Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Jardin d'Asie a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les décisions des 25 juin, 3 juillet et 23 août 2013 par lesquelles le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a mis en oeuvre à son encontre la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail fixée à un montant de 50 400 euros.
Par un jugement n° 1305035 du 2 octobre 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, et un mémoire, enregistrés les 2 novembre 2015 et 13 janvier 2016, la société Jardin d'Asie, représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 2 octobre 2015 ;
2°) d'annuler les décisions des 25 juin, 3 juillet et 23 août 2013 ;
3°) de minorer le montant de la contribution forfaitaire réclamée par l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors que les premiers juges ont omis de se prononcer sur le moyen tiré de l'interdiction de cumul des sanctions administratives, et plus particulièrement de la contribution forfaitaire et de la contribution spéciale, ainsi que sur ses conclusions tendant à la réduction de la contribution spéciale et ont également omis de statuer sur le moyen tiré de la violation du pacte international relatif aux droits civil et politique et de la charte des droits fondamentaux ;
- les décisions contestées, qui n'indiquent ni les faits qui lui sont reprochés, ni les éléments de liquidations des sommes dues, sont insuffisamment motivées ;
- il n'est pas établi que la décision du 23 août 2013 aurait été prise par une autorité compétente et plus particulièrement que M.I..., directeur de l'immigration était empêché ;
- les décisions contestées sont contraires au principe de non cumul des sanctions administratives dans la mesure où pour la contribution spéciale aucun cumul n'est prévu par les textes lorsqu'une contribution forfaitaire a été notifiée préalablement ;
- ces décisions ont été prises sur le fondement de textes qui méconnaissent le principe de non bis in idem prévu par l'article 50 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'article 4 du protocole n° 7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 14-7 du pacte international relatif aux droits civils et politiques ;
- les réserves émises par la France, qui ne sont pas conformes aux dispositions de l'article 57 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et revêtent manifestement un caractère général et ne comportent pas d'exposé de la loi visée qui est postérieure, et qui ont été relevées d'office par le tribunal administratif pour écarter l'application de l'article 4 du protocole n° 7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, sont inopérantes ;
- la règle de non bis in idem a vocation à s'appliquer dans la mesure où la contribution spéciale a une finalité répressive ;
- à titre subsidiaire, la somme qui lui est réclamée au titre de la contribution spéciale est manifestement disproportionnée et met gravement en péril sa pérennité.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 décembre 2015, l'Office français de l'immigration et de l'intégration, représenté par MeE..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 800 euros soit mise à la charge de la société Jardin d'Asie au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par la société Jardin d'Asie ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le pacte international relatif aux droits civils et politiques ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment son septième protocole ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code pénal ;
- le code du travail ;
-la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 ;
- le décret n° 89-37 du 24 janvier 1989 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gélard,
- les conclusions de Mme Piltant, rapporteur public ;
- et les observations de MeA..., substituant MeB..., représentant la société Jardin d'Asie.
1. Considérant que le 2 mars 2011, la société Jardin d'Asie a fait l'objet d'un contrôle des services de la police aux frontières intervenant sur réquisition du procureur de la République, lequel a révélé la présence dans le restaurant qu'elle exploite à Fougères de trois salariés de nationalité chinoise en situation irrégulière ; que par un arrêté du 11 mars 2012, le préfet d'Ille-et-Vilaine a condamné la société à une contribution forfaitaire de 6 927 euros sur le fondement de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour l'emploi de travailleurs étrangers en situation de séjour irrégulier ; que par une décision du 25 juin 2013, annulée et remplacée en raison d'une erreur matérielle par une décision du 3 juillet 2013, l'Office français de l'immigration et de l'intégration a réclamé à cette même société la somme de 50 400 euros au titre de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail pour l'emploi de trois travailleurs étrangers non munis du titre les autorisant à exercer une activité salariée en France ; que le recours gracieux présenté le 14 août 2013 par la société Jardin d'Asie a été rejeté le 23 août 2013 par l'Office français de l'immigration et de l'intégration ; que la société relève appel du jugement du 2 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces trois décisions ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant, en premier lieu, que les premiers juges ont indiqué au point 5 du jugement attaqué que la règle prévue à l'article 4 du protocole n° 7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne faisait pas obstacle à ce qu'une entreprise ayant commis une infraction au code du travail se voie appliquer la sanction administrative constituée par la contribution forfaitaire et la contribution spéciale ; qu'ils ont ajouté que la décision relative à la contribution spéciale due pour l'emploi d'un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France était distincte de la contribution forfaitaire qui est due pour chaque employé en situation irrégulière et que l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoyait expressément le cumul de la sanction pénale et des deux contributions, forfaitaire et spéciale ; que contrairement à ce que soutient la société requérante, les premiers juges ont donc répondu de manière suffisante au moyen tiré de l'interdiction de cumul des deux sanctions administratives ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que le tribunal administratif de Rennes a répondu au point 7 aux conclusions de la société Jardin d'Asie tendant à la réduction de la somme de 50 400 euros à laquelle elle a été assujettie au titre de la contribution spéciale ; que dès lors l'omission à statuer invoquée par la société requérante manque en fait ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'en se bornant à citer une jurisprudence du tribunal administratif de Strasbourg statuant sur un moyen tiré de la violation de l'article 14 du pacte international relatif aux droits civils et politiques, la société requérante ne peut être regardée comme ayant expressément entendu reprendre ce moyen ; que, par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que les premiers juges, qui ainsi qu'il a été dit au point 2 ont estimé que la règle " non bis in idem " n'avait pas été méconnue, auraient omis de répondre à cet autre moyen tiré de l'inconventionnalité des dispositions de l'article L. 8253-1 du code du travail ; que par ailleurs, les premiers juges n'étaient pas tenus de répondre au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 50 de la charte des droits fondamentaux, qu'ils ont visé, mais qui n'est opérant que dans le cadre de la mise en oeuvre du droit de l'Union ;
Sur les conclusions à fin d'annulation des décisions contestées :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 8253-1 du code du travail dans sa réaction issue de la loi du 7 mars 2016 : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte, pour chaque travailleur étranger non autorisé à travailler, une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Il est, au plus, égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. Ce montant peut être minoré en cas de non-cumul d'infractions ou en cas de paiement spontané par l'employeur des salaires et indemnités dus au salarié étranger non autorisé à travailler mentionné à l'article R. 8252-6. Il est alors, au plus, égal à 2 000 fois ce même taux. Il peut être majoré en cas de réitération et est alors, au plus, égal à 15 000 fois ce même taux. / L'Office français de l'immigration et de l'intégration est chargé de constater et de liquider cette contribution. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 8251-1 du code du travail : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. / Il est également interdit à toute personne d'engager ou de conserver à son service un étranger dans une catégorie professionnelle, une profession ou une zone géographique autres que celles qui sont mentionnées, le cas échéant, sur le titre prévu au premier alinéa. " ;
6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet
1979 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - infligent une sanction ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; que les décisions contestées visent notamment les articles L. 8251-1 et L. 8253-1 du code du travail, le procès-verbal d'infraction dressé le 2 mars 2011 ainsi que la lettre du 25 octobre 2011 par laquelle l'Office français de l'immigration et de l'intégration a informé la société Jardin d'Asie qu'elle encourait le paiement de la contribution spéciale prévue par ces dispositions ; qu'elles comprennent les éléments permettant, à leur lecture, de connaître les modalités de calcul de la contribution de 50 400 euros mise à la charge de la société pour l'emploi de trois ressortissants chinois démunis d'autorisation de travail, notamment, par référence aux textes applicables repris in extenso au verso de ces décisions ; qu'en outre, la décision du 23 août 2013 rappelle expressément les faits reprochés à la société tels qu'ils sont mentionnés dans le procès-verbal du 2 mars 2011 et indique les raisons pour lesquelles l'application du taux de 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12 est justifié ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de ces décisions manque en fait et ne peut qu'être écarté ;
7. Considérant, en deuxième lieu, que par une décision du 1er novembre 2012, régulièrement publiée, le directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a donné délégation à M. C...I..., directeur de l'immigration et, en cas d'absence ou d'empêchement à Mmes J...H...et G...D..., adjointes, à l'effet de signer tous actes, décisions et correspondances relevant du champ de compétence de la direction de l'immigration ; que, dès lors qu'il n'est pas établi que M. I...n'ait pas été absent ou empêché, le moyen tiré de ce que la décision du 23 août 2013 serait entachée d'incompétence en tant qu'elle a été signée par Mme F...doit être écarté ;
8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées à son encontre et de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail, l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en situation de séjour irrégulier acquittera une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine. / Le montant total des sanctions pécuniaires prévues, pour l'emploi d'un étranger non autorisé à travailler, au premier alinéa du présent article et à l'article L. 8253-1 du code du travail ne peut excéder le montant des sanctions pénales prévues par les articles L. 8256-2, L. 8256-7 et L. 8256-8 du code du travail ou, si l'employeur entre dans le champ d'application de ces articles, le montant des sanctions pénales prévues par le chapitre II du présent titre. " ; que contrairement à ce que soutient la société requérante, le législateur a expressément prévu un cumul possible de la contribution spéciale visée à l'article L. 8253-1 du code du travail et de la contribution forfaitaire prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en outre, le principe de non-cumul des peines consacré tant par le droit d'origine interne que par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne fait pas obstacle à ce qu'un même agissement puisse donner lieu, dans le respect du principe de proportionnalité appréhendé en fonction des circonstances propres à chaque affaire, au prononcé, non seulement d'une peine principale mais également d'une ou plusieurs peines complémentaires répondant à la prise en compte du particularisme de certains comportements délictueux ; que le principe du non-cumul ne s'oppose pas davantage à ce que puissent être infligées, à raison des mêmes faits, des sanctions distinctes dès lors que celles-ci visent à assurer le respect de réglementations distinctes ou à protéger des intérêts spécifiques ; que par suite, la société Jardin d'Asie n'est pas fondée à soutenir que la règle " non bis in idem " aurait été méconnue par les dispositions instaurant les contributions spéciale et forfaitaire ;
9. Considérant, en dernier lieu, que si la société requérante se prévaut de l'article 50 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne pour exciper de l'inconventionnalité de l'article L. 8253-1 du code du travail, cette charte n'est applicable que dans la mise en oeuvre du droit de l'Union ; que par ailleurs, si le paragraphe 7 de l'article 14 du pacte international relatif aux droits civils et politiques, ouvert à la signature à New York le 19 décembre 1966 et introduit dans l'ordre juridique français par l'effet conjugué de la loi du 25 juin 1980 qui en a autorisé la ratification et du décret du 29 janvier 1981 qui en a ordonné la publication, stipule que " Nul ne peut être poursuivi ou puni en raison d'une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de chaque pays ", la règle "non bis in idem" qu'elle énonce ne trouve à s'appliquer que dans le cas où une même infraction pénale ayant déjà donné lieu à un jugement définitif de condamnation ou d'acquittement ferait l'objet d'une nouvelle poursuite et, le cas échéant, d'une condamnation devant ou par une juridiction répressive ;
10. Considérant par ailleurs, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 4 du protocole n° 7 afférent à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même Etat en raison d'une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet Etat " ; que si la société Jardin d'Asie soutient que les dispositions de l'article L. 8253-1 du code du travail sont contraires à ces stipulations et conteste le caractère opposable des réserves émises par la France à l'occasion de la ratification de ce protocole publiées dans le décret n° 89-37 du 24 janvier 1989 susvisé, et qui ne s'appliquent " que pour les seules infractions relevant en droit français de la compétence des tribunaux statuant en matière pénale qui doivent être regardées comme des infractions au sens des articles 2 à 4 du présent Protocole ", les contributions spéciale et forfaitaire qui lui ont été appliquées ne peuvent en tout état de cause être regardées comme sanctionnant deux fois une seule et même infraction ; que, par suite, la société ne peut utilement soutenir que les dispositions des articles L. 8253-1 du code du travail seraient entachées d'inconventionnalité ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que la société Jardin d'Asie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Sur la réduction de la contribution spéciale mise à la charge de la société requérante :
12. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 8253-1 du code du travail : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte, pour chaque travailleur étranger non autorisé à travailler, une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Il est, au plus, égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. Ce montant peut être minoré en cas de non-cumul d'infractions ou en cas de paiement spontané par l'employeur des salaires et indemnités dus au salarié étranger non autorisé à travailler mentionné à l'article R. 8252-6. Il est alors, au plus, égal à 2 000 fois ce même taux. Il peut être majoré en cas de réitération et est alors, au plus, égal à 15 000 fois ce même taux (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 8253-2 du même code : " I.-Le montant de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 est égal à 5 000 fois le taux horaire, à la date de la constatation de l'infraction, du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. II.-Ce montant est réduit à 2 000 fois le taux horaire du minimum garanti dans l'un ou l'autre des cas suivants : 1° Lorsque le procès-verbal d'infraction ne mentionne pas d'autre infraction commise à l'occasion de l'emploi du salarié étranger en cause que la méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 ; 2° Lorsque l'employeur s'est acquitté des salaires et indemnités mentionnés à l'article L. 8252-2 dans les conditions prévues par les articles R. 8252-6 et R. 8252-7. III.-Dans l'hypothèse mentionnée au 2° du II, le montant de la contribution spéciale est réduit à 1 000 fois le taux horaire du minimum garanti lorsque le procès-verbal d'infraction ne mentionne l'emploi que d'un seul étranger sans titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France (...) " ;
13. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le procès-verbal d'infraction du 2 mars 2011, qui fait foi jusqu'à preuve contraire, mentionne, d'une part, l'infraction de " travail dissimulé par dissimulation d'activité ou de salariés " et vise les articles L. 8224-5, L. 8224-1, L. 8221-1, L. 8221-3, L. 8221-4 et L. 8221-5 du code du travail et, d'autre part, l'infraction d'emploi d'un étranger non muni d'une autorisation de travail réprimée aux articles L. 8256-7, L. 8256-2, L. 5221-8, L. 5221-2 et L. 5221-1 du code du travail ; que par ailleurs, la société Jardin d'Asie ne soutient pas avoir acquitté spontanément les salaires et indemnités visés par l'article L. 8252-2 du code du travail ; que dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que le montant de la contribution spéciale, qui lui est réclamé à hauteur de 50 400 euros, aurait dû être calculé sur la base de 1 000 fois ou de 2 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12 et non sur celui de 5 000 fois ce même taux en application des articles L. 8253-1 et R. 8253-2 du même code ;
14. Considérant, en deuxième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit au point 8, l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise que " le montant total des sanctions pécuniaires prévues, pour l'emploi d'un étranger non autorisé à travailler, au premier alinéa du présent article et à l'article L. 8253-1 du code du travail ne peut excéder le montant des sanctions pénales prévues par les articles L. 8256-2, L. 8256-7 et L. 8256-8 du code du travail ou... le montant des sanctions pénales prévues par le chapitre II du présent titre. " ; que l'article 131-38 du code pénal prévoit que pour les personnes morales le taux de l'amende est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques, soit en l'occurrence 75 000 euros ; que, dès lors, la société requérante n'est pas fondée à solliciter la réduction de sa contribution spéciale sur le fondement de ces dispositions ;
15. Considérant, en dernier lieu, qu'il n'est pas contesté que la société Jardin d'Asie a employé trois salariés étrangers ne disposant pas d'une autorisation de travail ; que la contribution spéciale qui lui est réclamée a été calculée sur la base des dispositions précitées des articles L. 8253-1 et R. 8253-2 du code du travail ; que par suite, et alors même que son gérant n'aurait, par un jugement du 25 septembre 2012 du tribunal correctionnel de Rennes, pas fait l'objet de sanction pénale, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la contribution de 50 400 euros qui lui est appliquée serait manifestement disproportionnée aux faits qui lui sont reprochés ; que si elle fait valoir que le paiement de cette somme met gravement en péril sa pérennité, la décision du 23 août 2013 indique expressément qu'elle a la possibilité de solliciter des délais de paiement adaptés auprès de la direction régionale des finances publiques de Bretagne ; que, par suite, les conclusions de la société requérante tendant à la réduction de la contribution spéciale à laquelle elle a été assujettie ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
16. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la société Jardin d'Asie de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Jardin d'Asie le versement à l'Office français de l'immigration et de l'intégration de la somme de 1 500 euros au titre des mêmes frais ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Jardin d'Asie est rejetée.
Article 2 : La société Jardin d'Asie versera la somme de 1 500 euros à l'Office français de l'immigration et de l'intégration au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Jardin d'Asie et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
Délibéré après l'audience du 3 janvier 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. Millet, président-assesseur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 janvier 2017.
Le rapporteur,
V. GELARDLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
S. BOYERE
La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°15NT03350