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14/12/2018 | FRANCE | N°18NT00826

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 14 décembre 2018, 18NT00826


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...et Mme H...B...ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 22 janvier 2015 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours dirigé contre la décision du 15 octobre 2014 de l'ambassadeur de France à Port-au-Prince (Haïti) refusant de délivrer un visa de long séjour à H...B..., au titre du regroupement familial.

Par un jugement n° 1502069 du 21 décembre 2017, le tribunal administratif de Na

ntes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregist...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...et Mme H...B...ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 22 janvier 2015 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours dirigé contre la décision du 15 octobre 2014 de l'ambassadeur de France à Port-au-Prince (Haïti) refusant de délivrer un visa de long séjour à H...B..., au titre du regroupement familial.

Par un jugement n° 1502069 du 21 décembre 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 février 2018, Mle H...B...et M. D...B..., représentés par MeF..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 21 décembre 2017 ;

2°) d'annuler la décision du 22 janvier 2015 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur : à titre principal, de délivrer un visa de long séjour à MleB..., au titre du regroupement familial, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de la demande dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier comme n'étant pas suffisamment motivé ;

- le refus de visa est insuffisamment motivé au regard des actes d'état civil produits et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- une erreur d'appréciation a été commise quant à la filiation de H...B... au regard des actes produits et du rapport d'expertise d'ADN ;

- la possession d'état doit être constatée ;

- l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant a été méconnu ;

- l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme a été violé.

Par un mémoire enregistré le 23 avril 2018, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun moyen n'est fondé.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

-la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Brisson.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 15 octobre 2014, l'ambassadeur de France à Port-au-Prince (Haïti) a refusé de délivrer un visa de long séjour au profit de la jeune H...B..., née le 28 mai 1994, au titre du regroupement familial sollicité par M. D...B..., de nationalité haïtienne, résidant en France. Le 22 janvier 2015, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours présenté par M. B...à l'encontre de cette décision. Les requérants relèvent appel du jugement du 21 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Le jugement attaqué, après avoir rappelé que la délivrance d'un visa sollicité par une personne dont le regroupement familial a été autorisé peut être refusée, notamment, si les actes d'état civil produits ne sont pas probants, a explicité, au point 6 de son jugement, les raisons pour lesquelles il estimait que les actes produits par M. B...n'étaient pas revêtus de ce caractère en raison des incohérences qu'ils présentaient. Il a également aux points 7 et 8, précisé les motifs conduisant à écarter le test ADN produit. Dans ces conditions, le jugement attaqué n'est pas entaché d'un défaut de motivation.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, alors en vigueur : " Par dérogation aux dispositions de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, les décisions de refus de visa d'entrée en France, prises par les autorités diplomatiques ou consulaires, ne sont pas motivées sauf dans les cas où le visa est refusé à un étranger appartenant à l'une des catégories suivantes et sous réserve de considérations tenant à la sûreté de l'Etat : (...) / 2° Conjoints, enfants de moins de vingt et un ans ou à charge, et ascendants de ressortissants français (...) ".

4. La décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France vise les articles L. 211-2 et L 411-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et comporte l'énoncé circonstancié des considérations de fait sur lesquelles elle se fonde, en particulier la circonstance que l'acte de naissance n° 1729 du 12 juin 1994 et les actes joints au recours comportent des incohérences qui leur ôtent tout caractère probant et ne permettent pas d'établir le lien familial. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France doit dès lors être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil " et aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état-civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent le cas échéant après toutes vérifications utiles que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. ".

6. L'administration est en droit de refuser la délivrance d'un visa de long séjour à un étranger lorsque le lien familial, matrimonial ou de filiation, n'est pas établi, notamment en raison de l'absence de caractère probant des documents d'état civil présentés pour établir ce lien.

7. La naissance de la jeuneH..., intervenue le 28 mai 1994, a été déclarée le 12 juin 1994 par sa mère, Mme I...E..., et a donné lieu à l'établissement d'un acte de naissance, portant le n° 1729 sans qu'une filiation paternelle n'apparaisse, l'enfant portant le nom maternel.

8. En vertu d'un jugement supplétif du 7 octobre 2008, un nouvel acte de naissance, portant le n°227, a été établi le 9 octobre 2008 à la demande de M.B.... Toutefois, cet acte méconnaît les dispositions de l'article 55 du code civil haïtien lequel ne permet la mise en oeuvre d'une déclaration tardive de naissance qu'en l'absence de déclaration de l'enfant dans les deux ans suivant sa naissance, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Il ressort également des pièces du dossier que si M. B...a, 3 décembre 2012, procédé à une reconnaissance de la jeuneH..., les mentions de cet acte de naissance ne font pas apparaître que l'accord de cette dernière aurait été recueilli comme le prévoit l'article 305 du code civil haïtien en présence d'une personne majeure ; de plus, cette reconnaissance n'a pas été transcrite en marge de l'acte de naissance de 1994.

9. Dans ces conditions, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a estimé que le lien de filiation entre Francy B...et H...B...n'était pas établi.

10. En troisième lieu, si une ordonnance du 12 mars 2015 du doyen du tribunal d'instance de Port-au-Prince a autorisé la réalisation d'un test ADN lequel, réalisé aux Etats-Unis, a conclu, le 20 avril 2015, à une probabilité de plus de 99 % que M. D...B...soit le père de H...B..., il ne ressort pas des pièces du dossier que cette identification par les empreintes génétiques aurait été prescrite dans les conditions exigées par l'article 16-11 du code civil français à défaut d'avoir recueilli l'accord préalable de la jeune H...B.... Par suite, le document du 20 avril 2015 n'est pas propre à établir, dans des conditions opposables aux tiers, la filiation des intéressés.

11. En dernier lieu, si des transferts de fonds ont été effectués entre la fin de l'année 2011 et 2015 au profit de MM C...etG..., respectivement parrain et oncle maternel de la jeuneH..., il ne résulte pas de ces seuls transferts que ces personnes la prendraient effectivement en charge. De même, les attestations de tiers indiquant, de manière peu précise, que M. B...a exercé ses responsabilités paternelles vis-à-vis de sa fille alléguéeH..., lesquelles ne sont pas corroborées par d'autres éléments, ne suffisent pas à établir, par la possession d'état, le lien de filiation entre les requérants.

12. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande. Par suite, leurs conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des articles L 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B...et de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B..., à Mme H...B...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 27 novembre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme Brisson, président assesseur,

- MA...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique le 14 décembre 2018.

Le rapporteur,

C. BRISSONLe président,

A. PEREZLe greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 18NT00826

4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT00826
Date de la décision : 14/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : CHERIFF

Origine de la décision
Date de l'import : 25/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-12-14;18nt00826 ?
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