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30/01/2017 | FRANCE | N°16NT00515

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 30 janvier 2017, 16NT00515


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 22 juin 2012 par laquelle le préfet de l'Indre a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation, ainsi que la décision du ministre de l'intérieur du 11 décembre 2012 rejetant son recours dirigé contre cette première décision.

Par un jugement n° 1302833 du 28 août 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés

les 15 février et 1er août 2016, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 22 juin 2012 par laquelle le préfet de l'Indre a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation, ainsi que la décision du ministre de l'intérieur du 11 décembre 2012 rejetant son recours dirigé contre cette première décision.

Par un jugement n° 1302833 du 28 août 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 15 février et 1er août 2016, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 28 août 2015 ;

2°) d'annuler les décisions des 22 juin et 11 décembre 2012.

Elle soutient que :

- les décisions attaquées sont insuffisamment motivées ;

- elles sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il ne peut lui être reproché d'avoir introduit sa fille en France hors de la procédure de regroupement familial, celle-ci étant entrée légalement sur le territoire français, sous couvert d'un visa Schengen délivré par les autorités italiennes ;

- ces décisions sont également entachées d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation car la condition de ressources ne peut lui être opposée, dès lors qu'elle n'est pas prévue par les textes, et qu'elle a travaillé dès qu'elle le pouvait depuis qu'elle est en France et ne peut désormais plus travailler.

Par un mémoire en défense enregistré le 8 mars 2016, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- les conclusions dirigées contre la décision préfectorale du 22 juin 2012 sont irrecevables, sa décision du 11 décembre suivant s'y étant substituée ;

- les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.

Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 décembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité français ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Massiou a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeA..., ressortissante congolaise bénéficiaire du statut de réfugié, relève appel du jugement du 28 août 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de l'Indre du 22 juin 2012 ajournant à deux ans sa demande de naturalisation, et de la décision du ministre de l'intérieur du 11 décembre 2012 rejetant son recours dirigé contre cette première décision ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision préfectorale du 22 juin 2012 :

2. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 45 du décret du 30 décembre 1993 que les décisions par lesquelles le ministre en charge des naturalisations statue sur les recours préalables obligatoires se substituent à celles des autorités préfectorales qui lui sont soumises ; que, par suite, la décision du 11 décembre 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans la demande de naturalisation de Mme A...s'est substituée à celle prise par le préfet de l'Indre le 22 juin 2012 ; que le ministre de l'intérieur est, dès lors, fondé à soutenir que les conclusions de la requête tendant à l'annulation de cette dernière décision doivent être rejetées en tant qu'elles sont irrecevables ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision ministérielle du 11 décembre 2012 :

3. Considérant, en premier lieu, que la décision attaquée mentionne qu'elle est fondée sur les dispositions des articles 45 et 48 du décret du 30 décembre 1993 et sur les circonstances selon lesquelles, d'une part, Mme A...a introduit sur le territoire français sa fille née en 1998 hors de la procédure de regroupement familial et, d'autre part, l'examen du parcours professionnel de l'intéressée, apprécié dans sa globalité, ne permettait pas de considérer qu'elle avait pleinement réalisé son insertion professionnelle, ne disposant pas de ressources suffisantes et stables ; que cette décision comporte, dès lors, la mention des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée ;

4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger. " ; qu'en vertu de l'article 27 de ce même code, l'administration a le pouvoir de rejeter ou d'ajourner une demande de naturalisation ; qu'en outre, selon l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 : " (...) Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation (...) sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande. " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au préfet, ainsi qu'au ministre, saisi sur recours préalable obligatoire, de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le postulant, ainsi que son degré d'autonomie matérielle, apprécié au regard du caractère suffisant et durable de ses ressources propres ;

5. Considérant que pour ajourner à deux ans la demande de naturalisation de Mme A...le ministre de l'intérieur s'est fondé sur les motifs évoqués au point 3 du présent arrêt ;

6. Considérant, d'une part, qu'il est constant que la fille de MmeA..., née en 1998, est entrée en France en 2011 sous couvert d'un visa de court séjour délivré par les autorités italiennes et non d'un visa de long séjour sollicité au titre de la procédure de rapprochement familial de réfugié statutaire que la requérante avait parallèlement initiée ; que son entrée en France pour s'y maintenir à ce titre était ainsi irrégulière, le ministre ayant, dès lors, pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, fonder la décision d'ajourner la demande de naturalisation de Mme A...sur ce motif ;

7. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier qu'au mois d'octobre 2012, Mme A...était sans emploi ; qu'elle n'avait, par ailleurs, déclaré que 4 256 euros de revenus au titre de l'année 2010 et 6 202 euros au titre de l'année 2011 ; que la circonstance selon laquelle elle s'est vue reconnaître un taux d'incapacité compris entre 50 et 79 % par une décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées du 11 avril 2014, postérieure à la date de la décision attaquée, est sans incidence sur la légalité celle-ci, qui s'apprécie à la date à laquelle elle a été prise ; que, dès lors, alors même que Mme A...a occupé différents emplois depuis son entrée en France dans le cadre de contrats à durée déterminée, c'est sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur manifeste d'appréciation que le ministre s'est fondé sur l'insuffisance de son insertion professionnelle pour ajourner à deux ans sa demande de naturalisation ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 13 janvier 2017, où siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- Mme Massiou, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 janvier 2017.

Le rapporteur,

B. MASSIOULe président,

H. LENOIR

Le greffier,

F. PERSEHAYE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT00515


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT00515
Date de la décision : 30/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: Mme Barbara MASSIOU
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : SCP BONHOMME - LEAL

Origine de la décision
Date de l'import : 14/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-01-30;16nt00515 ?
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