Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le préfet du Morbihan a demandé au tribunal administratif de Rennes, sur le fondement de l'article L. 554-1 du code de justice administrative, de suspendre les effets du certificat d'urbanisme délivré le 15 octobre 2015 par le maire de la commune de Locmariaquer à M. et Mme C...relativement au projet de construction d'une habitation sur un terrain situé au lieu-dit " Kerlogonan ".
Par une ordonnance n° 1600836 du 18 mars 2016, le juge désigné par la présidente du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 31 mars, 29 juin et 7 juillet 2016 le préfet du Morbihan demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1600836 du 18 mars 2016 ;
2°) d'ordonner la suspension des effets du certificat d'urbanisme du 15 octobre 2015.
Il soutient que :
- l'ensemble des formalités prévues à l'article R. 600-1 contentieux ont été respectées ;
- ce certificat d'urbanisme est intervenu en méconnaissance des dispositions du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme ;
- alors que le certificat fait référence à l'extension d'une construction existante, le projet vise en réalité à doubler la surface existante, ce qui ne constitue pas une extension mesurée.
Par mémoire en défense, enregistré le 9 juin 2016, la commune de Locmariaquer, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir :
- à titre principal, que le déféré au fond n'a pas été régulièrement notifié au regard de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ; par suite le déféré suspension ne peut être accueilli ;
- à titre subsidiaire, qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique du 30 septembre 2016 :
- le rapport de M. Francfort, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public ;
- et les observations de M.B..., représentant le préfet du Morbihan, et celles de MeD..., substituant MeE..., représentant la commune de Locmariaquer.
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 554-1 du code de justice administrative : " Les demandes de suspension assortissant les requêtes du représentant de l'Etat dirigées contre les actes des communes sont régies par le 3ème alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales ci-après reproduit : " Art. L. 2131-6, alinéa 3. - Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué. Il est statué dans un délai d'un mois. " ;
2. Considérant que, par décision du 22 mai 2012, le maire de la commune de Locmariaquer (Morbihan) a délivré à M. et Mme C...un certificat d'urbanisme déclarant réalisable leur projet d'édifier une maison d'habitation de 150 m² environ sur une parcelle cadastrée section BC n° 0006 située dans cette commune, au lieu-dit Kerlogonan ; qu'après le rejet tacite du recours gracieux exercé le 10 décembre 2015 auprès du maire de Locmariaquer par le préfet du Morbihan, ce dernier a saisi le 23 février 2016 le tribunal administratif de Rennes de deux demandes distinctes tendant, d'une part, à l'annulation de ce certificat et, d'autre part, à la suspension de ses effets sur le fondement du troisième alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales ; qu'il relève appel de l'ordonnance du 18 mars 2016 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Rennes a rejeté cette demande à fin de suspension ;
Sur l'exception soulevée par la commune de Locmariaquer :
3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un certificat d'urbanisme, une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou un permis de construire, d'aménager ou de démolir. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. / La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux " ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet du Morbihan a communiqué le 23 février 2016 tant à M. et MmeC..., bénéficiaires du certificat d'urbanisme en cause, qu'au maire de la commune de Locmariaquer, auteur de la décision, la copie de la demande d'annulation de ce certificat d'urbanisme qu'il avait formée auprès du tribunal administratif de Rennes le même jour ; que la preuve de ce respect des formalités de communication de l'article R. 600-1, lesquelles ne s'imposent qu'à l'égard des conclusions en annulation du certificat d'urbanisme en litige, a été apportée devant le premier juge, ainsi qu'il résulte des mentions figurant à l'ordonnance attaquée ; que la commune de Locmariaquer n'est dès lors pas fondée à exciper devant le juge d'appel de la méconnaissance de ces formalités ;
Sur les conclusions à fins de suspension présentées par le préfet du Morbihan :
5. Considérant que le préfet du Morbihan invoque la méconnaissance par le projet des époux C...des dispositions alors en vigueur du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, selon lesquelles l'extension de l'urbanisation doit se réaliser, dans les communes littorales, soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement ;
6. Considérant que le lieu-dit de Kerlogonan, auquel se rattache le terrain propriété de M. et MmeC..., se limite à une dizaine de constructions distantes les unes des autres, principalement situées le long d'une route ; que ce hameau ouvre au sud et à l'est sur de vastes espaces agricoles et présente à l'ouest une rupture d'urbanisation de plusieurs dizaines de mètres par rapport à un lotissement qui forme l'extrémité du bourg ; qu'enfin la présence d'habitations légères de loisirs est insusceptible d'être prise en compte pour apprécier le caractère urbanisé des lieux ; qu'ainsi le préfet du Morbihan est fondé à soutenir que le lieu-dit de Kerlogonan, qui se caractérise par un habitat diffus et est séparé du bourg de Locmariaquer par des espaces naturels et agricoles, ne présente pas un nombre et une densité significatifs de constructions qui permettraient de le faire regarder comme un espace urbanisé au sens du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme ;
7. Considérant que, pour écarter la prise en compte de ces dispositions du code de l'urbanisme, la commune de Locmariaquer se prévaut de la conformité du projet en litige aux dispositions du document d'orientations et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale du Pays d'Auray relatives à l'application de la loi littoral ; qu'elle n'y est en tout état de cause pas fondée, dès lors que le lieu-dit de Kerlogonan ne correspond ni aux " secteurs urbanisés denses de taille limitée constituant un noyau urbain " mentionnées par ces dispositions, ni aux " zones bâties susceptibles d'être qualifiées d'agglomérations et de villages " identifiées par une carte du schéma, laquelle ne mentionne parmi ces zones que le " bourg " de Locmariaquer, auquel le terrain des époux C...n'appartient pas ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré par le préfet du Morbihan de la méconnaissance par le projet des époux C...des dispositions alors en vigueur du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme parait, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité du certificat d'urbanisme attaqué ; que le préfet du Morbihan est par suite fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la suspension des effets du certificat d'urbanisme accordé le 15 octobre 2015 à M. et MmeC... ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, la somme que demande la commune de Locmariaquer au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance du 18 mars 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Rennes est annulée.
Article 2 : Les effets du certificat d'urbanisme délivré le 15 octobre 2015 par le maire de Locmariaquer à M. et Mme C...relativement au projet de construction d'une habitation sur un terrain situé au lieu-dit " Kerlogonan " sont suspendus jusqu'à ce qu'il ait été statué sur les conclusions à fins d'annulation présentées à l'encontre de cette décision par le préfet du Morbihan.
Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Locmariaquer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au préfet du Morbihan, à la ministre du logement et de l'habitat durable, à la commune de Locmariaquer et à M. et Mme A...et PascaleC....
Délibéré après l'audience du 30 septembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- M. Mony, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 octobre 2016.
Le rapporteur,
J. FRANCFORT Le président,
H. LENOIR
Le greffier,
F. PERSEHAYE
La République mande et ordonne à la ministre du logement et de l'habitat durable en ce qui la concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16NT01096 2
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