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13/07/2018 | FRANCE | N°15NT00012

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 13 juillet 2018, 15NT00012


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Les amis des chemins de ronde du Morbihan " a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 24 avril 2013 par lequel le préfet du Morbihan a, en application de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, autorisé le président de la communauté d'agglomération " Vannes agglo " à réaliser divers ouvrages liés à la création d'une base nautique au lieu-dit " Toulindac " sur le territoire de la commune de Baden.

Par un jugement n° 1402072 du 6 novembre 2014,

le tribunal administratif de Nantes a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Les amis des chemins de ronde du Morbihan " a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 24 avril 2013 par lequel le préfet du Morbihan a, en application de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, autorisé le président de la communauté d'agglomération " Vannes agglo " à réaliser divers ouvrages liés à la création d'une base nautique au lieu-dit " Toulindac " sur le territoire de la commune de Baden.

Par un jugement n° 1402072 du 6 novembre 2014, le tribunal administratif de Nantes a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 5 janvier 2015, 24 février 2017, 14 septembre 2017 et 2 octobre 2017 ainsi qu'un mémoire récapitulatif, enregistré le 24 avril 2018, la communauté d'agglomération " Vannes agglo ", représentée par MeC..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement du 6 novembre 2014 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) de rejeter la demande présentée par l'association " Les amis des chemins de ronde du Morbihan " devant le tribunal administratif de Nantes ;

3°) de mettre à la charge de l'association " Les amis des chemins de ronde du Morbihan " une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de l'association dirigée contre l'arrêté du 24 avril 2013 du préfet du Morbihan était irrecevable compte tenu du caractère superfétatoire de cet acte et du défaut d'intérêt à agir de l'association ;

- le moyen retenu par le tribunal pour annuler l'arrêté litigieux était inopérant dès lors, d'une part, que le projet entre dans le champ d'application de l'article L. 146-8 du code de l'urbanisme qui permet de déroger à l'article L. 146-6 du même code et, d'autre part, que les règles d'urbanisme ne sont pas opposables aux autorisations délivrées au titre de la loi sur l'eau ;

- au demeurant, la seule décision de justice exécutoire à la date de l'arrêté contesté avait implicitement mais nécessairement considéré que le lieu d'implantation du projet ne constituait pas un espace remarquable au sens de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme ;

- c'est à tort que les premiers juges ont fait une application directe de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme dès lors que c'est au regard du schéma de mise en valeur de la mer du golfe du Morbihan, qui comporte des dispositions suffisamment précises quant aux modalités d'application de cet article et des suivants et est compatible avec la loi " Littoral ", que la légalité de l'autorisation contestée devait être appréciée ; le projet litigieux est conforme aux prescriptions du schéma de mise en valeur de la mer ; au surplus, l'emprise du projet est incluse dans le périmètre du schéma de cohérence territoriale du Pays de Vannes, lequel prévoit précisément le projet de base nautique ;

- alors que le tribunal ne pouvait se borner, pour retenir la qualification d'espace remarquable, à déduire cette qualification de l'arrêt de la cour du 28 juin 2013 relatif à la légalité du plan local d'urbanisme de Baden, lequel n'a pas d'autorité de la chose jugée dans le cadre du présent litige, le site d'implantation du projet n'est remarquable ni au titre de sa flore, ni au titre de sa faune, ni au titre des habitats terrestres ;

- c'est à tort que, pour apprécier la légalité du projet au regard du régime des espaces littoraux remarquables, le tribunal l'a examiné dans son ensemble ;

- les moyens invoqués en première instance par l'association ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mai 2015, ainsi qu'un mémoire récapitulatif, enregistré le 3 mai 2018, l'association " Les amis des chemins de ronde du Morbihan ", représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la communauté d'agglomération " Vannes agglo " d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête d'appel est irrecevable ; il n'est pas justifié de l'autorisation donnée au président de la communauté d'agglomération pour relever appel du jugement du tribunal administratif de Nantes ;

- les moyens de la communauté d'agglomération ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, elle entend se prévaloir de l'intégralité de ses écritures de première instance.

Par des mémoires, enregistrés le 23 août 2017 et le 4 mai 2018, le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire conclut à l'annulation du jugement du 6 novembre 2014 du tribunal administratif de Nantes et au rejet de la demande présentée par l'association " Les amis des chemins de ronde du Morbihan " devant le tribunal administratif de Nantes.

Il soutient que :

- les premiers juges ont insuffisamment motivé leur décision en ne précisant pas en quoi le lieu d'implantation de la base nautique pouvait être qualifié d'espace remarquable au sens de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme ni pour quelles raisons les aménagements envisagés ne pouvaient être qualifiés de légers ;

- en application des dispositions de l'article L. 146-8 du code de l'urbanisme, le projet n'est pas soumis à l'article L. 146-6 de ce code dès lors qu'il a pour objet de garantir la sécurité maritime et que la localisation retenue répond à une nécessité technique impérative ;

- en tout état de cause, la décision litigieuse ne méconnaît pas l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme,

- le code de l'environnement,

- la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983,

- le décret n° 86-1252 du 5 décembre 1986,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bougrine,

- les conclusions de M. Derlange, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant la communauté d'agglomération " Vannes agglo " et de MmeB..., représentant l'association " Les amis des chemins de ronde du Morbihan ".

1. Considérant que la communauté d'agglomération " Vannes agglo " relève appel du jugement du 6 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de l'association " Les amis des chemins de ronde du Morbihan ", l'arrêté du 24 avril 2013 du préfet du Morbihan autorisant, en application de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, la réalisation de divers ouvrages liés à la création d'une base nautique, au lieu-dit " Toulindac ", sur le territoire de la commune de Baden ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que le jugement attaqué indique que, s'agissant du terrain d'assiette du projet, la qualification de site remarquable au sens de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme et, s'agissant des aménagements projetés, l'absence de caractère léger au sens du 2° du même article et de l'article R. 146-2 du code de l'urbanisme résultent de l'autorité absolue de la chose jugée qui s'attache à l'arrêt de la présente cour du 28 juin 2013 annulant la délibération du 11 février 2008, par laquelle le conseil municipal de la commune de Baden a approuvé son plan local d'urbanisme, en tant qu'il crée, en vue de la construction de la base nautique, les emplacements réservés n° 9 et n° 28 ainsi que le secteur Uln à Toulindac ; que, eu égard au raisonnement suivi par les premiers juges, fondé sur l'autorité de la chose jugée et dont le bien fondé n'est pas susceptible d'entacher le jugement attaqué d'irrégularité, celui-ci doit, alors même qu'il ne précise pas en quoi le lieu d'implantation de la base nautique peut être qualifié d'espace remarquable ni pour quelles raisons les aménagements envisagés ne peuvent être qualifiés de légers, être regardé comme suffisamment motivé ;

Sur la recevabilité de la demande présentée par l'association " Les amis des chemins de ronde du Morbihan " devant le tribunal administratif de Nantes :

3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des statuts de l'association " Les amis des chemins de ronde du Morbihan " que celle-ci poursuit un objectif de " promotion et [de] défense des sentiers côtiers, passages piétons et chemins des communes littorales et communes d'estuaires, et la sauvegarde de leur environnement " dans le département du Morbihan ; qu'à cette fin, l'association s'est donnée pour objet de " veiller à la préservation de l'environnement des chemins " et sentiers côtiers, de " participer à la sauvegarde de leurs abords : murets, talus, arbres, haies ... " et de " veiller à la préservation du patrimoine naturel (faune, flore, richesses biologiques, équilibres écologiques) " et paysager de l'ensemble du territoire des communes littorales et des communes d'estuaire du Morbihan ;

4. Considérant, d'une part, que tant le champ géographique d'action de l'association, limité aux communes littorales et d'estuaire du Morbihan, que la nature des intérêts qu'elle défend, lesquels sont définis en des termes suffisamment précis et sont relatifs à la sauvegarde et à la valorisation des sentiers côtiers, lui confèrent un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de l'autorisation accordée au titre de la loi sur l'eau, sur le fondement de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, en vue de la réalisation d'une base nautique implantée en bordure immédiate du littoral et modifiant l'accès au sentier littoral ;

5. Considérant, d'autre part, que la seule circonstance que l'association n'ait manifesté une opposition au projet de base nautique, étudié depuis 1998, qu'à l'occasion de l'intervention des arrêtés des 24 avril et 7 juin 2013, portant, respectivement, autorisation de création de la base nautique au regard de l'article L. 214-3 du code de l'environnement et autorisation de déroger au principe d'interdiction des espèces protégées, ne permet pas de regarder son action contentieuse comme poursuivant non la réalisation de son objet statutaire mais l'intérêt personnel de son vice-président ;

6. Considérant qu'il suit de là que, alors même que l'aménagement du sentier des douaniers prévu par le projet litigieux contribuerait à la réalisation des intérêts défendus par l'association, la fin de non-recevoir opposée par la communauté d'agglomération et tirée du défaut d'intérêt à agir de l'association doit être écartée ;

7. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 214-3 du code de l'environnement : " I - Sont soumis à autorisation de l'autorité administrative les installations, ouvrages, travaux et activités susceptibles de présenter des dangers pour la santé et la sécurité publique, de nuire au libre écoulement des eaux, de réduire la ressource en eau, d'accroître notablement le risque d'inondation, de porter gravement atteinte à la qualité ou à la diversité du milieu aquatique, notamment aux peuplements piscicoles (...) III - Un décret détermine les conditions dans lesquelles les prescriptions prévues au I et au II sont établies, modifiées et portées à la connaissance des tiers (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 214-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : " La nomenclature des installations, ouvrages, travaux et activités soumis à autorisation ou à déclaration en application des articles L. 214-1 à L. 214-6 figure au tableau annexé au présent article. (...) Titre IV Impacts sur le milieu marin. Au sens du présent titre, le milieu marin est constitué par : (...) -les eaux côtières du rivage de la mer jusqu'à la limite extérieure de la mer territoriale ; (...) 4. 1. 2. 0. Travaux d'aménagement portuaires et autres ouvrages réalisés en contact avec le milieu marin et ayant une incidence directe sur ce milieu : 1° D'un montant supérieur ou égal à 1 900 000 euros (A) ; 2° D'un montant supérieur ou égal à 160 000 euros mais inférieur à 1 900 000 euros (D). (...) " ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la communauté d'agglomération " Vannes agglo " a décidé de créer une base nautique, au lieu-dit " Toulindac ", sur le territoire de la commune de Baden, en bordure du golfe du Morbihan ; que cette base nautique comporte la construction d'un bâtiment semi-enterré d'un étage, d'une surface de 992 mètres carrés, la restauration d'un ancien corps de ferme, d'une surface de 104 mètres carrés, et des travaux d'aménagement sur 1,32 hectare de terrains en vue de la réalisation d'aires de stationnement automobile, d'une aire de distribution de carburants, d'une zone de stockage des bateaux et de voies d'accès et de cheminements piétons ; que la communauté d'agglomération a présenté, au cours de l'année 2012, une demande d'autorisation au titre de la loi sur l'eau pour des ouvrages relevant de la rubrique 4.1.2.0 de la nomenclature ; que son projet porte sur la réhabilitation d'une cale de mise à l'eau " par création d'une nouvelle structure reposant sur des fondations indépendantes recouvrant de part et d'autre la rampe actuelle " ainsi que sur la réalisation d'un fossé recueillant les eaux pluviales d'une parcelle agricole voisine de 1,20 hectare, lesquelles seront rejetées en mer après franchissement d'un batardeau destiné à retenir les matières en suspension, et d'un ouvrage de collecte et de traitement des eaux pluviales rendu nécessaire par l'importante imperméabilisation des sols entraînée par l'opération, comprenant notamment deux bassins n° 1 et n° 3 dont les eaux se déversent dans le bassin de décantation aval n° 2 et seront rejetées dans le golfe du Morbihan, le point de sortie de l'ouvrage consistant en une canalisation installée sous la rampe de mise à l'eau ; qu'il résulte, également, de l'instruction, notamment, des photographies jointes au dossier de demande d'autorisation, que la cale de mise à l'eau est en contact avec le milieu marin, quand bien même son point le plus haut ne serait couvert par les plus hautes mers qu'en cas de perturbations météorologiques exceptionnelles ; que l'ouvrage de collecte et de traitement qui se termine par une canalisation installée sous cette cale est, également, en contact avec le milieu marin ; que, par ailleurs, il ne peut être sérieusement soutenu alors, en outre, que le document d'incidence joint à la demande d'autorisation mentionne les risques de pollution liés au rejet des eaux pluviales dans le golfe du Morbihan, que ces ouvrages n'auront pas une incidence directe sur ce milieu ; que, dans le document d'incidence, la communauté d'agglomération a évalué le coût total des travaux à la somme de 2 000 000 d'euros excédant ainsi le seuil fixé au 1° de la rubrique 4.1.2.0 susmentionnée de la nomenclature pour les ouvrages soumis à autorisation ; qu'à supposer, ainsi que le soutient la communauté d'agglomération, que le coût de certains ouvrages, pour la réalisation desquels elle avait néanmoins demandé une autorisation au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, ne doive pas être pris en compte, elle n'établit pas, par le seul devis sommaire relatif à la réhabilitation de la cale de mise à l'eau qu'elle produit, que le coût des ouvrages réalisés en contact avec le milieu marin et ayant une incidence directe sur ce milieu serait inférieur à celui de 160 000 euros fixé au 2° de la rubrique 4.1.2.0 de la nomenclature au delà duquel une déclaration était nécessaire et dont il n'est pas contesté qu'elle n'a pas été déposée ; que l'arrêté litigieux qui a pour objet, notamment, de définir les caractéristiques de la cale devant être édifiée et celles de la canalisation installée sous cette cale par laquelle sont rejetées, dans le golfe du Morbihan, les eaux issues du bassin de décantation aval n° 2, ainsi que les prescriptions relatives à l'entretien et la surveillance des ouvrages, n'est pas sans incidence juridique et ne saurait ainsi être regardé comme superfétatoire ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les fins de non-recevoir opposées à la demande de première instance doivent être écartées ;

Sur la légalité de l'arrêté du préfet du Morbihan du 24 avril 2013 :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 146-6, alors en vigueur, du code de l'urbanisme : " Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques (...) Toutefois, des aménagements légers peuvent y être implantés lorsqu'ils sont nécessaires à leur gestion, à leur mise en valeur notamment économique ou, le cas échéant, à leur ouverture au public. Un décret définit la nature et les modalités de réalisation de ces aménagements " ; qu'aux termes de l'article R. 146-1 du même code : " En application du premier alinéa de l'article L. 146-6, sont préservés, dès lors qu'ils constituent un site ou un paysage remarquable ou caractéristique du patrimoine naturel et culturel du littoral, sont nécessaires au maintien des équilibres biologiques ou présentent un intérêt écologique : (...) g) Les parties naturelles des sites inscrits ou classés en application de la loi du 2 mai 1930, modifiée (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 146-2 de ce code, alors en vigueur : " En application du deuxième alinéa de l'article L. 146-6, peuvent être implantés dans les espaces et milieux mentionnés à cet article, après enquête publique (...) les aménagements légers suivants, à condition que leur localisation et leur aspect ne dénaturent pas le caractère des sites, ne compromettent pas leur qualité architecturale et paysagère et ne portent pas atteinte à la préservation des milieux : / a) Lorsqu'ils sont nécessaires à la gestion ou à l'ouverture au public de ces espaces ou milieux, les cheminements piétonniers et cyclables et les sentes équestres ni cimentés, ni bitumés, les objets mobiliers destinés à l'accueil ou à l'information du public, les postes d'observation de la faune ainsi que les équipements démontables liés à l'hygiène et à la sécurité tels que les sanitaires et les postes de secours lorsque leur localisation dans ces espaces est rendue indispensable par l'importance de la fréquentation du public ; / b) Les aires de stationnement indispensables à la maîtrise de la fréquentation automobile et à la prévention de la dégradation de ces espaces par la résorption du stationnement irrégulier, sans qu'il en résulte un accroissement des capacités effectives de stationnement, à condition que ces aires ne soient ni cimentées ni bitumées et qu'aucune autre implantation ne soit possible ; / c) La réfection des bâtiments existants et l'extension limitée des bâtiments et installations nécessaires à l'exercice d'activités économiques ; d) A l'exclusion de toute forme d'hébergement et à condition qu'ils soient en harmonie avec le site et les constructions existantes : (...) dans les zones de pêche, de cultures marines ou lacustres, de conchyliculture, de saliculture et d'élevage d'ovins de prés salés, les constructions et aménagements exigeant la proximité immédiate de l'eau liés aux activités traditionnellement implantées dans ces zones, à la condition que leur localisation soit rendue indispensable par des nécessités techniques. " ;

11. Considérant que, pour annuler l'autorisation du préfet du Morbihan délivrée en application des dispositions, citées au point 6, de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, le tribunal a considéré que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées des articles L. 146-1 et R. 146-1 du code de l'urbanisme était fondé ;

En ce qui concerne l'opposabilité des dispositions de l'article 146-6 du code de l'urbanisme :

12. Considérant, en premier lieu, qu'en application de l'article L. 146-1, alors en vigueur, du code de l'urbanisme, les dispositions de l'article L. 146-6 de ce code sont applicables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, défrichements, plantations, installations et travaux divers ; que l'article L. 146-6, alors en vigueur, vise les décisions relatives à l'occupation et à l'utilisation des sols ; que l'arrêté préfectoral autorisant, en application des articles L. 214-1 et suivants du code de l'environnement, la réalisation de travaux est au nombre des décisions mentionnées par les dispositions de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme relatif à la préservation de certains espaces et milieux naturels ; que, par suite, la communauté d'agglomération n'est pas fondée à soutenir que le tribunal aurait, à tort, fait application de règles d'urbanisme inopposables à l'autorisation litigieuse délivrée au titre de la loi sur l'eau ;

13. Considérant, en deuxième lieu, que si l'article 57 de la loi du 7 janvier 1983, relatif aux schémas de mise en valeur de la mer, prévoit que ces documents " précisent les mesures de protection du milieu marin " et " peuvent [...] édicter des sujétions particulières intéressant les espaces maritime, fluvial ou terrestre attenant, nécessaires à la préservation du milieu marin et littoral ", il ne résulte ni de ces dispositions ni d'aucune autre que la légalité d'une autorisation délivrée sur le fondement de l'article L. 214-3 du code de l'environnement au regard des articles L. 146-6 et suivants du code de l'urbanisme doive s'apprécier au regard de ces schémas ; que le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme n'étaient pas, compte tenu de l'existence du schéma de mise en valeur de la mer du Golfe du Morbihan, approuvé en 2006, directement opposables à l'autorisation en litige doit être écarté ;

14. Considérant, en troisième lieu, que les autorisations de travaux et constructions délivrées en application de l'article L. 214-3 du code de l'environnement ne sont pas au nombre des documents et actes, limitativement énumérés à l'article L. 122-1-15 du code de l'urbanisme alors en vigueur et relevant d'une législation distincte, dont la légalité est subordonnée à leur compatibilité avec le schéma de cohérence territoriale ; que, par suite, la communauté d'agglomération n'est pas fondée à soutenir qu'en présence du schéma de cohérence territoriale du Pays de Vannes, les dispositions de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme n'étaient pas directement opposables à l'autorisation en litige ;

15. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 146-8, alors en vigueur, du code de l'urbanisme : " Les installations, constructions, aménagements de nouvelles routes et ouvrages nécessaires à la sécurité maritime et aérienne, à la défense nationale, à la sécurité civile et ceux nécessaires au fonctionnement des aérodromes et des services publics portuaires autres que les ports de plaisance ne sont pas soumis aux dispositions du présent chapitre lorsque leur localisation répond à une nécessité technique impérative. " ;

16. Considérant que le ministre et la communauté d'agglomération soutiennent que le projet litigieux entre dans le champ des prévisions de l'article L. 146-8 du code de l'urbanisme, alors en vigueur, permettant de déroger aux prescriptions de protection fixées à l'article L. 146-6 du même code dès lors qu'il est justifié par des considérations de sécurité et que sa localisation répond à une nécessité technique impérative ; que, toutefois, si ce projet a notamment pour objet de regrouper sur le site de Toulindac, lequel offre un espace à l'abri du trafic maritime, trois structures de loisirs préexistantes, dont l'une est exposée à des courants violents et à un trafic portuaire important, de substituer aux installations précaires et obsolètes existant sur le site des équipements adaptés à l'accueil du public, notamment au plan sanitaire, et de créer des voies de circulation permettant un accès sécurisé au site, il résulte de l'instruction que seule une partie des constructions et aménagements projetés répond, au regard de leur fonction, de leur ampleur et de leurs caractéristiques, à des considérations liées à la sécurité ; qu'en outre, il ne résulte d'aucun des éléments de l'instruction qu'une nécessité technique impérative justifierait que la réalisation d'aires de stationnement automobile et d'une zone de stockage hivernal des bateaux ainsi que l'édification d'une plateforme de nettoyage et d'entretien du matériel incluant des locaux destinés à garantir le stockage de certains produits polluants soient localisés à l'emplacement projeté ; que, dans ces conditions, le projet litigieux ne peut être regardé comme nécessaire à la sécurité civile et maritime au sens de l'article L. 146-8 du code de l'urbanisme ;

En ce qui concerne l'existence d'un espace remarquable et le défaut de caractère léger des travaux aménagements projetés :

17. Considérant que, par un arrêt n°11NT02579 du 28 juin 2013, la présente cour a annulé la délibération du 11 février 2008 approuvant le plan local d'urbanisme de la commune de Baden en tant qu'il crée les emplacements réservés n° 9 et n° 28 pour la réalisation de la base nautique au motif que le terrain d'assiette de ce projet était inclus au sein de la partie naturelle d'un site inscrit au sens des dispositions combinées des articles L. 146-6 et R. 146-1 du code de l'urbanisme et que les travaux envisagés ne pouvaient être regardés comme des aménagements légers au sens du 2° alinéa de l'article L. 146-6 et de l'article R. 146-2 du même code ;

18. Considérant, d'une part, que l'autorité de la chose jugée dont est revêtue l'annulation par le juge de l'excès de pouvoir d'un acte administratif est absolue ; qu'il s'ensuit que la communauté d'agglomération ne saurait utilement soutenir qu'en l'absence d'identité d'objet et d'identité de parties entre le présent litige et celui sur lequel a statué la cour dans son arrêt 28 juin 2013, les conditions posées par l'article 1355 du code civil ne seraient pas réunies ;

19. Considérant, d'autre part, qu'il ne résulte pas de l'instruction que des circonstances de droit ou de fait nouvelles seraient apparues postérieurement à l'approbation du plan local d'urbanisme dont la cour a prononcé l'annulation partielle ; qu'il n'est pas allégué que le projet de base nautique au regard duquel la cour a examiné la légalité de ce plan serait différent de celui soumis à l'appréciation du préfet du Morbihan dans le cadre de la demande d'autorisation présentée sur le fondement de l'article L. 214-3 du code de l'environnement ; qu'ainsi, les qualifications retenues par la cour dans les motifs de son arrêt du 28 juin 2013, qui constituent le soutien nécessaire de son dispositif, s'imposent ; qu'au demeurant, les terrains d'assiette du projet sont compris dans le périmètre du site classé du Golfe du Morbihan, lequel est composé de 20 300 hectares de terres situées en zone littorale du Golfe du Morbihan, caractérisées par une grande variété des milieux naturels d'exception, espace également considéré, pour partie, comme une zone d'intérêt communautaire pour la conservation des oiseaux dans la communauté européenne, inventoriée dans le cadre de la directive n° 12/43 du 21 mai 1992 du Conseil concernant la conservation des habitats naturels, dans un secteur dépourvu de constructions, à l'exception d'un bâtiment abritant le club nautique existant ; que le site d'implantation du projet présente ainsi le caractère d'une partie naturelle d'un site inscrit et constitue un site remarquable et caractéristique du patrimoine naturel du littoral breton au sens des dispositions de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme ; que le projet litigieux a pour objet la construction d'une base nautique en remplacement d'installations sommaires et provisoires utilisées par un club nautique ; qu'il consiste, notamment, en l'édification d'un bâtiment principal de trois niveaux, l'agencement d'aires de stationnement, dont une partie seulement doit être enherbée, de voies de circulation et de cheminements piétons, la réhabilitation d'une cale de mise à l'eau par la création d'une structure nouvelle reposant sur des fondations indépendantes, l'aménagement d'une plateforme de nettoyage et d'entretien du matériel, traitée en béton surfacé, et l'établissement d'une zone de stockage hivernal pour les bateaux ; que ces ouvrages, qui doivent être appréciés dans leur ensemble dès lors qu'ils ont fait l'objet d'une seule autorisation, ne peuvent être regardés comme relevant des aménagements légers énumérés à l'article R. 146-2 de ce code ;

20. Considérant qu'il suit de là que, alors même que le projet de base nautique est mentionné dans le schéma de mise en valeur de la mer du Golfe du Morbihan ainsi que dans le schéma de cohérence territoriale du pays de Vannes, l'autorisation délivrée par le préfet du Morbihan méconnaît les articles L. 146-6 et R. 146-1 du code de l'urbanisme ;

21. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la requête, que la communauté d'agglomération " Vannes agglo " n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté du 24 avril 2013 du préfet du Morbihan ;

Sur les frais liés au litige :

22. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'association " Les amis des chemins de ronde du Morbihan ", qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la communauté d'agglomération " Vannes agglo " demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de la communauté d'agglomération " Vannes agglo ", le versement de la somme de 1 500 euros que l'association " Les amis des chemins de ronde du Morbihan " demande au titre des frais de même nature qu'elle a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la communauté d'agglomération " Vannes agglo " est rejetée.

Article 2 : La communauté d'agglomération " Vannes agglo " versera à l'association " Les amis des chemins de ronde du Morbihan " une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté d'agglomération " Vannes agglo ", au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire et à l'association " Les amis des chemins de ronde du Morbihan ".

Délibéré après l'audience du 26 juin 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. Degommier, président-assesseur,

- Mme Bougrine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 juillet 2018.

Le rapporteur,

K. BOUGRINE Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15NT00012


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT00012
Date de la décision : 13/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : LEXCAP RENNES LAHALLE - ROUHAUD et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-07-13;15nt00012 ?
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