La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/09/2016 | FRANCE | N°14NT01902

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 21 septembre 2016, 14NT01902


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...E...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 16 juin 2010 par lequel le ministre de l'intérieur lui a infligé la sanction disciplinaire de l'abaissement définitif de son niveau aéronautique, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 18 septembre 2010.

Par un jugement n° 1101297 du 15 mai 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentai

res, enregistrés les 16 juillet 2014, 12 novembre 2015 et 30 août 2016, M. C...E..., représent...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...E...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 16 juin 2010 par lequel le ministre de l'intérieur lui a infligé la sanction disciplinaire de l'abaissement définitif de son niveau aéronautique, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 18 septembre 2010.

Par un jugement n° 1101297 du 15 mai 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 16 juillet 2014, 12 novembre 2015 et 30 août 2016, M. C...E..., représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 15 mai 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 juin 2010, ainsi que la décision implicite de rejet née du silence observé par le ministre de l'intérieur sur son recours gracieux tendant au retrait de cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la procédure d'édiction de la décision contestée est entachée d'irrégularités ; il a été fait état, dans le cadre de l'enquête de commandement, de faits antérieurs non établis et n'ayant jamais été mentionnés dans son dossier ; des pressions sont exercées sur le délégué syndical qui l'a assisté devant la commission aéronautique compétente et l'influence des chefs de base a été déterminante dans le choix de la sanction qui lui a été infligée ; cette dernière était prédéterminée avant même la réunion de cette commission ;

- le ministre a procédé à une appréciation erronée de sa situation et a entaché son arrêté d'une erreur d'appréciation ; son intervention dans la nuit du 16 au 17 août 2009 était justifiée par des circonstances exceptionnelles ; les vols d'entraînement les 14 février, 29 juillet et 20 août 2009 ont été effectués en vertu d'une convention orale habituelle et afin de maintenir ses compétences et de se familiariser avec la zone géographique de son nouveau lieu d'affectation ; le ministre ne démontre pas que la note de service du 13 février 2009 avait été portée à sa connaissance le 14 février 2009 ; le vol du 20 août 2009 n'a été effectué que dans le but de s'entraîner ;

- la sanction qui lui a été infligée est disproportionnée par rapport aux faits qui lui sont reprochés, alors qu'il démontre par ailleurs d'indéniables qualités professionnelles.

En application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, une mise en demeure de produire des observations a été adressée au ministre de l'intérieur le 6 février 2015.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2016, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête de M. E...n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 2005-621 du 30 mai 2005 fixant les dispositions applicables aux personnels navigants du groupement d'hélicoptères de la sécurité civile au groupement des moyens aériens ;

- l'arrêté du 30 mai 2005 fixant les niveaux de compétence aéronautique et les fonctions spécifiques des personnels navigants du groupement d'hélicoptères de la sécurité civile au groupement des moyens aériens ;

- l'instruction n° 92-850 du 29 septembre 1992 modifiée relative à l'emploi des aéronefs du groupement des moyens aériens ;

- les consignes permanentes d'opérations du groupement d'hélicoptères ;

- les consignes permanentes d'opérations d'entraînement et de contrôle du groupement d'hélicoptères de la sécurité civile ;

- la note de service du 13 février 2009 du groupement d'hélicoptères relative au maintien des compétences des pilotes nationaux en 2009 ;

- le règlement intérieur du groupement aérien ;

- le règlement intérieur du groupement d'hélicoptères de la sécurité civile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lainé, président de chambre,

- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant M.E....

1. Considérant que M.E..., pilote d'hélicoptère du groupement d'hélicoptère de la sécurité civile (GHSC) recruté le 1er octobre 2005 et affecté le 1er novembre 2008 à la base de Quimper, s'est vu infliger, par arrêté du 16 juin 2010 du ministre de l'intérieur, la sanction de l'abaissement définitif de son niveau de compétence aéronautique ; que M. E...a formé, le 18 septembre 2010, un recours gracieux auprès du ministre de l'intérieur lui demandant le retrait de l'arrêté du 16 juin 2010 ; que le silence gardé sur ce recours gracieux a fait naître une décision implicite de rejet ; que M. E...relève appel du jugement du 15 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision implicite et de l'arrêté du 16 juin 2010 ;

Sur la légalité externe de la décision contestée :

2. Considérant que, dans sa requête introductive d'appel enregistrée le 16 juillet 2014 devant la cour, M. E...n'a soulevé que des moyens relatifs à la légalité interne de la décision contestée ; que si, dans son mémoire complémentaire enregistré le 12 novembre 2015, il a soulevé à l'appui de son appel de nouveaux moyens relatifs à la légalité externe de la décision contestée, ces moyens, qui ne sont pas d'ordre public et se rattachent à une cause juridique distincte de celle qui fonde les moyens invoqués dans sa requête introductive, constituent une demande nouvelle qui, présentée après l'expiration du délai d'appel, est tardive et, par suite, irrecevable ;

Sur la légalité interne de la décision contestée :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 15 du décret du 30 mai 2005 dans sa rédaction applicable à l'espèce : " En cas d'infraction aux règles d'exploitation à caractère aéronautique fixées par le ministre chargé de l'intérieur commise par un personnel navigant du groupement d'hélicoptères de la sécurité civile, la commission aéronautique prévue à l'article 12 du présent décret est compétente pour connaître des procédures disciplinaires engagées à l'encontre des personnels navigants. Le ministre chargé de l'intérieur prononce, par arrêté et après avis de la commission aéronautique, l'une des mesures suivantes : (...) e) L'abaissement définitif de niveau de compétence aéronautique selon les modalités définies dans l'arrêté mentionné à l'article 17 du présent décret, dans la limite d'un niveau (...) " ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 30 mai 2005 : " En application de l'article 17 du décret du 30 mai 2005 (...) les niveaux de compétence aéronautique des personnels navigants du groupement d'hélicoptères de la sécurité civile sont les suivants : I.- Pour les pilotes d'hélicoptères : - niveau 1 : pilote stagiaire ; - niveau 2 : pilote confirmé (...) " ; qu'aux termes de l'article 5 de cet arrêté : " Les conditions d'attribution des niveaux de compétence aéronautique sont les suivantes : I.- Pour les pilotes d'hélicoptères : - niveau 1 : les pilotes d'hélicoptères recrutés conformément à l'article 5 du décret du 30 mai 2005 sont classés au niveau 1. - niveau 2 : les pilotes de niveau 1 peuvent accéder au niveau 2 s'ils remplissent les conditions cumulatives suivantes : - ils ont exercé durant deux ans les fonctions de pilote stagiaire ; - ils ont obtenu une qualification de type telle que définie à l'article 4 ci-après (...) " ;

4. Considérant qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes ;

5. Considérant qu'il est, en premier lieu, reproché à M. E...d'avoir effectué des vols d'entraînement sans autorisation préalable de son chef de base les 14 février, 29 juillet et 20 août 2009, en méconnaissance de la note de service du 13 février 2009 relative au maintien des compétences des pilotes nationaux, qui prévoit que " pour améliorer la capacité opérationnelle des bases, les chefs de base auront la possibilité d'autoriser les entraînements en équipage constitué " ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M.E..., qui a lui-même affirmé dans ses écritures que ses demandes d'entraînement ne rencontraient pas d'écho auprès de son supérieur hiérarchique, bénéficiait, comme il le soutient, d'une convention orale habituelle pour ce faire ; que si le requérant soutient qu'il n'est pas établi que la note de service du 13 février 2009 ait été portée à sa connaissance le lendemain, 14 février 2009, il résulte des termes de ce texte qu'il procède à une extension de la possibilité d'autoriser des entraînements en équipage constitué pour le chef de base, auquel il n'attribue donc pas une compétence nouvelle ; qu'à les supposer établies, les circonstances invoquées par M. E...tenant à la nécessité pour lui d'améliorer ses compétences et sa connaissance géographique de la Bretagne, ne sont pas de nature à justifier le non-respect des règles précitées, alors surtout qu'il avait effectué le nombre de vols et d'opérations de treuillage minimaux et avait suivi, à son arrivée à la base de Quimper, un programment d'adaptation opérationnelle en base ; que, par suite, il n'établit pas qu'en estimant que les faits qui lui sont reprochés constituaient des fautes de nature à justifier une sanction, l'autorité investie du pouvoir disciplinaire les aurait inexactement qualifiés ;

6. Considérant que la sanction litigieuse est, en deuxième lieu, fondée sur le non-respect des dispositions de l'article A.3.1.8.2 des consignes permanentes d'opérations applicables au groupement d'hélicoptères de la sécurité civile, qui imposent à tout membre d'équipage d'observer une période de repos pendant 9 heures consécutives au minimum, comprise entre 20 heures et 9 heures, lorsqu'il n'a pu bénéficier d'un tel repos au cours de la nuit qui précède ; qu'il est constant que M. E...a participé, dans la nuit du 16 au 17 août 2009, entre 23 heures et 1 heure 17, à une mission de secours médicalisé avec un hélicoptère de la base, alors qu'il n'avait pu bénéficier d'un tel repos la nuit précédente ; que l'intéressé, à qui il appartenait d'organiser en temps utile son remplacement afin de bénéficier effectivement de ce repos, ne saurait se prévaloir de l'urgence et de la gravité de la situation à laquelle il était confronté ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les faits qui lui sont reprochés ne seraient pas fautifs ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, ainsi que l'a estimé le ministre dans l'arrêté contesté, que M. E...a, à l'occasion du vol d'entraînement effectué sans autorisation préalable le 20 août 2009, utilisé un hélicoptère de la base afin d'aller déjeuner dans l'archipel des Glénans, accompagné d'un mécanicien et d'un sapeur pompier, alors que cet équipage était d'alerte ; que, ce faisant, il a méconnu tant les dispositions de l'article 3.2.1 du titre 3 de l'instruction 92-850 modifiée relative aux règles générales d'emploi des hélicoptères en vertu desquelles les hélicoptères de la sécurité civile sont destinés en priorité à des missions de secours d'urgence et de sauvetage en mer, que celles de l'article 1.1.5 du titre III du règlement intérieur du groupement d'hélicoptères de la sécurité civile qui prévoit que le pilote d'hélicoptère doit assurer l'alerte en base ; qu'en se bornant à soutenir qu'il était en mesure d'intervenir en cas d'alerte éventuelle, le requérant n'invoque aucune circonstance de nature à justifier le non-respect de ces règles ; que, par suite, le ministre n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant que ces faits présentaient également un caractère fautif ;

8. Considérant qu'eu égard à la nature et au caractère volontaire et répété des fautes commises par M.E..., et en dépit des qualités professionnelles dont il se prévaut, le ministre de l'intérieur ne lui a pas infligé, en prononçant la sanction de l'abaissement définitif de son niveau de compétence aéronautique de 2 à 1, une sanction disproportionnée, la commission aéronautique compétente ayant d'ailleurs préconisé dans son avis du 9 mars 2010 la sanction, plus grave, de la perte définitive de la qualité de personnel navigant ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, la somme que M. E...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- et Mme Rimeu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 septembre 2016.

Le président, rapporteur,

L. LAINÉL'assesseur le plus ancien dans l'ordre du tableau,

C. LOIRAT

Le greffier,

M. A...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 14NT01902


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01902
Date de la décision : 21/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Laurent LAINE
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : CABINET MSELLATI-BARBARO

Origine de la décision
Date de l'import : 28/09/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-09-21;14nt01902 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award