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07/04/2016 | FRANCE | N°14NT02357

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 07 avril 2016, 14NT02357


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner l'Etat à lui verser la somme de 195 179 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison d'une carence du préfet de la Vendée.

Par un jugement n° 1112174 du 27 juin 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 5 septembre 2014, 20 mai 2015 et 3 mars 2016, M. A... C..., représenté par Me Mandeville,

demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 27 juin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner l'Etat à lui verser la somme de 195 179 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison d'une carence du préfet de la Vendée.

Par un jugement n° 1112174 du 27 juin 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 5 septembre 2014, 20 mai 2015 et 3 mars 2016, M. A... C..., représenté par Me Mandeville, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 27 juin 2014 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 195 179 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa requête, qui ne concerne ni l'indemnisation des préjudices subis du fait des dégâts causés aux récoltes, ni la mise en oeuvre de la procédure prévue aux articles L. 425-1, L. 421-6 et R. 426-3 et suivants du code de l'environnement mais tend à obtenir réparation de la carence de l'Etat à prendre toutes mesures adéquates pour endiguer la surpopulation de sangliers autour de ses parcelles, est parfaitement recevable ;

- la responsabilité de l'Etat est engagée dès lors que les dégâts causés par les sangliers résultent d'une carence des autorités administratives dans la mesure où, notamment en vertu des dispositions de l'article L. 421-10 du code de l'environnement, le préfet doit contrôler l'exécution par la fédération départementale des chasseurs des missions de service public auxquelles elle participe ;

- la surpopulation des sangliers autour de son exploitation est établie et justifie que des mesures soient prises par les autorités compétentes ;

- les mesures prises et notamment les trois battues administratives organisées ou l'adoption par la fédération départementale des chasseurs de la Vendée du schéma de gestion cynégétique sont insuffisantes pour prévenir les dégâts agricoles ;

- l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales ainsi que l'article L. 427-6 du code de l'environnement ne subordonnent pas la mise en oeuvre des mesures qu'ils prévoient à la participation active des propriétaires ;

- il ne peut lui être reproché une prétendue absence d'implication personnelle dès lors qu'il s'est manifesté à maintes reprises auprès de la fédération départementale des chasseurs et ne cesse d'alerter les services de l'Etat sur les dommages occasionnés à sa propriété, que la pose de clôture électrique est insuffisante pour lutter contre les dégâts causés par les sangliers et que, compte tenu de la configuration de ses parcelles, il ne peut pratiquer le tir à balles en toute sécurité ;

- ses préjudices correspondent à une perte de revenus constatée sur les années 2007 à 2011 à hauteur de 193 429 euros et à des frais de clôture dont le montant s'est élevé à 1 750 euros.

Par des mémoires enregistrés les 10 mars 2015 et 24 septembre 2015, la fédération départementale des chasseurs de la Vendée, représentée par Me Lagier, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande présentée par M. C...est irrecevable dès lors qu'il lui appartenait, s'il estimait que les indemnités obtenues étaient insuffisantes, de saisir le juge judiciaire afin d'engager la procédure contentieuse prévue aux articles L. 426-7 et suivants du code de l'environnement ou de saisir le juge administratif si les barèmes d'indemnisation fixés par la commission départementale étaient inadaptés ou trop faibles, et que les demandes en réparation relatives aux dégâts de gibier relèvent de la seule compétence des tribunaux de l'ordre judiciaire ;

- les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 22 janvier 2016, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gélard,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public.

- les observations de MeB..., substituant Me Mandeville, avocat de M.C...,

- et les observations de Me Lagier, avocat de la fédération départementale des chasseurs de la Vendée.

1. Considérant que M. A...C...est propriétaire exploitant de terres agricoles situées sur les communes de Poiroux et de Talmont Saint-Hilaire en Vendée ; qu'il se plaint des dégâts récurrents occasionnés par les sangliers sur ses cultures ; qu'après avoir sollicité et obtenu à plusieurs reprises une indemnisation amiable auprès de la fédération départementale des chasseurs de la Vendée sur le fondement des dispositions des articles L. 426-1 et suivants du code de l'environnement, l'intéressé a saisi le préfet de la Vendée d'une réclamation préalable tendant à ce que la somme de 195 179 euros lui soit versée en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis entre 2006 et 2011 en raison de la carence des services de l'Etat ; que, suite au rejet implicite de sa demande, l'intéressé a saisi le tribunal administratif de Nantes d'un recours indemnitaire qui a été rejeté par un jugement rendu le 27 juin 2014 ; que M. C... relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales : " (...) sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, le maire est chargé, d'une manière générale, d'exécuter les décisions du conseil municipal et, en particulier : (...) 9° De prendre, à défaut des propriétaires ou des détenteurs du droit de chasse, à ce dûment invités, toutes les mesures nécessaires à la destruction des animaux nuisibles, de requérir, dans les conditions fixées à l'article L. 427-5 du code de l'environnement, les habitants avec armes et chiens propres à la chasse de ces animaux, à l'effet de détruire ces derniers, de surveiller et d'assurer l'exécution des mesures ci-dessus et d'en dresser procès-verbal. " ; que l'article L. 427-1 code de l'environnement dispose que : " Les lieutenants de louveterie sont nommés par l'autorité administrative et concourent sous son contrôle à la destruction des animaux mentionnés aux articles L. 427-6 et L. 427-8 ou ponctuellement aux opérations de régulation des animaux qu'elle a ordonnées. Ils sont consultés, en tant que de besoin, par l'autorité compétente, sur les problèmes posés par la gestion de la faune sauvage. " ; qu'aux termes de l'article L. 427-6 du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " Sans préjudice des dispositions de l'article L. 2122-21 (9°) du code général des collectivités territoriales, il est fait, chaque fois qu'il est nécessaire, sur l'ordre du préfet, après avis du directeur départemental de l'agriculture et de la forêt et du président de la fédération départementale ou interdépartementale des chasseurs, des chasses et battues générales ou particulières aux animaux nuisibles. Ces chasses et battues peuvent porter sur des animaux d'espèces soumises à plan de chasse en application de l'article L. 425-6. Elles peuvent également être organisées sur les terrains visés au 5° de l'article L. 422-10. " ; qu'aux termes de l'article L. 427-7 de ce code : " Dans les communes situées à proximité des massifs forestiers où les cultures sont menacées périodiquement de destruction par les sangliers (...), et dont la liste est établie par arrêté du préfet, celui-ci peut déléguer ses pouvoirs aux maires des communes intéressées. Les battues sont organisées sous le contrôle et la responsabilité technique des lieutenants de louveterie. " ; qu'enfin aux termes de l'article R. 421-39 du même code : " I.-Le préfet contrôle, conformément au premier alinéa de l'article L. 421-10, l'exécution par la fédération départementale des chasseurs des missions de service public auxquelles elle participe, notamment dans les domaines suivants : (...) 2° Elaboration du schéma départemental de gestion cynégétique ; (...)7° Prévention et indemnisation des dégâts de grand gibier. II.-A cet effet, et sans préjudice des obligations prévues au deuxième alinéa de l'article L. 421-10, le président de la fédération départementale des chasseurs fait parvenir au préfet, à sa demande, toutes informations sur les actions conduites par la fédération dans les domaines mentionnés ci-dessus. Les observations éventuelles du préfet sont portées dans les meilleurs délais à la connaissance du conseil d'administration et de l'assemblée générale de la fédération. " ;

3. Considérant que, dans la lettre qu'il a adressée le 21 septembre 2009 à la direction départementale de l'équipement et de l'agriculture de la Vendée, l'office national de la chasse et de la faune sauvage, alors même qu'il indiquait que la population des sangliers ne semblait pas démesurée, a admis que certains sites dans le département présentaient des conditions d'accueil plus favorables et étaient plus fréquentés que d'autres ; que, dans ce contexte, il a été reconnu qu'une parcelle de maïs grains de 11 hectares appartenant à M. C...faisait l'objet de visites quotidiennes de la part de ces animaux ; que, par ailleurs, le compte rendu de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage du 27 février 2008 a également indiqué que, selon l'évaluateur départemental pour le secteur concerné, il existait bien un problème local alors même que la population de sangliers sur l'unité de gestion n'était pas excessive ; qu'enfin le nombre de demandes d'indemnisation amiable présentées par M. C...à la fédération départementale des chasseurs de Vendée au cours de la période concernée allant de l'année 2007 à l'année 2011, et auxquelles il a été fait droit, atteste de la présence de sangliers sur ses terres et de la réalité des dégâts qu'ils occasionnent régulièrement à ses cultures ;

4. Mais considérant qu'il résulte de l'instruction qu'un schéma départemental de gestion cynégétique prévoyant notamment des mesures destinées à prévenir les dégâts occasionnés par les sangliers a été adopté par la fédération départementale des chasseurs de la Vendée pour la période 2006-2012 ; que, par ailleurs, si le sanglier n'a pas été déclaré nuisible en Vendée, le préfet a néanmoins pris, les 14 avril 2010 et 5 août 2010 notamment, des arrêtés pour autoriser spécifiquement le lieutenant de louveterie à organiser des battues sur l'exploitation de M. C..., tant sur le territoire de la commune de Talmont Saint-Hilaire que sur celui des communes limitrophes ; qu'un troisième arrêté a été pris le 17 août 2010 par la même autorité en vue d'autoriser le lieutenant de louveterie à organiser des battues de refoulement et de destruction de sangliers sur ces communes ; qu'un agent de la direction départementale des territoires et de la mer s'est rendu sur l'exploitation de M. C...le 23 septembre 2010 en compagnie du chef de service départemental de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage pour constater les dégâts occasionnés par le gibier ; que, dans sa séance du 9 octobre 2010, la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage a proposé de prêter gratuitement une clôture à gibier à M. C... à condition que celui-ci assure la fourniture en alimentation électrique, la pose et la surveillance de la clôture et qu'il demande un plan de chasse " sanglier " permettant une mise en action de chiens sur sa propriété afin d'éliminer les animaux susceptibles de se réfugier dans ses cultures ; que ces mesures pouvaient intervenir rapidement avec l'accord de l'intéressé pour protéger ses semis d'automne ; que, dans ces conditions, les services de l'Etat doivent être regardés comme ayant pris les mesures adaptées afin de tenter de restreindre la population de sangliers et les dégâts qu'ils occasionnent sur l'exploitation agricole de M. C...; que par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les motifs de ses réticences à installer une clôture à gibier ou à procéder lui-même à la chasse au sanglier, l'intéressé n'établit pas l'existence de la carence fautive de ces services qu'il invoque ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. C... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. C... le versement à la fédération départementale des chasseurs de la Vendée de la somme qu'elle demande au titre des mêmes frais ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la fédération départementale des chasseurs de la Vendée tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., au ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, relations climat, au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt et à la fédération départementale des chasseurs de la Vendée.

Délibéré après l'audience du 17 mars 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- Mme Specht, premier conseiller,

- Mme Gélard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 avril 2016.

Le rapporteur,

V. GélardLe président,

I. Perrot

Le greffier,

A. Maugendre

La République mande et ordonne au ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, relations climat en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT02357


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT02357
Date de la décision : 07/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SEP LACHAUD MANDEVILLE COUTADEUR et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-04-07;14nt02357 ?
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