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23/11/2018 | FRANCE | N°17NT02961

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 23 novembre 2018, 17NT02961


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...F...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés du 17 août 2017 par lesquels le secrétaire général de la préfecture du Maine-et-Loire a décidé sa remise aux autorités suisses en vue de l'examen de sa demande d'asile et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1707498 du 25 août 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requê

te, enregistrée le 24 septembre 2017, M.F..., représenté par Me H..., demande à la cour :

1°) d'annule...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...F...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés du 17 août 2017 par lesquels le secrétaire général de la préfecture du Maine-et-Loire a décidé sa remise aux autorités suisses en vue de l'examen de sa demande d'asile et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1707498 du 25 août 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 septembre 2017, M.F..., représenté par Me H..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 25 août 2017 ;

2°) d'annuler les arrêtés du 17 août 2017 du secrétaire général de la préfecture du Maine-et-Loire ;

3°) d'enjoindre au préfet du Maine-et-Loire réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter du présent arrêt et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de ce réexamen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 400 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- les arrêtés ont été pris par une autorité incompétente ;

- la décision de remise aux autorités suisses méconnaît l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, en raison des risques que son renvoi en Somalie lui ferait encourir compte tenu de son état de santé ;

- la décision portant assignation à résidence est illégale en conséquence de l'illégalité qui entache la décision de remise aux autorités suisses.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 décembre 2017, le préfet du Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. F...n'est fondé.

M. F...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 novembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Besse a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.F..., ressortissant somalien, né le 20 octobre 1996, qui déclare être entré irrégulièrement en France le 7 mai 2017, a présenté une demande d'asile auprès de la préfecture du Maine-et-Loire le 4 juillet 2017. Les recherches effectuées sur le fichier Eurodac ont révélé que ses empreintes avaient été précédemment relevées en Suisse le 16 juillet 2015, puis en Allemagne le 20 février 2017. Le préfet du Maine-et-Loire a alors respectivement saisi, le 5 juillet 2017, les autorités suisses d'une part, et les autorités allemandes d'autre part, d'une demande de reprise en charge de l'intéressé sur le fondement du 1 de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Le 7 juillet 2017, les autorités suisses ont accepté cette reprise en charge, tandis que les autorités allemandes la refusaient. Par deux arrêtés du 17 août 2017, le secrétaire général de la préfecture du Maine-et-Loire a décidé de remettre M. F... aux autorités suisses et de l'assigner à résidence. M. F... relève appel du jugement du 25 août 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de remise aux autorités suisses :

2. En premier lieu, aux termes du I de l'article 45 du décret susvisé du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements: " (...) En cas de vacance momentanée du poste de préfet, l'intérim est assuré par le secrétaire général de la préfecture. (...) ". L'arrêté du 17 août 2017 de remise de M. F...aux autorités suisses a été signé par M. C...A..., nommé secrétaire général de la préfecture du Maine-et-Loire par décret du 8 juillet 2015 régulièrement publié au Journal officiel de la République française, et chargé à ce titre d'assurer l'intérim du préfet du département à la suite de la cessation par Mme E...I...de ses fonctions de préfète du Maine-et-Loire à compter du 27 juillet 2017 et dans l'attente de l'installation dans ses fonctions, intervenue le 21 août 2017, de M. D...G..., nommé préfet du Maine-et-Loire par décret du 28 juillet 2017. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 17 août 2017 doit être écarté comme manquant en fait.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " 1. Les États membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux, y compris à la frontière ou dans une zone de transit. La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 susvisé : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ". Il résulte de ces dispositions que si le règlement (UE) n° 604/2013 susvisé prévoit en principe qu'une demande d'asile est examinée par un seul Etat membre et que cet Etat est déterminé par application des critères fixés par son chapitre III, dans l'ordre énoncé par ce chapitre, l'application des critères d'examen des demandes d'asile est toutefois écartée en cas de mise en oeuvre de la clause dérogatoire énoncée au paragraphe 1 de l'article 17 du règlement, qui procède d'une décision prise unilatéralement par un Etat membre. Cette faculté laissée à chaque Etat membre par l'article 17 de ce règlement est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.

4. D'une part, si M. F...soutient qu'il présente une infection tuberculeuse latente, ni le certificat médical établi le 25 août 2017 selon lequel il doit suivre un traitement prophylactique pendant trois mois avec bilans hépatiques et réaliser une radiographie de contrôle à l'issue du traitement, ni le document émanant de la Ligue pulmonaire suisse ne permettent d'établir qu'il serait exposé à un risque d'interruption de ce traitement en cas de transfert en Suisse. D'autre part, l'intéressé ne peut utilement faire valoir qu'il ne pourra pas bénéficier de soins adaptés à son état de santé en cas de renvoi ultérieur en Somalie, dès lors que la décision litigieuse ne prononce pas son éloignement vers ce pays mais sa remise aux autorités suisses. Par suite, le moyen tiré de ce qu'en ne dérogeant pas aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile, le secrétaire général de la préfecture du Maine-et-Loire aurait méconnu les dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, doit être écarté.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision d'assignation à résidence :

5. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté d'assignation à résidence de M. F...doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 2 du présent arrêt.

6. En deuxième lieu, compte tenu de ce qui a été dit aux points 2 à 4 du présent arrêt, M. F...n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté d'assignation à résidence serait illégal en conséquence de l'illégalité de la décision prononçant sa remise aux autorités suisses.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. F...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 17 août 2017 par lesquels le secrétaire général de la préfecture du Maine-et-Loire a décidé sa remise aux autorités suisses et son assignation à résidence. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...F...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...F...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise au préfet du Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 6 novembre 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Tiger-Winterhalter, présidente,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller,

- M. Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 novembre 2018.

Le rapporteur,

P. BesseLa présidente,

N. Tiger-Winterhalter

Le greffier,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT02961


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT02961
Date de la décision : 23/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TIGER-WINTERHALTER
Rapporteur ?: M. Pierre BESSE
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : SCHAUTEN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-11-23;17nt02961 ?
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