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24/09/2018 | FRANCE | N°17NT01370

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 24 septembre 2018, 17NT01370


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 4 novembre 2015 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a autorisé l'association calvadosienne de sauvegarde de l'enfant à l'adulte (ACSEA) à la licencier pour faute.

Par un jugement n°1502598 du 2 mars 2017, le tribunal administratif de Caen a rejeté la demande de MmeA....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 mai 2017, Mm

e C...A..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du trib...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 4 novembre 2015 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a autorisé l'association calvadosienne de sauvegarde de l'enfant à l'adulte (ACSEA) à la licencier pour faute.

Par un jugement n°1502598 du 2 mars 2017, le tribunal administratif de Caen a rejeté la demande de MmeA....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 mai 2017, Mme C...A..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen ;

2°) d'annuler la décision du ministre du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social du 4 novembre 2015 autorisant son licenciement ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il ne comporte pas la minute signée du rapporteur, du président et du greffier ;

- la décision qu'elle critique est insuffisamment motivée ;

- elle n'a pas commis de faute de nature à justifier le licenciement dont elle a fait l'objet ;

- en tout état de cause le doute doit lui profiter conformément à ce que prévoit l'article L.1235-1 du code du travail ;

- la faute qui lui est reprochée ne présente pas un caractère de gravité suffisant pour justifier son licenciement ;

- elle n'a été soumise à une interdiction d'exercice de la profession d'aide médico-psychologique que le 9 mai 2015, donc postérieurement à la décision du ministre et n'a donc pas continué à exercer son métier en méconnaissance de la peine qui lui a été infligée ;

- les faits pour lesquels elle avait fait l'objet d'une mise à pied ne pouvaient pas être pris en compte faute d'avoir été établis ;

- la sanction prononcée est en lien avec le mandat syndical qu'elle exerce, l'ACSEA ayant eu un traitement discriminatoire à son encontre.

Par un mémoire enregistré le 21 juillet 2017, le ministre du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient que les moyens invoqués par Mme A...ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 22 septembre 2017, l'association ACSEA, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête de Mme A...et à ce qu'il soit mis à la charge de cette dernière le versement d'une somme de 3000 € en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

L'association soutient que :

- le jugement du 2 mars 2017 n'est pas entaché d'irrégularité.

- les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées que l'affaire était susceptible, à compter du 1er août 2018, de faire l'objet d'une clôture d'instruction à effet immédiat en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance du 2 août 2018, la clôture d'instruction a été fixée au même jour en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Picquet,

- et les conclusions de M. Sacher, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. L'association calvadosienne pour la sauvegarde de l'enfant à l'adulte (ACSEA) a pour but l'accueil d'enfants, d'adolescents et d'adultes handicapés ou en difficulté d'insertion. Cette association a recruté Mme A...le 1er septembre 1993, pour exercer les fonctions d'aide médico-psychologique (AMP) tout d'abord au sein de la maison d'accueil spécialisé (MAS) de Ellon, puis, à compter d'octobre 2012 au foyer occupationnel pour adultes (FOA) " le Montmirel " situé à Saint-Loup-Hors. Mme A...a, par ailleurs, exercé un mandat de délégué syndical depuis l'année 1994 puis a été élue représentant personnel en 2012. Par un jugement en date du 25 avril 2012, le tribunal correctionnel de Caen, estimant que Mme A...s'était rendue coupable de violences sur une personne vulnérable sans qu'il en ait résulté une incapacité, a condamné la requérante à une interdiction d'exercer la profession d'aide médico-psychologique pendant une durée d'un an. Ce jugement a été confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Caen devenu définitif le 18 septembre 2013, le parquet général près la cour d'appel de Caen ayant procédé à l'exécution de la mesure d'interdiction d'exercer la profession d'AMP à compter du 9 mai 2015. Le 13 avril 2015, l'ACSEA a saisi l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation de licencier Mme A...en raison de deux comportements estimés fautifs résultant, pour le premier, d'une négligence caractérisée en ce qui concerne le suivi d'une résidente dont elle avait la charge, et, pour le second, d'un comportement déloyal concernant un défaut délibéré d'information de son employeur s'agissant de sa situation judiciaire. Par décision du 8 juin 2015, l'inspecteur du travail a refusé de délivrer l'autorisation sollicitée, estimant que la première faute alléguée à l'encontre de Mme A...n'était pas établie et que le deuxième fait, qui pouvait être qualifié de fautif, n'était pas d'une gravité suffisante pour justifier un licenciement pour motif disciplinaire. Par décision du 4 novembre 2015, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, saisi par l'association, a retiré la décision de l'inspecteur du travail et a autorisé le licenciement de MmeA.... Cette dernière relève appel du jugement en date du 2 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Caen, qu'elle avait saisi d'une demande d'annulation de cette décision, a rejeté cette demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient la requérante, la minute du jugement attaqué comporte effectivement la signature du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions l'article R. 741-7 du code de justice administrative ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision du 4 novembre 2015 du ministre du travail.

4. En second lieu, en application des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent d'une protection exceptionnelle, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail. En conséquence, lorsque leur licenciement est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale des intéressés. Par ailleurs, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par une faute commise dans le cadre de l'activité professionnelle, il appartient à l'inspecteur du travail, et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si cette faute est d'une gravité telle qu'elle justifie le licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé, des caractéristiques de l'emploi exercé à la date à laquelle elle est constatée et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont le salarié est investi.

5. Pour autoriser le licenciement de MmeA..., le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a estimé que Mme A...avait commis une faute en n'informant pas son employeur des suites données au pourvoi exercé devant la Cour de Cassation à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Caen confirmant la condamnation prononcée à son encontre par le tribunal correctionnel de Caen. Il est constant que Mme A...avait effectivement demandé à son conseil de se désister du pourvoi mentionné plus haut dès le 18 septembre 2013. Si le parquet général près la Cour d'appel de Caen n'a procédé à l'exécution de la sanction frappant Mme A...qu'à compter du 9 mai 2015 en informant officiellement cette dernière, à une date postérieure à la saisine de l'inspecteur du travail par l'ACSEA, qu'elle ne pouvait plus exercer les fonctions d'aide médico-psychologique pendant une durée d'une année à compter de cette date, cette circonstance ne peut venir justifier l'absence d'information de la part de MmeA..., pendant près de vingt mois, du dépôt d'une demande de désistement, quand bien même l'intéressée est demeurée dans l'ignorance des suites qui y avaient été données. De plus, comme l'indique le ministre dans la décision litigieuse, le comportement de Mme A...s'était déjà caractérisé par des faits manifestant une même volonté de dissimulation à l'égard de son employeur. Par suite, ce manquement à l'obligation de loyauté doit être regardé, ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges et le ministre en charge du travail, comme constituant une faute suffisamment grave de nature à justifier son licenciement.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme demandée par Mme A...au titre des frais liés au litige. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner la requérante à verser à l'ACSEA la somme de 1 000 euros sur le même fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Mme A...versera à l'ACSEA la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A..., au ministre du travail et à l'association calvadosienne de sauvegarde de l'enfant à l'adulte.

Délibéré après l'audience du 7 septembre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Dussuet, président de chambre,

- M. Degommier, président-assesseur,

- Mme Picquet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 septembre 2018.

Le rapporteur,

P. PICQUETLe président,

J-P. DUSSUET

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre du travail en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT01370


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT01370
Date de la décision : 24/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUSSUET
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : SELARL DURAND LOYGUE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-09-24;17nt01370 ?
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