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04/12/2017 | FRANCE | N°16NT01532

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 04 décembre 2017, 16NT01532


Vu les procédures suivantes :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...D...et Mme F...E...ont chacun demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 22 février 2012 par lequel le préfet du Finistère a autorisé la société Guerlesquin Bioénergies à exploiter une unité de méthanisation au lieu-dit Hent Troguic à Guerlesquin.

Par un jugement nos 1300237-1300238-1300239-1300241 du 11 mars 2016, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I) Par une requête et des mémoires enr

egistrés les 11 mai 2016, 6 juin 2017 et 21 juin 2017 sous le n° 16NT01532, M. C...A...D..., repré...

Vu les procédures suivantes :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...D...et Mme F...E...ont chacun demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 22 février 2012 par lequel le préfet du Finistère a autorisé la société Guerlesquin Bioénergies à exploiter une unité de méthanisation au lieu-dit Hent Troguic à Guerlesquin.

Par un jugement nos 1300237-1300238-1300239-1300241 du 11 mars 2016, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I) Par une requête et des mémoires enregistrés les 11 mai 2016, 6 juin 2017 et 21 juin 2017 sous le n° 16NT01532, M. C...A...D..., représenté par MeG..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 mars 2016 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 février 2012 du préfet du Finistère ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- l'étude d'impact est insuffisante, en raison du caractère manifestement sous-estimé des mouvements de poids lourds, de l'absence d'information du public s'agissant de l'existence du périmètre de captage et de l'absence d'évaluation de l'impact sur les cours d'eau de la commune de Guerlesquin et les eaux souterraines ;

- le demandeur n'a pas justifié de ses capacités financières ;

- l'étude de dangers est insuffisante ;

- l'enquête publique est irrégulière :

* l'avis du commissaire enquêteur est insuffisamment motivé, il ne répond pas à l'ensemble des questions posées et les réponses apportées sont non circonstanciées , l'adéquation entre les infrastructures routières existantes et le développement de transport n'est pas abordé, le périmètre de protection rapprochée et la proximité avec le bourg ne sont pas pris en compte, la réserve émise par le commissaire enquêteur n'a pas été suivie et le projet litigieux est entaché d'irrégularité, l'avis comporte des inexactitudes quant à la proximité des premières habitations ;

* le dossier de demande d'autorisation a subi une modification substantielle entre l'enquête publique et l'arrêté portant autorisation d'installation classée du 22 février 2012.

Par un mémoire enregistré le 8 août 2017, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. A...D...n'est fondé en se référant au mémoire en défense du préfet du Finistère produit devant le tribunal.

II) Par une requête et des mémoires enregistrés les 11 mai 2016, 6 juin 2017 et 21 juin 2017 sous le n° 16NT01534, M. B...E..., venant aux droits de Mme E...au nom de l'indivisionE..., représenté par MeG..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 11 mars 2016 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 février 2012 du préfet du Finistère ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- l'étude d'impact est insuffisante en raison du caractère manifestement sous-estimé des mouvements de poids lourds, de l'absence d'information du public s'agissant de l'existence du périmètre de captage et de l'absence d'évaluation de l'impact sur les cours d'eau de la commune de Guerlesquin et les eaux souterraines ;

- le demandeur n'a pas justifié de ses capacités financières ;

- l'étude de dangers est insuffisante ;

- l'enquête publique est irrégulière car :

* l'avis du commissaire enquêteur est insuffisamment motivé, il ne répond pas à l'ensemble des questions posées et les réponses apportées sont non circonstanciées , l'adéquation entre les infrastructures routières existantes et le développement de transport n'est pas abordé, le périmètre de protection rapprochée et la proximité avec le bourg ne sont pas pris en compte, la réserve émise par le commissaire enquêteur n'a pas été suivie et le projet litigieux est entaché d'irrégularité, l'avis comporte des inexactitudes quant à la proximité des premières habitations ;

* le dossier de demande d'autorisation a subi une modification substantielle entre l'enquête publique et l'arrêté portant autorisation d'installation classée du 22 février 2012.

Par un mémoire enregistré le 8 août 2017, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. E...n'est fondé en se référant au mémoire en défense du préfet du Finistère produit devant le tribunal.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pons,

- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public.

1. Considérant que les requêtes n°16NT01532 et n°16NT01534 présentées pour M. A...D...et M. E...présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que M. A...D...et M. E...relèvent appel du jugement du 11 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 février 2012 par lequel le préfet du Finistère a autorisé la société Guerlesquin Bioénergies à exploiter une unité de méthanisation au lieu-dit Hent Troguic à Guerlesquin ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'étude d'impact

3. Considérant que les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative en la conduisant à sous-estimer l'importance des conséquences du projet sur l'environnement et la commodité du voisinage ;

4. Considérant que si les requérants soutiennent que le trafic quotidien généré par l'installation serait de 200 à 400 passages, ils n'assortissent cette affirmation d'aucun élément permettant de démentir que les prévisions mentionnées dans l'étude d'impact, à savoir une trentaine de passages de camions par jour, serait erronées ; que le défaut ainsi allégué de l'étude d'impact sur ce point n'est pas établi ;

5. Considérant qu'il est constant, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, que le projet est implanté, pour partie, dans le projet de périmètre rapproché de la prise d'eau du Guic et que l'étude d'impact ne mentionne pas ce périmètre de protection, instauré par arrêté préfectoral du 19 août 1975, dont les services de l'Etat n'ont pas fait mention lors de l'instruction de la demande, mais seulement le projet d'instauration d'un périmètre de protection rapproché autour de l'étang du Guic de type P2 " zone sensible " ; que, toutefois, l'étude d'impact a pris en compte la problématique du périmètre de captage, dans son paragraphe III.2.2.3.3, en relevant notamment que : " Guerlesquin est concernée par un périmètre de protection de captage d'eau potable (Plouégat-Moysan), au nord de la commune sur le hameau de Kerhellou. Le site de la société Guerlesquin Bioénergies n'est pas concerné par ce périmètre de protection. (...) Le périmètre rapproché " P2 " concernerait la partie Ouest du site Guerlesquin Bioénergies (...) Dans tous les cas, compte tenu du relief, le site de la société est physiquement en dehors du bassin versant qui alimente la prise d'eau du Guic et, de ce fait, il ne présenterait que très peu de risque vis-à-vis de la ressource en eau potable " ; qu'en outre, les installations sont implantées sur des surfaces étanches et les produits dangereux sont isolés par rétention ce qui limite très fortement les risques de déversement ; que, compte tenu de l'absence de captage d'eaux souterraines destiné à l'alimentation en eau potable dans le secteur et dès lors que l'unité de méthanisation en fonctionnement normal ne rejette aucun déchet liquide ou organique dans le sous-sol et que des moyens de récupération des eaux usées ou souillées sont prévus, même en cas d'accident, la nécessité de réaliser des sondages profonds du sol dans le cadre de l'étude d'impact n'est pas établie ; que, dans ces conditions, l'étude d'impact n'est pas entachée d'une omission de nature à avoir nui à une information complète de la population ou avoir exercé une influence sur la décision de l'autorité administrative ;

En ce qui concerne l'étude de dangers

6. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, comme le soutiennent les requérants, que l'étude de dangers réalisée dans le cadre de l'enquête publique qui a précédé l'édiction de l'arrêté attaqué ait sous-estimé, notamment, les risques d'explosion accidentelle liés aux procédés de méthanisation de la biomasse et des déchets ; que ces risques et les moyens d'y pallier sont clairement exposés dans l'étude, celle-ci prenant en compte les rayons des dangers, notamment aériens, autours des installations ; qu'ainsi que l'a relevé le tribunal, ces risques sont évalués, autour du digesteur, comme ne dépassant pas 50 m en cas de rejet atmosphérique après percement de la paroi du digesteur primaire avec un diamètre de fuite compris entre 0,1 cm et 15 cm ; que l'étude de danger conclut, sinon à l'absence, au moins à la maîtrise du risque d'explosion ; que, dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'étude de dangers serait insuffisante ;

En ce qui concerne les capacités financières du demandeur

7. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'environnement qu'une autorisation délivrée au titre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement doit prendre en compte " les capacités techniques et financières dont dispose le demandeur, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts visés à l'article L. 511-1 et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-6-1 lors de la cessation d'activité " ; que le 5° de l'article R. 512-3 du même code prévoit que la demande d'autorisation mentionne " les capacités techniques et financières de l'exploitant " ; qu'une demande d'autorisation d'une telle installation doit, à peine d'illégalité de l'autorisation, permettre à l'autorité administrative d'apprécier la capacité financière du pétitionnaire à assumer l'ensemble des obligations susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ; que, pour apprécier si le pétitionnaire dispose de capacités, notamment, financières suffisantes, et conformément aux dispositions de l'article L. 514-6 de ce code selon lesquelles les autorisations de cette nature sont soumises à un contentieux de pleine juridiction, il appartient au juge de statuer, à la date de sa décision, au vu de l'ensemble des pièces qui lui sont soumises ;

8. Considérant que le moyen tiré de l'insuffisance des capacités financières de la société Guerlesquin Bioénergies doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, dès lors que les requérants ne produisent en appel aucun élément probant supplémentaire à l'appui de leur contestation sur ce point ;

En ce qui concerne l'enquête publique

9. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article R. 512-17 du code de l'environnement, dans sa rédaction en vigueur à la date de la clôture de l'enquête publique, que, si celles-ci n'imposent pas au commissaire-enquêteur de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête publique, elles l'obligent à indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis ; qu'il ressort des pièces du dossier que le commissaire-enquêteur a, dans ses conclusions, d'une part, réalisé un examen critique des éléments contenus dans le rapport d'enquête publique prenant en compte, notamment, les avantages attendus du projet, puis, d'autre part, présenté en détail les observations recueillies au cours de l'enquête publique en y apportant des réponses circonstanciées fondées sur le déroulement de l'enquête et les caractéristiques du projet ; que ces réponses précisent, en particulier, que les installations sont situées en zone industrielle et sont " loin du bourg ", à plus de 200 m des premières habitations ; que le commissaire enquêteur pouvait, sans méconnaître l'obligation de rendre un avis personnel, se fonder sur l'étude d'impact et sur la réponse du pétitionnaire pour déterminer les raisons du choix du projet et ses impacts sur l'environnement ; que les requérants ne sont, par suite, pas fondés à soutenir que les conclusions du commissaire-enquêteur seraient insuffisamment motivées ;

10. Considérant que le commissaire enquêteur a procédé à une synthèse de ses réflexions et émis un avis favorable motivé assorti d'une recommandation, et non d'une réserve comme le soutiennent les requérants, sur le maintien à titre conservatoire, durant une période de l'ordre d'une année, après la mise en exploitation, d'un personnel d'astreinte sur le site 24h/24h pendant toute la semaine ; qu'en tout état de cause, cette recommandation, qui ne liait pas l'autorité chargée de prendre la décision, a été reprise par l'arrêté préfectoral contesté ; que les allégations des requérants selon lesquelles les premières habitations seraient situées à 11 mètres du site ne reposent sur aucun élément, le préfet du Finistère faisant valoir sans être contredit que les distances avancées par les requérants en ce qui concerne l'implantation de l'unité de méthanisation sont erronées, dès lors qu'elles prennent comme référence la distance séparant la limite de la propriété de la société Guerlesquin Bioénergies des habitations les plus proches et non la distance séparant l'unité de méthanisation des habitations ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les conclusions du commissaire-enquêteur seraient entachées d'irrégularités ;

11. Considérant que les requérants soutiennent que des modifications substantielles entachant d'irrégularité l'autorisation seraient intervenues postérieurement à l'enquête publique, l'arrêté préfectoral contesté n'ayant pas repris les rubriques 2730, 2731 (sous-produits d'origine animale) et 1411 (gazomètres et réservoirs de gaz comprimés renfermant des gaz inflammables) de la nomenclature des installations classées, lesquelles figurent dans le dossier soumis à l'enquête publique, mais la rubrique 2781 de la nomenclature concernant spécifiquement les installations de méthanisation de déchets non dangereux ou matière végétale brute, à l'exclusion des installations de méthanisation d'eaux usées ou de boues d'épuration urbaine lorsqu'elles sont méthanisées sur leur site de production ; que, toutefois, le préfet fait valoir sans être utilement contredit que les matières concernées par les rubriques 2730, 2731 pouvaient être regroupées sous la rubrique 2781 et que la rubrique 1411 n'est pas concernée par la demande d'autorisation dès lors que le gazomètre est situé sous le ciel des digesteurs ; qu'en tout état de cause, ainsi que l'a relevé le tribunal, un simple changement de rubrique de la nomenclature entre la demande d'autorisation et l'arrêté portant autorisation n'est pas de nature à faire regarder le projet comme modifié, et encore moins comme faisant l'objet d'un changement substantiel de nature à justifier une nouvelle enquête publique ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes ;

Sur les conclusions relatives aux dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes n°16NT01532 et n°16NT01534 de MM. A...D...et E...sont rejetées.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. C...A...D..., à M. B...E..., à la société Langa Méthanisation Production et au ministre de la transition écologique et solidaire.

Copie en sera adressée, pour information, au Préfet du Finistère.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2017, où siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Pons, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 décembre 2017.

Le rapporteur,

F. PONSLe président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

Nos 16NT01532, 16NT01534


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT01532
Date de la décision : 04/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : METAIS-MOURIES

Origine de la décision
Date de l'import : 07/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-12-04;16nt01532 ?
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