Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 21 mars 2014 par laquelle le président du conseil général du Cher a prononcé le retrait de son agrément en qualité d'assistante familiale et la décision du 10 avril 2014 par laquelle cette même autorité l'a licenciée de ses fonctions d'assistante familiale.
Par un jugement n° 1402000 du 8 octobre 2015, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 9 décembre 2015, Mme B...A..., représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1402000 du 8 octobre 2015 du tribunal administratif d'Orléans ;
2°) d'enjoindre au président du conseil départemental du Cher de la rétablir dans ses fonctions d'assistante familiale à compter du 10 avril 2014, date de son éviction, et de reconstituer sa carrière pour la période d'exclusion du 21 mai 2014 au jour de sa réintégration effective dans ses fonctions ;
3°) de mettre à la charge du département du Cher une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal s'est fondé sur le rapport partisan d'une psychologue qui s'est employée à déformer ses propos voire à inscrire des informations parfaitement erronées sur sa vie, qui dès lors fragilisent toute l'analyse qui en découle ; le tribunal a également déformé le sens du rapport de la direction " enfance adolescence famille " et en a repris des éléments parcellaires ; elle a exprimé, lors de ces entretiens, un souhait d'évolution professionnelle dont il ne peut lui être tenu rigueur et qui s'inscrivait dans la continuité d'une expérience récente d'accueil permanent ; les décisions sont entachées d'erreur d'appréciation ;
- les décisions sont entachées d'un détournement de pouvoir : le conseil général a cherché des griefs à son encontre pour lui retirer son agrément et la licencier ; elle n'a jamais fait parler d'elle depuis 6 ans d'exercice sur le plan disciplinaire ; elle est aujourd'hui sanctionnée pour avoir émis le souhait d'une évolution professionnelle ;
- les décisions sont entachées d'une erreur de droit au regard de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 421-15 du code de l'action sociale et des familles ; le conseil général ne l'a pas mise en capacité d'améliorer son positionnement et ses pratiques éducatives en ne la faisant pas participer à la formation continue qui est pourtant une obligation légale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mai 2016, le département du Cher, représenté par Me Gourdain, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme A...une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Une ordonnance du 12 octobre 2016 a porté clôture de l'instruction au 3 novembre 2016 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bouchardon ;
- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public ;
- et les observations de Me Gourdain, avocat du département du Cher.
1. Considérant que MmeA..., qui a obtenu un agrément lui permettant d'exercer la profession d'assistante familiale le 23 mars 2006, a été recrutée le 15 mai suivant en cette qualité par le département du Cher, notamment pour l'accueil en urgence d'enfants ou adolescents ; qu'elle a demandé en 2013 à son employeur que son agrément prévu pour deux soit étendu à l'accueil d'un troisième enfant ; qu'à l'occasion de l'examen de cette demande, le bénéfice de son agrément a été remis en cause ; que, par décisions des 21 mars et 10 avril 2014, le président du conseil général du Cher, après avis favorable de la commission d'agrément réunie le 2 décembre 2013, a respectivement prononcé le retrait de l'agrément en qualité d'assistante familiale de Mme A...aux motifs que " les entretiens d'évaluation menés dans le cadre de la demande d'extension (...) n'ont pas permis de repérer ses capacités à poser un cadre éducatif cohérent, structurant et adapté aux besoins de l'enfant " et que " face aux mises en situation proposées et à son expérience professionnelle, son positionnement éducatif est apparu rigide avec peu de propositions éducatives pour l'enfant confié et une remise en cause des pratiques limitée ", et l'a licenciée de ses fonctions d'assistante familiale ; que Mme A...relève appel du jugement du 8 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 21 mars 2014 portant retrait d'agrément :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 421-2 du code de l'action sociale et des familles : " L'assistant familial est la personne qui, moyennant rémunération, accueille habituellement et de façon permanente des mineurs et des jeunes majeurs de moins de vingt et un ans à son domicile. Son activité s'insère dans un dispositif de protection de l'enfance, un dispositif médico-social ou un service d'accueil familial thérapeutique. Il exerce sa profession comme salarié de personnes morales de droit public ou de personnes morales de droit privé dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre ainsi que par celles du chapitre III du présent livre, après avoir été agréé à cet effet. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 421-3 du même code : " (...) L'agrément est accordé (...) si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne (...) " et qu'aux termes de l'article L. 421-6 dudit code : " (...) Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil départemental peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait. (...). / Toute décision de retrait de l'agrément (...) doit être dûment motivée et transmise sans délai aux intéressés(...) " ;
3. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées qu'il incombe au président du conseil départemental de s'assurer que les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis et de procéder au retrait de l'agrément si ces conditions ne sont plus remplies ; qu'à cette fin, dans l'hypothèse où il est informé de suspicions de comportements susceptibles de compromettre ces conditions de la part du bénéficiaire de l'agrément, il lui appartient de tenir compte de tous les éléments portés à la connaissance des services compétents du département ou recueillis par eux et de déterminer si ces éléments sont suffisamment établis pour lui permettre raisonnablement de penser que les conditions de l'agrément ne sont plus remplies ;
4. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, d'une part, qu'à la suite de la demande formulée par Mme A...d'extension de son agrément à trois enfants, celle-ci a fait l'objet d'une enquête psychologique menée en deux entretiens, les 17 juillet et 6 août 2013 ; que le rapport qui en a résulté conclut à l'expression d'un avis défavorable à la demande de MmeA..., et plus encore à une proposition de retrait de son agrément en qualité d'assistante familiale, du fait de l'incapacité de celle-ci à proposer aux enfants accueillis " un positionnement éducatif pertinent, une présence étayante, un lieu sécurisant psychiquement ", en raison de la fragilité psychologique de l'intéressée, que les entretiens ont révélée ; que, d'autre part, le rapport de la direction " enfance adolescence famille " du département du Cher du 27 novembre 2013 relève que " les principales règles éducatives se situent autour de règles de vie (...) il semble difficile pour Mme A...de percevoir les besoins et les difficultés des jeunes (...) elle semble mesurer difficilement les enjeux liés à l'accueil familial et sa spécificité " ;
5. Considérant que si Mme A...conteste les conclusions de la note d'évaluation psychologique précitée, elle ne démontre pas les erreurs qu'elle contiendrait, par la simple production de déclarations de ses parents à son soutien ; qu'en outre, sans remettre en cause leur valeur, les témoignages, notamment de proches ou de voisins produits au dossier, s'ils mettent en avant les capacités d'organisation de l'intéressée, ne permettent pas davantage de contredire la pertinence des critiques exprimées par une professionnelle, reposant sur une approche concrète des comportements susceptibles d'être adoptés par la requérante dans l'exercice de ses fonctions d'assistante familiale, telles que contenues dans l'évaluation psychologique qui a notamment servi de fondement à la décision contestée ; que cette dernière n'est dès lors pas entachée de l'erreur d'appréciation invoquée ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que le détournement de pouvoir allégué par Mme A...n'est pas établi par les pièces du dossier dès lors qu'il n'en ressort aucunement que la décision de retrait d'agrément aurait été prise pour une autre raison que celles tenant aux conditions d'attribution de cet agrément prévues par les dispositions précitées du code de l'action sociale et des familles ;
7. Considérant, en troisième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 421-15 du code de l'action sociale et des familles : " (...). Dans le délai de trois ans après le premier contrat de travail suivant son agrément, tout assistant familial doit suivre une formation adaptée aux besoins spécifiques des enfants accueillis. Cette formation est à la charge de l'employeur qui organise et finance l'accueil de l'enfant pendant les heures de formation (...) " ;
8. Considérant qu'il n'est pas établi par les pièces du dossier que la circonstance que MmeA..., qui ne l'avait d'ailleurs pas demandé, n'a pas suivi la formation mise en oeuvre par les services du département du Cher adaptée aux besoins spécifiques des enfants accueillis, telle que prévue par les dispositions précitées, aurait été de nature à modifier les conclusions contenues dans l'évaluation psychologique de l'intéressée ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 21 mars 2014 par laquelle le président du conseil général du Cher a prononcé le retrait de son agrément en qualité d'assistante familiale ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 10 avril 2014 portant licenciement de MmeA... :
10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 423-8 du code de l'action sociale et des familles, applicable aux assistants familiaux employés par des personnes morales de droit public en application de l'article L. 422-1 du même code : " en cas de retrait d'agrément, l'employeur est tenu de procéder au licenciement (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le président du conseil général était placé en situation de compétence liée ; que, par suite, l'ensemble des moyens soulevés à l'encontre de cette dernière décision par Mme A...ne peuvent que rester sans incidence sur sa légalité ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 10 avril 2014 par laquelle le président du conseil général du Cher a prononcé son licenciement ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
12. Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme A...ne peuvent par suite qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du département du Cher, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que Mme A...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme A...la somme que le département du Cher demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le département du Cher au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et au département du Cher.
Délibéré après l'audience du 28 février 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président assesseur,
- M. Bouchardon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 mars 2017.
Le rapporteur,
L. BOUCHARDONLe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
V. DESBOUILLONS La République mande et ordonne au préfet du Cher en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT03800