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24/03/2016 | FRANCE | N°14NT02023

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 24 mars 2016, 14NT02023


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...E...ont demandé au tribunal administratif de Caen de condamner le centre hospitalier universitaire de Caen à verser à M. E...la somme de 53 947 euros avec intérêts ainsi qu'une rente annuelle de 12 500 euros capitalisée à la date du jugement et les arrérages échus entre le 8 juillet 2010 et la date du jugement et la somme de 2 680 euros avec intérêts à son épouse en réparation de leurs préjudices résultant de l'hospitalisation de l'intéressé dans cet établissement.

Par un ju

gement n° 1300056 du 3 juin 2014, le tribunal administratif de Caen a condamné le centr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...E...ont demandé au tribunal administratif de Caen de condamner le centre hospitalier universitaire de Caen à verser à M. E...la somme de 53 947 euros avec intérêts ainsi qu'une rente annuelle de 12 500 euros capitalisée à la date du jugement et les arrérages échus entre le 8 juillet 2010 et la date du jugement et la somme de 2 680 euros avec intérêts à son épouse en réparation de leurs préjudices résultant de l'hospitalisation de l'intéressé dans cet établissement.

Par un jugement n° 1300056 du 3 juin 2014, le tribunal administratif de Caen a condamné le centre hospitalier universitaire de Caen à verser à M. et Mme E...les sommes respectives de 20 800 euros et de 1 180 euros et à la caisse du régime social des indépendants de Basse-Normandie les sommes de 22 520,96 euros et de 1 015 euros en remboursement de ses débours et au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 23 juillet 2014 et 20 novembre 2015, le régime social des indépendants de Basse-Normandie, représenté par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 3 juin 2014 en tant qu'il a limité la somme que le centre hospitalier universitaire de Caen a été condamné à lui verser à 22 520,96 euros au titre de ses débours ;

2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Caen à lui verser en outre la somme de 6 250,77 euros en remboursement de la pension d'incapacité définitive au métier versée à M. E...et de porter à 1 028 euros l'indemnité forfaitaire de gestion qui lui a été allouée en première instance ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Caen le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué devra être confirmé en ce qu'il reconnaît la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Caen ;

- il est fondé à solliciter la condamnation de cet établissement à lui rembourser, par priorité, la somme de 6 250,77 euros versée à M. E...entre le 8 juillet et le 31 décembre 2010 au titre d'une pension d'incapacité définitive au métier.

Par un mémoire enregistré le 11 septembre 2015, M. et MmeE..., représentés par MeB..., concluent à ce que la somme globale de 20 800 euros allouée en première instance à M. E...soit portée à 66 447 euros et à ce que la somme de 1 180 euros allouée à son épouse soit portée à 2 680 euros, à ce que ces sommes soient assorties des intérêts au taux légal à compter du 14 décembre 2012 et de leur capitalisation, à ce que la somme de 4 500 euros soit mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Caen au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à ce que cet établissement soit condamné à leur rembourser la somme de 35 euros acquittée en première instance au titre de l'article L. 1685 Q du code général des impôts.

Ils soutiennent que :

- l'arrêt de travail lié à l'infection nosocomiale s'entend du 28 janvier au 7 juillet 2010 et sa perte de gains professionnels actuels peut être évaluée à 16 967 euros dès lors que le centre hospitalier universitaire, qui n'a pas répondu à la mise en demeure qui lui a été adressée, aurait dû être regardé par les premiers juges comme ayant acquiescé aux faits et que pour sa part, il a produit le justificatif de ce préjudice ;

- l'incidence professionnelle de cette infection doit être évaluée à 15 000 euros dans la mesure où il ne peut plus exercer son métier de carreleur en raison de la difficulté qu'il éprouve à se maintenir à genou et doit se limiter au démarchage et à la supervision des chantiers ;

- il supportera une baisse de ses revenus futurs du fait de son activité réduite, laquelle peut être chiffrée à 12 500 euros ; ce préjudice, qui n'a pas été contesté par le centre hospitalier universitaire, sera compensé par une rente annuelle de 12 500 euros due à compter du 7 juillet 2010 jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir à partir de laquelle une rente d'un même montant sera capitalisée ;

- l'indemnisation accordée par les premiers juges au titre de la tierce personne, dont le montant n'est pas justifié, est insuffisante et doit être portée à 2 600 euros ; une aide non spécialisée pour se déplacer et pour les gestes de la vie courante a été nécessaire du 31 décembre 2009 au 5 mars 2010 à raison de 2 heures par jour ;

- la somme de 1 000 euros allouée par le tribunal administratif en réparation de son déficit fonctionnel temporaire lié à l'infection nosocomiale est insuffisante et doit être portée à 1 380 euros dans la mesure où ce préjudice a été total du 21 au 31 décembre 2009 puis partiel de classe III du 31 décembre 2009 au 5 mars 2010 et de classe II du 6 mars au 17 juin 2010 ;

- il sollicite les sommes de 12 000 euros, 3 000 euros et 3 000 euros en réparation de son déficit fonctionnel permanent, des souffrances qu'il a endurées et de son préjudice d'agrément liés à l'infection nosocomiale ;

- les premiers juges ne pouvaient laisser sans réparation le préjudice d'accompagnement de Mme E... ;

Par des mémoires, enregistrés les 14 septembre 2015 et 12 février 2016, le centre hospitalier universitaire de Caen, représenté par MeD..., conclut au rejet de la requête et des conclusions présentées par M. et MmeE....

Il soutient que :

- les conclusions d'appel provoqué présentées par les époux E...sont irrecevables dès lors que l'appel principal du régime social des indépendants n'est pas susceptible d'aggraver leur situation ;

- leurs conclusions ne sont, en tout état de cause, pas fondées ;

- les moyens soulevés par le régime social des indépendants ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées par une lettre du 24 février 2016 que l'arrêt était susceptible, en ce qui concerne les conclusions d'appel principal de M. et MmeE..., d'être fondé sur un moyen d'ordre public soulevé d'office tiré de la tardiveté de leurs conclusions.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gélard,

- et les conclusions de M. Giraud, rapporteur public.

1. Considérant que le 21 avril 2008, M. A...E...qui exerçait la profession de maçon-carreleur, a été victime d'un accident du travail lui occasionnant un traumatisme crânien, une fracture du rocher gauche avec brèche dure-mérienne, une fracture de l'extrémité inférieure du tibia et du péroné de la jambe droite avec trait de refend articulaire frontal ; que la fracture du membre inférieur droit a été traitée au centre hospitalier universitaire de Caen par un enclouage centromédullaire verrouillé statique ; qu'en raison des douleurs périarticulaires ressenties par l'intéressé autour des vis qui lui avaient été posées, il a été décidé d'enlever ce matériel d'ostéosynthèse ; que cette intervention a été réalisée le 14 décembre 2009 sous anesthésie générale ; que le 21 décembre suivant, alors que M. E...présentait une fièvre de 39 °C, une infection nosocomiale de type staphylocoque lugdumensis méthicilline sensible a été diagnostiquée chez ce patient, alors âgé de 46 ans ; qu'après un lavage du genou, il a été traité par antibiothérapie jusqu'en février 2010 ; que l'intéressé, qui a été placé en arrêt de travail du 14 décembre 2009 au 7 juillet 2010, a saisi la Commission Régionale de Conciliation et d'Indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales de Basse Normandie ; que par une ordonnance du 6 mai 2011 une expertise a été confiée aux docteurs Boisrenoult et Ghnassia, lesquels ont déposé leur rapport le 20 août 2011 et fixé la date de consolidation de M. E...au 17 juin 2011 ; que par un avis du 1er mars 2012, la commission a reconnu la responsabilité du centre hospitalier universitaire ; que M. E... a toutefois refusé l'indemnisation qui lui a été proposée par l'assureur du centre hospitalier et a saisi, avec son épouse, le tribunal administratif de Caen d'une demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Caen à lui verser la somme de 53 947 euros outre une rente annuelle de 12 500 euros capitalisée et les arrérages échus ainsi que la somme de 2 680 euros à MmeE... ; que par un jugement du 3 juin 2014, le tribunal administratif de Caen a condamné le centre hospitalier universitaire de Caen à verser à M. et Mme E...les sommes respectives de 20 800 euros et 1 180 euros et à la caisse du régime social des indépendants (RSI) de Basse-Normandie les sommes de 22 520,96 euros et de 1 015 euros en remboursement de ses débours et au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ; que le RSI relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier à lui rembourser la somme de 6 250,77 euros versée à M. E...au titre de la " pension d'incapacité au métier " ; que les consorts E...concluent à ce que la somme globale de 20 800 euros allouée en première instance à M. E...soit portée à 66 447 euros et à ce que celle de 1 180 euros attribuée à son épouse soit revalorisée à hauteur de 2 680 euros ; que le centre hospitalier universitaire, qui ne conteste pas le principe de sa responsabilité, conclut au rejet de la requête du RSI et des conclusions des consortsE... ;

Sur les conclusions du RSI :

2. Considérant que le RSI a produit devant les premiers juges un état des débours daté du 4 octobre 2013, non signé, indiquant qu'une " pension d'incapacité définitive au métier " avait été servie à M. E...à compter du 8 juillet 2010 jusqu'au 31 décembre 2010 pour une somme de 6 531,61 euros bruts - 6 256,77 euros nets - ainsi qu'une attestation du docteur Preaux du 26 novembre 2013 certifiant que cette indemnité est en lien avec l'infection nosocomiale contractée par M. E... ; qu'en appel, le RSI a, en outre, transmis un état définitif des débours engagés pour l'intéressé attestant que du 8 juillet 2010 au 31 décembre 2010 la somme de 6 250,77 euros lui a été versée au titre de sa " pension d'incapacité au métier " ; que ce document daté du 24 juin 2014 est signé de l'agent comptable de la société créée en janvier 2006 par M.E... au sein de laquelle il exerce son activité de maçon-carreleur ; que ces trois documents, qui sont concordants et qui se complètent, sont de nature à établir le versement de la somme de 6 250,77 euros à M. E... par le RSI de Basse-Normandie ;

3. Considérant, toutefois, que la pension en litige a été perçue par l'intéressé entre le 8 juillet 2010 et le 31 décembre 2010 ; qu'elle ne peut donc compenser que ses éventuelles pertes de revenus subie au cours de cette même période ; qu'ainsi que le tribunal administratif l'a estimé, l'intéressé, qui ne conteste pas avoir repris son activité professionnelle à compter du 8 juillet 2010, n'établit pas avoir subi une perte de revenus au titre de cette période en se bornant, sans apporter d'éléments supplémentaires, à se prévaloir du recrutement d'un salarié supplémentaire à compter du mois d'octobre 2008 ; que par suite, le RSI ne démontre pas avoir versé la pension litigieuse à M. E...pour compenser une éventuelle perte de revenus ; que le caractère temporaire de cette pension ne correspond pas davantage à l'indemnisation de l'incidence professionnelle subie par M. E...du fait de l'infection nosocomiale qu'il a contractée et qui, au demeurant, a été retenue et indemnisée par le tribunal administratif ; que par suite, le RSI n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a refusé de condamner le centre hospitalier universitaire de Caen à lui verser la somme de 6 250,77 euros dont elle réclame le remboursement et a limité à 22 520,96 euros la somme qui lui a été accordée ;

Sur les conclusions de M. et MmeE... :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier et la recevabilité des conclusions de M. et Mme E...:

4. Considérant qu'aux termes du huitième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, relatif au recours subrogatoire des caisses de sécurité sociale contre le responsable d'un accident ayant entraîné un dommage corporel : " L'intéressé ou ses ayants droit doivent indiquer, en tout état de la procédure, la qualité d'assuré social de la victime de l'accident ainsi que les caisses de sécurité sociale auxquelles celle-ci est ou était affiliée pour les divers risques. Ils doivent appeler ces caisses en déclaration de jugement commun ou réciproquement (...) " ; qu'il appartient au juge administratif, qui dirige l'instruction, d'assurer, en tout état de la procédure, le respect de ces dispositions ; qu'ainsi, le tribunal administratif, saisi par la victime ou par la caisse d'une demande tendant à la réparation du dommage corporel par l'auteur de l'accident, doit appeler en la cause, selon le cas, la caisse ou à la victime ; que la cour administrative d'appel, saisie dans le délai légal d'un appel de la victime ou de la caisse, doit communiquer la requête, selon le cas, à la caisse ou à la victime ; qu'eu égard au lien que les dispositions de l'article L. 376-1 établissent entre la détermination des droits de la victime et celle des droits de la caisse, la caisse ou la victime est recevable à faire à son tour appel du jugement, sans condition de délai ; que par suite, et alors même que M. et Mme E... avaient reçu la notification du jugement attaqué le 4 juin 2014, les conclusions présentées par eux dans leur mémoire du 11 septembre 2015, qui présentaient le caractère d'un appel principal et non, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier universitaire de Caen, d'un appel provoqué, n'étaient pas irrecevables ;

En ce qui concerne les pertes de gains professionnels subies par M. E...durant la période du 28 janvier au 7 juillet 2010 :

5. Considérant qu'il résulte des pièces du dossier et notamment du rapport d'expertise que M. E...a été arrêté du 15 décembre 2009 au 7 juillet 2010 et qu'en l'absence de complication, l'intervention qu'il a subie le 14 décembre 2009 aurait impliqué un arrêt de travail de 45 jours ; que si le tribunal administratif a estimé que l'arrêt de travail en lien avec l'infection nosocomiale contractée par M. E...s'étendait du 30 janvier au 7 juillet 2010, au lieu du 28 janvier au 7 juillet 2010, alors qu'il a effectivement pris en compte les indemnités journalières qui lui ont été versées à compter du 28 janvier 2010, il ne résulte pas de l'instruction que cette erreur purement matérielle aurait eu une incidence sur la perte de revenus subie par l'intéressé au titre de cette période ;

6. Considérant par ailleurs qu'aux termes de l'article R. 612-6 du code de justice administrative : " Si, malgré une mise en demeure, la partie défenderesse n'a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant. " ; qu'il est constant que le centre hospitalier universitaire de Caen n'a produit son mémoire en défense devant le tribunal administratif qu'après l'expiration du délai de trente jours qui lui avait été imparti pour faire valoir ses observations par la mise en demeure qui lui a été adressée le 20 juin 2013, de telle sorte qu'il doit être regardé comme acquiesçant aux faits ; que si les premiers juges n'ont pas constaté cet acquiescement aux faits, ils n'ont, pour fixer l'indemnité sollicitée par M.E..., écarté aucun des faits allégués par lui et se sont bornés à les qualifier juridiquement et à en tirer toutes les conséquences qui s'y attachent ; que, par suite, M. E...n'est pas fondé à soutenir que le tribunal aurait méconnu les dispositions précitées de l'article R. 612-6 du code de justice administrative ;

7. Considérant enfin que selon les pièces comptables figurant au dossier le chiffre d'affaires de la société créée en janvier 2006 par M. E...a subi une diminution de 29 337 euros entre le 21 décembre 2009 et le 31 juillet 2010 par rapport à la même période de l'année précédente ; que, selon le comptable de cette société, cette perte a pu générer un manque à gagner de l'ordre de 15 000 euros pour la seule période du 28 janvier 2010 au 7 juillet 2010 ; que toutefois, pour fixer à 10 000 euros la perte de gains professionnels subie par M. E... au titre de cette période, le tribunal administratif a tenu compte du fait que son entreprise était récente et bénéficiait d'avantages fiscaux de nature à réduire l'impact négatif de cette perte de bénéfices ; que les premiers juges ont également déduit les indemnités journalières perçues par M. E... à hauteur de 6 269,40 euros entre le 28 janvier 2010 et le 7 juillet 2010 ; que par suite, en évaluant la perte de gains professionnelles effectivement subie par M. E...durant cette période à 3 800 euros le tribunal administratif n'a pas fait une appréciation erronée de ce chef de préjudice ; qu'ainsi, les conclusions de M. E...tendant à ce que cette indemnité soit portée à 16 967 euros ne peuvent qu'être rejetées ;

En ce qui concerne les pertes de gains professionnels subies par M. E...à compter du 8 juillet 2010 :

8. Considérant que M. E...sollicite le versement d'une somme de 12 500 euros au titre de ses pertes de revenus subies entre le 7 juillet 2010 et la date de l'arrêt à intervenir et l'octroi d'une rente capitalisée pour la période postérieure ; que selon la lettre du comptable de la société en date du 6 septembre 2012, cette indemnité est calculée en tenant compte des charges patronales liées au recrutement d'un salarié supplémentaire ; que toutefois, il n'est pas contesté que ce recrutement est intervenu au cours du mois d'octobre 2008 pour tenir compte de l'activité réduite de M.E..., laquelle à cette époque ne pouvait résulter que de son accident de travail et non de l'infection nosocomiale contractée ultérieurement ; que dans ces conditions, les conclusions présentées à ce titre par M. E...ne peuvent qu'être rejetées ;

En ce qui concerne l'incidence professionnelle :

9. Considérant qu'au regard des conclusions de l'expert, le tribunal administratif a évalué à 2 000 euros les conséquences de l'infection nosocomiale contractée par M. E...en raison de la persistance des douleurs qui le gênaient dans ses activités de carreleur ; que si l'intéressé sollicite une majoration de cette indemnité, il résulte de l'instruction qu'il était employé dans le cadre de sa propre entreprise et qu'il a pu adapter son activité à son handicap ; que par suite, ses conclusions concernant ce chef de préjudice doivent être rejetées ;

En ce qui concerne l'indemnisation accordée par les premiers juges au titre de la tierce personne :

10. Considérant que les premiers juges ont alloué la somme de 1 000 euros à M. E... en compensation de ce chef de préjudice ; que si l'intéressé sollicite une augmentation de cette somme sur la base d'une aide de 2 heures par jour, il résulte du rapport d'expertise que l'état de santé de M. E...a nécessité une aide non spécialisée pour les soins quotidiens et les transports du 31 décembre 2009 au 5 mars 2010 à raison d'une heure par jour ; qu'ainsi, en fixant à 1 000 euros la somme qui lui a été accordée à ce titre, les premiers juges n'ont pas fait une insuffisante appréciation de ce chef de préjudice ;

En ce qui concerne le déficit fonctionnel temporaire de M.E... :

11. Considérant que selon l'expert M. E...a été totalement immobilisé en raison de son hospitalisation du 21 décembre 2009 au 31 décembre 2009 et a subi une incapacité partielle de classe III du 31 décembre 2009 au 5 mars 2010 puis de classe II du 6 mars 2010 au 17 juin 2010 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que, sur la base de ces éléments, le tribunal aurait insuffisamment apprécié le déficit fonctionnel temporaire de M. E...imputable au centre hospitalier en lui allouant à ce titre la somme de 1 000 euros ;

En ce qui concerne le déficit fonctionnel permanent, les souffrances endurées par M. E...et son préjudice d'agrément liés à l'infection nosocomiale :

12. Considérant qu'il résulte du rapport d'expertise que M. E...reste atteint d'une incapacité partielle permanente de 12 % dont 8 % est imputable à l'infection nosocomiale contractée au centre hospitalier universitaire de Caen à l'occasion de son intervention du 14 décembre 2009 ; que les souffrances qu'il a endurées en raison de cette infection sont évaluées à 2,5 sur une échelle de 7 ; qu'enfin, l'expert a reconnu une gêne empêchant M. E...de pratiquer le vélo ou la course à pied ; qu'en indemnisant ces différents préjudices à hauteur des sommes respectives de 10 000 euros, 2 000 euros et 1 000 euros, le tribunal administratif a correctement évalué la réparation due à ce titre à M.E... ;

En ce qui concerne le préjudice moral de MmeE... :

13. Considérant que contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, Mme E...doit être regardée comme ayant subi un préjudice moral en raison des contraintes générées par l'infection nosocomiale subie par son mari ; qu'à ce titre, le centre hospitalier universitaire de Caen sera condamné à lui verser la somme de 1 000 euros ;

Sur les conclusions relatives à l'indemnité forfaitaire de gestion :

14. Considérant que les premiers juges ont condamné le centre hospitalier universitaire de Caen à verser au RSI de Basse-Normandie la somme de 1 015 euros au titre des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; qu'en vertu de l'arrêté du 10 décembre 2013 du ministre des affaires sociales et de la santé le montant maximum de l'indemnité forfaitaire de gestion visés aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale a été fixé à 1 028 € à compter du 1er janvier 2014 ; que par suite, le RSI de Basse-Normandie est fondé à demander à ce que la somme de 1 015 euros que le centre hospitalier universitaire de Caen a été condamné à lui verser sur le fondement de ces dispositions soit portée à 1 028 euros ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il ne doit être fait droit aux conclusions de la requête du RSI que dans la limite mentionnée au point 14 ; que par ailleurs, les consorts E...ne sont fondés que dans la mesure évoquée au point 13 à soutenir que le tribunal administratif aurait insuffisamment évalué leurs préjudices ;

Sur les intérêts et leur capitalisation :

16. Considérant que les sommes de 20 800 euros et de 2 280 euros accordées respectivement à M. E...et à son épouse seront assorties des intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2012, date de réception par le centre hospitalier universitaire de leur réclamation préalable, et de leur capitalisation au 17 décembre 2013 et à chaque échéance annuelle ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 et

R. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du centre hospitalier universitaire de Caen, qui n'est pas pour ce qui concerne le RSI la partie perdante dans la présente instance, le versement à cette caisse de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge du centre hospitalier le versement à M. et Mme E...de la somme qu'ils demandent au titre des mêmes frais ; qu'en revanche, les intéressés sont fondés à solliciter le remboursement par le centre hospitalier universitaire de Caen de la contribution à l'aide juridique de 35 euros qu'ils ont acquittée devant le tribunal administratif ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme que le centre hospitalier universitaire de Caen a été condamné à verser au régime social des indépendants de Basse-Normandie sur le fondement de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale est portée à 1 028 euros.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête du régime social des indépendants de Basse-Normandie est rejeté.

Article 3 : La somme que le centre hospitalier universitaire de Caen a été condamné à verser à Mme E...est portée à 2 280 euros. Elle sera assortie, au même titre que celle de 20 800 euros accordée à M.E..., des intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2012 et de leur capitalisation au 17 décembre 2013 et à chaque échéance annuelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées en appel par M. et Mme E...est rejeté.

Article 5 : Le jugement n° 1300056 du tribunal administratif de Caen en date du 3 juin 2014 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au régime social des indépendants de Basse-Normandie, au centre hospitalier universitaire de Caen et à M. et Mme A...E....

Délibéré après l'audience du 3 mars 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Coiffet, président,

- Mme Specht, premier conseiller,

- Mme Gélard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 mars 2016.

Le rapporteur,

V. GélardLe président,

O. Coiffet

Le greffier,

M. C...

La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT02023


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT02023
Date de la décision : 24/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. COIFFET
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : CABINET FORVEILLE MARI LELONG

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-03-24;14nt02023 ?
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