Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...D...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 30 mai 2017 par lequel la préfète de la Loire-Atlantique a décidé sa remise aux autorités italiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile.
Par un jugement n° 1704962 du 15 juin 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2017, MmeD..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 15 juin 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 mai 2017 de la préfète de la Loire-Atlantique ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire-Atlantique de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision est insuffisamment motivée ;
- la décision, qui n'indique pas qu'un entretien individuel aurait été réalisé, est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 novembre 2018, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Il déclare s'en remettre à ses écritures de première instance.
Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 octobre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Besse a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeD..., ressortissante nigériane née le 1er janvier 1996 et entrée irrégulièrement en France, a présenté une demande d'asile auprès de la préfecture de la Loire-Atlantique le 4 mai 2017. Les recherches effectuées sur le fichier Eurodac ont révélé que ses empreintes avaient été précédemment relevées en Italie, où elle a sollicité l'asile le 18 juin 2016. La préfète de la Loire-Atlantique a alors saisi les autorités italiennes le 5 mai 2017 d'une demande de reprise en charge de l'intéressée sur le fondement du 1 de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Ces autorités ont implicitement accepté cette reprise en charge. Par un arrêté du 30 mai 2017, la préfète de la Loire-Atlantique a décidé la remise de Mme D...aux autorités italiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile. Mme D... relève appel du jugement du 15 juin 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, la décision litigieuse vise notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le règlement (UE) n° 604/2013 susvisé, ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier ses articles L. 742-3 à L. 742-6. Elle comporte en outre un exposé détaillé des considérations de fait sur lesquelles la préfète de la Loire-Atlantique s'est fondée pour décider la remise de Mme D...aux autorités italiennes. Elle mentionne notamment à cet égard que la consultation du fichier Eurodac a révélé que les empreintes de l'intéressée, entrée irrégulièrement sur le territoire français, ont été relevées le 18 juin 2016 en Italie où elle a sollicité l'asile et que les autorités de ce pays, saisies le 5 mai 2017 d'une demande de reprise en charge de l'intéressée sur le fondement du paragraphe 1 de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, ont implicitement accepté cette reprise en charge. La décision précise en outre que si Mme D...déclare avoir été logée dans un camp en Italie d'où elle est partie après avoir reçu des menaces de belligérants qu'elle avait séparés lors d'une bagarre, elle n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'établit pas de risque personnel constituant une atteinte grave au droit d'asile en cas de remise aux autorités italiennes. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision ne satisferait pas à l'exigence légale de motivation doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Entretien individuel : 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / 2. (...) / 3. L'entretien individuel a lieu en temps utile et, en tout cas, avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. / 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé ". Il ressort des mentions figurant sur le formulaire signé par Mme D...le 4 mai 2017 qu'elle a bénéficié le jour même, soit avant l'intervention de la décision contestée, de l'entretien individuel prévu par l'article 5 précité du règlement n° 604/2013. Cet entretien s'est tenu en anglais, langue que l'intéressée a déclaré comprendre, avec l'assistance, par téléphone, d'un traducteur assermenté. Par suite, Mme D...n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'a pas bénéficié d'un entretien individuel en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013.
4. En troisième et dernier lieu, si Mme D...fait valoir qu'elle a été menacée en Italie par des personnes se trouvant dans le camp où elle logeait, cette seule circonstance, dont la réalité n'est au demeurant pas établie, ne permet pas de démontrer qu'elle serait personnellement exposée, en cas de retour dans ce pays, au risque d'y subir des traitements inhumains ou dégradants contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 mai 2017. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D...et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 20 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Tiger-Winterhalter, présidente assesseure,
- M. Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 7 décembre 2018.
Le rapporteur,
P. BesseLe président,
L. Lainé
Le greffier,
M. B...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT03626