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06/10/2017 | FRANCE | N°16NT03920

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 06 octobre 2017, 16NT03920


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le centre hospitalier de Quimperlé a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Rennes :

- à titre principal, de condamner solidairement, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, les sociétés Occamat, Ad Quatio et Egis à lui verser une provision de 175 456,85 euros TTC, en réparation des préjudices subis du fait de l'exécution non conforme des travaux de remblaiement prévus au lot n° 1 du marché de reconstruction du site d'hébergement de personne

s âgées de la résidence du Bois Joly à Quimperlé,

- à titre subsidiaire, de condam...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le centre hospitalier de Quimperlé a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Rennes :

- à titre principal, de condamner solidairement, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, les sociétés Occamat, Ad Quatio et Egis à lui verser une provision de 175 456,85 euros TTC, en réparation des préjudices subis du fait de l'exécution non conforme des travaux de remblaiement prévus au lot n° 1 du marché de reconstruction du site d'hébergement de personnes âgées de la résidence du Bois Joly à Quimperlé,

- à titre subsidiaire, de condamner sur le même fondement, la société Occamat à lui verser une provision de 96 841,11 euros TTC, la société Ad Quatio une provision de 41 257,54 euros TTC, et la société Egis une provision de 37 602,77 euros TTC, en réparation des mêmes préjudices.

Par une ordonnance n° 1600753 du 21 novembre 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Rennes a, d'une part, condamné solidairement les sociétés Occamat, Ad Quatio et Egis Bâtiments Centre-Ouest à verser au centre hospitalier de Quimperlé une provision d'un montant de 163 885 euros TTC, en réparation des préjudices résultant de l'exécution non conforme des travaux de remblaiement et une provision de 11 056,98 euros TTC au titre des frais d'expertise, et d'autre part, rejeté les demandes de partage de responsabilité et les appels en garantie présentés par les sociétés Egis Bâtiments Centre Ouest et Occamat.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 9 décembre 2016 et le 23 juin 2017, la société Ad Quatio et la société Architectes Compère et Cie, représentées par MeB..., demandent à la cour :

1°) de réformer l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Rennes du 21 novembre 2016 en tant qu'elle prononce des condamnations à l'encontre de la société Ad Quatio ;

2°) de rejeter les demandes formées contre la société Ad Quatio par le centre hospitalier de Quimperlé devant le tribunal administratif de Rennes ;

3°) de rejeter les appels en garantie formés à leur encontre ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Quimperlé la somme de 2 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les désordres sont de la seule responsabilité de la société Occamat, titulaire des travaux du lot n° 1 ;

- ce lot ne faisait pas partie de sa mission, seul Egis est intervenu.

Par des mémoires, enregistrés les 28 avril et 25 août 2017, la société Egis Bâtiments Centre-Ouest demande la réformation de l'ordonnance du 21 novembre 2016 en tant qu'elle a rejeté sa demande de partage de responsabilité et demande que sa condamnation soit limitée à 73 420,48 euros au titre des préjudices résultant de l'exécution non conforme des travaux de remblaiement et à 4 953,52 euros au titre des frais d'expertise ; elle demande également que la société Ad Quatio soit condamnée à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre et que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge du centre hospitalier de Quimperlé ou de toute autre partie perdante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'expertise a retenu des responsabilités respectives de 55,2 % pour Occamat et 44,8% pour le groupement de maîtrise d'oeuvre, de sorte que ce partage devait s'appliquer au stade du référé provision ;

- les désordres sont principalement de la responsabilité de la société Occamat, chargée des travaux.

Par des mémoires, enregistrés le 9 mai 2017, le 24 mai 2017 et le 24 août 2017, la société Occamat conclut, à titre principal, à la réformation de l'ordonnance du 21 novembre 2016 en tant qu'elle prononce des condamnations à son encontre et, à titre subsidiaire, à la limitation du montant des réparations mises à la charge des constructeurs à 45 940,20 euros correspondant au coût de reprise du remblai.

Elle soutient que :

- en raison de l'attitude du maître d'oeuvre et du maître d'ouvrage, elle n'a pas été en mesure de reprendre son ouvrage, de sorte que, en vertu de l'article 1146 du code civil, son obligation est sérieusement contestable ;

- le montant non sérieusement contestable du préjudice ne peut excéder 45 940,20 euros ;

- la responsabilité du groupement de maîtrise d'oeuvre est pleinement engagée.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 11 mai 2017 et le 26 juin 2017, le centre hospitalier de Quimperlé conclut au rejet de la requête et des conclusions d'appel incident des sociétés Egis et Occamat et demande que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de chacune des sociétés Ad Quatio, Egis et Occamat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la responsabilité du groupement de maîtrise d'oeuvre dans les préjudices qu'il a subis n'est pas sérieusement contestable ;

- la société Ad Quatio, qui avait en charge les missions DET et ACT et était le mandataire solidaire du groupement, ne peut pas sérieusement affirmer qu'elle n'avait pas de responsabilité dans l'exécution du lot n° 1.

Par une ordonnance du 26 juin 2017 prise en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, la clôture de l'instruction a été fixée au 28 août 2017 à 12 :00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport Mme Rimeu, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,

- et les observations de Me Costard, avocat du centre hospitalier de Quimperlé, celles de Me Bernier, avocat de la société Occamat et celles de Me Baugas, avocat de la société Egis Bâtiments Centre-Ouest.

1. Considérant qu'en 2006 le centre hospitalier de Quimperlé a décidé de reconstruire le site d'hébergement de personnes âgées de la résidence du Bois Joly en édifiant un établissement de 255 lits en remplacement de trois bâtiments existants ; que par un marché signé le 4 août 2006, la maîtrise d'oeuvre des travaux a été confiée à un groupement conjoint composé notamment des sociétés Ad Quatio, mandataire, et OTH Ouest devenue Egis Bâtiments Centre-Ouest ; que par un contrat signé le 2 avril 2013, la société Ad Quatio a sous-traité sa mission à la société Architectes Compère et Cie ; que l'étude géotechnique du projet a été confiée à la société Hydrogéotechnique Nord et Ouest et réalisée en novembre 2007 ; que par un marché signé le 20 novembre 2008, le lot n° 1 " désamiantage démolitions " a été attribué à la société Occamat ; que par un contrat signé le 6 septembre 2013, la société Occamat a sous-traité à la société ACMTP les travaux de concassage et de remblaiement ; qu'en raison de désordres affectant le remblaiement des volumes libérés par les travaux de démolition des ouvrages existants, le tribunal administratif de Rennes a, à la demande du centre hospitalier de Quimperlé, ordonné une expertise le 1er septembre 2015 ; que l'expert a déposé son rapport au greffe de ce tribunal le 13 janvier 2016 ; que par une ordonnance du 21 novembre 2016, le juge des référés de ce même tribunal a, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, condamné solidairement les sociétés Occamat, Ad Quatio et Egis Bâtiments Centre-Ouest à verser au centre hospitalier de Quimperlé une provision de 163 885 euros TTC en réparation des préjudices résultant de l'exécution non conforme des travaux de remblaiement ; que la société Ad Quatio relève appel de cette ordonnance en tant qu'elle prononce des condamnations à son encontre ; que la société Egis Bâtiments Centre-Ouest présente des conclusions d'appel provoqué et incident tendant au partage de responsabilité entre la société Occamat et le groupement de maîtrise d'oeuvre et à ce que la société Ad Quatio soit condamnée à la garantir des condamnations prononcées à son encontre ; que la société Occamat présente des conclusions d'appel provoqué tendant, à titre principal, à la réformation de l'ordonnance du 16 novembre 2016 en tant qu'elle prononce des condamnations à son encontre et, à titre subsidiaire, à ce que le montant des réparations soit limité à 45 940,20 euros ;

Sur l'appel principal :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ";

3. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que les remblais en litige, qui n'étaient pas chimiquement inertes, n'étaient pas conformes aux prescriptions du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du marché et ne permettaient pas de réaliser les fondations superficielles initialement prévues ; que le groupement de maîtrise d'oeuvre, d'une part, aurait dû anticiper ces malfaçons dès l'étude de l'offre de la société Occamat, laquelle comportait une note méthodologique précisant les matériaux utilisés pour le remblai, et d'autre part, aurait pu éviter ces malfaçons s'il avait surveillé l'exécution des travaux, comme il lui appartenait de le faire ; que les désordres litigieux résultent donc tant de fautes contractuelles de la société chargée de l'exécution des travaux, qui a méconnu les stipulations du CCTP et manqué aux règles de l'art, que de fautes contractuelles du groupement conjoint de maîtrise d'oeuvre dans l'exercice de ses missions " assistance à la passation des contrats de travaux " (ACT) et " direction de l'exécution des travaux " (DET) ;

4. Considérant, d'autre part, que si l'extrait du contrat liant les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre établit que le lot n° 1 " désamiantage démolitions " constitue un lot technique, dont la société Egis Bâtiments Centre-Ouest avait principalement la charge, il n'exclut pas la société Ad Quatio des missions ACT et DET relatives aux lots techniques ; que le tableau de répartition des honoraires joint à l'acte d'engagement du contrat de maîtrise d'oeuvre prévoit une part de rémunération des phases ACT et DET, sans distinguer selon les lots techniques ou architecturaux, au profit de la société Ad Quatio, au demeurant mandataire solidaire du groupement ; qu'il suit de là que la société Ad Quatio n'est pas fondée à soutenir qu'elle serait étrangère aux fautes commises par le groupement de maîtrise d'oeuvre ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les fautes contractuelles de la société Occamat et des sociétés Ad Quatio et Egis Bâtiments Centre-Ouest ont concouru à la réalisation des désordres objet du présent litige ; que, par suite, la société Ad Quatio n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Rennes a regardé son obligation à l'égard du centre hospitalier de Quimperlé comme non sérieusement contestable et l'a condamnée, solidairement avec les sociétés Occamat et Egis Bâtiments Centre-Ouest, à verser au centre hospitalier de Quimperlé, une provision d'un montant non contesté de 163 885 euros TTC ;

Sur les conclusions d'appel provoqué et incident de la société Egis Bâtiments Centre-Ouest :

6. Considérant, d'une part, qu'il résulte de ce qui a été dit au point 4 que si la société Ad Quatio a participé aux missions ACT et DET s'agissant des lots techniques, tels le lot " désamiantage démolitions ", la société Egis Bâtiments Centre-Ouest en était principalement chargée ; qu'il suit de là que ne peut être regardée comme non sérieusement contestable l'obligation que la société Egis Bâtiments Centre-Ouest estime détenir à l'encontre de la société Ad Quatio ; que, par suite, l'appel en garantie formé par la société Egis Bâtiments Centre-Ouest contre la société Ad Quatio, au demeurant non motivé, ne peut qu'être rejeté ;

7. Considérant, d'autre part, que le présent arrêt n'aggrave pas la situation de la société Egis Bâtiments Centre-Ouest ; que par suite, ses conclusions d'appel provoqué demandant un partage de responsabilité avec la société Occamat ne sont pas recevables ;

Sur l'appel provoqué de la société Occamat :

8. Considérant que le présent arrêt n'aggrave pas la situation de la société Occamat ; que, par suite, ses conclusions d'appel provoqué, qui contestent, à titre principal, l'engagement de sa responsabilité contractuelle vis à vis du centre hospitalier de Quimperlé, et à titre subsidiaire l'évaluation du préjudice subi par celui-ci, ne sont pas recevables ;

Sur les frais d'expertise :

9. Considérant qu'ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Rennes les frais d'expertise, liquidés et taxés par une ordonnance de la présidente du tribunal administratif de Rennes du 3 février 2016 à la somme de 11 056,98 euros, représentent une obligation non sérieusement contestable pour les sociétés Occamat, Ad Quatio et Egis Bâtiments Centre-Ouest ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Rennes a condamné solidairement ces trois sociétés, au titre des dépens, à verser au centre hospitalier de Quimperlé une provision de 11 056,98 euros ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative:

10. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par les parties au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Ad Quatio est rejetée.

Article 2 : Les conclusions d'appel incident et provoqué présentées par les sociétés Egis Bâtiments Centre-Ouest et Occamat, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par ces sociétés et par le centre hospitalier de Quimperlé sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié aux sociétés Ad Quatio, Architectes Compère et Cie, Egis Bâtiments Centre-Ouest et Occamat et au centre hospitalier de Quimperlé.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Tiger-Winterhalter, présidente-assesseure,

- Mme Rimeu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 octobre 2017.

Le rapporteur,

S. RIMEULe président,

L. LAINÉ

La greffière,

M. A...

La République mande et ordonne au préfet du Finistère en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT03920


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT03920
Date de la décision : 06/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Sophie RIMEU
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : SCP BELWEST

Origine de la décision
Date de l'import : 10/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-10-06;16nt03920 ?
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