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24/11/2017 | FRANCE | N°16NT03966

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 24 novembre 2017, 16NT03966


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du préfet de Loir-et-Cher du 9 septembre 2016 ordonnant sa remise aux autorités italiennes et d'enjoindre au préfet d'accomplir les démarches nécessaires en vue de l'instruction de sa demande d'asile par les autorités françaises compétentes.

Par un jugement n° 1603100 du 6 octobre 2016 le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2016, M.A..., représenté par Me C..., demande à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du préfet de Loir-et-Cher du 9 septembre 2016 ordonnant sa remise aux autorités italiennes et d'enjoindre au préfet d'accomplir les démarches nécessaires en vue de l'instruction de sa demande d'asile par les autorités françaises compétentes.

Par un jugement n° 1603100 du 6 octobre 2016 le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2016, M.A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 6 octobre 2016 en tant qu'il rejette sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Loir-et-Cher du 9 septembre 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Loir-et-Cher du 9 septembre 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Loir-et-Cher d'admettre l'instruction de sa demande d'asile par les autorités françaises compétentes ;

3°) de mettre à la charge de L'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les dispositions des articles 18 et 19 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues ; il n'a pas bénéficié de l'entretien individuel prévu par les textes communautaires ; le seul fait qu'il s'est vu remettre le guide du demandeur d'asile ainsi qu'une brochure d'information à l'attention des demandeurs d'asile qui font l'objet d'une procédure Dublin ne saurait suffire à considérer qu'il a bénéficié d'un entretien individuel, d'autant qu'il ne sait ni lire ni écrire ;

- les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues dès lors qu'il ne parle pas l'italien et n'a pas bénéficié d'un interprète tout au long de la procédure en Italie ;

- l'arrêté contesté méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet n'a pas indiqué la date à laquelle il a franchi irrégulièrement la frontière italienne ; il n'est pas possible de savoir si l'Italie est encore responsable de sa demande d'asile.

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été communiquée au préfet de Loir-et-Cher qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 26 décembre 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Tiger-Winterhalter, présidente-assesseure.

1. Considérant que M.A..., ressortissant guinéen, est entré irrégulièrement en France le 11 mai 2016 et a formé une demande d'asile en préfecture de Loir-et-Cher le 31 mai 2016 ; qu'informé de ce que l'intéressé avait déjà été enregistré le 24 janvier 2016 en Italie par le relevé d'empreintes digitales et la vérification du fichier " Eurodac ", le préfet a saisi les autorités italiennes d'une demande de reprise en charge sur le fondement de l'article 13 du règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ; que les autorités italiennes ont implicitement accepté, le 7 septembre 2016, cette reprise en charge ; que par un arrêté du 9 septembre 2016, le préfet de Loir-et-Cher a ordonné la remise de M. A...aux autorités italiennes responsables de sa demande d'asile ; que M. A...relève appel du jugement du 6 octobre 2016 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 9 septembre 2016 ;

2. Considérant que l'article 18 du règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil énonce que : " 1. L'État membre responsable en vertu du présent règlement est tenu de : / a)prendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 21, 22 et 29, le demandeur qui a introduit une demande dans un autre État membre ; / b) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le demandeur dont la demande est en cours d'examen et qui a présenté une demande auprès d'un autre État membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre État membre; / c) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29 le ressortissant de pays tiers ou l'apatride qui a retiré sa demande en cours d'examen et qui a présenté une demande dans un autre État membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre État membre ; /d) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le ressortissant de pays tiers ou l'apatride dont la demande a été rejetée et qui a présenté une demande auprès d'un autre État membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre État membre./ 2. Dans les cas relevant du champ d'application du paragraphe 1, points a) et b), l'État membre responsable est tenu d'examiner la demande de protection internationale présentée par le demandeur ou de mener à son terme l'examen. / Dans les cas relevant du champ d'application du paragraphe 1, point c), lorsque l'État membre responsable avait interrompu l'examen d'une demande à la suite de son retrait par le demandeur avant qu'une décision ait été prise sur le fond en première instance, cet État membre veille à ce que le demandeur ait le droit de demander que l'examen de sa demande soit mené à terme ou d'introduire une nouvelle demande de protection internationale, qui ne doit pas être considérée comme une demande ultérieure prévue par la directive 2013/32/UE. Dans ces cas, les États membres veillent à ce que l'examen de la demande soit mené à terme. /Dans les cas relevant du champ d'application du paragraphe 1, point d), lorsque la demande a été rejetée en première instance uniquement, l'État membre responsable veille à ce que la personne concernée ait la possibilité ou ait eu la possibilité de disposer d'un recours effectif en vertu de l'article 46 de la directive 2013/32/UE. " ; que l'article 19 du même règlement dispose que : " 1. Si un État membre délivre au demandeur un titre de séjour, les obligations prévues à l'article 18, paragraphe 1, lui sont transférées. / 2. Les obligations prévues à l'article 18, paragraphe 1, cessent si l'État membre responsable peut établir, lorsqu'il lui est demandé de prendre ou reprendre en charge un demandeur ou une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), que la personne concernée a quitté le territoire des États membres pendant une durée d'au moins trois mois, à moins qu'elle ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité délivré par l'État membre responsable./ Toute demande introduite après la période d'absence visée au premier alinéa est considérée comme une nouvelle demande donnant lieu à une nouvelle procédure de détermination de l'État membre responsable. / 3. Les obligations prévues à l'article 18, paragraphe 1, points c) et d), cessent lorsque l'État membre responsable peut établir, lorsqu'il lui est demandé de reprendre en charge un demandeur ou une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), que la personne concernée a quitté le territoire des États membres en exécution d'une décision de retour ou d'une mesure d'éloignement délivrée à la suite du retrait ou du rejet de la demande./ Toute demande introduite après qu'un éloignement effectif a eu lieu est considérée comme une nouvelle demande et donne lieu à une nouvelle procédure de détermination de l'État membre responsable. " ;

3. Considérant que si M. A...soutient qu'originaire d'un pays francophone il ne parle ni n'écrit l'italien et ne dispose pas des moyens financiers nécessaires pour assurer sa défense dans ce pays, une telle argumentation est sans portée utile au regard du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles 18 et 19 du règlement du 26 juin 2013 précités ;

4. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (...) " ; que M. A...ne peut pas utilement se prévaloir de ces stipulations, qui ne sont pas applicables aux mesures de police administrative ;

5. Considérant que la seule allégation du requérant, d'ailleurs démentie par les pièces du dossier, selon laquelle il n'aurait pas bénéficié d'un entretien individuel en vue de déterminer l'Etat responsable de sa demande d'asile n'est pas de nature à caractériser une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

6. Considérant, enfin, que la circonstance invoquée par le requérant selon laquelle le préfet n'a pas précisé la date à laquelle il a franchi irrégulièrement la frontière italienne ne suffit pas à ôter à l'Italie la qualité d'Etat membre responsable de la demande d'asile de M. A...dès lors que les empreintes de l'intéressé ont été relevées le 24 janvier 2016 dans ce pays et qu'il s'est présenté en préfecture en France le 31 mai 2016 en vue de l'enregistrement de sa demande d'asile ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions du requérant aux fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise au préfet de Loir-et-Cher.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Tiger-Winterhalter, présidente-assesseure,

- Mme Rimeu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 novembre 2017.

La rapporteure,

N. TIGER- WINTERHALTERLe président,

L. LAINÉ

La greffière,

V. DESBOUILLONS

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°16NT03966

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT03966
Date de la décision : 24/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Nathalie TIGER-WINTERHALTER
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : SOUAMOUNOU

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-11-24;16nt03966 ?
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