Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 158 431,02 euros en réparation des préjudices résultant de l'illégalité fautive des articles 1er et 3 de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 26 novembre 2004 portant mise en demeure de cesser l'activité d'élevage de canards sur caillebotis dans le bâtiment n°3 de son exploitation et de respecter les effectifs fixés par l'arrêté du 3 mai 2004 pour l'élevage de volailles en plein air et de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 13 avril 2005 prononçant la suspension du fonctionnement de l'exploitation jusqu'à l'exécution des conditions imposées par les arrêtés des 3 mai 2004 et 26 novembre 2004.
Par un jugement n° 1503720 du 30 juin 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 30 août 2017, M. A... demande à la cour :
1°) de condamner l'Etat au versement d'une somme de 1 158 431,02 euros en réparation de ses préjudices ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 8 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- l'illégalité de l'arrêté de mise en demeure du 26 novembre 2004 est fautive et engage la responsabilité de l'Etat ;
- faute de délai dans la mise en demeure, il a été privé de la possibilité de satisfaire aux mesures prescrites par le préfet de la Loire-Atlantique ;
- les termes de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 1er juillet 2011 s'opposent à ce qu'il puisse être considéré que les décisions étaient justifiées au fond ; les travaux requis étaient achevés à la date à laquelle la mise en demeure lui a été adressée ;
- l'illégalité de la décision de suspension de son activité imposée le 13 avril 2005 est à l'origine du préjudice qu'il a subi durant 8 ans.
Par un mémoire en défense enregistré le 5 novembre 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que le préjudice invoqué découle directement et exclusivement de la situation irrégulière dans laquelle le requérant s'est placé ; ce dernier ne démontre pas que les mesures prescrites par l'arrêté de mise en demeure ne pouvaient être réalisées avant le 13 avril 2005.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Brisson,
- et les conclusions de M. Derlange, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 3 mai 2004, le préfet de la Loire-Atlantique a autorisé M. A...à exploiter un élevage de volailles d'une capacité de 66 800 équivalents animaux volailles au lieu-dit Le Plessis à St Philbert de Grand Lieu. Par un arrêté du 26 novembre 2004, le préfet a mis en demeure l'intéressé, aux termes des articles 1er et 3, respectivement, de cesser l'activité d'élevage de canards sur caillebotis dans le bâtiment n°3 de son exploitation et de respecter les effectifs fixés par l'arrêté du 3 mai 2004 pour l'élevage de volailles en plein air. Par un arrêté du 13 avril 2005, le préfet de la Loire-Atlantique a prononcé la suspension du fonctionnement de l'élevage avicole jusqu'à l'exécution des conditions imposées par les arrêtés des 3 mai 2004 et 26 novembre 2004. Par un arrêt du 29 juillet 2008, la cour administrative d'appel de Nantes, après avoir annulé le jugement du 28 août 2007 en tant qu'il a annulé les articles 1er et 3 de l'arrêté du 26 novembre 2004 ainsi que, par voie de conséquence, l'arrêté du 13 avril 2005, a rejeté la requête présentée par M. A...tendant à l'annulation de ces deux arrêtés. Cet arrêt ayant été annulé par le Conseil d'Etat le 4 mars 2011, la cour, appelée à se prononcer de nouveau a, le 1er juillet 2017, rejeté l'appel principal formé par le ministre ainsi que l'appel incident présenté par M.A.... Par un jugement du 30 juin 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté les conclusions présentées par M. A...tendant à l'indemnisation des préjudices nés de l'illégalité fautive des articles 1er et 3 de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 26 novembre 2004 ainsi que l'arrêté préfectoral du 13 avril 2005. M. A...relève appel de ce jugement.
2. En principe, toute illégalité commise par l'administration constitue une faute susceptible d'engager sa responsabilité, pour autant qu'il en soit résulté un préjudice direct et certain. Cependant, la responsabilité de l'administration ne saurait être engagée pour la réparation des dommages qui ne trouvent pas leur cause dans cette illégalité mais découlent directement et exclusivement de la situation irrégulière dans laquelle la victime s'est elle-même placée, indépendamment des faits commis par la puissance publique, et à laquelle l'administration aurait pu légalement mettre fin à tout moment.
3. Alors même que le préfet était en situation de compétence liée pour prononcer les mesures édictées dans les articles 1er et 3 de l'arrêté du 26 novembre 2004, leur annulation a été confirmée par la cour administrative d'appel de Nantes au seul motif qu'ils n'étaient pas assortis d'un délai permettant à M. A...de satisfaire aux obligations mises à sa charge au titre des installations classées.
4. Le requérant soutient que l'illégalité entachant les arrêtés en litige l'a privé de la possibilité de poursuivre son activité jusqu'au mois de juin 2014, soit pendant près de 10 ans. Toutefois, il résulte de l'instruction d'une part, que si M. A...se prévaut de ce qu'un procès-verbal d'huissier établi le 3 novembre 2004 atteste qu'une chape de béton avait été coulée et qu'elle présentait une pente permettant une évacuation du lisier, le rapport de l'inspecteur des installations classées établi le 3 décembre 2004, avant que ne soit pris l'arrêté par lequel le préfet a suspendu l'exploitation du requérant, constate que ces travaux ne sont pas conformes à la législation sur les installations classées. D'autre part, l'intéressé ne justifie pas, ni même n'allègue, avoir réalisé les travaux propres à permettre à l'administration de mettre fin à la suspension ou n'expose avoir été dans l'impossibilité d'y procéder.
5. Dans ces conditions, la cause du préjudice invoqué par M. A...trouve son origine non pas directement dans l'illégalité fautive tenant à l'absence de mention d'un délai dans la mise en demeure de mise aux normes de l'exploitation avicole ou dans la décision subséquente de suspension de l'exploitation mais dans la carence persistante du requérant à respecter les mises en demeure du préfet quant à l'étanchéité du sol et la réduction des effectifs animaux. Le requérant s'est ainsi placé lui-même dans une situation irrégulière à laquelle l'administration aurait pu légalement mettre fin s'il s'était conformé aux prescriptions qui lui ont été imposées. Il s'ensuit que les conclusions indemnitaires présentées par le requérant ne peuvent qu'être rejetées.
6. Il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. A...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de la transition écologique et solidaire.
Copie en sera adressée au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 29 janvier 2019, où siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- Mme Brisson, président-assesseur,
- Mme Bougrine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 février 2019.
Le rapporteur,
C. BRISSON Le président,
A. PEREZ
Le greffier,
A. BRISSET
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 17NT02667