Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme B...F...ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 12 mars 2015 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a accordé à la société MSE Saint-Saumont un permis de construire trois éoliennes E3, E5 et E6 sur le territoire de la commune de Neufbosc (Seine-Maritime).
Par un jugement n°s 1700741-1700744 du 30 mars 2018, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 8 juin 2018 et un mémoire enregistré le 18 janvier 2019, M. et MmeF..., représentés par MeC..., demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 30 mars 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime du 12 mars 2015 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société MSE Saint-Saumont une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement est irrégulier dès lors qu'il n'est pas justifié que le jugement a été signé conformément à l'article R 741-7 du code de justice administrative ;
- le jugement est infondé puisque :
. l'arrêté n'a pas été signé par une autorité compétente en méconnaissance de l'article R 422-2 du code de l'urbanisme ;
. l'article R 431-20 du code de l'urbanisme a été méconnu ; la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) n'a pas été mise en possession du récépissé de demande d'autorisation au titre des installations classées ;
. l'arrêté du 12 mars 2015 a été pris en méconnaissance de l'article L 424-5 du code de l'urbanisme ;
. l'article R 111-2 du code de l'urbanisme est méconnu compte tenu du faible périmètre retenu autour des machines pour le risque de projection de glace.
Par un mémoire enregistré le 27 septembre 2018 et un mémoire du 22 février 2019, non communiqué, la SNC MSE Saint-Saumont, représentée par MeE..., conclut :
- au non-lieu à statuer ;
- au rejet de la requête ;
- à ce que soit mis à la charge des requérants le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- il n'y a plus lieu de statuer sur la requête dès lors que l'autorisation d'exploiter délivrée par le préfet de la Seine-Maritime a rendu superfétatoire le permis de construire ;
- la requête est irrecevable comme tardive ;
- aucun des autres moyens n'est fondé.
Par un mémoire en défense enregistré le 19 décembre 2018, le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriale conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun moyen n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience. ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mars 2019 :
- le rapport de Mme Brisson,
- les conclusions de M Derlange,
- et les observations de MeD..., substituant MeE..., représentant la société MSE Saint-Saumont.
Considérant ce qui suit :
1. Le 29 novembre 2013, la société MSE Saint-Saumont a sollicité la délivrance d'un permis de construire trois éoliennes E3, E5 et E6 sur le territoire de la commune de Neufbosc (Seine-Maritime). Par un arrêté du 12 mars 2015, le préfet de la Seine-Maritime a accordé à la société pétitionnaire le permis de construire les trois éoliennes E3, E5 et E6. M. et Mme F...ont demandé l'annulation de cet arrêté. Par un jugement du 30 mars 2018, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur requête. Les intéressés relèvent appel de ce jugement.
Sur l'exception de non-lieu à statuer :
2. L'autorisation d'exploiter le projet décrit ci-dessus, délivrée à la société MSE Saint-Saumont par le préfet le 3 décembre 2014 au titre des installations classées pour la protection de l'environnement doit être considérée, depuis l'entrée en vigueur, le 1er mars 2017, de l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 et notamment son article 15, comme l'autorisation environnementale relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier du code de l'environnement. Cependant, les dispositions de cette ordonnance sont sans incidence sur les permis de construire délivrés pour l'installation d'éoliennes terrestres dans le régime applicable à ces projets antérieurement à l'entrée en vigueur de ladite ordonnance. Si l'article R. 425-29-2 introduit dans le code de l'urbanisme par le décret du 26 janvier 2017 dispense les projets d'installation d'éoliennes terrestres soumis à autorisation environnementale de l'obtention d'un permis de construire, il n'a, en revanche, ni pour objet ni pour effet de dispenser de tels projets du respect des règles d'urbanisme qui leur sont applicables. Dès lors, les conclusions présentées par la société MSE Saint-Saumont tendant au non-lieu à statuer sur la requête au motif que les textes précités ont abrogé les dispositions soumettant les éoliennes à permis de construire doivent être rejetées.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article R 741-7 du code de justice administrative : "Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Il ressort de la minute du jugement attaqué que celui-ci a été signé par le président de la formation de jugement, par le rapporteur, et par le greffier d'audience. Par suite, le moyen tiré de ce que ce jugement aurait été rendu en méconnaissance des dispositions précitées du code de justice administrative doit être écarté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la société MSE Saint-Saumont :
4. En premier lieu, Mme G...H..., sous-préfète de Dieppe, a, reçu par un arrêté du 1er septembre 2014, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la Seine-Maritime, délégation de signature du préfet de ce département à l'effet de signer, notamment, tous arrêtés et décisions se rattachant à l'administration de l'Etat dans le département, à l'exception de certains actes dont ne font pas partie les permis de construire. Le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision doit, dès lors, être écarté.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L 424-5 du code de l'urbanisme, alors applicable : " La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire. " et aux termes de l'article L 242-54 du code des relations entre le public et l'administration : " Sur demande du bénéficiaire de la décision, l'administration peut, selon le cas et sans condition de délai, abroger ou retirer une décision créatrice de droits, même légale, si son retrait ou son abrogation n'est pas susceptible de porter atteinte aux droits des tiers et s'il s'agit de la remplacer par une décision plus favorable au bénéficiaire. ".
6. Consécutivement au recours gracieux présenté le 30 décembre 2014 par la société MSE Saint-Saumont, le préfet de Seine-Maritime a, par son arrêté du 12 mars 2015, délivré un permis de construire portant sur 3 éoliennes et a procédé au retrait de l'arrêté du 26 novembre 2014 sur le fondement des dispositions de l'article L 242-4 du code des relations entre le public et l'administration. Ce retrait, qui n'a pas été contesté, était devenu définitif lorsque les premiers juges se sont prononcés.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article R 431-20 du code de l'urbanisme : " Lorsque les travaux projetés portent sur une installation classée soumise à autorisation, enregistrement ou déclaration en application des articles L. 512-1, L. 512-7 et L. 512-8 du code de l'environnement, la demande de permis de construire doit être accompagnée de la justification du dépôt de la demande d'autorisation, de la demande d'enregistrement ou de la déclaration ".
8. Par un courrier du 7 février 2014, les services de la préfecture de la Seine-Maritime, chargée de l'instruction du dossier du permis de construire, ont accusé réception de la demande d'autorisation d'exploiter déposée par la société MSE le 5 décembre 2013 et complétée le 10 décembre 2013. Cette demande a ainsi été formulée concomitamment à la demande de permis de construire trois éoliennes présentée le 29 novembre 2013. Le dossier de demande de ce permis ne comportant aucune imprécision sur les éléments relatifs à la consistance du projet en matière d'installation classées pour la protection de l'environnement, et le préfet étant compétent tant pour délivrer le permis de construire litigieux que l'autorisation d'exploiter les éoliennes qu'il a pour objet de permettre d'édifier, la seule circonstance que la société requérante ne justifie pas que la demande d'autorisation au titre du code de l'environnement était jointe à sa demande n'a privé les intéressés d'aucune garantie et n'a pas en l'espèce exercé une influence sur le sens de la décision prise par l'autorité administrative. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-20 du code de l'urbanisme doit être écarté.
9. En dernier lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation ou leurs dimensions, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. Il en est de même si les constructions projetées, par leur implantation à proximité d'autres installations, leurs caractéristiques ou leur situation, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique ".
10. Il ressort des pièces du dossier que l'éolienne la plus proche d'une habitation est située à plus de 500 mètres de celle-ci et que les voies départementales ou communales situées à proximité, bien que concernées par le transport de matières dangereuses, ne supportent qu'un faible trafic. L'étude des dangers précise que le risque de chute de glace est faible et celui de projection de glace très faible. En outre, en cas de formation de glace, le rotor sera automatiquement stoppé. Dans ces conditions, en autorisant la construction des éoliennes, le préfet de la Seine-Maritime n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation au regard des prescriptions de l'article R 111-2 du code de l'urbanisme.
11. Il résulte de ce qui précède, que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat et de la société MSE Saint Saumont, le versement d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées à ce titre par les requérants ne peuvent dès lors être accueillies.
13. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge des requérants une somme de 1 500 euros qui sera versée à la SNC MSE Saint-Saumont au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme F... est rejetée.
Article 2 : M. et Mme F...verseront à la société MSE Saint-Saumont, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...F...au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriale et à la société en nom collectif MSE Saint-Saumont.
Copie en sera adressée pour information au préfet de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience du 5 mars 2019, où siégeaient :
- M Perez, président de chambre,
- Mme Brisson, président-assesseur,
- MA...'hirondel, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 22 mars 2019.
Le rapporteur,
C. BRISSONLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriale, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT02260