Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... C...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 2 avril 2014 du préfet du Loiret rejetant sa demande de régularisation de sa situation administrative au regard des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un jugement n° 1402205 du 1er décembre 2015, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 17 février et 29 avril 2016, Mme B...C..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 1er décembre 2015 ;
2°) d'annuler la décision du 2 avril 2014 ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, au préfet du Loiret de lui délivrer un titre de séjour à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision contestée est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- le préfet a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision contestée est contraire aux dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le préfet a méconnu les stipulations des articles 3-1 et 9 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- la décision portant " invitation à quitter le territoire français ", qui vise l'article L. 621-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui a été abrogé le 2 janvier 2013, est entachée d'une erreur de droit.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mars 2016, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens soulevés à l'encontre de l'invitation à quitter le territoire français sont irrecevables dans la mesure où elle ne constitue pas une décision faisant grief ;
- les autres moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 janvier 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- la loi n° 2012-1560 du 31 décembre 2012 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Gélard a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme B...C..., ressortissante turque, relève appel du jugement du 1er décembre 2015 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 avril 2014 du préfet du Loiret rejetant sa demande de régularisation de sa situation administrative au regard des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur la décision portant refus de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée indique que Mme B... C...a présenté une première demande de régularisation de sa situation administrative au regard du séjour le 14 février 2011 et que cette demande a été rejetée par une décision du 2 janvier 2012 dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif d'Orléans du 15 octobre 2013 et que l'intéressée s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français depuis cette date ; que le préfet du Loiret a également rappelé que Mme C..., qui s'exprimait très difficilement en français et le comprenait à peine, n'était pas intégrée à la société française et qu'elle n'avait présenté aucun argument susceptible de constituer une considération humanitaire ou un motif exceptionnel au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile tout en soulignant que quatre de ses enfants vivaient en Turquie et que sa cellule familiale pouvait s'y reconstituer ; que si la requérante soutient que la décision qu'elle conteste est insuffisamment motivée en ce qu'elle ne vise ni le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'est pas contesté que sa demande était fondée sur le seul article L. 313-14 de ce code et que le préfet a par ailleurs examiné de manière approfondie sa situation personnelle et familiale et a estimé qu'elle n'entrait dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que dans ces conditions, et alors même que Mme C... ne serait pas entrée en France via l'Allemagne, le 15 avril 2006, mais directement en France, la décision contestée comporte les considérations de droit et fait qui en constituent le fondement et est suffisamment motivée ; qu'elle ne révèle aucun défaut d'examen de sa situation personnelle et familiale ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que le préfet du Loiret a indiqué que Mme C... était susceptible de faire l'objet d'une " mesure administrative de reconduite à la frontière " en application des dispositions de " l'article L. 621-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ", qui a été abrogé par la loi susvisée du 31 décembre 2012, est sans incidence sur la légalité de la décision contestée qui porte seulement refus de régularisation de sa situation administrative et de délivrance d'un titre de séjour ; que par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit invoqué par la requérante, ne peut qu'être écarté ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que si le mari de Mme C... ainsi que leurs deux enfants nés respectivement les 10 janvier 2007 et 29 décembre 2007 résident régulièrement en France, il est constant que le couple qui s'est marié le 25 mars 2000, a vécu séparément depuis plusieurs années dès lors que M. D...C...disposait d'un contrat de travail à durée indéterminée au sein de la société Hutchinson située à Chalette-sur-Loing (Loiret) depuis le 15 avril 1999 et que son épouse n'est entrée en France qu'au cours de l'année 2006 ; que l'intéressée, qui a sollicité sa régularisation le 14 février 2011, s'est maintenue irrégulièrement en France en dépit du rejet de sa demande qui, si elle ne portait pas expressément obligation de quitter le territoire français, ne l'autorisait pas à se maintenir en France sans titre de séjour ; que si la requérante justifie avoir suivi des cours de français depuis plusieurs années, le préfet a indiqué dans sa décision contestée, sans être sérieusement contredit, qu'elle ne comprenait et ne parlait pas correctement cette langue alors qu'elle résidait en France depuis 2006 et qu'elle ne justifiait pas de son insertion dans la société française ; qu'il est constant par ailleurs, que quatre des enfants du couple, nés respectivement en 1996, 1999, 2004 et 2005, résident toujours en Turquie ; que si la requérante soutient qu'une demande de regroupement familial a été présentée afin qu'ils rejoignent leurs parents sans toutefois préciser ni la date, ni le sens de la réponse apportée à cette demande, il n'est pas établi que la cellule familiale serait dans l'impossibilité de se reconstituer dans leur pays d'origine ; qu'en se bornant à produire les bulletins de paie de son conjoint, les attestations de la caisse d'allocations familiales lui accordant le bénéfice de l'aide médicale d'Etat, le bail attestant de la disposition d'un logement et les bulletins et certificats de scolarité de ses deux enfants nés en France, l'intéressée ne justifie d'aucune circonstance humanitaire ou motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que dans ces conditions, et en dépit de la durée de sa présence en France, Mme C... n'est pas fondée à soutenir qu'en refusant de régulariser sa situation le préfet aurait méconnu ces dispositions ;
5. Considérant, en quatrième lieu, que pour les motifs évoqués ci-dessus la requérante n'est pas davantage fondée à soutenir que le préfet du Loiret aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni en tout état de cause les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en refusant de régulariser sa situation administrative le préfet du Loiret n'a pas non plus commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée ;
6. Considérant, enfin, que depuis son entrée en France en 2006, la requérante ainsi que son mari ont vécu séparément de leurs quatre enfants tous mineurs restés en Turquie ; qu'il n'est pas établi que Mme C... serait dans l'impossibilité d'emmener avec elle dans son pays d'origine ses deux enfants nés en France en 2007 et que son mari, qui a la même nationalité, ne pourrait les rejoindre en Turquie ; que dans ces conditions, l'intéressée, qui ne saurait utilement se prévaloir des stipulations de l'article 9 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 qui créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits à leurs ressortissants, n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée serait contraire aux stipulations de l'article 3-1 de la même convention ;
Sur l'invitation à quitter le territoire français :
7. Considérant que si dans sa décision du 2 avril 2014 le préfet du Loiret a par ailleurs invité Mme C... à prendre toutes dispositions utiles pour quitter la France à destination du pays de son choix dans un délai d'un mois, il a également précisé qu'en cas de maintien sur le territoire français l'intéressée s'exposerait à des poursuites judiciaires ainsi qu'à une " mesure administrative de reconduite à la frontière " ; que cette " invitation à quitter le territoire français " ne peut être regardée comme une mesure d'éloignement du territoire français au sens de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile faisant grief à Mme C... ; que dès lors, elle n'est pas fondée à en demander l'annulation et ses moyens dirigés contre cette " invitation à quitter le territoire français " ne peuvent qu'être écartés ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction, sous astreinte :
9. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de Mme C..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que par suite, les conclusions de l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au préfet du Loiret de lui délivrer un titre de séjour doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de Mme C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C...et au ministre de l'intérieur.
Une copie sera transmise au préfet du Loiret.
Délibéré après l'audience du 7 mars 2017 à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. Millet, président-assesseur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 mars 2017
Le rapporteur,
V. GELARDLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
S. BOYERE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°16NT00554