Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 15 juillet 2015 par lequel le maire de la commune de Mortain a instauré et réglementé une zone de rencontre dans le centre-ville de Mortain, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux.
Par un jugement n° 1600397 du 2 mars 2017, le tribunal administratif de Caen a rejeté la demande de M.B....
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 27 avril 2017 et le 16 février 2018, M. B..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) de surseoir à statuer dans l'attente de la réponse du maire de Mortain-Bocage à sa demande tendant à la suppression d'un dos d'âne à l'intersection de la rue du Couvent et de la rue de la 30ème Division Américaine ;
2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 2 mars 2017 ;
3°) d'annuler l'arrêté du maire de Mortain du 15 juillet 2015 et la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;
4°) d'enjoindre au maire de Mortain-Bocage de remplacer la barrière placée rue du Couvent par un arceau de sécurité, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Mortain-Bocage la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté a pour effet de restreindre l'accès à sa propriété et de modifier l'assiette de la voie publique, de sorte qu'il ne peut légalement être fondé sur les dispositions des articles L. 2213-1 à L. 2213-6 du code général des collectivités territoriales ;
- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, la barrière installée n'est pas amovible et elle porte atteinte à son aisance de voirie.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2017, la commune de Mortain-Bocage conclut au rejet de la requête et demande, d'une part que M. B...soit condamné à une amende de 3 000 euros en application de l'article R. 741-12 du code de justice administrative, et d'autre part que la somme de 3 225,20 euros soit mise à la charge de M. B...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés ne sont pas fondés ;
- la requête d'appel est abusive.
Par ordonnance du 8 mars 2018, prise en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative, la clôture d'instruction a été fixée avec effet immédiat.
Des pièces complémentaires, présentées pour M.B..., ont été enregistrées le 9 mars 2018.
Un mémoire, présenté pour la commune de Mortain Bocage, a été enregistré le 11 juin 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de la route ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rimeu,
- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,
- et les observations de Me Vautier, avocat de la commune de Mortain-Bocage.
1. Considérant que, par un arrêté du 15 juillet 2015, le maire de la commune de Mortain, devenue Mortain-Bocage, a délimité, dans le centre de la commune, une zone de rencontre comprenant la rue du Couvent, dans laquelle M. B...possède une propriété, et a prévu que, sauf prescriptions contraires, la circulation des véhicules dans les rues comprises dans cette zone s'effectuera en sens unique ; qu'une barrière a été placée en haut de la rue du Couvent afin de matérialiser la circulation à sens unique sur la portion de cette rue comprise entre la rue de la 30ème Division Américaine et la rue de Perrégaux ; que la demande de M.B..., formée le 23 octobre 2015, tendant à l'enlèvement de cette barrière et au retrait de l'arrêté du 15 juillet 2015, a été implicitement rejetée par le maire de Mortain-Bocage ; que M. B...relève appel du jugement du 2 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 juillet 2015 et de la décision implicite rejetant son recours gracieux ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est chargé (...) de la police municipale (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 2212-2 du même code : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment 1°) Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques (...) " ; qu'aux termes de l'article L.2213-1 du même code: " Le maire exerce la police de la circulation sur les routes nationales, les routes départementales et les voies de communication à l'intérieur des agglomérations, sous réserve des pouvoirs dévolus au représentant de l'Etat dans le département sur les routes à grande circulation (...). " ; qu'aux termes de l'article L. 2213-2 du même code : " Le maire peut, par arrêté motivé, eu égard aux nécessités de la circulation et de la protection de l'environnement : / 1° Interdire à certaines heures l'accès de certaines voies de l'agglomération ou de certaines portions de voie ou réserver cet accès, à certaines heures, à diverses catégories d'usagers ou de véhicules (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 110-2 du code de la route : " Pour l'application du présent code, les termes ci-après ont le sens qui leur est donné dans le présent article : (...) - zone de rencontre : section ou ensemble de sections de voies en agglomération constituant une zone affectée à la circulation de tous les usagers. Dans cette zone, les piétons sont autorisés à circuler sur la chaussée sans y stationner et bénéficient de la priorité sur les véhicules. La vitesse des véhicules y est limitée à 20 km/ h. Toutes les chaussées sont à double sens pour les cyclistes, sauf dispositions différentes prises par l'autorité investie du pouvoir de police. Les entrées et sorties de cette zone sont annoncées par une signalisation et l'ensemble de la zone est aménagé de façon cohérente avec la limitation de vitesse applicable. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 411-3-1 du même code : " Le périmètre des zones de rencontre et leur aménagement sont fixés par arrêté pris par l'autorité détentrice du pouvoir de police (...) Les règles de circulation définies à l'article R. 110-2 sont rendues applicables par arrêté de l'autorité détentrice du pouvoir de police constatant l'aménagement cohérent des zones et la mise en place de la signalisation correspondante " ;
3. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté litigieux, qui institue une zone de rencontre comprenant plusieurs rues de la commune, a été pris sur le fondement des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales, qui confèrent au maire la possibilité de faire usage de ses pouvoirs de police pour réglementer la circulation sur les voies publiques de sa commune, et sur celles des dispositions précitées du code de la route, visées par l'arrêté litigieux, qui définissent les zones de rencontre et renvoient, pour leur périmètre et leur aménagement, aux pouvoirs de police du maire ; qu'il suit de là que M. B...n'est pas fondé à soutenir que cet arrêté serait dépourvu de base légale ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la rue du Couvent est une rue de petite largeur, empruntée par de nombreux élèves d'un groupe scolaire situé à proximité ; que l'arrêté contesté, qui se borne à y limiter la vitesse de circulation des véhicules à 20 km/h et à instaurer un sens unique de circulation, sans porter atteinte au droit des riverains d'accéder à leur propriété, est donc proportionné aux nécessités de la sécurité publique ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'en application de l'article 4 de l'arrêté litigieux, une barrière a été installée en haut de la rue du Couvent, au croisement avec la rue de la 30ème division américaine, pour matérialiser le sens unique de circulation ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du constat d'huissier et des attestations du chef du centre de secours de Mortain et du directeur du groupe scolaire Sacré-Coeur, que cette barrière peut facilement être enlevée pour permettre le passage des véhicules de secours ; que la circonstance que les riverains de la rue du Couvent ne puissent pas ouvrir eux même cette barrière ne porte pas atteinte à leur droit d'accès à leur propriété, dès lors, ainsi qu'il a été dit, qu'ils peuvent y accéder facilement, en respectant le sens unique de circulation, par la rue Perregaux ; qu'il suit de là que M. B...n'est pas fondé à soutenir que la barrière, qui matérialise le sens unique instauré par l'arrêté litigieux, serait dépourvue de base légale et ne serait pas proportionnée aux objectifs de sécurité publique poursuivis ;
6. Considérant, enfin, que si un dos d'âne a été aménagé ultérieurement, à l'occasion de travaux, au croisement de la rue du Couvent et de la rue de la 30ème division américaine, cette circonstance, postérieure à l'arrêté et à la barrière en litige, est sans incidence sur leur légalité ; qu'en outre, et en tout état de cause, M. B...n'établit pas que seuls certains véhicules pourraient passer sur ce dos d'âne et que celui-ci aurait ainsi pour conséquence de transformer la rue du Couvent en impasse ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 2 mars 2017, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Mortain du 15 juillet 2015 et à ce qu'il soit enjoint à ce maire de remplacer la barrière par un arceau de sécurité ;
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
8. Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que par suite, les conclusions à fin d'injonction sous astreinte présentées par M. B...ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur l'application de l'article R. 741-12 du code de justice administrative :
9. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative, alors en vigueur : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3 000 euros " ; que la faculté prévue par ces dispositions constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions de la commune de Mortain-Bocage tendant à ce que M. B...soit condamné à une telle amende ne sont pas recevables ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Mortain-Bocage, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
11. Considérant, en revanche, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B...une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Mortain-Bocage et non compris dans les dépens ;
DECIDE
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : M. B...versera à la commune de Mortain-Bocage la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Mortain-Bocage tendant à l'application de l'article R. 741-2 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et à la commune de Mortain-Bocage.
Délibéré après l'audience du 19 juin 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Tiger Winterhalter, présidente-assesseure,
- Mme Rimeu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 juillet 2018.
Le rapporteur,
S. RIMEU
Le président,
L. LAINÉ
Le greffier,
V. DESBOUILLONS
La République mande et ordonne au préfet de la Manche en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT01338