La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/11/2017 | FRANCE | N°16NT01639

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 20 novembre 2017, 16NT01639


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Agir pour un Environnement et un Développement Durables, M. I...G..., M. E...H..., M. N...L..., M. J...O..., M. et Mme D...et Q... B...et M. et Mme A...et P... F...ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 13 décembre 2012 par laquelle le préfet du Finistère a déclaré d'utilité publique les travaux et les acquisitions foncières nécessaires à l'aménagement d'une voie de liaison entre la route départementale n° 112 (Kergaradec) et la route départementale r>
n° 205 (Le Spernol) par la communauté urbaine de Brest métropole océane.

Par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Agir pour un Environnement et un Développement Durables, M. I...G..., M. E...H..., M. N...L..., M. J...O..., M. et Mme D...et Q... B...et M. et Mme A...et P... F...ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 13 décembre 2012 par laquelle le préfet du Finistère a déclaré d'utilité publique les travaux et les acquisitions foncières nécessaires à l'aménagement d'une voie de liaison entre la route départementale n° 112 (Kergaradec) et la route départementale

n° 205 (Le Spernol) par la communauté urbaine de Brest métropole océane.

Par un jugement n° 1301976 du 25 mars 2016, le tribunal administratif de Rennes a annulé la déclaration d'utilité publique du 13 décembre 2012.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 20 mai 2016 et 23 août 2017, la métropole " Brest Métropole ", venant aux droits de Brest Métropole Océane, représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 25 mars 2016 ;

2°) de rejeter la demande de l'association Agir pour un Environnement et un Développement Durables (AE2D) et des autres demandeurs de première instance cités ci-dessus ;

3°) de mettre à la charge des intimés le versement d'une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Brest Métropole soutient que :

- l'arrêté litigieux n'est pas incompatible avec le document d'urbanisme remis en vigueur ; c'est donc à tort que le tribunal administratif a jugé qu'ont été méconnues les dispositions de l'article L. 123-16 du code de l'urbanisme ;

- en tout état de cause c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a confronté la légalité de l'arrêté litigieux au plan d'occupation des sols approuvé le 20 janvier 1995, lequel n'était pas compatible avec le SCOT approuvé le 13 septembre 2011 ;

- par l'effet dévolutif de l'appel, les autres moyens invoqués en première instance ne sont pas fondés, qu'il s'agisse de l'insuffisance de l'étude d'impact, de l'absence de levée des réserves émises par la commission d'enquête, de la prétendue irrégularité de l'avis de l'Autorité environnementale ou de son absence de prise en compte, des modalités de la concertation, de l'incompatibilité du projet avec le POS et le SCOT, le SDAGE et le SAGE ; par ailleurs le projet présente bien un caractère d'utilité publique.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 15 et 17 octobre 2016 et 6 septembre 2017 l'Association Agir pour un Environnement et un Développement Durables, M. I...G..., M. E...H..., M. N...L..., M. J...O..., M. et Mme B...et M. et MmeF..., représentés par MeK..., concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de

3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Un mémoire présenté pour Brest Métropole, enregistré le 27 septembre 2017, n'a pas été communiqué à défaut d'éléments nouveaux au sens de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Francfort, président-assesseur,

- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public,

- et les observations de MeM..., substituant MeC..., représentant Brest Métropole, et de MeK..., représentant l'association Agir pour un Environnement et un Développement Durables et les autres défendeurs.

Une note en délibéré présentée pour Brest Métropole a été enregistrée le 9 novembre 2017.

1. Considérant que par jugement du 25 mars 2016 le tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de l'association Agir pour un Environnement et un Développement Durables et de plusieurs personnes physiques, la décision du 13 décembre 2012 par laquelle le préfet du Finistère a déclaré d'utilité publique les travaux et les acquisitions foncières nécessaires à la réalisation de l'aménagement de la voie de liaison entre la route départementale n° 112 (Kergaradec) et la route départementale n° 205 (Le Spernol) par la communauté urbaine de Brest Métropole océane ; que la métropole de " Brest Métropole ", venant aux droits de Brest Métropole Océane, relève appel de ce jugement ;

Sur les conclusions à fins d'annulation :

En ce qui concerne la compatibilité de la déclaration d'utilité publique avec le plan d'occupation des sols du 20 janvier 1995 :

2. Considérant, d'une part, qu'en application des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la présente espèce : " L'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'une carte communale, d'un schéma directeur ou d'un plan d'occupation des sols ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu a pour effet de remettre en vigueur le schéma de cohérence territoriale, le schéma directeur ou le plan local d'urbanisme, la carte communale ou le plan d'occupation des sols ou le document d'urbanisme en tenant lieu immédiatement antérieur " ;

3. Considérant que, par jugement du 28 décembre 2012, devenu définitif, le tribunal administratif de Rennes a annulé la délibération du 11 décembre 2009 par laquelle le conseil de la communauté urbaine de Brest métropole océane avait approuvé le plan local d'urbanisme de cette collectivité sous l'empire duquel avait été prise la déclaration d'utilité publique en litige ; qu'en application des dispositions précitées, cette annulation a eu pour effet de remettre en vigueur le plan d'occupation des sols du 20 janvier 1995, applicable sur les terrains objet de la déclaration d'utilité publique, dès lors que par un précédent jugement, en date du 22 octobre 2009, le tribunal administratif de Rennes avait annulé le plan local d'urbanisme du 7 juillet 2006 lui-même issu d'une révision de ce plan d'occupation des sols ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 123-16 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté en litige : " La déclaration d'utilité publique (...) d'une opération qui n'est pas compatible avec les dispositions d'un plan local d'urbanisme ne peut intervenir que si : a) L'enquête publique concernant cette opération a porté à la fois sur l'utilité publique ou l'intérêt général de l'opération et sur la mise en compatibilité du plan qui en est la conséquence ; / b) L'acte déclaratif d'utilité publique ou la déclaration de projet est pris après que les dispositions proposées pour assurer la mise en compatibilité du plan ont fait l'objet d'un examen conjoint du représentant de l'Etat dans le département, du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent, du maire de la commune sur le territoire de laquelle est situé le projet, de l'établissement public mentionné à l'article L. 122-4, s'il en existe un, de la région, du département et des organismes mentionnés à l'article L. 121-4, et après avis de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent ou, dans le cas prévu par le deuxième alinéa de l'article L. 123-6, du conseil municipal. La déclaration d'utilité publique emporte approbation des nouvelles dispositions du plan. " ; que pour annuler, par le jugement attaqué, la déclaration d'utilité publique du 13 décembre 2012, le tribunal administratif de Rennes a estimé que les travaux de liaison routière qui formaient l'objet de cette déclaration constituaient une opération incompatible avec les dispositions du plan d'occupation des sols approuvé le 20 janvier 1995, remis en vigueur dans les conditions précisées ci-dessus, dès lors que les documents graphiques de ce plan classaient l'emprise de l'opération en zone naturelle à protéger ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les terrains en question sont classés par le plan d'occupation des sols remis en vigueur en zone naturelle à protéger ND, décrite par le préambule du règlement comme " une zone naturelle faisant l'objet d'une protection particulière, soit en raison de la qualité du site et du paysage, soit en raison de l'intérêt qu'elle présente sur le plan de l'environnement et de l'écologie (...) la vocation de cette zone est donc celle d'un espace non urbanisable et non constructible, sauf exception explicitée ci-dessous (...) " ;

6. Considérant que la déclaration d'utilité publique en litige vise à la réalisation, au sein de cette zone naturelle, d'une voirie routière dont le tracé présente une longueur d'environ 4 200 mètres, à la création de merlons de 3 mètres de hauteur et de 5 mètres de largeur et au déplacement et à la mise en place de 19 500 m3 de déblais et 5 000 m3 de remblais ; qu'elle porte ainsi manifestement atteinte à l'objectif de préservation de la zone naturelle en cause ; que le résumé non technique de l'étude d'impact indique que la phase de réalisation des travaux présente des impacts directs, mais aussi potentiels importants, et ce sur toutes les composantes du site, le secteur concerné de la vallée du Restic concentrant la majorité des enjeux floristiques et faunistiques de l'opération ; que la cartographie de l'étude d'impact fait apparaitre que le fuseau d'étude comprend des zones humides sensibles ; que, compte tenu de ces caractéristiques de l'opération et de l'objectif de préservation recherché par les auteurs du plan d'occupation des sols, la création de cette liaison routière ne peut être regardée comme compatible avec la vocation de cette zone ; que compte tenu de l'impact de ces travaux sur l'environnement, Brest Métropole n'est pas davantage fondée à invoquer les mesures compensatoires dont est assortie l'opération aux termes du dossier d'enquête, ni à se prévaloir des dispositions de l'article N1 du règlement de la zone qui autorisent, " dans la mesure où leur implantation ne nuit pas à la végétation, au site, au paysage et à l'environnement, et sous réserve d'un traitement architectural et d'un aménagements appropriés : (...) les ouvrages d'intérêt général tels que réservoirs d'eau, station de captage, de pompage ou de refoulement, ligne électrique avec ses accessoires ", dans la mesure où le chantier projeté ne peut être assimilé à de tels ouvrages ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'opération pour laquelle a été prise la déclaration d'utilité publique en litige n'est pas compatible avec le plan d'occupation des sols approuvé le 20 janvier 1995, remis en vigueur par l'effet de l'annulation du plan local d'urbanisme intervenue le 28 décembre 2012 ; que cette déclaration est par suite contraire aux dispositions précitées de l'article L. 123-16 du code de l'urbanisme ;

En ce qui concerne l'effet du schéma de cohérence territorial du 13 septembre 2011 :

8. Considérant que Brest Métropole soutient que le plan d'occupation des sols du 20 janvier 1995 devrait lui-même être écarté en raison de son incompatibilité avec le schéma de cohérence territoriale du pays de Brest, approuvé le 13 septembre 2011, dès lors que le classement en zone naturelle des parcelles nécessaires au projet, tel qu'il résulte de ce plan, fait obstacle à la création de la voie routière, alors que cette opération forme l'une des orientations expresses du schéma de cohérence, avec laquelle le plan d'occupation des sols doit être compatible ; que Brest Métropole sollicite ainsi du juge qu'il déclare illégal, au sens des dispositions précitées de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, ce plan d'occupation des sols dans la mesure où il ne permet pas la réalisation de la voie routière dont s'agit ; que cette argumentation est toutefois sans incidence, dès lors qu'en tout état de cause la collectivité requérante ne démontre ni même n'allègue que le document local d'urbanisme immédiatement antérieur au plan d'occupation des sols aurait permis la réalisation de cette liaison ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Brest Métropole n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté portant déclaration d'utilité publique du 13 décembre 2012 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'association Agir pour un Environnement et un Développement Durables et des autres intimés, qui n'ont pas dans la présente instance la qualité de parties perdantes, la somme que demande Brest Métropole au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Brest Métropole le versement à l'association Agir pour un Environnement et un Développement Durables, à M. I...G..., à M. E...H..., à M. N...L..., à M. J...O..., à M. et MmeB..., à M. et Mme F...d'une somme globale de 1 500 euros au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Brest Métropole est rejetée.

Article 2 : " Brest Métropole " versera à l'association Agir pour un Environnement et un Développement Durables, à M. I...G..., à M. E...H..., à M. N...L..., à M. J...O..., à M. et MmeB..., à M. et Mme F...une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Agir pour un Environnement et un Développement Durables, à M. I...G..., à M. E...H..., à M. N...L..., à M. J...O..., à M. et Mme D...et Q...B..., à M. et Mme A...et P...F..., à " Brest Métropole " et au ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur.

Une copie sera transmise au préfet du Finistère.

Délibéré après l'audience du 3 novembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Mony, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 novembre 2017.

Le rapporteur,

J. FRANCFORTLe président,

H. LENOIR

Le greffier,

F. PERSEHAYE

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT01639


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT01639
Date de la décision : 20/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Jérôme FRANCFORT
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : CABINET JEAN-PAUL MARTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-11-20;16nt01639 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award