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10/05/2019 | FRANCE | N°18NT02980

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 10 mai 2019, 18NT02980


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 19 mai 2015 par laquelle le président de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre les refus de délivrer des visas de long séjour à ses enfants allégués Joël et F...C....

Par un jugement n° 1509890 du 9 janvier 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregis

trés le 1er août 2018 et le 1er avril 2019, M. D... C..., Mme F...C...et M. A...C..., représentés...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 19 mai 2015 par laquelle le président de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre les refus de délivrer des visas de long séjour à ses enfants allégués Joël et F...C....

Par un jugement n° 1509890 du 9 janvier 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 1er août 2018 et le 1er avril 2019, M. D... C..., Mme F...C...et M. A...C..., représentés par MeE..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 janvier 2018 ;

2°) d'annuler la décision du président de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer les visas sollicités dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de cent euros par jour de retard, subsidiairement de procéder à un nouvel examen des demandes, dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au profit de Me E...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que le président de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France pouvait rejeter comme non fondé son recours au motif que celui-ci n'était pas accompagné des éléments et justificatifs permettant d'en apprécier le bien fondé ;

- la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France aurait dû l'inviter à compléter son dossier en application des dispositions de l'article 2 du décret du 6 juin 2001 alors en vigueur ;

- le recours formé devant la commission de recours n'était pas dénué de toute pertinence ; il n'était pas manifestement mal fondé dès lors que M. C...se prévalait de sa paternité envers les enfants Joël et F... ;

- la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le tribunal devait prendre en compte les éléments produits qui sont relatifs à une situation déjà existante à la date de la décision attaquée et non pas les écarter ;

- le président de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- M. C...justifie de l'existence d'une situation de possession d'état ;

- les enfants Joël et F...ne sont pas exclus du bénéfice de la procédure de réunification familiale des enfants de réfugiés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 mars 2019, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Le ministre renvoie pour l'essentiel à ses écritures produites en première instance, fait valoir qu'aucun des moyens d'annulation soulevés par les requérants n'est fondé et ajoute que les enfants Joël et F...n'entrent pas dans le champ de la réunification familiale d'un réfugié dès lors qu'ils ne sont pas les enfants que M. C...a eu avec MmeB....

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 juillet 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mony,

- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,

- et les observations de MeE..., représentant M. C...et les autres requérants.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., ressortissant de la République démocratique du Congo, s'est vu reconnaître la qualité de réfugié statutaire en 2012. Les demandes de visas de long séjour formées dans le cadre d'un rapprochement familial pour ses enfants allégués Joël etF... ont été rejetées par les autorités consulaires françaises à Kinshasa le 15 avril 2015. M. C...a formé, par un courrier en date du 11 mai 2015, un recours contre ces décisions auprès de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France. Par décision du 19 mai 2015, le président de la commission a rejeté ce recours, sur le fondement des dispositions de l'article D. 211-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, comme " manifestement mal fondé ". M.C..., Mme F...C...et M. A...C...relèvent appel du jugement du 9 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif a rejeté la demande d'annulation de cette décision.

2. Aux termes de l'article D. 211-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le président de la commission peut rejeter, sans réunir la commission, les recours manifestement irrecevables ou mal fondés. ".

3. Selon les termes mêmes de la décision litigieuse, le président de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France, a rejeté le recours formé par M. C...comme " manifestement mal fondé " , au motif que ce recours n'était pas " accompagné d'éléments et justificatifs permettant d'en apprécier le bien fondé et de justifier une révision de la décision du poste consulaire ".

4. Il ressort des pièces du dossier, notamment des termes du recours devant la commission, que M.C..., après y avoir rappelé les références des dossiers de demandes de visas, indique clairement vouloir former un recours contre les décisions de refus et conteste les deux motifs de rejet des demandes de visas formées pour ses enfants allégués, tenant au caractère imprécis des déclarations relatives à la filiation maternelle des enfants, d'une part, et à l'établissement tardif des documents d'état-civil produits à l'appui de ces demandes, d'autre part. Ce recours, bien que motivé de manière succincte, comportait néanmoins des éléments de discussion du bien fondé des motifs de la décision de refus des autorités consulaires dont rien n'indiquait, à ce stade de la procédure, qu'ils soient manifestement dépourvus de tout bien fondé et par là même insusceptibles de le faire prospérer. Il appartenait donc à la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France de statuer collégialement au fond sur le recours de l'intéressé en apportant une nouvelle appréciation sur les demandes de visas, à partir des éléments mis en avant par M. C...pour contester le motif de la décision de refus du poste consulaire et des autres éléments du dossier. Dans ces conditions, le président de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a fait une inexacte application des dispositions de l'article D. 211-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en rejetant comme manifestement mal fondé le recours de M. C...par les motifs précités. Sa décision du 19 mai 2015 doit par suite être annulée.

5. Il résulte de ce qui précède que M. C...et les autres requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Le présent arrêt, qui annule la décision du président de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France rejetant comme manifestement mal fondé le recours formé par M. C...contre les refus de visas opposés aux demandes formées pour ses enfants allégués, implique seulement, en l'état du dossier, qu'il soit enjoint à la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France de statuer collégialement, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sur ce recours. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances particulières de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

7. M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros à Me E...dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 9 janvier 2018 et la décision du président de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France du 19 mai 2015 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France de statuer sur le recours préalable de M. C...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me E...une somme de 1 200 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., Mme F...C...et M. A...C...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 5 avril 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Degommier, président,

- M. Mony, premier conseiller,

- Mme Picquet, premier conseiller.

Lu en audience publique le 10 mai 2019.

Le rapporteur,

A. MONY

Le président,

S. DEGOMMIERLe greffier,

C. POPSE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18NT02980


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT02980
Date de la décision : 10/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DEGOMMIER
Rapporteur ?: M. Arnaud MONY
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : CABINET POLLONO

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-05-10;18nt02980 ?
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