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18/04/2017 | FRANCE | N°16NT00122

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 18 avril 2017, 16NT00122


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les décisions des 20 décembre 2012 et 8 mars 2013 par lesquelles le ministre de l'intérieur a ajourné sa demande de naturalisation et a confirmé ce refus en rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n°1303287 du 10 juillet 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 janvier 2016, M. B...A..., représenté par Me Bedrossian, demande à la

cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 juillet 2015 ;

2°) d'annuler la décision d'ajourneme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les décisions des 20 décembre 2012 et 8 mars 2013 par lesquelles le ministre de l'intérieur a ajourné sa demande de naturalisation et a confirmé ce refus en rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n°1303287 du 10 juillet 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 janvier 2016, M. B...A..., représenté par Me Bedrossian, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 juillet 2015 ;

2°) d'annuler la décision d'ajournement du ministre du 20 décembre 2012 ainsi que sa décision du 8 mars 2013 portant rejet de son recours administratif ;

3°) d'enjoindre au ministre de procéder à un réexamen de sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son avocat renonce à percevoir le montant de la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

M. A...soutient que la décision d'ajournement sa demande de réintégration dans la nationalité française est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que, reconnu handicapé à plus de 80% depuis le 7 août 2008, il est dans l'incapacité totale de pouvoir s'insérer matériellement, faute de pouvoir exercer une activité salariée dans des conditions normales.

Par un mémoire en défense, enregistrés le 28 janvier 2016, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Le ministre fait valoir qu'aucun des moyens d'annulation soulevés par le requérant n'est fondé.

Par ordonnance du 13 décembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 12 janvier 2017 à 12 heures.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 novembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 91- 647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 29 décembre 1991 ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 modifié ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Mony a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.A..., ressortissant algérien, relève appel du jugement en date du 10 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa requête tendant à l'annulation des décisions des 20 décembre 2012 et 8 mars 2013 par lesquelles le ministre de l'intérieur a, d'une part, ajourné sa demande de naturalisation, et, d'autre part, rejeté le recours gracieux formé contre cette décision ;

Sur les conclusions en annulation :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour rejeter la demande de réintégration dans la nationalité française présentée par M.A..., le ministre de l'intérieur s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé ne disposait pas de ressources stables et suffisantes et ne subvenait à ses besoins qu'à l'aide de prestations sociales, d'une part, et qu'il n'avait pas réalisé son insertion professionnelle, alors qu'il peut exercer une activité professionnelle compatible avec son handicap, d'autre part ; qu'il ressort également des pièces du dossier que M. A... s'est vu reconnaître par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées du Rhône, le 19 septembre 2012, en même temps que le renouvellement du bénéfice de l'allocation aux adultes handicapés, qu'il percevait au moins depuis le mois de janvier 2009, un taux d'incapacité d'au moins 80 % ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française : " (...) Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions (...) " ; que s'il appartient ainsi au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la sollicite ou de réintégrer ce dernier dans la nationalité française, ce dernier, même s'il dispose en la matière d'un large pouvoir d'appréciation, ne peut toutefois, pour rejeter une telle demande, ni se fonder exclusivement sur l'existence d'une maladie ou d'un handicap ni sur le fait que les ressources dont dispose l'intéressé ont le caractère d'allocations accordées en compensation d'un handicap ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...n'exerce plus aucune activité professionnelle depuis plusieurs années en raison de son mauvais état de santé, à l'origine d'une restriction substantielle et durable de son accès à l'emploi, reconnue à l'intéressé par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées du Rhône ; que M.A..., en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de l'action sociale et des familles, bénéficie depuis au moins le mois de janvier 2009, le bénéfice lui en ayant été renouvelé à compter du 1er décembre 2012, de l'allocation d'adulte handicapé ; que le ministre, quand bien même M. A...pourrait exercer une activité dans une structure spécialisée pouvant fournir un travail aux personnes handicapées compatible avec leur handicap, ne pouvait ainsi se fonder exclusivement sur la circonstance que l'intéressé n'exerçait pas d'activité professionnelle pour refuser de faire droit à sa demande de naturalisation, dès lors que les ressources dont celui-ci disposait alors présentaient le caractère d'allocations accordées en compensation d'un handicap et que les revenus qu'il serait susceptible de se procurer en travaillant dans un tel établissement spécialisé ne sauraient, en tout état de cause, suffire à assurer son autonomie matérielle ; qu'en conséquence, le moyen invoqué par M. A...tiré de l'erreur manifeste qu'aurait commis le ministre en ce qui concerne l'appréciation de sa situation personnelle doit être accueilli ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nantes a, par le jugement attaqué, rejeté sa demande d'annulation des décisions du ministre de l'intérieur des 20 décembre 2012 et 8 mars 2013 ;

Sur les conclusions en injonction de M.A... :

6. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement, en raison de ses motifs, que le ministre de l'intérieur procède au réexamen de la demande de naturalisation présentée par M. A...; que les conclusions de ce dernier à fin d'injonction en ce sens doivent dès lors être accueillies ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au ministre de procéder au réexamen de la demande de naturalisation de M. A...dans un délai de deux mois ;

Sur les conclusions en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de M.A... :

7. Considérant que M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Bedrossian, avocate de l'intéressé, d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que cette dernière s'engage à renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 10 juillet 2015 et les décisions du ministre de l'intérieur des 20 décembre 2012 et 8 mars 2013 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de procéder au réexamen de la demande de naturalisation de M. A...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Bedrossian une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que son conseil s'engage à renoncer à percevoir le bénéfice de la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 31 mars 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président,

- M. Francfort, président assesseur,

- M. Mony, premier conseiller,

Lu en audience publique le 18 avril 2017.

Le rapporteur,

A. MONY

Le président,

H. LENOIRLe greffier,

C. GOY

2

N° 16NT00122


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT00122
Date de la décision : 18/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Arnaud MONY
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : BEDROSSIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-04-18;16nt00122 ?
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