pour devenir acquéreur des parcelles cadastrées section B n° 1018 et 1019, M. et Mme F...ont exposé des frais d'acte et de négociation pour un montant de 13 300 euros. Il résulte de l'instruction que les intéressés auraient dû régler à ce titre 800 euros pour l'acquisition des mêmes parcelles non constructibles, sur la base d'un prix d'acquisition de 700 euros. Il y a lieu d'accorder à ce titre à M. et Mme F...la somme de 12 500 euros, correspondant à la différence entre ces sommes, comme l'ont indiqué les premiers juges.

11. En troisième lieu, M. et Mme F...sont fondés à demander l'indemnisation d'un préjudice lié aux intérêts bancaires et aux frais d'assurance versés dans le cadre de l'emprunt souscrit pour l'achat du terrain dès lors qu'il résulte de l'instruction qu'ils n'auraient pas eu à souscrire d'emprunt bancaire pour l'acquisition de terrains non constructibles, au vu de la modicité de la somme correspondante. Ce chef de préjudice doit, conformément aux principes généraux d'évaluation d'un préjudice, être évalué jusqu'à ce qu'il ait pris fin ou, s'il n'a pas pris fin, au moment où le juge statue. Il ne résulte pas de l'instruction que le remboursement du crédit souscrit auprès de la banque Crédit Lyonnais d'un montant de 100 000 euros aurait pris fin à ce jour. Ainsi, les frais d'intérêts bancaires et d'assurance dont M. et Mme F...demandent le remboursement s'élèvent au total à 32 154, 71 euros, comme l'ont indiqué les premiers juges.

12. En quatrième lieu, en ce qui concerne la perte de rémunération de leur épargne personnelle de 20 000 euros, le préjudice de M. et Mme F...doit être calculé sur la base de 19 300 euros, soit 96,5 % de l'épargne ainsi mobilisée. Les intéressés sont donc fondés à en demander réparation à concurrence de 96,5 %. Toutefois, s'ils se prévalent d'une estimation bancaire de placement de 20 000 euros en 2006 à un taux de 2,71%, il n'est pas établi que M. et Mme F...auraient pu percevoir des intérêts nets de 6 016,17 euros, les sommes mentionnées étant brutes. Dès lors, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en accordant à

M. et Mme F...la somme de 5 500 euros.

13. En cinquième lieu, M. et Mme F...ont établi avoir exposé des honoraires d'architecte d'un montant de 7 000 euros et des frais d'étude d'assainissement d'un montant de 399,46 euros. Toutefois, il est constant que ces frais ont été engagés uniquement dans le cadre du dépôt d'une demande de permis de construire, permis qui a été délivré en 2007 mais qui n'a finalement pas été exécuté par M. et Mme F...pendant son délai de validité en raison, comme ils l'indiquent, de motifs personnels. Il en est de même du paiement de la taxe locale d'équipement de 5 009 euros, liée à l'exécution du permis de construire. Dès lors, le lien de causalité ne présente pas de caractère direct avec les préjudices invoqués. Il y a lieu, par suite, de réformer le jugement attaqué en ce sens.

14. En sixième lieu, M. et Mme F...demandent à être indemnisés des frais de géomètre concernant les parcelles en cause et correspondant à la somme de 876,07 euros. Toutefois, ils n'établissent pas que leur préjudice trouverait son origine directe dans la faute commise par la commune.

15. En septième lieu, si M. et Mme F...demandent à être remboursés des taxes foncières qu'ils ont acquittées à compter de 2008, ils n'indiquent pas le montant de ces taxes pour des terrains non constructibles, seule la différence entre ces deux sommes pouvant leur être remboursée.

16. En huitième et dernier lieu, en délivrant à M. et MmeF..., avant l'acquisition des parcelles en cause, un certificat d'urbanisme positif, puis en délivrant un permis de construire, le maire de Landunvez a induit M. et Mme F...en erreur sur les possibilités de construire sur les parcelles litigieuses. Ils ont subi, de ce fait, un préjudice moral et des troubles dans leurs conditions d'existence. Il en sera fait une juste appréciation en condamnant la commune à les indemniser à hauteur d'une somme fixée à 1 500 euros. Il y a lieu, par suite, de réformer le jugement attaqué en ce sens.

17. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de réformer le jugement attaqué en condamnant la commune de Landunvez à verser à M. et Mme F...la somme globale de 170 954, 71 euros, en réparation des préjudices subis.

En ce qui concerne les intérêts et la capitalisation de ces intérêts :

18. M. et Mme F...ont droit aux intérêts de la somme de 170 954, 71 euros à compter du 13 décembre 2014, date de réception de leur demande préalable par la commune de Landunvez ainsi qu'à leur capitalisation à compter 13 décembre 2015, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

En ce qui concerne l'appel en garantie de la société d'assurance Groupama Loire Bretagne par la commune de Landunvez :

19. Aux termes de l'article L 113-1 du code des assurances : " Les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police. Toutefois, l'assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré. ". Aux termes de l'article 1.5 du contrat d'assurance liant la commune de Landunvez avec la société Groupama assurance : " 5 ; Les exclusions communes à toutes les garanties. Ne sont jamais garantis : a. les dommages provenant de la faute intentionnelle ou dolosive des représentants légaux de l'assuré ". Il résulte de ces dispositions que la faute intentionnelle est caractérisée par la volonté de l'assuré de créer un dommage et la faute dolosive est caractérisée par un comportement de l'assuré qui a pour effet de rendre inéluctable la réalisation du dommage et de faire disparaître l'aléa attaché à la couverture du risque.

20. D'une part, il résulte de l'instruction que s'il n'est pas contesté que la commune a commis une faute d'une part, en classant une partie des parcelles en litige dans un secteur constructible de son plan local d'urbanisme et d'autre part, en délivrant un certificat d'urbanisme positif puis un permis de construire en méconnaissance des dispositions de la loi dite " littoral ", la société d'assurance Groupama Loire Bretagne n'établit pas que ces fautes ont été causées intentionnellement avec une volonté de la collectivité de provoquer ou de réaliser un dommage à M. et MmeF.... D'autre part, il ne résulte pas davantage de l'instruction, au vu de l'appréciation devant être portée sur la qualification d'espace urbanisé au sens de la loi littoral et de l'imprécision des éléments dont disposait la commune sur ce point, que les fautes commises aient eu pour effet de rendre inéluctable la réalisation du dommage. Dans ces conditions, les conclusions de la société Groupama Loire Bretagne dirigées contre le jugement de première instance en tant qu'il a retenu l'appel en garantie de la commune ne peuvent qu'être rejetées.

21. Comme il a été dit aux points 5 à 8, ni M. et MmeF..., ni le notaire, ni l'Etat n'ont commis de faute de nature à exonérer la responsabilité de la commune et par suite de son assureur.

22. Il résulte de ce qui précède que Groupama Loire Bretagne n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes l'a condamnée à garantir la commune de Landunvez de l'indemnité mise à sa charge à raison des illégalités fautives commises par cette dernière. Par voie de conséquence de la condamnation prononcée au point 17, il y a lieu de réduire à une somme de 170 954, 71 euros le montant que cette société devra garantir à la commune de Landunvez.

Sur les frais liés au litige :

23. M. et Mme F...n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à leur charge le versement de la somme demandée par la société Groupama Loire-Bretagne à ce titre. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Landunvez la somme de 1 500 euros au bénéfice de M. et Mme F...à ce titre. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Groupama Loire Bretagne la somme que la commune de Landunvez demande au titre de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Groupama Loire-Bretagne est rejetée.

Article 2 : La somme que la commune de Landunvez est condamnée à verser à M. et Mme F...est réduite à 170 954, 71 euros. Cette somme portera intérêt à compter du 13 décembre 2014, ces intérêts étant capitalisés à compter du 13 décembre 2015.

Article 3 : La société Groupama Loire Bretagne est condamnée à garantir la commune de Landunvez à hauteur de la somme de 170 954, 71 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 13 décembre 2014 ainsi que de la capitalisation des intérêts.

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Rennes du 15 décembre 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : La commune de Landunvez versera à M. et Mme F...une somme de

1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de M. et Mme F...est rejeté.

Article 7 : Les conclusions de la commune de Landunvez tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à la société Groupama Loire Bretagne, à M. et Mme A...F...et à la commune de Landunvez.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Dussuet, président de chambre,

- M. Degommier, président assesseur,

- Mme Picquet, premier conseiller.

Lu en audience publique le 4 juin 2019.

Le rapporteur,

P. PICQUET

Le président,

J-P. DUSSUET

Le greffier,

C. POPSE

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°18NT00366


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT00366
Date de la décision : 04/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DUSSUET
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : SCP ARES BOIS COLLET LEDERF-DANIEL LE DANTEC

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-06-04;18nt00366 ?
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