Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 12 novembre 2013 du préfet du Morbihan déclarant d'utilité publique le projet de réalisation d'un itinéraire mixte de promenade entre Vannes et Sainte Anne d'Auray.
Par un jugement n° 1400153 du 2 décembre 2016, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 1er février 2017, M. C..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 2 décembre 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 12 novembre 2013 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. C...soutient que :
- le projet litigieux est dépourvu d'utilité publique dès lors que les inconvénients qu'il emporte présentent un caractère excessif ;
- le projet litigieux fait obstacle à la préservation des espaces agricoles ;
- le projet litigieux va impacter négativement son activité d'exploitant agricole ;
- le tracé de l'itinéraire prévu porte atteinte à l'objectif de préservation des espaces agricoles figurant au plan local d'urbanisme de Vannes ;
- un tracé alternatif était possible sur des parcelles non cultivées ;
-l'itinéraire de promenade pouvait être mis en place dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation ;
- le tribunal administratif a omis de se prononcer sur ce dernier point ;
- un sentier existe déjà qui aurait permis de contourner les parcelles qu'il exploite.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juillet 2017, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de
M. C...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le ministre fait valoir qu'aucun des moyens d'annulation soulevés par le requérant n'est fondé.
Par un mémoire enregistré le 26 juillet 2017, le département du Morbihan, représenté par MeE..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. C...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le département fait valoir qu'aucun des moyens d'annulation soulevés par le requérant n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mony,
- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,
- et les observations de MeD..., représentant M.C..., et de MeB..., substituant MeF..., représentant le département du Morbihan.
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 16 octobre 2009, le conseil départemental du Morbihan a approuvé le lancement d'une étude relative à la réalisation d'un itinéraire de randonnée entre les communes de Vannes et de Sainte Anne d'Auray permettant de sécuriser la circulation des piétons et des cyclistes entre ces communes, notamment lors des pèlerinages ainsi que de valoriser le patrimoine local. Après avis favorable du commissaire enquêteur à l'issue d'une enquête publique sur ce projet, le préfet du Morbihan a déclaré d'utilité publique, par arrêté du 12 novembre 2013, le projet de réalisation d'un itinéraire de randonnée mixte piétons/vélos reliant Vannes à Sainte-Anne d'Auray, au nord de la route départementale n° 19. M. C...relève appel du jugement du 2 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Si M. C...soutient que les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de ce que l'expropriant était en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation, notamment en utilisant des biens se trouvant dans son patrimoine, le jugement du 4 novembre 2016 précise en son point 4 que " que si, en outre, M. C...soutient, sans le démontrer, qu'un autre trajet aurait pu être choisi, sur un chemin dont le Conseil départemental n'est pas propriétaire, il n'appartient pas au juge de l'excès de pouvoir d'apprécier l'opportunité du tracé retenu ". Par suite, le tribunal n'a pas entaché sa décision d'irrégularité pour défaut de réponse à un moyen.
Sur les conclusions en annulation :
3. Il appartient au juge, lorsqu'il se prononce sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu'elle répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs au regard de l'intérêt qu'elle présente.
4. En premier lieu, si M. C... soutient que " l'espace agricole doit être préservé " et que " le tracé retenu apparaît contraire aux objectifs de préservation des espaces agricoles figurant au plan local d'urbanisme de Vannes ", il ne ressort pas des pièces du dossier que la création des espaces réservés nécessaires à la réalisation du projet, dont M. C...ne conteste pas sérieusement qu'ils ne représenteraient qu'une très faible superficie des terrains qu'il exploite lui-même, de l'ordre de 0,308 hectare, serait de nature à compromettre le parti d'aménagement retenu par la commune de Vannes. La circonstance, à la supposer même avérée, que la réalisation du projet d'itinéraire de randonnée devrait se traduire par une modification du zonage actuel du plan local d'urbanisme communal de Vannes, n'est pas par elle-même de nature à établir l'existence d'inconvénients ou atteintes aux intérêts de la profession agricole.
5. En deuxième lieu, si M. C...fait valoir que le projet litigieux impacterait " plusieurs zones humides ", il ne précise pas davantage la localisation et l'importance de telles zones, ni l'atteinte que serait susceptible de leur porter la mise en place de l'itinéraire litigieux.
6. En troisième lieu, si l'intéressé fait valoir que le projet portera atteinte à son activité agricole, il n'apporte aucune précision sur les contraintes effectivement occasionnées par le projet sur celle-ci et ne démontre en rien, faute d'apporter le moindre élément concret au soutien de ses allégations, en quoi la réalisation d'un itinéraire de randonnée compromettrait une exploitation normale des terrains dont il est propriétaire, l'emprise du projet sur les terrains qu'il exploite, se limitant comme déjà indiqué à 0,308 hectare, alors même que M. C...exploite plus de 95 hectares de terres agricoles au total.
7. S'il soutient également que le projet litigieux n'a qu'un simple but d'agrément sans fournir de contrepartie économique et touristique, il ressort des pièces du dossier que la réalisation d'un itinéraire de randonnée mixte piétons et cyclistes contribuera à accroître la sécurité de la circulation des très nombreux touristes et promeneurs empruntant chaque année, que ce soit à pied ou à bicyclette, la route départementale 19, très fréquentée, menant à la basilique Saint-Anne d'Auray, laquelle constitue un monument emblématique du tourisme morbihanais, ainsi qu'en atteste l'importance du pèlerinage annuel, en juillet, vers Sainte Anne d'Auray. Cet itinéraire constituera également une opportunité en termes de développement touristique local, notamment au travers la mise en valeur du petit patrimoine local présent sur l'itinéraire. Ce projet, par suite, présente une finalité d'intérêt général de nature à justifier qu'il soit déclaré d'utilité publique.
8. En quatrième lieu, si le requérant soutient que la commune de Vannes aurait été en mesure de réaliser l'opération sans avoir à recourir à la procédure de l'expropriation pour cause d'utilité publique, la circonstance alléguée selon laquelle le projet litigieux pouvait emprunter un autre itinéraire au travers de terrains non cultivés à des conditions équivalentes n'est nullement démontrée. En effet, le sentier situé au nord du village du Bernard dont il évoque l'existence n'est pas la propriété de l'autorité expropriante et son utilisation n'aurait ainsi procuré aucun avantage particulier par rapport à l'itinéraire retenu, et ce alors même que le tracé de ce chemin, qui ne se connecte pas aux cheminements localisés à Kermesquel devant constituer la partie suivante de l'itinéraire, ne peut ainsi être regardé comme offrant la possibilité de réaliser l'opération projetée dans des conditions équivalentes. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier, ainsi pourtant que M. C...l'allègue, que le tracé retenu porte une atteinte excessive à la profession agricole locale et lui occasionnerait personnellement une gêne excessive au niveau de son activité.
9. En cinquième lieu, si M. C...fait valoir que le commissaire-enquêteur aurait exprimé lors de l'enquête publique que le tracé envisagé comportait des incohérences, il ressort des pièces du dossier que ce dernier a émis un avis favorable sans réserves sur l'utilité publique du projet litigieux.
10. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, M. C...n'apportant lui-même que des éléments imprécis au débat contentieux, que le projet d'itinéraire litigieux porte une atteinte excessive apportée à la propriété privée.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M.C..., n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à
M. C...la somme que celui-ci réclame au tire des frais exposés par lui non compris dans les dépens. Si le ministre de l'intérieur, qui n'a pas eu recours au ministère d'avocat, demande l'application de ces mêmes dispositions au titre des frais exposés par ses services à l'occasion de l'instance, il ne justifie toutefois en rien d'un surcroît de travail de ses services ou de frais spécifiques engagés à l'occasion du présent contentieux et ne peut, par suite, en bénéficier. Il y a en revanche lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M.C..., au même titre, une somme de 1 000 euros au profit du département du Morbihan.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions en application de l'article L. 761-1 du ministre de l'intérieur sont rejetées.
Article 3 : M. C...versera 1 000 euros au département du Morbihan en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., au ministre de l'intérieur, à la département du Morbihan, au ministre de la cohésion des territoires et au préfet du Morbihan.
Délibéré après l'audience du 4 février 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Dussuet, président,
- M. Degommier, président assesseur,
- M. Mony, premier conseiller,
Lu en audience publique le 5 mars 2019.
Le rapporteur,
A. MONY
Le président,
J-P. DUSSUETLe greffier,
C. POPSE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT00418