La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/10/2018 | FRANCE | N°17NT01401

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 22 octobre 2018, 17NT01401


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Erquy environnement et habitat ", M. et MmeE..., Mme D...G..., Mme I...F...ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 3 juillet 2014 par lequel le maire d'Erquy a délivré à la société SPI un permis d'aménager un lotissement de 27 lots sur des terrains situés rue Louis Veuillot, rue des Forges, rue de la Franchise et rue des Amelines.

Par un jugement n° 1403947 du 3 mars 2017, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure de

vant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 mai 2017 et le 27 avril...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Erquy environnement et habitat ", M. et MmeE..., Mme D...G..., Mme I...F...ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 3 juillet 2014 par lequel le maire d'Erquy a délivré à la société SPI un permis d'aménager un lotissement de 27 lots sur des terrains situés rue Louis Veuillot, rue des Forges, rue de la Franchise et rue des Amelines.

Par un jugement n° 1403947 du 3 mars 2017, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 mai 2017 et le 27 avril 2018, l'association " Erquy environnement et habitat ", M. et MmeE..., Mme D...G..., Mme I...F..., représentés par MeJ..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 mars 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 3 juillet 2014 du maire d'Erquy ;

3°) de leur allouer une somme de 1500 euros pour les frais exposés en première instance, et une somme de 2000 euros pour les frais exposés en appel, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est entaché d'insuffisance de motivation ;

- la commune, dans son courrier du 23 janvier 2014, ne s'est pas bornée à demander des pièces complémentaires mais a informé la pétitionnaire des carences de son dossier ; la demande était complète et aurait justifié, compte tenu de ces carences, un refus ; l'article R. 423-38 du code de l'urbanisme a été méconnu ;

- la société SPI a fait parvenir des pièces complémentaires les 6, 18 et 26 juin 2014, après expiration du délai de trois mois prévu par l'article R. 423-39 du code de l'urbanisme ;

- la commune a adressé une autre demande de pièces le 28 mars 2014, soit plus d'un mois après réception de la demande de permis, en méconnaissance de l'article R. 423-40 du code de l'urbanisme ; cette demande n'a pu modifier le délai d'instruction ;

- la demande de permis d'aménager aurait dû être tacitement rejetée au 23 avril 2014 en application de ces dispositions ;

- la notice jointe à la demande de permis d'aménager ne répond pas aux exigences de l'article R. 441-3 du code de l'urbanisme, en ce qui concerne l'insertion du projet dans son environnement, l'accès et le traitement des voiries, et le stationnement des véhicules ;

- le projet conduit à une extension, qui n'est pas limitée, de l'urbanisation dans un espace proche du rivage ; cette extension n'est pas autorisée par le PLU et n'a pas donné lieu à autorisation du préfet ; les premiers juges ne se sont pas prononcés sur ce point ;

- une partie considérable du terrain assiette du projet de lotissement en litige ne répond ni à l'une, ni à l'autre des conditions posées par l'article 1AU3 du règlement du PLU de la commune, notamment au niveau de la rue des Forges.

Par un mémoire distinct, enregistré le 20 juillet 2017, la société SPI (groupe Ambassade), représenté par MeB..., conclut à la condamnation de l'association " Erquy environnement et habitat " et autres au paiement d'une indemnité de 1 235 050 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme.

Elle soutient que :

- le recours de l'association " Erquy environnement et habitat " et autres excède manifestement la défense de leurs intérêts légitimes, compte tenu de leur absence d'intérêt à agir et de leur acharnement à vouloir empêcher le projet ;

- du fait de ce recours, elle a subi un préjudice excessif matériel, financier et une atteinte à son image.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 12 septembre 2017 et le 11 mai 2018, la commune d'Erquy, représentée par MeH..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'association " Erquy environnement et habitat " et autres une somme de 1500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par l'association " Erquy environnement et habitat " et autres ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 7 novembre 2017 et le 11 mai 2018, la société SPI (groupe Ambassade), représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'association " Erquy environnement et habitat " et autres une somme de 2000 euros, pour chaque instance, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'association requérante n'a pas justifié de la date d'enregistrement de ses statuts en préfecture ; le projet litigieux ne porte pas atteinte à l'objet social de l'association, laquelle n'est que la réunion des personnes physiques requérantes ;

- aucun des requérants personnes physiques ne démontre en quoi le projet porterait atteinte à l'un des intérêts visés à l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, notamment quant aux conditions d'occupation de leur propriété ;

- les moyens soulevés par l'association " Erquy environnement et habitat " et autres ne sont pas fondés.

Vu les pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Degommier,

- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,

- et les observations de MeJ..., représentant l'association " Erquy environnement et habitat " et autres, de MeC..., représentant la société SPI, et de Me A...substituant MeH..., représentant la commune d'Erquy.

Considérant ce qui suit :

1. L'association " Erquy environnement et habitat " et autres interjette appel du jugement du 3 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 juillet 2014 par lequel le maire d'Erquy a délivré à la société SPI un permis d'aménager un lotissement de 27 lots, sur des terrains situés rue Louis Veuillot, rue des Forges, rue de la Franchise et rue des Amelines.

Sur la légalité de l'arrêté du 3 juillet 2014 du maire d'Erquy :

2. En premier lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, les moyens tirés de la méconnaissance des articles R. 423-38 à R. 423-40 du code de l'urbanisme, que l'association " Erquy environnement et habitat " et autres reprennent en appel sans apporter de précisions nouvelles.

3. En deuxième lieu, la circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

4. L'association " Erquy environnement et habitat " et autres soutiennent à nouveau, en appel, que la notice jointe à la demande de permis d'aménager ne répond pas aux exigences de l'article R. 441-3 du code de l'urbanisme. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point n° 8 du jugement attaqué.

5. En troisième lieu, aux termes du II de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme alors applicable, désormais repris à l'article L. 121-13 : "II - L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée doit être justifiée et motivée, dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. Toutefois, ces critères ne sont pas applicables lorsque l'urbanisation est conforme aux dispositions d'un schéma de cohérence territoriale ou d'un schéma d'aménagement régional ou compatible avec celles d'un schéma de mise en valeur de la mer. En l'absence de ces documents, l'urbanisation peut être réalisée avec l'accord du représentant de l'Etat dans le département. Cet accord est donné après que la commune a motivé sa demande et après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites appréciant l'impact de l'urbanisation sur la nature. Les communes intéressées peuvent également faire connaître leur avis dans un délai de deux mois suivant le dépôt de la demande d'accord. Le plan local d'urbanisme doit respecter les dispositions de cet accord.". Doivent être regardées comme une extension de l'urbanisation au sens de ces dispositions, l'ouverture à la construction de zones non urbanisées ainsi que la densification significative de zones déjà urbanisées.

6. D'une part, il ressort des termes du jugement attaqué que le tribunal a considéré que le projet d'aménagement litigieux ne constituait pas une extension de l'urbanisation au sens des dispositions précitées. En l'absence d'une telle extension, le tribunal n'était pas tenu de répondre au moyen, dès lors inopérant, tiré de ce que cette extension n'est pas prévue par le plan local d'urbanisme et n'a pas donné lieu à un accord du préfet.

7. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, notamment de la notice de présentation du projet et des plans produits, que les parcelles faisant l'objet de l'autorisation d'aménagement contestée, classées en zone 1AU du plan local d'urbanisme, sont entourées de terrains déjà bâtis pour la plupart, classés en zone UC et se situent dans un quartier significativement urbanisé, situé à proximité immédiate du centre-bourg. Ce projet, qui prévoit la création de 27 lots, d'une surface comprise entre 286 m² et 803 m², en vue de la construction de maisons individuelles à usage d'habitation, ne conduit pas à une augmentation de la densité des constructions du quartier dans lequel il s'insère. Compte tenu de la localisation de ce projet au milieu d'un espace urbanisé et de l'absence de densification significative, le projet litigieux ne peut être regardé comme constituant une extension de l'urbanisation. Dès lors, les moyens tiré de ce que cette extension n'est pas limitée, n'est pas justifiée par le PLU et n'a pas donné lieu à une autorisation du préfet ne peuvent qu'être écartés comme inopérants.

8. En dernier lieu, aux termes de l'article 1AU 3 du règlement du plan local d'urbanisme d'Erquy : " Un terrain pour être constructible doit disposer d'un accès sur une voie publique ou privée, ou bien le pétitionnaire doit produire une servitude de passage suffisante, instituée par acte authentique ou par voie judiciaire en application de l'article 682 du code civil (...) ".

9. Il ressort des pièces du dossier, notamment de la notice de présentation du projet et des plans produits que le projet de lotissement bénéficie de deux accès, l'un à l'ouest, sur la rue Veuillot, l'autre, pour les lots n° 16 à 27, au sud, sur la rue des Forges, après des travaux d'aménagement. Si les requérants soutiennent que la rue des Forges ne constitue ni une voie publique ni une voie privée pouvant desservir le futur lotissement, dès lors qu'elle est réservée au passage des propriétaires la bordant sur son côté sud, il n'est toutefois pas établi que cette rue, d'une largeur de plus de 3,5 mètres, serait une voie privée fermée au public, alors qu'il ressort des plans cadastraux, que l'emprise de la rue des Forges est distincte des parcelles situées sur son côté sud. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 1AU 3 du règlement du plan local d'urbanisme doit être écarté.

10. Il résulte de ce qui précède que l'association " Erquy environnement et habitat " et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Sur l'application de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme :

11. Aux termes de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme : " Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager est mis en oeuvre dans des conditions qui excèdent la défense des intérêts légitimes du requérant et qui causent un préjudice excessif au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l'auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel ".

12. Il résulte de l'instruction que, parmi les requérants personnes physiques, Mme G...est propriétaire d'une maison située rue des Amelines, qui jouxte le terrain d'assiette du lotissement litigieux sur lequel elle a une vue directe, M. et Mme E...possèdent une maison située rue Castelnau, à proximité immédiate du projet, tout comme MmeF.... L'association " Erquy environnement et habitat ", qui s'est donnée pour buts la valorisation et la protection du patrimoine architectural et des espaces naturels d'Erquy " centre ville ", justifie à ce titre d'un intérêt à agir. Par ailleurs, il n'est pas contesté que cette association a été déclarée le 4 septembre 2012 à la préfecture des Côtes d'Armor, soit avant le dépôt des demandes de permis d'aménager. L'action introduite par les requérants, qui disposent d'un intérêt à contester le permis d'aménager délivré à la société SPI, n'excède pas, en l'espèce, la défense de leurs intérêts légitimes, l'acharnement procédural allégué, n'étant pas établi. En conséquence, les conclusions présentées par la société SPI sur le fondement de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Erquy et de la société SPI, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que l'association " Erquy environnement et habitat " et autres demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de l'association " Erquy environnement et habitat " et autres une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune et non compris dans les dépens et une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société SPI.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'association " Erquy environnement et habitat " et autres est rejetée.

Article 2 : L'association " Erquy environnement et habitat " et autres verseront ensemble à la commune d'Erquy, une somme de 1 500 euros, et à la société SPI, une somme de 1 500 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la société SPI présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'Association " Erquy environnement et habitat ", à M. et Mme E..., à Mme D...G..., à Mme I...F..., à la commune d'Erquy et à la Société SPI (groupe ambassade).

Délibéré après l'audience du 5 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Dussuet, président de chambre,

- M. Degommier, président assesseur,

- M. Mony, premier conseiller.

Lu en audience publique le 22 octobre 2018.

Le rapporteur,

S. DEGOMMIER

Le président,

J-P. DUSSUET

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 17NT01401


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT01401
Date de la décision : 22/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUSSUET
Rapporteur ?: M. Sébastien DEGOMMIER
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : SARL ANTIGONE

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-10-22;17nt01401 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award