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21/05/2019 | FRANCE | N°18NT02677

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 21 mai 2019, 18NT02677


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du préfet d'Indre-et-Loire du 16 juillet 2015 rejetant sa demande d'acquisition de la nationalité française.

Par un jugement n° 1601146 du 17 mai 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 juillet 2018, M. B...C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Na

ntes du 17 mai 2018 ;

2°) d'annuler la décision du préfet d'Indre-et-Loire du 16 juillet 2015 rejet...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du préfet d'Indre-et-Loire du 16 juillet 2015 rejetant sa demande d'acquisition de la nationalité française.

Par un jugement n° 1601146 du 17 mai 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 juillet 2018, M. B...C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 17 mai 2018 ;

2°) d'annuler la décision du préfet d'Indre-et-Loire du 16 juillet 2015 rejetant sa demande d'acquisition de la nationalité française ainsi que la décision implicite de rejet du ministre de l'intérieur du 17 décembre 2015 ;

3°) de lui accorder la nationalité française ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés pour sa défense en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

la décision du ministre étant implicite, elle est totalement dépourvue de motivation ;

la décision préfectorale n'est pas suffisamment motivée ;

- il conteste les faits qui lui sont reprochés, excepté la dette locative mais cette-dernière a été apurée, ne fait pas partie des motifs de la décision du ministre et ne peut fonder à elle seule un refus de naturalisation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 août 2018, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.

Les parties ont été informées le 21 mars 2019, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions à fin d'octroi de la nationalité française.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Picquet a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., ressortissant béninois, a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du préfet d'Indre-et-Loire du 16 juillet 2015 rejetant sa demande d'acquisition de la nationalité française. Le tribunal, par un jugement du 17 mai 2018, a regardé cette demande comme étant dirigée exclusivement contre la décision ministérielle s'étant substituée à la décision préfectorale et l'a rejetée. M. C...fait appel de ce jugement.

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, il résulte des dispositions de l'article 45 du décret visé ci-dessus du 30 décembre 1993 que les décisions par lesquelles le ministre statue sur les recours préalables obligatoires se substituent à celles des autorités préfectorales qui lui sont déférées. Par suite, la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté la demande de naturalisation de M. C...s'est substituée à la décision préfectorale. Dès lors, comme le fait valoir le ministre en 1ère instance, les conclusions dirigées contre la décision préfectorale sont irrecevables et doivent être rejetées.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979 alors applicable : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande (...) ". Pour les raisons indiquées au point précédent, le moyen tiré de ce que la décision préfectorale n'était pas suffisamment motivée doit être écarté comme étant inopérant. Si le requérant soutient que la décision du ministre étant implicite, elle est totalement dépourvue de motivation, il n'établit ni même n'allègue avoir sollicité la communication des motifs de cette décision. Dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté.

4. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger ". Aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande ". En vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite. Dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant.

5. Il ressort du mémoire en défense du ministre de l'intérieur que sa décision implicite rejetant la demande de naturalisation en litige est fondée sur la triple circonstance que M. C... s'est rendu coupable de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur sans assurance en 2014, qu'il a été l'auteur d'atteinte sexuelle le 22 mai 2011 et qu'il était redevable au 1er octobre 2014 de la somme de 1 610,58 euros envers son bailleur.

6. Il ressort des pièces du dossier que, par deux jugements rendus les 2 juin et 4 juillet 2016, le tribunal correctionnel de Tours a seulement retenu contre M. C...des faits de non-apposition sur son véhicule du certificat d'assurance, en le condamnant au paiement d'une amende de 75 euros, et a relaxé l'intéressé des faits d'atteinte sexuelle qui lui étaient reprochés. Par suite, les deux premiers motifs de la décision attaquée sont entachés d'erreur de fait, ainsi d'ailleurs que le ministre l'admet lui-même dans son dernier mémoire produit en 1ère instance.

7. Toutefois, il est constant que M. C...a été condamné avec Mme D...C..., par une ordonnance de référé du tribunal d'instance de Tours du 2 mai 2013, à payer à leur bailleur la somme de 3 250 euros. L'intéressé était encore redevable au 1er octobre 2014 de la somme de 1 610,58 euros envers son bailleur, dette contractée depuis plusieurs années. La circonstance que la dette a été apurée, au demeurant postérieurement à la décision ministérielle attaquée, ne faisait pas obstacle à ce que le ministre se fonde sur ce motif pour rejeter la demande de naturalisation. Par suite, le ministre, qui a fait usage de son large pouvoir d'appréciation, n'a pas entaché sa décision d'une erreur de fait, d'une erreur manifeste d'appréciation ou d'une erreur de droit. Comme l'ont indiqué les premiers juges, il résulte de l'instruction que le ministre aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur ce seul motif.

8. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'octroi de la nationalité française, qui sont d'ailleurs irrecevables, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 3 mai 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Dussuet, président de chambre,

- M. Degommier, président assesseur,

- Mme Picquet, premier conseiller.

Lu en audience publique le 21 mai 2019.

Le rapporteur,

P. PICQUET

Le président,

J-P. DUSSUET

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°18NT02677


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT02677
Date de la décision : 21/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUSSUET
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : SCP HARDY

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-05-21;18nt02677 ?
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