Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...B...épouse C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté la demande de visa de long séjour présentée pour l'enfant SalimatouC....
Par jugement n° 1502555 du 19 décembre 2017, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de la commission de recours et enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer le visa sollicité dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 9 janvier 2018, le ministre de l'intérieur demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 19 décembre 2017 ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme C...devant le tribunal administratif de Nantes.
Le ministre soutient que :
- l'extrait d'acte de naissance de l'enfant Salimatou établi avant la demande de visa n'a été produit par Mme C...qu'au cours de l'instance devant le tribunal dans son mémoire complémentaire ;
- cet acte n'est pas probant dans la mesure où le jugement supplétif sur la base duquel il a été dressé n'a été produit à aucun moment de la procédure ;
- L'extrait d'acte de naissance en cause n'a pas été établi conformément aux règles fixées par l'article 193 du code civil guinéen ;
- La signature figurant sur le passeport de l'enfant est imitée et ne correspond pas à celle de MmeC....
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 octobre 2018, Mme C..., représentée par MeF..., conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint à l'ambassade de France à Conakry de délivrer un visa d'entrée en France à Salimatou C...dans un délai de quinze jours sous astreinte de 100 euros par jour de retard à partir d'un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que les moyens soulevés par le ministre de l'intérieur ne sont pas fondés.
Mme C... n'a pas été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 13 août 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Degommier, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A...C..., ressortissante guinéeenne, a déposé une demande de visa pour elle-même en qualité de conjointe de M.D... C..., ressortissant français, ainsi que pour l'enfant SalimatouC..., née le 2 août 2011, qu'elle présente comme sa fille, née d'une précédente union et dont le père est décédé. Si elle a obtenu pour elle-même le visa sollicité, les autorités consulaires françaises à Conakry ont refusé de délivrer un visa à l'enfant Salimatou par décision du 23 octobre 2014. La commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours préalable formé par Mme C...contre cette décision. Le ministre de l'intérieur relève appel du jugement du 19 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision implicite de la commission de recours et lui a enjoint de délivrer le visa sollicité dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement.
Sur la requête du ministre de l'intérieur :
2. Aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil (...) ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties..
3. Par ailleurs, il n'appartient pas aux autorités administratives françaises de mettre en doute le bien-fondé d'une décision rendue par une autorité juridictionnelle étrangère, hormis le cas où le document produit aurait un caractère frauduleux.
4. Il ressort des écritures du ministre de l'intérieur que pour refuser le visa sollicité, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur l'absence de preuve du lien de filiation allégué entre Mme C...et l'enfant Salimatou et sur le caractère non probant et non authentique de l'acte d'état civil produit en cours d'instance par MmeC....
5. Il ressort des pièces du dossier que Mme C...a produit en cours d'instance, pour établir le lien de filiation avec l'enfant SalimatouC..., un extrait d'acte de naissance n° 11294 transcrit par la commune de Dixinn le 10 décembre 2013 sur la base d'un jugement supplétif n° 4727 rendu le 4 septembre 2013 par le tribunal de première instance de Conakry II. Le ministre fait valoir que cet acte n'a été produit qu'en cours d'instance devant le tribunal administratif alors que ce document a été nécessairement transcrit et délivré avant le dépôt de la demande de visa et qu'en outre, ce jugement supplétif n'a été produit à aucun moment de la procédure. Toutefois, la production tardive de ces documents, dont Mme C...soutient qu'ils n'étaient pas en sa possession lors de la demande de visa et du recours devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, ne permet pas à elle seule de remettre en cause les mentions figurant sur l'extrait d'acte de naissance, ni celles du jugement supplétif, produit en appel, sur la base duquel il a été dressé. Le caractère frauduleux de ce jugement n'est ni établi, ni allégué par le ministre. Par ailleurs, ni la méconnaissance du code civil guinéen, ni le caractère falsifié de la signature de Mme C... sur le passeport de sa fille, ce dernier corroborant les mentions indiquées sur les documents produits, ne sont démontrés. Dans ces conditions, le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France.
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
6. Le présent arrêt n'implique pas le prononcé d'une injonction autre que celle déjà prononcée par les premiers juges, dès lors qu'il appartient au ministre de prendre les mesures nécessaires pour qu'un visa de long séjour soit délivré à Mlle E...C.... Les conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir l'injonction prononcée par les premiers juges d'une astreinte.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
7. Considérant que Mme C...n'a pas obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat ne peut pas se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 pour demander le versement d'une somme à ce titre. Dès lors, ces conclusions doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du ministre de l'intérieur est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par Mme C...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...épouse C...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 15 février 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Dussuet, président de chambre,
- M. Degommier, président-assesseur,
- M. Mony, premier conseiller.
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Lu en audience publique, le 8 mars 2019.
Le rapporteur,
S. DEGOMMIERLe président,
J-P. DUSSUET
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT00076