La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/10/2017 | FRANCE | N°16NT02536

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 02 octobre 2017, 16NT02536


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet du Finistère a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner Brest Métropole Océane à verser la somme de 67 663,51 euros à la SNCF en réparation des dommages causés au domaine public ferroviaire du fait de déversements d'eaux pluviales sur la plate-forme ferroviaire.

Par un jugement n°1403478 du 3 juin 2016, le tribunal administratif de Rennes a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 juillet 20

16 et le 5 juillet 2017, Brest Métropole Océane, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet du Finistère a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner Brest Métropole Océane à verser la somme de 67 663,51 euros à la SNCF en réparation des dommages causés au domaine public ferroviaire du fait de déversements d'eaux pluviales sur la plate-forme ferroviaire.

Par un jugement n°1403478 du 3 juin 2016, le tribunal administratif de Rennes a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 juillet 2016 et le 5 juillet 2017, Brest Métropole Océane, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 juin 2016 ;

2°) de rejeter la demande du préfet du Finistère ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Brest Métropole Océane soutient que :

- la constatation des faits constitutifs de la contravention de grande voirie qui lui a été imputée est irrégulière en ce que l'agent verbalisateur n'a pas été le témoin direct des faits relatés dans le procès-verbal d'infraction ;

- l'ouvrage public à l'origine du dommage subi par la SNCF ne lui appartient pas ;

- aucune convention n'a été passée entre elle et la SNCF au sujet de la canalisation à l'origine du débordement sur la voie ferrée ;

- la canalisation en cause doit être regardée comme ayant été mise en place par la SNCF et étant demeurée sa propriété ;

- elle n'a pas la garde de cette canalisation ;

- elle n'a commis aucune faute et sa responsabilité ne peut pas être engagée ;

- aucune démonstration n'a été apportée du lien de causalité entre l'ouvrage public en cause et le préjudice subi par la SNCF ;

- les fortes précipitations du 24 octobre 2011 doivent être regardées comme s'apparentant à un cas de force majeure de nature à l'exonérer de toute responsabilité ;

- la somme mise à sa charge présente un caractère excessif.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mars 2017, la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer conclut au rejet de la requête.

La ministre fait valoir qu'aucun des moyens d'annulation soulevés par la requérante n'est fondé, que les poursuites engagées à l'encontre de la requérante sont régulières et que sa condamnation à verser 67 663,51 euros à la SNCF correspond aux sommes engagées par cette dernière pour faire cesser le trouble affectant le domaine public ferroviaire.

Par un mémoire en intervention volontaire, enregistré le 28 juillet 2017, la SNCF conclut à la confirmation de la décision du tribunal administratif et au rejet de la demande de Brest Métropole Océane.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le procès-verbal de contravention de grande voirie établi le 12 mai 2014 ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mony,

- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public,

- et les observations de Me C...A..., substituant MeB..., représentant Brest Métropole Océane.

1. Considérant que Brest Métropole Océane (BMO) relève appel du jugement en date du 3 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Rennes l'a condamné à payer 1 500 euros d'amende et à verser 67 663,51 euros à la Société nationale des chemins de fer (SNCF) en réparation des dommages causés au domaine public ferroviaire sur la ligne de transport de fret Le Rody/Brest Bassins ;

Sur l'intervention volontaire de la SNCF :

2. Considérant que la contravention de grande voirie en litige trouve son origine dans les dommages causés au réseau ferroviaire exploité par la SNCF à hauteur du secteur de Dou-Braz et dont elle a assuré la remise en état ; que, par suite, son intervention est recevable ;

Sur les conclusions en annulation :

3. Considérant, en premier lieu, que la circonstance que l'agent verbalisateur de la SNCF n'ait pas constaté lui-même les faits reprochés à BMO est sans incidence sur la régularité des poursuites ensuite engagées dès lors que les énonciations du procès-verbal du 12 mai 2014, faisant état de ce que l'ouvrage hydraulique à l'origine du sinistre était géré par l'établissement public BMO sont corroborés, ainsi qu'il résulte de l'instruction, par les autres pièces du dossier, en particulier les différents courriers échangés dès la fin de l'année 2007 entre la SNCF et BMO, soit avant même que n'interviennent les dommages en litige, attirant l'attention de cette dernière sur les problèmes posés par le fonctionnement défectueux du réseau d'eaux pluviales sous la voie fret SNCF, ainsi que l'étude alors commanditée par BMO à un cabinet spécialisé ayant mis en évidence le sous-dimensionnement des réseaux situés dans le secteur de Dour-Braz provoquant l'inondation de la voie ferrée en cas de fortes précipitations, BMO s'étant en particulier engagée dans un courrier du 17 janvier 2008 à inspecter l'état des collecteurs et à réaliser une étude relative à leur renforcement ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la personne qui peut être poursuivie pour contravention de grande voirie est soit celle qui a commis ou pour le compte de laquelle a été commise l'action qui est à l'origine de l'infraction, soit celle sous la garde de laquelle se trouvait l'objet qui a été la cause de la contravention ;

5. Considérant que les circonstances, à les supposer établies, que BMO ne soit pas propriétaire de la canalisation traversant la voie ferrée au lieu-dit Dour-Bras et que celle-ci a été réalisée sous maîtrise d'ouvrage de la SNCF, à qui elle appartiendrait de ce fait, sont sans incidence sur la légalité de la contravention de grande voirie infligée à BMO dès lors que cette dernière, même si elle n'a pas construit elle-même les ouvrages à l'origine du dommage subi par la SNCF, ne peut qu'être regardée comme ayant la garde des différents ouvrages hydrauliques incriminés dans la réalisation du dommage subi part la SNCF ; qu'en effet, il résulte de l'instruction qu'elle est seule en charge de la gestion du réseau unitaire d'eaux pluviales sur l'ensemble du territoire métropolitain brestois, les conduits d'évacuation incriminés ne constituant eux-mêmes qu'un tronçon du réseau unitaire desservant le bassin versant dit du Guelmeur et s'est effectivement comporté comme gestionnaire dudit réseau , notamment en s'engageant dans un courrier du 17 janvier 2008 à inspecter l'état des collecteurs à hauteur du secteur de Dour-Braz et à réaliser une étude relative à leur renforcement ainsi qu'en mandatant un cabinet spécialisé afin d'identifier les causes des inondations de la voie ferrée déjà alors constatés et de proposer des solutions pour y remédier comme en attestent les différents courriers échangés entre 2007 et 2011 avec la SNCF ; que, compte tenu de cette qualité de gestionnaire du réseau responsable du sinistre, c'est à bon droit que les premiers juges l'ont déclaré responsable de celui-ci et l'on condamnée à en réparer les conséquences dommageables ;

6. Considérant, en troisième lieu, que la circonstance qu'un contrevenant n'ait commis aucune faute est sans incidence sur la légalité d'une contravention de grande voirie, cette dernière ayant pour seul objet la constatation de l'infraction matérielle ayant affecté le domaine public ; qu'il résulte en outre de l'instruction que, antérieurement aux dommages faisant l'objet du présent litige, BMO a, comme déjà indiqué, vu à plusieurs reprises son attention attirée par la SNCF sur les inondations répétées de la voie ferrée de fret Le Rody/Brest Bassins, et avait elle-même commandité, dès 2008, une étude technique ayant pour objet d'identifier les causes de ces dysfonctionnements et de proposer des solutions possibles ; que cette étude a mis en évidence le sous-dimensionnement du réseau existant sur place en faisant état d'inondation et la nécessité de procéder à son remplacement sur certains tronçons ; que, néanmoins, à la date de survenance du dommage en litige, le 24 octobre 2011, de tels travaux n'avaient pas été réalisés ; qu'il résulte également de l'instruction que l'assureur de BMO a expressément refusé de prendre à sa charge les frais consécutifs aux dommages causés au domaine public ferroviaire au motif que BMO connaissait depuis 2008 les risques particuliers que posait le sous-dimensionnement des réseaux d'évacuation des eaux pluviales du secteur de Dour-Braz ; que le moyen tiré de l'absence de responsabilité de BMO doit ainsi être écarté ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas sérieusement contesté par BMO que les dégâts occasionnés par le ruissellement d'eaux pluviales intervenu le 24 octobre 2011 trouvent directement leur origine dans le mauvais fonctionnement des réseaux d'évacuation des eaux pluviales en cas de fortes précipitations et provoquant alors une inondation de la voie de fret, situation portée à la connaissance de BMO depuis plusieurs années sans qu'il y soit remédié ; que le moyen tiré de l'absence de lien de causalité entre la faute commise par BMO et le dommage subi par la SNCF ne peut ainsi qu'être écarté ;

8. Considérant, en cinquième lieu, que la circonstance que l'évènement pluvieux intervenu sur Brest le 24 octobre 2011 se soit caractérisé par son caractère exceptionnel, ayant donné lieu à une déclaration de catastrophe naturelle, ne peut cependant pas suffire à exonérer BMO de sa responsabilité, le dommage alors subi par la SNCF ne pouvant être regardé comme exclusivement imputable à cet évènement, la voie de frêt endommagée ayant déjà été, à plusieurs reprises par le passé inondée lors d'épisodes pluvieux de moindre importance, BMO en ayant été informée dès 2008, ainsi que du sous-dimensionnement des réseaux d'eau pluviales présents sur place ; que l'inondation de la voie de fret Le Rody/Brest Bassins au lieu-dit Dour-Braz ne peut ainsi, en dépit du caractère exceptionnel des précipitations constatées le 24 octobre 2011, être regardée comme constituant un évènement imprévisible de nature à exonérer BMO de sa responsabilité ;

9. Considérant, en dernier lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que la somme de 67 663,51 euros mise à la charge de BMO ait excédé le coût de la remise en état de la voie ferrée supporté par la SNCF; qu'il n'y a dès lors pas lieu de réduire le montant mis à la charge de BMO au titre de l'indemnisation des frais de réparation du domaine public ferroviaire ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Brest Métropole Océane n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention volontaire de la SNCF est admise.

Article 2 : La requête de Brest Métropole Océane est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Brest Métropole Océane, au ministre d'État, ministre de la Transition écologique et solidaire, à la société nationale des chemins de fer français (SNCF) et au département du Finistère.

Copie en sera adressée au préfet du Finistère et au directeur régional des finances publiques d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 15 septembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président assesseur,

- M. Mony, premier conseiller.

Lu en audience publique le 2 octobre 2017.

Le rapporteur,

A. MONYLe président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre d'État, ministre de la Transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT02536


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT02536
Date de la décision : 02/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux répressif

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Arnaud MONY
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : CABINET JEAN-PAUL MARTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-10-02;16nt02536 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award