Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E...C...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 24 mars 2014 par lequel le maire de la commune de Lucé l'a radiée des cadres de la commune pour abandon de poste.
Par un jugement n° 1403368 du 10 mars 2015 le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 9 octobre 2015 et 23 mars 2017 Mme E... C..., représentée par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1403368 du 10 mars 2015 du tribunal administratif d'Orléans ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 mars 2014 du maire de la commune de Lucé la radiant des cadres de la commune pour abandon de poste ;
3°) de mettre à la charge de la commune le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que ;
- le jugement du tribunal administratif est irrégulier dès lors qu'il ne mentionne dans ses visas aucune analyse de son mémoire en réplique ni des conclusions et moyens qu'elle y a présentés ;
- l'arrêté du 24 mars 2014 a été pris par une autorité incompétente et méconnaît les dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;
- elle n'a pas abandonné son poste car elle venait de formuler une demande de congé de longue maladie ; son état de santé ne lui permettait pas de prendre conscience du risque encouru en ne se présentant pas à son poste ;
- l'arrêté contesté est entaché de détournement de pouvoir ; elle était en effet en litige avec la commune pour des faits de harcèlement moral.
Par un mémoire en défense enregistré le 5 janvier 2016 la commune de Lucé, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme C... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens invoqués par Mme C...ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 28 février 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 28 mars 2017 en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Par ordonnance du 24 mars 2017, la clôture d'instruction a été reportée au 11 avril 2017 à 12h00.
Mme E... C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale au titre de cette instance et Me F... a été désigné pour la représenter par une décision du 18 août 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique des collectivités territoriales ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M.D...,
- et les conclusions de M. Giraud, rapporteur public.
1. Considérant que Mme C..., assistante spécialisée d'enseignement artistique employée par la commune de Lucé au sein du conservatoire municipal en qualité de professeur de piano, relève appel du jugement du 10 mars 2015 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de cette commune du 24 mars 2014 la radiant des cadres pour abandon de poste ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 du décret du 30 juillet 1987 : " Le comité médical (...) est consulté obligatoirement pour : (...) b) L'octroi et le renouvellement des congés de longue maladie (...) " ;
3. Considérant qu'une mesure de radiation de cadres pour abandon de poste ne peut être régulièrement prononcée que si l'agent concerné a, préalablement à cette décision, été mis en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service dans un délai approprié qu'il appartient à l'administration de fixer ; qu'une telle mise en demeure doit prendre la forme d'un document écrit, notifié à l'intéressé, l'informant du risque qu'il encourt d'une radiation de cadres sans procédure disciplinaire préalable ; que lorsque l'agent ne s'est ni présenté ni n'a fait connaître à l'administration aucune intention avant l'expiration du délai fixé par la mise en demeure, et en l'absence de toute justification d'ordre matériel ou médical, présentée par l'agent, de nature à expliquer le retard qu'il aurait eu à manifester un lien avec le service, cette administration est en droit d'estimer que le lien avec le service a été rompu du fait de l'intéressé ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme C...a été placée en congé de longue durée jusqu'au 15 mai 2013 puis en congé de maladie ordinaire du 19 septembre 2013 au 20 février 2014 ; qu'en réponse à une lettre du 5 février 2014 par laquelle la commune de Lucé a informé l'intéressée qu'une nouvelle prolongation de son arrêt de travail impliquerait la saisine du comité médical et lui a demandé de préciser si son état de santé était susceptible de relever, selon son médecin traitant, d'un congé de longue maladie ou de longue durée, Mme C...a transmis le 20 février 2014 un pli contenant une demande de congé de longue maladie, accompagnée d'un certificat médical attestant que son état de santé justifiait l'attribution d'un tel congé ; que cependant la commune a, le 24 février 2014, refusé, en raison de son affranchissement insuffisant, d'accepter ce pli, qui a été retourné à son expéditeur par les services de la Poste ; que, par une lettre du 17 mars 2014, le maire a, d'une part, rappelé à l'intéressée que depuis la fin de son dernier congé pour maladie ordinaire, prolongé jusqu'au 20 février 2014, elle n'avait pas repris ses fonctions ni fourni aucune prolongation d'arrêt de travail et, d'autre part, mis en demeure l'intéressée de reprendre son poste le lundi 24 mars 2014, en lui rappelant que dans l'hypothèse d'une absence elle serait radiée des effectifs pour abandon de poste, sans qu'il soit nécessaire d'engager une procédure disciplinaire à son encontre ; que si cette mise en demeure a été adressée par courrier recommandé à Mme C...qui en a accusé réception le 20 mars 2014, il n'est pas contesté que, parallèlement, l'intéressée n'a reçu que le samedi 22 mars 2014 retour du courrier portant demande de placement en congé de longue maladie qu'elle avait elle-même adressé le 20 février 2014 à la commune, qui avait refusé de le recevoir ; qu'ainsi, jusqu'à cette date du 22 mars 2014, la requérante était en situation de penser que sa demande de congé de longue maladie était en cours d'examen par l'administration municipale, et qu'elle n'a disposé que du samedi 22 mars et du dimanche 23 mars, jours non ouvrables, pour prendre réellement conscience du risque encouru en ne se présentant pas à son poste le lundi 24 mars au matin ; que, dans les circonstances particulières de l'espèce, Mme C... doit être regardée comme n'ayant pas bénéficié d'un délai suffisant à cet égard ; que, par suite, l'arrêté contesté du 24 mars 2014 la radiant des cadres pour abandon de poste a été pris à la suite d'une procédure irrégulière et ne peut qu'être annulé ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme C..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Lucé demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la commune de Lucé le versement à Mme C... de la somme que celle-ci demande au titre des mêmes frais ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1403368 du 10 mars 2015 du tribunal administratif d'Orléans et l'arrêté du 24 mars 2014 du maire de la commune de Lucé sont annulés.
Article 2 : Les conclusions de Mme C... et de la commune de Lucé présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C...et à la commune de Lucé.
Délibéré après l'audience du 11 mai 2017, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- M. Lemoine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 24 mai 2017.
Le président rapporteur,
I. Perrot
L'assesseur,
O. CoiffetLe greffier,
M. B...
La république mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT02963