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09/01/2018 | FRANCE | N°16NT02235

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 09 janvier 2018, 16NT02235


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours à l'encontre de la décision des autorités consulaires à Oran (Algérie) rejetant sa demande de visa dit " de retour ".

Par jugement n°1403766 du 5 juillet 2016, le tribunal administratif de Nantes a annulé cette décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'

entrée en France et a enjoint au ministre de l'intérieur de réexaminer la demande ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours à l'encontre de la décision des autorités consulaires à Oran (Algérie) rejetant sa demande de visa dit " de retour ".

Par jugement n°1403766 du 5 juillet 2016, le tribunal administratif de Nantes a annulé cette décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France et a enjoint au ministre de l'intérieur de réexaminer la demande de visa dans un délai de deux mois.

Procédure devant la cour :

Par un recours enregistré le 8 juillet 2016, le ministre de l'intérieur a demandé à la cour d'annuler ce jugement.

Le ministre soutient que le tribunal a commis une erreur de droit, M. A...ne bénéficiant d'aucun droit au séjour et ne pouvait donc bénéficier d'un visa dit " de retour ".

Vu le jugement attaqué ;

Par un mémoire en défense enregistré le 3 mars 2017, M.A..., représenté par Me B..., conclut au rejet du recours, à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de lui délivrer un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " ou à défaut, un visa dit " de retour ", et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement à son profit d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal n'a commis aucune erreur de droit, il était titulaire d'un récépissé valable jusqu'au 31 décembre 2013 et devait donc, sur ce fondement, se voir attribuer un visa dit " de retour " ;

- dès lors qu'un ressortissant étranger est titulaire d'un titre, quelle qu'en soit la nature, l'autorisant à séjourner en France, il lui est loisible de quitter le territoire national et, sans visa, d'y revenir tant que ce titre n'est pas expiré ;

- c'est à la date du 25 novembre 2013 qu'il convient de se placer pour apprécier sa situation et, à cette date et jusqu'au 31 décembre 2013, il était légitimement fondé à revenir en France ;

- l'arrêté du 8 janvier 2014 portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier.

M. A...a obtenu l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 décembre 2017.

Vu :

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêt n°C-606/10 du 14 juin 2012 de la Cour de Justice de l'Union européenne ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Pons, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.A..., ressortissant algérien, est entré sur le territoire français en 1999 muni d'un visa de court séjour et s'y est maintenu irrégulièrement ; qu'il a sollicité le 3 juillet 2013 du préfet de la Haute-Corse la délivrance d'un certificat de résidence d'un an sur le fondement des stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et obtenu la délivrance d'un récépissé le 1er octobre 2013, valable jusqu'au 31 décembre 2013 ; que le requérant est retourné en Algérie en octobre 2013 et a sollicité la délivrance d'un visa dit " de retour " le 25 novembre 2013 auprès des autorités consulaires à Oran ; que ces autorités consulaires ont rejeté la demande de visa de l'intéressé, décision confirmée par une décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France née le 30 mars 2014 ; que, saisi par M. A...d'une demande d'annulation de cette décision de la commission, le tribunal administratif de Nantes y a fait droit par un jugement du 5 juillet 2016 dont le ministre relève régulièrement appel ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 2 du règlement CE n° 562/2006 du parlement européen et du conseil du 15 mars 2006 : " Aux fins du présent règlement, on entend par : 15) " titre de séjour " : (...) b) tous les autres documents délivrés par un État membre aux ressortissants de pays tiers et leur autorisant le séjour ou le retour sur son territoire, à l'exception des titres temporaires délivrés au cours de l'examen d'une première demande de titre de séjour tel que visé au point a) ou au cours de l'examen d'une demande d'asile (...) " ; qu'aux termes de l'article 5 du même règlement, relatif aux conditions d'entrée pour les ressortissants de pays tiers : " 1. Pour un séjour n'excédant pas trois mois sur une période de six mois, les conditions d'entrée pour les ressortissants de pays tiers sont les suivantes : a) être en possession d'un document ou de documents de voyage en cours de validité permettant le franchissement de la frontière ; b) être en possession d'un visa en cours de validité si celui-ci est requis en vertu du règlement (CE) no 539/2001 du Conseil du 15 mars 2001 fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l'obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation, sauf s'ils sont titulaires d'un titre de séjour en cours de validité ; c) justifier l'objet et les conditions du séjour envisagé, et disposer des moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans le pays d'origine ou le transit vers un pays tiers dans lequel leur admission est garantie, ou être en mesure d'acquérir légalement ces moyens ; d) ne pas être signalé aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ; e) ne pas être considéré comme constituant une menace pour l'ordre public, la sécurité intérieure, la santé publique ou les relations internationales de l'un des États membres et, en particulier, ne pas avoir fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans les bases de données nationales des États membres pour ces mêmes motifs. (...) " ; qu'enfin aux termes de l'article 13 - paragraphe 1 - du même règlement, intitulé " Refus d'entrée " : " L'entrée sur le territoire des États membres est refusée au ressortissant de pays tiers qui ne remplit pas l'ensemble des conditions d'entrée, telles qu'énoncées à l'article 5, paragraphe 1, et qui n'appartient pas à l'une des catégories de personnes visées à l'article 5, paragraphe 4. (...) " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 311-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " La détention d'un récépissé d'une demande de délivrance ou de renouvellement d'un titre de séjour, d'un récépissé d'une demande d'asile ou d'une autorisation provisoire de séjour autorise la présence de l'étranger en France sans préjuger de la décision définitive qui sera prise au regard de son droit au séjour. Sauf dans les cas expressément prévus par la loi ou les règlements, ces documents n'autorisent pas leurs titulaires à exercer une activité professionnelle. (...) " ;

4. Considérant que dans un arrêt du 14 juin 2012, la Cour de justice de l'Union européenne a relevé que l'article 2 du règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 excluait expressément de la notion de titre de séjour les titres temporaires de séjour délivrés au cours de l'examen d'une première demande de titre de séjour ou au cours de l'examen d'une demande d'asile ; qu'elle a précisé que les règles relatives au refus d'entrée des ressortissants de pays tiers prévues à l'article 13 du règlement cité : " sont également applicables aux ressortissants de pays tiers soumis à l'obligation de visa qui souhaitent revenir par les frontières extérieures de l'espace Schengen dans l'Etat membre qui leur a délivré un titre temporaire de séjour, sans entrer à cet effet sur le territoire d'un autre Etat membre " ; que, dans ces conditions, M. A...ne pouvait, à la date de sa demande de visa, se prévaloir de la délivrance d'un récépissé valable jusqu'au 31 décembre 2013 au titre d'une première demande de certificat de résidence pour se voir attribuer un visa dit " de retour " de plein droit ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur le motif tiré de la délivrance au requérant d'un récépissé valable jusqu'au 31 décembre 2013 au titre d'une première demande de certificat de résidence pour annuler la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France en litige ;

6. Considérant qu'il y a lieu, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. A...au soutien de sa demande ;

7. Considérant, d'une part, que M. A...ne saurait utilement se prévaloir des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, qui fixe les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France, au soutien de ses conclusions en annulation dirigées contre la décision de refus de visa qui lui a été opposé ;

8. Considérant, d'autre part, que M. A...ne saurait davantage utilement soutenir devant la cour que l'arrêté du 8 janvier 2014 du préfet de Haute-Corse portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation pour contester la légalité de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours à l'encontre de la décision des autorités consulaires à Oran rejetant sa demande de visa dit de " retour " ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 30 mars 2014 ; que les conclusions à fin d'injonction présentées par M. A...ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

10. Considérant que les dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement à M. A...de la somme demandée par ce dernier au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°1403766 du 5 juillet 2016 du tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Nantes et les conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à M. C...A....

Délibéré après l'audience du 15 décembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président,

- M. Mony, premier conseiller,

- M. Pons, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 janvier 2018.

Le rapporteur,

F. PONS

Le président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°16NT02235


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT02235
Date de la décision : 09/01/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : SELARL SUI GENERIS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-01-09;16nt02235 ?
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