La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/06/2018 | FRANCE | N°17NT00588

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 25 juin 2018, 17NT00588


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Globale Construction a demandé au tribunal administratif de Caen :

- de prononcer la résiliation du contrat conclu le 27 mars 2015 entre l'office public de l'habitat Calvados Habitat et la société Quille Construction en vue de la construction de trente logements collectifs sur la commune de Mondeville ;

- de condamner l'office public de l'habitat Calvados Habitat à lui verser la somme de 113 599 euros, ou subsidiairement de 32 059 euros, ces sommes étant assorties des intérêts et

de leur capitalisation.

Par un jugement n°1501221 du 12 décembre 2016, le tribunal...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Globale Construction a demandé au tribunal administratif de Caen :

- de prononcer la résiliation du contrat conclu le 27 mars 2015 entre l'office public de l'habitat Calvados Habitat et la société Quille Construction en vue de la construction de trente logements collectifs sur la commune de Mondeville ;

- de condamner l'office public de l'habitat Calvados Habitat à lui verser la somme de 113 599 euros, ou subsidiairement de 32 059 euros, ces sommes étant assorties des intérêts et de leur capitalisation.

Par un jugement n°1501221 du 12 décembre 2016, le tribunal administratif de Caen a rejeté la demande de la société Globale Construction.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 février 2017 et le 19 février 2018, la société Globale Construction, représentée par Me B...du Tertre, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 12 décembre 2016 ;

2°) de condamner l'office public de l'habitat Calvados Habitat à lui verser la somme de 113 599 euros, ou subsidiairement de 32 059 euros, ces sommes étant assorties des intérêts et de leur capitalisation ;

3°) de mettre à la charge de l'office public de l'habitat Calvados Habitat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les documents de la consultation étaient contradictoires quant au délai d'exécution ;

- son offre et celle de la société attributaire étaient identiques quant au délai global d'exécution, de sorte qu'elle aurait du obtenir la même note pour ce sous critère, soit 10/12, ce qui porte sa note globale à 96,5 contre 95,5 pour la société attributaire ;

- cette irrégularité, qui l'a privée d'une chance sérieuse d'emporter le marché, lui ouvre droit à indemnisation de son manque à gagner ;

- subsidiairement, elle n'était pas dépourvue de toute chance d'emporter le marché et doit donc être indemnisée des frais de présentation de son offre.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juillet 2017, l'office public de l'habitat Calvados Habitat conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de la société Globale Construction la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- ainsi que l'a jugé le TA, le délai global d'exécution proposé par l'attributaire était inférieur à celui proposé par la société Globale Construction, de sorte que la procédure d'attribution du marché n'est entachée d'aucune irrégularité ;

- les indemnités demandées ne sont pas justifiées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juillet 2017, la société Quille Construction, dénommée désormais Bouygues Bâtiment Grand Ouest, conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la société Globale Construction au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- même en présence d'irrégularités, le juge du contrat peut ne pas prononcer la résiliation ;

- le moyen tiré de la prétendue contradiction des documents de la consultation est inopérant et non fondé ;

- la notation du sous-critère " optimisation des délais " n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rimeu

- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,

- et les observations de Me B...du Tertre, avocat de la société Globale Construction et celles de Me Cano, avocat de la société Bouygues Bâtiment Grand Ouest.

1. Considérant que par un avis d'appel public à la concurrence publié le 10 octobre 2014, l'office public de l'habitat Calvados Habitat a lancé une procédure simplifiée en vue de la construction de trente logements collectifs sur le territoire de la commune de Mondeville ; que le 3 mars 2015, la société Globale Construction a été informée du rejet de son offre et de l'attribution du marché à la société Quille Construction, dénommée désormais Bouygues Bâtiment Grand Ouest ; que le contrat entre cette société et Calvados Habitat a été signé le 27 mars 2015 ; que par un jugement du 12 décembre 2016, le tribunal administratif de Caen a rejeté la demande de la société Globale Construction tendant à la résiliation de ce contrat et à la condamnation de Calvados Habitat à lui verser la somme de 113 599 euros, ou à défaut de 32 059 euros, en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait du rejet irrégulier de son offre ; que la société Globale Construction relève appel de ce jugement, mais ne reprend en appel que ses conclusions indemnitaires ;

2. Considérant que lorsqu'une entreprise candidate à l'attribution d'un marché public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce dernier, il appartient au juge de vérifier d'abord si l'entreprise était ou non dépourvue de toute chance de remporter le marché ; que, dans l'affirmative, l'entreprise n'a droit à aucune indemnité ; que, dans la négative, elle a droit en principe au remboursement des frais qu'elle a engagés pour présenter son offre ; qu'il convient ensuite de rechercher si l'entreprise avait des chances sérieuses d'emporter le marché ; que, dans un tel cas, l'entreprise a droit à être indemnisée de son manque à gagner, incluant nécessairement, puisqu'ils ont été intégrés dans ses charges, les frais de présentation de l'offre qui n'ont donc pas à faire l'objet, sauf stipulation contraire du contrat, d'une indemnisation spécifique ;

3. Considérant que l'article 3.5 du règlement de la consultation consacré au délai d'exécution indique : " Le délai global des travaux est de 16 mois à partir de la date de l'ordre de service prescrivant le démarrage des travaux. " ; que l'article 4.1. du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) intitulé " délai d'exécution " stipule : " (...) A compter de la date fixée par l'ordre de service général N° 1 fixant le commencement des travaux, le délai global est de 16 mois inclus 10 jours d'intempéries et les périodes de congés payés. (...) Il est précisé pour l'application de l'article 19.1.1 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicable aux marchés publics de travaux, que les délais stipulés ci-dessus sont indépendants de la période de préparation, en ce sens que leur point de départ peut se situer à l'intérieur ou à l'extérieur de cette période. (...) " ; que l'article 19.1.1. du CCAG applicable au marché en vertu de l'article 2 du CCAP dispose : " Le délai d'exécution du marché comprend la période de préparation définie à l'article 28.1 et le délai d'exécution des travaux défini ci-dessous. Un ordre de service précise la date à partir de laquelle démarre la période de préparation. " ; que l'article 8.1. du même CCAP stipule : " Pour l'application de l'article 28-1 du CCAG, il est précisé qu'il y a une période de préparation d'une durée de 1 mois qui est indépendante du délai d'exécution des travaux. " ;

4. Considérant, d'une part, qu'il résulte des stipulations précitées que le marché prévoit un délai d'exécution des travaux ou délai global des travaux de 16 mois, ainsi qu'une période de préparation d'un mois, et que ces deux délais, qui constituent ensemble le délai d'exécution du marché, sont indépendants l'un de l'autre de telle sorte que la période de préparation peut se dérouler entièrement avant le commencement des travaux ou être partiellement concomitante avec le délai d'exécution des travaux ; que le planning prévisionnel annexé au cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du marché, qui ne concerne, ainsi que l'indique son intitulé, que l' " exécution des travaux " et ne comprend donc pas la période de préparation, qui en est indépendante, n'est pas en contradiction avec le règlement de la consultation et le CCAP du marché ; que si ce planning a pu porter à confusion, d'une part, dans l'ordre des documents fixé par l'article 2 du règlement de la consultation, il arrivait après ce règlement et le CCAP du marché, et d'autre part, il appartenait à la société Globale Construction, le cas échéant, de demander des précisions sur la computation des différents délais ;

5. Considérant, d'autre part, que le mémoire technique du 25 septembre 2014 de la société Globale Construction indique " délai de période de préparation : 1 mois / délai d'exécution G.O. : 5 mois / délai d'exécution T.C.E. : 13 mois (...) " et le planning, qui y est joint, fait apparaître une période de préparation d'un mois puis une période d'exécution des travaux de 14 mois ; qu'après des échanges avec le maître d'ouvrage dans le cadre des négociations ouvertes avec les candidats, la société requérante a confirmé " ramener le délai d'exécution de 16 mois, précisé à l'article 4.1 du CCAP, à 14 mois. Ce délai englobe les tests d'infiltrométrie, les OPR, la réception des ouvrages ainsi que les mises en service suivantes : énergie, télévision, chaudières, contrôle d'accès. " ; qu'ainsi, si le mémoire technique de la société Globale Construction pouvait prêter à confusion quant aux délais proposés, son offre finale, qui a été notée par le maître d'ouvrage, proposait clairement, conformément au planning prévisionnel qui y était joint, un délai d'exécution des travaux de 14 mois, lequel n'incluait pas la période de préparation d'un mois ; que le mémoire technique de la société attributaire prévoyait une période de préparation de 2 mois et une période d'exécution des travaux de 12 mois ; qu'à l'issue des négociations menées avec Calvados Habitat, l'offre finale de la société Quille Construction, telle que notée par le maître d'ouvrage, prévoyait une période de préparation d'un mois et un délai d'exécution des travaux de 13 mois ; qu'ainsi, le délai d'exécution des travaux de la société attributaire était inférieur d'un mois à celui proposé par la société requérante ; qu'il suit de là qu'en attribuant une note de 10/12 à la société Bouygues Bâtiment Grand Ouest et une note de 8/12 à la société Globale Construction pour le sous critère relatif à l'optimisation des délais de réalisation du chantier, Calvados Habitat n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Globale Construction, qui n'a pas été irrégulièrement évincée du marché signé le 27 mars 2015 entre Calvados Habitat et la société Bouygues Bâtiment Grand Ouest, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 12 décembre 2016, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la condamnation de Calvados Habitat à lui verser la somme de 113 599 euros, ou à défaut celle de 32 059 euros ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la cour fasse bénéficier la société Globale Construction, partie perdante, du paiement par Calvados Habitat des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige ;

8. Considérant en revanche qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Globale Construction le versement à l'office public de l'habitat Calvados Habitat et à la société Bouygues Bâtiment Grand Ouest de la somme de 750 euros chacun au titre des frais engagés par eux et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Globale Construction est rejetée.

Article 2 : La société Globale Construction versera 750 euros à l'office public de l'habitat Calvados Habitat et 750 euros à la société Bouygues Bâtiment Grand Ouest au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Globale Construction, à la société Bouygues Bâtiment Grand Ouest et à l'office public de l'habitat Calvados Habitat.

Délibéré après l'audience du 5 juin 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Tiger-Winterhalter, présidente,

- Mme Rimeu, premier conseiller,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 juin 2018.

Le rapporteur,

S. RimeuLa présidente,

N. Tiger-Winterhalter

Le greffier,

M. A...

La République mande et ordonne au préfet du Calvados en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT00588


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT00588
Date de la décision : 25/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme TIGER-WINTERHALTER
Rapporteur ?: Mme Sophie RIMEU
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : COUETOUX DU TERTRE

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-06-25;17nt00588 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award