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30/03/2018 | FRANCE | N°17NT00772

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 30 mars 2018, 17NT00772


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Constructions B. Fournigault a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner le syndicat mixte intercommunal de réalisation et de gestion pour l'élimination des ordures ménagères de l'Est de la Sarthe (SMIRGEOMES) à lui verser la somme de 164 195, 35 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 juin 2014, avec capitalisation, au titre du solde du prix des travaux exécutés pour la modernisation de l'usine de traitement et stockage d'ordures ménagères à Ecorpain.>
Par un jugement n° 1407599 du 2 janvier 2017, le tribunal administratif de Nante...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Constructions B. Fournigault a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner le syndicat mixte intercommunal de réalisation et de gestion pour l'élimination des ordures ménagères de l'Est de la Sarthe (SMIRGEOMES) à lui verser la somme de 164 195, 35 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 juin 2014, avec capitalisation, au titre du solde du prix des travaux exécutés pour la modernisation de l'usine de traitement et stockage d'ordures ménagères à Ecorpain.

Par un jugement n° 1407599 du 2 janvier 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 1er mars 2017 et le 13 juillet 2017, la société Constructions B. Fournigault, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 2 janvier 2017 ;

2°) de condamner le SMIRGEOMES au paiement de la somme de 164 195,35 euros au titre du solde du prix des travaux sous-traités dans le cadre de l'opération de modernisation de l'usine de traitement et stockage d'ordures ménagères à Ecorpain, et à titre subsidiaire à titre de dommages et intérêts ;

3°) d'assortir cette somme des intérêts au taux légaux à compter de la mise en demeure reçue le 3 juin 2014, avec capitalisation des intérêts à compter de la date d'enregistrement de la demande au greffe du tribunal administratif de Nantes ;

4°) de mettre à la charge du SMIRGEONES une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en tant que sous-traitant elle a droit au paiement des travaux supplémentaires à la réalisation de l'ouvrage, en dépit du caractère forfaitaire du marché ; les travaux de génie civil réalisés entrent dans le champ du lot technique qui lui a été donné en sous-traitance ; ils sont justifiés tant dans leur principe que dans leur montant ;

- le contrat de sous-traitance signé est bien en la possession du SMIRGEOMES, de même que l'acte de déclaration de sous-traitance qui a été régularisé ; elle justifie de la signature de ce contrat ; les conditions de paiement ont été agréées ; elle a participé au chantier en qualité de sous-traitant ce que le maitre d'ouvrage ne pouvait ignorer ; elle a bénéficié de paiement direct à ce titre ;

- à titre subsidiaire, le SMIRGEOMES avait nécessairement connaissance de sa présence sur le chantier ; en ne la mettant pas en demeure de régulariser, il a commis une faute ; il doit donc l'indemniser du dommage correspondant au montant des travaux supplémentaires non payés par l'entreprise principale sans pouvoir opposer le caractère forfaitaire du marché ;

- elle est en droit, à titre plus subsidiaire, d'être indemnisée sur le fondement de l'enrichissement sans cause du maitre de l'ouvrage.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 1er juin 2017 et 28 juillet 2017, le SMIRGEOMES, représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête et demande en outre qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la société Constructions B. Fournigault au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la demande de première instance, introduite plus de deux mois après la notification de la décision de rejet, était tardive et par suite irrecevable ;

- la société Constructions B. Fournigault ne peut invoquer la responsabilité délictuelle du SMIRGEOBMES, dès lors que cette cause juridique a été invoquée au-delà du délai de recours contentieux ;

- la société Constructions B. Fournigault ne peut fonder sa demande sur l'enrichissement sans cause du maître d'ouvrage dès lors qu'il s'agit d'une cause juridique en appel ;

- les autres moyens soulevés par la société Constructions B. Fournigault ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- la loi n°75-1334 du 31 décembre 1975 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Allio-Rousseau,

- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant le syndicat mixte intercommunal de réalisation et de gestion pour l'élimination des ordures ménagères de l'Est de la Sarthe.

1. Considérant que le syndicat mixte intercommunal de réalisation et de gestion pour l'élimination des ordures ménagères de l'Est de la Sarthe (SMIRGEOMES) est un établissement public en charge d'une mission de collecte et de traitement de déchets sur les territoires de l'est du département de la Sarthe ; que, dans le cadre de ses compétences, le SMIRGEOMES exploite un centre de stockage de déchets dans la commune d'Ecorpain, au lieu-dit le Ganotin ; qu'en 2010 il a décidé de procéder à des travaux de modernisation de ce centre de stockage ; qu'il a confié la conception et la réalisation des travaux au groupement d'entreprise " Bio Vea72 " ayant pour mandataire la société Bioreva ; que cette dernière a confié à la société Constructions B. Fournigault, exerçant alors sous l'enseigne Elyssa, les travaux de génie civil et second oeuvre, ayant notamment pour objet le coulage de fondation de gros oeuvre par l'injection de béton dans l'assise du sol ; que se prévalant de sa qualité de sous-traitant, la société Constructions B. Fournigault a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner le SMIRGEOMES à lui verser la somme de 164 195, 35 euros, au titre du solde du prix des travaux supplémentaires et indispensables qu'elle a dû exécuter ; qu'elle relève appel du jugement du 2 janvier 2017 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande ;

Sur les conclusions indemnitaires :

2. Considérant, en premier lieu, qu'en application des dispositions combinées des articles 3 et 6 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, le paiement direct du sous-traitant par le maître de l'ouvrage, pour la part du marché dont il assure l'exécution, est subordonné à la double condition que, sur la demande de l'entrepreneur principal, le sous-traitant ait été "accepté" par le maître de l'ouvrage et que les conditions de paiement du contrat de sous-traitance aient été "agréées" par ce dernier ; que la société Bioreva, qui avait conclu avec le SMIRGEOMES un marché de conception, construction-modernisation des installations du centre de stockage de déchets sis à Ecorpain, a sous-traité l'exécution des travaux de génie civil à la société Constructions B. Fournigault ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la société Bioreva a présenté au maître d'ouvrage une demande d'acceptation de la société Constructions B. Fournigault, ni une demande d'agrément des conditions de paiement prévues au contrat de sous-traitance dont un exemplaire signé est produit pour la première fois en appel ; que la société requérante ne justifie pas avoir effectué les démarches afin de régulariser sa situation, notamment par l'envoi d'une déclaration de sous-traitance au demeurant établie postérieurement à la date de réception des travaux ; qu'elle s'est bornée à demander au SMIRGEOMES le règlement de ses prestations le 27 mai 2014, soit plus d'un an après la réception des travaux et plus de deux ans après leur exécution ; que, dans ces conditions, et alors même que le SMIRGEOMES aurait effectué des paiements des travaux réalisés par elle, la société Constructions B. Fournigault, qui ne remplit pas les deux conditions fixées par les articles 3 et 6 de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, ne peut prétendre au paiement direct par le SMIRGEOMES des travaux supplémentaires qu'elle a exécutés ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que le maître d'ouvrage qui, ayant eu connaissance d'une sous-traitance irrégulière, s'abstient de toute mesure propre à y mettre fin conformément aux dispositions de l'article 14-1 de la même loi, commet une faute de nature à engager sa responsabilité ; que la société Constructions B. Fournigault soutient que le SMIRGEOMES a commis une faute de nature à engager sa responsabilité à son égard dès lors qu'il avait connaissance de son intervention sur le chantier du centre de déchets ; que, toutefois, le fait qu'un représentant du SMIRGEOMES a participé à trois réunions de chantier les 20 septembre, 15 novembre et 20 décembre 2011, en présence de représentants de la société Constructions B. Fournigault, ne suffit pas à prouver que le maître d'ouvrage aurait été informé des conditions exactes de son intervention et de la nature exacte des liens l'unissant à l'entrepreneur principal ; qu'il n'est pas établi que le SMIRGEOMES ait eu connaissance de la nature de l'intervention de la société requérante avant le 27 janvier 2012, date à laquelle le titulaire du marché l'a informé des coûts supplémentaires de génie civil en raison des quantités supplémentaires de gros béton injectées par son " sous-traitant Elyssa " à l'occasion des travaux de réalisation des fondations de gros oeuvre au mois de septembre 2011 ; que ces seuls éléments ne sauraient suffire à établir que le SMIRGEOMES était suffisamment informé de la nature des liens de la société Constructions B. Fournigault avec l'entreprise principale pour que son abstention à diligenter la régularisation de la situation de ce sous-traitant puisse être regardée comme fautive ;

4. Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort pas des écritures de première instance de la société requérante que celle-ci avait également fondé sa demande devant le tribunal administratif sur l'enrichissement sans cause du SMIRGEOMES ; que l'invocation de cette cause juridique, nouvelle en appel et qui n'est pas d'ordre public, n'est pas recevable ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoins de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance, que la société Constructions B. Fournigault n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que le SMIRGEOMES, qui n'est pas la partie perdante, verse à la société Constructions B. Fournigault une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'en revanche il y a lieu de faire droit aux conclusions présentées par le SMIRGEOMES sur le même fondement et de mettre à la charge de la société Constructions B. Fournigault une somme de 1 500 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Constructions B. Fournigault est rejetée.

Article 2 : La société Constructions B. Fournigault versera au syndicat mixte intercommunal de réalisation et de gestion pour l'élimination des ordures ménagères de l'Est de la Sarthe une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Constructions B. Fournigault et au syndicat mixte intercommunal de réalisation et de gestion pour l'élimination des ordures ménagères de l'Est de la Sarthe.

Délibéré après l'audience du 13 mars 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Rimeu, premier conseiller,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 mars 2018.

Le rapporteur,

M-P. Allio-RousseauLe président,

L. Lainé

Le greffier,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au préfet de la Sarthe en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT00772


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT00772
Date de la décision : 30/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : SCP PIERRE LANDRY ET HELENE PAUTY

Origine de la décision
Date de l'import : 03/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-03-30;17nt00772 ?
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