La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/12/2018 | FRANCE | N°18NT00574

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 07 décembre 2018, 18NT00574


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation des arrêtés du 9 janvier 2018 par lesquels la préfète de la Loire-Atlantique, d'une part, a prononcé sa remise aux autorités italiennes, d'autre part, l'a assigné à résidence.

Par un jugement 1800295 du 12 janvier 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 12 février 2018 et le 5 m

ars 2018, M. D..., représenté par Me C...E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation des arrêtés du 9 janvier 2018 par lesquels la préfète de la Loire-Atlantique, d'une part, a prononcé sa remise aux autorités italiennes, d'autre part, l'a assigné à résidence.

Par un jugement 1800295 du 12 janvier 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 12 février 2018 et le 5 mars 2018, M. D..., représenté par Me C...E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes 12 janvier 2018 ;

2°) d'annuler les arrêtés du 9 janvier 2018 de la préfète de la Loire-Atlantique ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à la préfète de la Loire-Atlantique de réexaminer sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer durant ce réexamen une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

en ce qui concerne la décision de réadmission en Italie :

- les dispositions des articles 4 et 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues ;

- les dispositions de l'article 25 du règlement du 26 juin 2013 n'ont pas été respectées ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur de fait en ce qui concerne la durée de validité de l'attestation de demande d'asile qui lui a été délivrée le 7 novembre 2017 ; cela témoigne du défaut de réexamen suite à l'annulation des précédents arrêtés datés du 11 décembre 2017 ;

- il n'a jamais déposé de demande d'asile en Italie;

en ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant réadmission en Italie.

Par un mémoire et un courrier, enregistrés le 13 avril 2018 et le13 novembre 2018, le préfet de la Loire-Atlantique indique que M. D...a été déclaré comme étant en fuite depuis le 16 mars 2018.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. D...n'est fondé.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 22 février 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Allio-Rousseau a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... D..., ressortissant guinéen né le 18 juillet 1995, est entré irrégulièrement sur le territoire français et y a sollicité l'asile, le 7 novembre 2017, auprès des services de la préfecture de la Loire-Atlantique. La consultation du fichier Eurodac a révélé que ses empreintes digitales avaient été enregistrées en Italie le 13 septembre 2016 et qu'il y avait demandé l'asile le 22 septembre 2016, puis en Suisse le 12 avril 2017 et de nouveau en Italie le 6 juillet 2017. Par deux arrêtés du 11 décembre 2017, la préfète de la Loire-Atlantique a ordonné sa remise aux autorités italiennes, qui avaient accepté implicitement sa reprise en charge le 24 novembre 2017, et son assignation à résidence. Par un jugement du 14 décembre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé ces deux arrêtés en raison de la méconnaissance des dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et a enjoint à la préfète de réexaminer la demande d'asile formulée par M. D.... La préfète de la Loire-Atlantique a édicté deux nouveaux arrêtés le 9 janvier 2018 par lesquels elle a décidé la remise de l'intéressé aux autorités italiennes et son assignation à résidence. M. D... relève appel du jugement du 11 janvier 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux dernières décisions.

Sur l'arrêté de transfert aux autorités italiennes :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. D...a reçu, le 7 novembre 2017, soit au moment du dépôt de sa demande d'asile en France, le guide du demandeur d'asile ainsi que les brochures portant information générale sur la procédure de demande d'asile dans l'Union européenne et information sur la procédure " Dublin " en français, langue que l'intéressé a déclaré comprendre. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. (...) 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. ( ...) ".

4. A la suite de l'annulation des arrêtés du 11 décembre 2017, M. D...a été reçu en préfecture pour un entretien individuel le 28 décembre 2017. Il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce qu'indique le requérant, le compte-rendu de cet entretien est signé par un agent habilité de la préfecture de la Loire-Atlantique clairement désigné et identifié. Il a par ailleurs bénéficié de la possibilité de faire valoir toutes observations utiles, comme il ressort d'ailleurs des termes du compte-rendu, s'agissant notamment de son séjour en Italie et de son état de santé. Il s'ensuit que le moyen tiré de la violation de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ne peut qu'être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 25 du règlement UE n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. L'État membre requis procède aux vérifications nécessaires et statue sur la requête aux fins de reprise en charge de la personne concernée aussi rapidement que possible et en tout état de cause dans un délai n'excédant pas un mois à compter de la date de réception de la requête. Lorsque la requête est fondée sur des données obtenues par le système Eurodac, ce délai est réduit à deux semaines. 2. L'absence de réponse à l'expiration du délai d'un mois ou du délai de deux semaines mentionnés au paragraphe 1 équivaut à l'acceptation de la requête, et entraîne l'obligation de reprendre en charge la personne concernée, y compris l'obligation d'assurer une bonne organisation de son arrivée. ".

6. Il ressort des pièces du dossier, notamment du formulaire de la requête aux fins de reprise en charge adressée le 8 novembre 2017 aux autorités italiennes et des fiches décadactylaires Eurodac dont il ressort que M. D...a présenté une demande d'asile en Italie, que la requête de la préfète de la Loire-Atlantique était bien fondée sur des données obtenues par le système Eurodac. En vertu des dispositions de l'article 25 citées au point précédent, un accord implicite des autorités italiennes est ainsi intervenu à l'expiration d'un délai de deux semaines, soit le 24 novembre 2017. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du délai fixé par ces dispositions doit être écarté.

7. En quatrième lieu, si M. D...soutient n'avoir jamais présenté de demande d'asile en Italie, il ressort cependant des recherches effectuées dans le fichier Eurodac qu'il est identifié comme ayant présenté une demande d'asile dans ce pays. Aucun élément au dossier ne permet de remettre en cause l'exactitude de ces données. Par suite, le moyen tiré de ce que la préfète de la Loire-Atlantique a fait une inexacte application du règlement doit être écarté.

8. En cinquième lieu, l'erreur matérielle affectant l'arrêté en litige, relative à la durée de validité de l'attestation de demande d'asile remise à M.D..., n'a pas exercé d'influence sur la décision de remise aux autorités italiennes et ne révèle pas à elle seul un défaut d'examen.

Sur l'arrêté d'assignation à résidence :

9. Il résulte des points 2 à 8 du présent arrêt que M. D... n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision ordonnant sa remise aux autorités italiennes.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions de la préfète de la Loire-Atlantique du 9 janvier 2018. Ses conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 20 novembre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Tiger-Winterhalter, présidente assesseure,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 décembre 2018.

Le rapporteur,

M-P. Allio-RousseauLe président,

L. Lainé

Le greffier,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18NT00574


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT00574
Date de la décision : 07/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : MOREAU-TALBOT

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-12-07;18nt00574 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award