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29/12/2017 | FRANCE | N°16NT03756

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 29 décembre 2017, 16NT03756


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2016 du préfet d'Indre-et-Loire portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant son pays de renvoi.

Par un jugement n° 1601457 du 27 juillet 2016, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 novembre 2016, Mme C..., représentée par MeB..., demande

la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 27 juillet 2016 ;

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2016 du préfet d'Indre-et-Loire portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant son pays de renvoi.

Par un jugement n° 1601457 du 27 juillet 2016, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 novembre 2016, Mme C..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 27 juillet 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2016 ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, au préfet d'Indre-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont renversé la charge de la preuve en estimant que les éléments qu'elle avait apportés n'étaient pas de nature à contredire l'avis du médecin de l'agence régionale de santé alors qu'il incombait au préfet de démontrer l'existence de traitements appropriés dans son pays d'origine ;

- le préfet, qui s'est borné à suivre l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, a méconnu l'étendue de sa compétence et entaché son arrêté d'une erreur de droit ;

- l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que le système de santé de la République Démocratique du Congo n'est pas en mesure de prendre en charge des pathologies comme la sienne et qu'au surplus, elle ne dispose d'aucune ressource dans son pays d'origine pour assumer le coût de ce traitement ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la mesure où elle vit en France depuis 2 ans, y a tissé des liens personnels et n'a plus aucun contact avec ses deux filles restées en République Démocratique du Congo ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation de son pays de renvoi sont illégales à raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- la décision fixant son pays de renvoi est contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la mesure où règne en République Démocratique du Congo une insécurité permanente en raison de l'existence de groupes armés encore actifs.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 décembre 2016, le préfet d'Indre-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête est tardive ;

-les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 octobre 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Gélard a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que Mme C..., ressortissante de République Démocratique du Congo, relève appel du jugement du 27 juillet 2016 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 janvier 2016 du préfet d'Indre-et-Loire portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant son pays de renvoi ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé (...) " ;

3. Considérant que sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;

4. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

5. Considérant que, par un avis rendu le 9 décembre 2015, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de Mme C... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il existe un traitement approprié à cet état de santé dans son pays d'origine ; que le préfet d'Indre-et-Loire a refusé de délivrer le titre de séjour demandé au motif que l'intéressée ne remplissait pas les conditions prévues au 11° de l'article L. 313-11 ;

6. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas de l'arrêté contesté que le préfet n'aurait pas procédé à un examen complet de la situation de Mme C... et se serait estimé en situation de compétence liée vis-à-vis de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ; que par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 3 et 4, qu'en estimant que les justificatifs médicaux apportés par Mme C..., qui ne se prononçaient pas sur l'existence de traitements appropriés à ses pathologies dans son pays d'origine, n'étaient pas de nature à contredire l'avis du médecin de l'agence régionale de santé les premiers juges n'ont pas renversé la charge de la preuve ; que si l'intéressée soutient devant la cour que le système de santé de la République Démocratique du Congo n'est pas en mesure de prendre en charge des pathologies comme les siennes, le certificat du docteur Bénichou, psychiatre, en date du 18 août 2016 qu'elle produit, se borne à indiquer qu'elle est suivie depuis le mois de mars 2015 et qu'elle évoque de nombreuses violences subies dans son pays ; que cette pièce n'est toutefois pas suffisante à elle seule pour attester de l'impossibilité pour Mme C... de se rendre en République Démocratique du Congo et d'y poursuivre les traitements médicaux et le suivi psychologique nécessaires à son état de santé ; que par ailleurs, l'intéressée ne peut utilement se prévaloir de la circonstance, au demeurant non établie, qu'elle ne disposerait d'aucune ressource dans son pays d'origine pour assumer le coût de ce traitement ; que par suite, en refusant de lui délivrer un titre de séjour à raison de son état de santé le préfet d'Indre-et-Loire n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation ;

8. Considérant, en troisième lieu , qu'il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, les moyens tirés de ce que l'arrêté contesté serait contraire aux stipulations des articles 8 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que la requérante réitère en appel, sans apporter de précisions nouvelles ;

9. Considérant, en dernier lieu, que la décision de refus de titre de séjour n'étant pas illégale, le moyen tiré de ce que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation de son pays de renvoi seraient entachées d'illégalité à raison de l'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction, sous astreinte :

11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de Mme C..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au préfet d'Indre-et-Loire de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande, doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de Mme C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise au préfet d'Indre-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 12 décembre 2017 à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. Degommier, président-assesseur,

- Mme Gélard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 décembre 2017

Le rapporteur,

V. GELARDLe président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT03756


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT03756
Date de la décision : 29/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : SCP OMNIA LEGIS

Origine de la décision
Date de l'import : 09/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-12-29;16nt03756 ?
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