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08/03/2019 | FRANCE | N°18NT00851

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 08 mars 2019, 18NT00851


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 16 octobre 2015 par laquelle le ministre de l'intérieur a déclaré irrecevable sa demande d'acquisition de la nationalité française.

Par un jugement n° 1510620 du 9 octobre 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 février 2018 et le 4 juin 2018, Mme B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 octobre 2017 ;

2°) d'annuler la décision du 16 octobre 2015 du ministre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 16 octobre 2015 par laquelle le ministre de l'intérieur a déclaré irrecevable sa demande d'acquisition de la nationalité française.

Par un jugement n° 1510620 du 9 octobre 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 février 2018 et le 4 juin 2018, Mme B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 octobre 2017 ;

2°) d'annuler la décision du 16 octobre 2015 du ministre de l'intérieur ;

3°) d'enjoindre au ministre de procéder à un nouvel examen de sa demande de naturalisation et d'y statuer dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au profit de Me C...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Mme B...soutient que :

- le tribunal administratif a commis une erreur de droit en jugeant que, malgré sa situation de handicap, la condition de connaissance de la langue française lui demeurait opposable ;

- le tribunal administratif n'a pas correctement apprécié les faits de l'espèce dès lors que sa situation de personne handicapée faisait obstacle à ce qu'il lui soit valablement opposé un niveau de connaissance du français inférieure au niveau B1 oral ;

- la réalité de sa situation personnelle n'a pas été prise en compte lors de l'entretien d'assimilation ;

- l'outil d'évaluation de ses compétences linguistiques en français qui a été utilisé lors de l'entretien n'est pas conforme au Cadre européen commun de référence pour les langues et la décision prise à son encontre méconnaît ainsi les dispositions de l'article 37 du décret du 30 décembre 1993 ;

- sa demande de naturalisation n'a pas été traitée conformément à la circulaire du ministre du 30 novembre 2011.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mars 2018, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Le ministre fait valoir qu'aucun des moyens d'annulation soulevés par la requérante n'est fondé.

MmeB... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 février 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91- 1266 du 19 décembre 1991 ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Mony a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeB..., qui bénéficie du statut d'apatride, relève appel du jugement du 9 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 16 octobre 2015 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté comme irrecevable sa demande de naturalisation.

Sur les conclusions en annulation :

2. Aux termes de l'article 21-24 du code civil : " Nul ne peut être naturalisé s'il ne justifie de son assimilation à la communauté française, notamment par une connaissance suffisante, selon sa condition, de la langue, de l'histoire, de la culture et de la société françaises, dont le niveau et les modalités d'évaluation sont fixés par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article 21-24-1 du même code " La condition de connaissance de la langue française ne s'applique pas aux (...) apatrides résidant régulièrement et habituellement en France depuis quinze années au moins et âgés de plus de soixante-dix ans. ".

3. Aux termes de l'article 37 du décret du 30 décembre 1993 : " Pour l'application de l'article 21-24 du code civil : 1° Tout demandeur doit justifier d'une connaissance de la langue française caractérisée par la compréhension des points essentiels du langage nécessaire à la gestion de la vie quotidienne et aux situations de la vie courante ainsi que par la capacité à émettre un discours simple et cohérent sur des sujets familiers dans ses domaines d'intérêt. Son niveau est celui défini par le niveau B1, rubriques "écouter", "prendre part à une conversation" et "s'exprimer oralement en continu" du Cadre européen commun de référence pour les langues, tel qu'adopté par le comité des ministres du Conseil de l'Europe dans sa recommandation CM/ Rec (2008) du 2 juillet 2008. / Un arrêté du ministre chargé des naturalisations définit les diplômes permettant de justifier d'un niveau égal ou supérieur au niveau requis.(...) ". Aux termes de l'article 37-1 de ce même décret : " La demande est accompagnée des pièces suivantes : (...) 9° Un diplôme ou une attestation justifiant d'un niveau de langue égal ou supérieur à celui exigé en application de l'article 37 et délivré dans les conditions définies par cet article ou, à défaut, une attestation délivrée dans les mêmes conditions justifiant d'un niveau inférieur. Sont toutefois dispensées de la production de ce diplôme ou de cette attestation (...) les personnes souffrant d'un handicap ou d'un état de santé déficient chronique ou âgées d'au moins soixante ans. ". Aux termes de l'article 41 du même décret : " Le postulant se présente en personne devant un agent désigné nominativement par l'autorité administrative chargée de recevoir la demande. / Lors d'un entretien individuel, l'agent vérifie que le demandeur possède les connaissances attendues de lui, selon sa condition, sur l'histoire, la culture et la société françaises, telles qu'elles sont définies au 2° de l'article 37. / A l'issue de cet entretien individuel, cet agent établit un compte rendu constatant le degré d'assimilation du postulant à la communauté française ainsi que, selon sa condition, son niveau de connaissance des droits et devoirs conférés par la nationalité française. / L'entretien individuel prévu au deuxième alinéa permet de vérifier que maîtrisent un niveau de langue correspondant au niveau exigé en vertu de l'article 37 : (...) b) Les demandeurs souffrant d'un handicap ou d'un état de santé déficient chronique ou âgés d'au moins soixante ans. (...) " .

4. En premier lieu, contrairement à ce que soutient MmeB..., sa situation de handicap ne fait aucunement obstacle à ce que la recevabilité de sa demande de naturalisation soit, en application des dispositions précitées, conditionnée par un niveau de connaissance suffisant de la langue française, cette situation de handicap n'ayant pour seul effet que de dispenser les personnes concernées de produire le diplôme ou l'attestation mentionnées à l'article 37-1 du décret du 30 novembre 1993.

5. Il ne ressort pas des pièces du dossier, en deuxième lieu, que l'entretien individuel destiné à apprécier notamment le niveau de langue de Mme B...et son degré d'assimilation à la communauté française auquel l'intéressée a été conviée le 19 février 2015 n'aurait pas pris en compte sa situation particulière, les caractéristiques du handicap dont fait état Mme B...ne faisant pas obstacle à ce que celle-ci puisse accéder à un niveau suffisant de connaissance du français, de l'histoire de France et de sa culture. Comme précédemment indiqué, aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait que l'évaluation de la connaissance du français par une personne handicapée sollicitant l'acquisition de la nationalité française soit effectuée à partir de dispositifs spécifiques, Mme B...ne démontrant en rien en quoi la procédure suivie à son égard aurait présenté un caractère inadéquat.

6. En troisième lieu, c'est au terme d'une exacte motivation, dont il y a par suite lieu de s'approprier les termes, que le tribunal administratif a écarté, d'une part, le moyen tiré de l'erreur de droit et de la méconnaissance des dispositions des articles 21-24, 37 et 41 du décret du 30 décembre 1993 et, d'autre part, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation quant au niveau de connaissance de la langue française de MmeB....

7. MmeB..., en dernier lieu, ne peut utilement se prévaloir des dispositions de la circulaire ministérielle du 30 novembre 2011, laquelle est dépourvue de toute portée réglementaire.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions en injonction :

9. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions en annulation présentées par MmeB..., n'appelle aucune mesure particulière en vue de son exécution. Les conclusions en injonction de l'intéressée ne peuvent dès lors qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente affaire, verse à Mme B...la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 15 février 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Degommier, président,

- M. Mony, premier conseiller,

- M. Besse, premier conseiller,

Lu en audience publique le 8 mars 2019.

Le rapporteur,

A. MONY

Le président,

S. DEGOMMIERLe greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18NT00851


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT00851
Date de la décision : 08/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DEGOMMIER
Rapporteur ?: M. Arnaud MONY
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : BORGES DE DEUS CORREIA

Origine de la décision
Date de l'import : 19/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-03-08;18nt00851 ?
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