Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme B...et Chantal D...ont demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 23 octobre 2014 par laquelle le maire de Chécy a exercé, au nom de la commune, le droit de préemption urbain sur les parcelles cadastrées section ZN 63 et ZN 661 situées rue Nationale à Chécy.
Par un jugement n°1404770 du 1er mars 2016, le tribunal administratif d'Orléans a annulé cette décision.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 avril 2016, la commune de Chécy, représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 1er mars 2016 ;
2°) de mettre à la charge de M. et Mme D...la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier faute de comporter la mention de l'audition ou de l'absence d'audition au cours de l'audience du représentant de la commune de Chécy, qui avait présenté des conclusions au fond en vue de cette audience, ainsi que de sa convocation ou de son absence de convocation ;
- ce jugement est insuffisamment motivé en ce qu'il ne fait pas référence aux pièces qu'elle avait communiquées au tribunal, relatives notamment à l'intérêt général dans lequel elle a exercé le droit de préemption en l'espèce, ni à aucun précédent jurisprudentiel ;
- il est également entaché d'erreur de droit, d'erreur de fait et d'erreur d'appréciation pour avoir considéré que la décision contestée a été prise en méconnaissance des dispositions des articles L. 210-1 et L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors que le droit de préemption a ici été exercé dans l'intérêt général afin de constituer une réserve foncière en vue de mettre en oeuvre la politique locale de l'habitat de la communauté d'agglomération orléanaise pour réaliser des logements sociaux, ainsi que cela ressort des pièces du dossier.
Par un mémoire en défense enregistré le 19 juillet 2016, M. et MmeD..., représentés par MeA..., concluent au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 500 euros soit mise à la charge de la commune de Chécy au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils font valoir que les moyens soulevés par la commune de Chécy ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Massiou,
- et les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public.
1. Considérant que la commune de Chécy (Loiret) relève appel du jugement du 1er mars 2016 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a, à la demande de M. et MmeD..., annulé la décision du 23 octobre 2014 par laquelle le maire de cette commune a exercé, au nom de la commune, le droit de préemption urbain sur les parcelles cadastrées section ZN 63 et ZN 661 situées rue Nationale à Chécy ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, relatif aux mentions obligatoires du jugement, dans sa version alors en vigueur : " La décision mentionne que l'audience a été publique (...). Mention y est faite que le rapporteur et le rapporteur public et, s'il y a lieu, les parties, leurs mandataires ou défenseurs (...) ont été entendus. (...) " ; qu'il ressort des énonciations du jugement attaqué que l'audience s'est tenue publiquement après que les parties y ont été convoquées ; qu'il y est également fait mention de ce que le rapporteur, le rapporteur public et le conseil de M. et Mme D...y ont été entendus ; que la commune de Chécy ne soutient pas avoir été représentée à l'audience et avoir, à ce titre, demandé à présenter des observations orales ; qu'elle n'est, par suite, pas fondée à se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, qui n'imposent la mention des observations des parties que si celles-ci ont effectivement usé de la possibilité d'en présenter ;
3. Considérant, en second lieu, que les premiers juges n'avaient pas l'obligation de mentionner dans leur jugement tant le détail des pièces produites par les parties que les précédents jurisprudentiels dont elles se sont prévalues devant eux ; que la commune de Chécy n'est, par suite, pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé à cet égard ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, dans sa version alors en vigueur : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1 (...) ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. / Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé. (...)/ Lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme local de l'habitat ou, en l'absence de programme local de l'habitat, lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme de construction de logements locatifs sociaux, la décision de préemption peut, sauf lorsqu'il s'agit d'un bien mentionné à l'article L. 211-4, se référer aux dispositions de cette délibération. (...) " ;
5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les collectivités titulaires du droit de préemption urbain peuvent légalement exercer ce droit, d'une part, si elles justifient, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date et, d'autre part, si elles font apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption ; que, lorsque la loi autorise la motivation par référence à un programme local de l'habitat, les exigences résultant de l'article L. 210-1 doivent être regardées comme remplies lorsque la décision de préemption se réfère à une délibération fixant le contenu ou les modalités de mise en oeuvre de ce programme, et qu'un tel renvoi permet de déterminer la nature de l'action ou de l'opération d'aménagement que la collectivité publique entend mener au moyen de cette préemption ; qu'à cette fin, la collectivité peut soit indiquer la nature de l'action ou de l'opération d'aménagement du programme local de l'habitat à laquelle la décision de préemption participe, soit se borner à renvoyer à la délibération si celle-ci permet d'identifier la nature de l'action ou de l'opération d'aménagement poursuivie, eu égard notamment aux caractéristiques du bien préempté et au secteur géographique dans lequel il se situe ;
6. Considérant que la décision du 23 octobre 2014 mentionne que " la commune souhaite exercer son droit de préemption urbain pour constituer une réserve foncière en vue de mettre en oeuvre les objectifs de la politique locale de l'habitat de la communauté d'agglomération orléanaise ", sans pour autant viser la délibération fixant le contenu ou les modalités de mise en oeuvre de cette politique, ni la nature de l'action ou de l'opération d'aménagement à laquelle la décision de préemption participe ; qu'aucune autre mention de la décision contestée ne permet de déterminer la nature du projet en vue duquel le droit de préemption urbain a été exercé en l'espèce ; que c'est, dès lors, à bon droit que les premiers juges ont considéré que cette décision était insuffisamment motivée au regard des exigences des dispositions précitées de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme ;
7. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est de nature à justifier l'annulation prononcée par le présent arrêt ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Chécy n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision du 23 octobre 2014 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme D...qui n'ont pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, la somme dont la commune de Chécy sollicite le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par M. et MmeD..., en mettant à la charge de la commune de Chécy la somme de 1 500 euros ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Chécy est rejetée.
Article 2 : La commune de Chécy versera la somme de 1 500 euros à M. et Mme D...en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Chécy et à M. et Mme B... et ChantalD....
Délibéré après l'audience du 21 juin 2017, où siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- Mme Massiou, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 juillet 2017.
Le rapporteur,
B. MASSIOULe président,
H. LENOIR
Le greffier,
F. PERSEHAYE
La République mande et ordonne au ministre de la Cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16NT01377