Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a confirmé l'ajournement à deux ans de sa demande de naturalisation.
Par un jugement n° 1407667 du 9 juin 2016, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 11 juillet 2016 et le 31 mai 2017, Mme A...C..., représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 9 juin 2016 ;
2°) d'annuler la décision du ministre ;
3°) d'enjoindre au ministre de faire droit à sa demande de naturalisation, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au profit de son avocat au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir le montant de la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Mme C...soutient que :
- la décision du ministre est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que, depuis sa régularisation, elle a toujours cherché à s'insérer, en réussissant à trouver des emplois successifs et en suivant une formation qualifiante ;
- le ministre n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;
- le niveau des revenus qu'elle parvient à se procurer ne doit pas constituer un critère déterminant ;
- le tribunal a jugé à tort que les circonstances qu'elle remplissait les conditions prévues aux articles 21-16 et suivants du code civil, n'avait pas fait l'objet d'une condamnation pénale et était bien intégrée à la société française étaient sans incidence sur la légalité de la décision attaquée.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 23 août 2016 et le 12 juin 2017, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Le ministre fait valoir qu'aucun des moyens d'annulation soulevés par la requérante n'est fondé.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 juillet 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le code civil ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Mony a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que MmeC..., ressortissante togolaise, relève régulièrement appel du jugement en date du 9 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation ;
Sur les conclusions en annulation :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé : " (...) Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte, notamment, le degré d'insertion professionnelle et le niveau et la stabilité de ses ressources ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour ajourner à deux ans la demande de naturalisation de MmeC..., le ministre chargé des naturalisations s'est fondé sur le motif tirés de ce que la requérante ne disposait pas de ressources " suffisantes et stables " ; que, selon les éléments fournis par l'intéressée à l'appui de sa demande de naturalisation formée en août 2013, les revenus dont a disposé en 2010, 2011 et 2012 MmeC..., qui a la charge de deux enfants, étaient particulièrement bas, s'élevant à un peu plus de 3 600 euros pour la meilleure de ces années ; que Mme C...n'exerçait elle-même en 2013 qu'un emploi à temps non complet faiblement rémunéré ; que la circonstance que l'intéressée se soit postérieurement inscrite à une formation qualifiante et ait finalement obtenu en 2016 le diplôme correspondant, même si elle atteste des mérites de Mme C...et de la réalité de sa volonté de parvenir à s'insérer économiquement, n'est pas de nature à remettre en cause la matérialité du constat alors opéré par le ministre d'une insuffisance d'autonomie matérielle de l'intéressée, ce motif étant de nature à justifier la décision de refus du ministre sans entacher celle-ci d'une erreur manifeste d'appréciation ;
4. Considérant, en second lieu, que si Mme C...soutient que le ministre ne s'est pas livré à une appréciation complète de sa situation personnelle en estimant que son intégration professionnelle était insuffisante, elle ne peut utilement se prévaloir du fait qu'elle remplissait les conditions lui permettant de présenter une demande de naturalisation, laquelle ne constitue aucunement un droit pour l' étranger qui la sollicite ; qu'il en va de même s'agissant de la durée de son séjour en France et du fait qu'elle ne se soit jamais fait connaître défavorablement précédemment ; que c'est à juste titre que le tribunal administratif a jugé sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ces circonstances ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme C..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions de l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de réexaminer sa demande ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que Mme C... demande au titre des frais exposés par elle non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2: Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C...et au ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur.
Délibéré après l'audience du 1er décembre 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- M. Mony, premier conseiller.
Lu en audience publique le 18 décembre 2017.
Le rapporteur,
A. MONY
Le président,
H. LENOIR
Le greffier,
F. PERSEHAYE
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16NT02255