Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les arrêtés du 29 mars 2017 par lesquels le préfet de la Sarthe a ordonné sa remise aux autorités italiennes et l'a assigné à résidence.
Par un jugement n° 1704089 du 12 mai 2017 le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté ces demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 19 juin 2017, M.A..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes du 12 mai 2017 ;
2°) d'annuler les arrêtés du préfet de la Sarthe du 29 mars 2017;
3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en qualité de demandeur d'asile, dans un délai de huit jours à compter d'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
en ce qui concerne la décision de remise aux autorités italiennes :
- elle n'est pas suffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut de base légale ;
- elle méconnait l'article 22-7 du règlement n° 603/2013
- elle méconnaît l'article 3-2 du même règlement et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
en ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :
- elle est entachée d'un vice de procédure car il n'a pas été mis à même de présenter des observations préalables ;
- elle est illégale à raison de l'illégalité de la décision portant réadmission vers l'Italie ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à la fréquence de l'obligation de pointage.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 juillet 2017, le préfet de la Sarthe conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 juillet 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n°603/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Rimeu a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.A..., ressortissant guinéen, a déposé une demande d'asile en France le 16 septembre 2016 ; que la consultation du fichier Eurodac a révélé que ses empreintes digitales avaient été relevées par les autorités italiennes le 21 juillet 2016 ; que la demande de reprise en charge de M. A...formée par le préfet de la Sarthe auprès des autorités italiennes le 22 septembre 2016 a été implicitement acceptée ; que le 29 mars 2017, le préfet de la Sarthe a décidé de remettre M. A...aux autorités italiennes et l'a assigné à résidence ; que M. A... relève appel du jugement du 12 mai 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision de remise aux autorités italiennes ;
2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté du 29 mars 2017 vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la convention de Genève et le protocole de New-York, le règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il précise que les empreintes digitales ont été relevées en Italie et que M. A...a été enregistré dans ce pays comme demandeur d'asile ; que cet arrêté est ainsi suffisamment motivé en droit ; que le préfet de la Sarthe fait état de la situation personnelle et familiale de M. A...et précise qu'il n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Italie et qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que dans ces conditions, la décision contestée est également suffisamment motivée en fait ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que la décision contestée est fondée sur le règlement n° 604/2013, qui fait, en principe, de l'Etat dans lequel une personne a en premier lieu déposé une demande d'asile, l'Etat responsable de celle-ci ; que par suite, le moyen tiré de ce qu'elle serait dépourvue de base légale doit être écarté ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Sarthe a saisi les autorités italiennes d'une demande de prise en charge de M. A...le 22 septembre 2016 ; qu'en application du 7. de l'article 22 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, en l'absence de réponse explicite dans le délai de deux mois applicable en l'espèce, un accord implicite est intervenu au terme de ce délai ; que la circonstance que la décision contestée mentionne à tort un accord implicite des autorités italiennes le 17 février 2017 alors que celui-ci était intervenu, eu égard à la date de saisine, dès le 22 novembre 2016, est sans incidence sur la légalité de la décision contestée du 29 mars 2017 dès lors qu'à cette date, le délai de six mois prévu par l'article 29 du règlement n° 604/2013 n'était pas expiré ;
5. Considérant, enfin, qu'aux termes du 2 de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable " ;
6. Considérant que si l'intéressé fait état de la situation exceptionnelle dans laquelle se trouvent plusieurs Etats membres de l'Union européenne, notamment l'Italie, confrontés à un afflux sans précédent de réfugiés, il n'établit toutefois pas, par les pièces qu'il produit, que cette circonstance exposerait sa demande d'asile à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ; qu'il ne démontre pas davantage qu'il serait personnellement exposé à des risques de traitements inhumains ou dégradants en Italie, alors que ce pays est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il est constant, en outre, que le requérant n'entre pas dans le champ du dispositif dérogatoire de relocalisation de l'examen des demandes d'asile prévu par la décision (UE) 2015/1601 du Conseil européen du 22 septembre 2015 instituant des mesures provisoires en matière de protection internationale au profit de l'Italie et de la Grèce ; qu'ainsi, doivent être écartés les moyens tirés de ce que la décision contestée aurait été prise en méconnaissance des dispositions du 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :
7. Considérant, d'une part, qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'obligeait le préfet de la Sarthe à informer M.A..., préalablement à la décision d'assignation à résidence, de son intention de prendre à son encontre une telle décision ; qu'en tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que M. A...a reçu, le 20 septembre 2016, à l'issue de l'entretien à la préfecture, l'ensemble des informations relatives à sa situation de demandeur d'asile sous procédure Dublin ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision d'assignation à résidence serait entachée d'un vice de procédure, ne peut qu'être écarté ;
8. Considérant, d'autre part, qu'il résulte des points 2 à 6 du présent arrêt que M. A...n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision ordonnant sa remise aux autorités italiennes ;
9. Considérant, enfin, qu'en vertu de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'étranger astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés par l'autorité administrative doit se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie ; qu'aux termes de l'article R. 561-2 du même code : " L'autorité administrative détermine le périmètre dans lequel l'étranger assigné à résidence en application de l'article L. 561-1 (...) est autorisé à circuler muni des documents justifiant de son identité et de sa situation administrative et au sein duquel est fixée sa résidence. Elle lui désigne le service auquel il doit se présenter, selon une fréquence qu'il fixe dans la limite d'une présentation par jour, en précisant si cette obligation s'applique les dimanches et les jours fériés ou chômés (...) " ;
10. Considérant que l'arrêté assignant M. A...à résidence lui impose de se présenter chaque semaine, les lundis, mercredis et vendredis, à 8 h 30 au commissariat central du Mans ; que le requérant, qui se borne à soutenir que cette obligation de pointage trois fois par semaine entrave sa liberté, n'invoque toutefois aucune difficulté particulière ou l'existence d'une activité qui serait spécialement affectée par cette sujétion ; que, dans ces conditions, l'obligation de présentation mise à sa charge n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Sarthe du 29 mars 2017 ; que par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Une copie en sera transmise pour information au préfet de la Sarthe.
Délibéré après l'audience du 5 juin 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Tiger-Winterhalter, présidente,
- Mme Rimeu, premier conseiller,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 juin 2018.
Le rapporteur,
S. RimeuLa présidente,
N. Tiger-Winterhalter
Le greffier,
M. B...
La présidente,
N. TIGER-WINTERHALTER
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°17NT018972