La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/11/2016 | FRANCE | N°14NT03206

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 02 novembre 2016, 14NT03206


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 26 août 2011 par laquelle le centre territorial d'administration et de comptabilité de Rennes a sollicité le remboursement à hauteur de 32 280,12 euros du montant des frais supportés par l'Etat pour assurer sa formation, ainsi que la décision du 22 février 2012 du ministre de la défense rejetant son recours administratif préalable.

Par un jugement n° 1202439 du 16 octobre 2014, le tribunal administratif de Rennes a

rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 26 août 2011 par laquelle le centre territorial d'administration et de comptabilité de Rennes a sollicité le remboursement à hauteur de 32 280,12 euros du montant des frais supportés par l'Etat pour assurer sa formation, ainsi que la décision du 22 février 2012 du ministre de la défense rejetant son recours administratif préalable.

Par un jugement n° 1202439 du 16 octobre 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 décembre 2014, M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 16 octobre 2014 ;

2°) d'annuler la décision du 26 août 2011 par laquelle le centre territorial d'administration et de comptabilité de Rennes a sollicité le remboursement à hauteur de 32 280,12 euros du montant des frais supportés par l'Etat pour assurer sa formation, ainsi que la décision du 22 février 2012 du ministre de la défense rejetant son recours administratif préalable ;

3°) à titre subsidiaire, de minorer le montant des frais mis à sa charge, par application du décret n° 78-721 du 28 juin 1978 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les décisions attaquées ont été signées par des autorités incompétentes ;

- en application de dispositions de l'article 10-2 du décret du 28 juin 1978, reprises à l'article 16 du décret du 12 septembre 2008, le remboursement des frais qui lui est demandé n'est pas dû, dès lors que l'interruption de sa scolarité ne lui est pas imputable ;

- le décret du 28 juin 1978, en vigueur à la date à laquelle il a conclu son contrat d'engagement et qui prévoit un remboursement des frais de scolarité au prorata du nombre de mois de scolarité effectué, a vocation à s'appliquer à sa situation, et non celles du décret du

12 septembre 2008, qui lui ont été appliquées en méconnaissance du principe de sécurité juridique et dont les dispositions portent atteinte au droit au respect de ses biens garanti par les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Une mise en demeure a été adressée le 14 septembre 2015 au ministre de la défense.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 janvier 2016, le ministre de la défense conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 16 mars 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 18 avril 2016.

La demande de M. B...tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle a été rejetée par une décision du 5 mars 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le décret n° 78-721 du 28 juin 1978 fixant certaines dispositions applicables aux élèves officiers de carrière des écoles militaires ;

- le décret n° 2008-947 du 12 septembre 2008 fixant certaines dispositions applicables aux élèves militaires des écoles militaires d'élèves officiers de carrière ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Massiou,

- et les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public.

1. Considérant que M. B..., élève officier à l'école militaire interarmes de Saint-Cyr Coëtquidan en vertu d'un contrat d'engagement conclu pour servir à compter du 24 août 2008, a quitté l'école avant la fin de sa scolarité, sa démission ayant été acceptée par un arrêté du ministre de la défense du 8 avril 2010 ; qu'il a contesté devant le tribunal administratif de Rennes la décision du ministre de la défense du 22 février 2012 rejetant son recours préalable formé contre la décision du 26 août 2011 par laquelle le centre territorial d'administration et de comptabilité de Rennes a sollicité le remboursement à hauteur de 32 280,12 euros du montant des frais supportés par l'Etat pour assurer sa formation, ainsi que cette seconde décision ; que, par un jugement du 16 octobre 2014, le tribunal a rejeté cette requête, jugement dont M. B...relève appel ;

2. Considérant, en premier lieu, que M. B...n'est pas fondé à se prévaloir de l'incompétence du signataire du titre de perception en cause, la décision du ministre de la défense du 22 février 2012 rendue sur recours administratif préalable obligatoire s'y étant substituée ; qu'il ressort, en tout état de cause, des pièces du dossier que le signataire de cette décision disposait d'une délégation de signature régulière à cette fin ; que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des décisions attaquées doit, par suite, être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 16 du décret susvisé du

12 septembre 2008 : " I. - Sont tenus à remboursement [des frais de formation] : 1° Dans les conditions fixées à l'article 17, les élèves officiers de carrière quittant l'école avant la fin de la scolarité ; (...) II. - Toutefois : 1° Sur décision du ministre de la défense (...), le remboursement n'est pas dû si l'interruption de la scolarité n'est pas imputable aux intéressés ; (...) " ; que selon l'article 17 de ce même texte : " Les élèves officiers de carrière qui (...) quittent l'école avant la fin de la scolarité sont tenus de rembourser la somme des rémunérations qu'ils ont perçues au cours de leur scolarité. (...) " ; qu'en vertu des dispositions de l'article 21 de ce décret, celui-ci est entré en vigueur le 1er août 2009 ;

4. Considérant que bien que les élèves des écoles militaires soient dans une situation légale et règlementaire et n'aient aucun droit acquis au maintien d'une règlementation, celle-ci ne peut cependant légalement remettre en cause la portée des engagements souscrits avant son entrée en vigueur, en particulier les situations qui étaient définitivement constituées ; que si, à la date à laquelle M. B...a conclu son contrat d'engagement, le mode de calcul des frais de formation soumis à remboursement en cas de démission avant la fin de la scolarité était fixé par les dispositions du décret susvisé du 28 juin 1978, dont le régime était plus favorable, ce texte ne trouve pas à s'appliquer aux situations définitivement constituées après le 1er août 2009, date d'entrée en vigueur du décret du 12 septembre 2008, qui abroge celui du 28 juin 1978 ; qu'en l'espèce, l'étendue des obligations incombant à M. B...en ce qui concerne les modalités de remboursement de ses frais de formation était définitivement constituée à la date d'acceptation de sa démission par l'autorité hiérarchique, le 8 avril 2010 ; que, par suite, l'administration a pu, sans commettre d'erreur de droit, fixer le montant des frais à rembourser au regard des dispositions précitées de l'article 17 du décret du 12 septembre 2008 ;

5. Considérant, en troisième lieu, que M. B...soutient qu'il aurait dû lui être fait application des dispositions précitées du II de l'article 17 du décret du 12 septembre 2008, dès lors que l'interruption de sa scolarité ne lui est pas imputable ; qu'il se prévaut à cet égard des conditions dans lesquelles il a été mis fin dès décembre 2009 à la formation en informatique qu'il avait été autorisé à suivre à l'université de Rennes 1 dans le cadre d'une " externalisation " ; qu'il n'est toutefois pas contesté que ce sont des absences injustifiées à l'école militaire interarmes de Saint-Cyr Coëtquidan qui ont conduit sa hiérarchie à estimer que ce cursus mettait en péril sa formation militaire, alors même qu'il n'est pas contesté que M. B...obtenait de bons résultats universitaires ; qu'il n'y avait pas lieu de procéder à la saisine du conseil d'instruction prévue par les dispositions de l'article 9 du décret du 12 septembre 2008 ; qu'il n'est pas contesté que les jours d'arrêts que M. B...s'est vu infliger durant la période de son externalisation ont été justifiés par les absences sus évoquées ; que la circonstance que le requérant n'ait pas eu d'intérêt financier à présenter sa démission est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ; que le ministre de la défense pouvait légalement accepter sa démission sans faire application des dispositions de l'article 5 du décret du 12 septembre 2008, uniquement applicables aux démissions présentées durant la période pendant laquelle les officiers de carrière sont appelés à servir à l'issue de leurs études ; que si l'avis rendu par la commission de recours des militaires était favorable au requérant, cet avis ne liait pas le ministre de la défense ; qu'il n'est, enfin, pas établi que ce ministre aurait refusé de communiquer certaines pièces au requérant, celles sollicitées par le tribunal administratif au cours de l'instruction du dossier de première instance ayant bien été versées au débat ; qu'il n'est, dès lors, pas établi que l'interruption de la scolarité de M. B... ne lui serait pas imputable, le requérant n'étant, par suite, pas fondé à se prévaloir de la méconnaissance des dispositions précitées du II de l'article 17 du décret du 12 septembre 2008 ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes. " ; que l'obligation de remboursement de frais de scolarité ne constitue pas la privation d'un bien au sens de ces stipulations, de la méconnaissance desquelles M. B...ne peut, dès lors, utilement se prévaloir ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 août 2011, ni à solliciter la minoration des frais mis à sa charge par cette décision ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de la défense.

Délibéré après l'audience du 14 octobre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- Mme Massiou, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 novembre 2016.

Le rapporteur,

B. MASSIOULe président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de la défense, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 14NT03206


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT03206
Date de la décision : 02/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: Mme Barbara MASSIOU
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : AUBRY

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-11-02;14nt03206 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award