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03/03/2016 | FRANCE | N°15NT01126

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 03 mars 2016, 15NT01126


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 21 août 2014 du préfet de la Loire Atlantique refusant de lui accorder un titre de séjour, portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il est susceptible d'être renvoyé d'office.

Par un jugement n° 1408762 du 9 janvier 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête

enregistrée le 8 avril 2015, M. B... A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 21 août 2014 du préfet de la Loire Atlantique refusant de lui accorder un titre de séjour, portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il est susceptible d'être renvoyé d'office.

Par un jugement n° 1408762 du 9 janvier 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 avril 2015, M. B... A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 9 janvier 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté du préfet de la Loire-Atlantique du 21 août 2014 ;

3°) d'enjoindre préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, d'annuler la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ; le préfet n'a pas précisé les motifs pour lesquels il s'est écarté de l'avis favorable du médecin de l'agence régionale de santé ;

- il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison de ses attaches en France et en produisant un contrat de travail à durée indéterminée ; le préfet a refusé la délivrance du titre demandé en se fondant sur les stipulations de l'accord franco-algérien sans exercer son pouvoir d'appréciation ;

- il remplit les conditions de la circulaire du 28 novembre 2012 pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il a également sollicité la délivrance d'un titre de séjour pour motif de santé sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 modifié ; les éléments sur lesquels s'est fondé le tribunal pour estimer que le système de santé en Algérie disposait des structures nécessaires pour traiter ses troubles sont anciens et ne reflètent pas l'évolution du pays ;

- le traitement qui lui est nécessaire n'est pas accessible en Algérie ; de plus il ne disposerait pas de ressources financières suffisantes pour avoir accès au traitement ;

- il ne peut avoir accès aux soins dans son pays en raison d'une infrastructure de santé publique obsolescente et de l'absence de moyens humains et matériels ; par ailleurs, il souffre de troubles psychologiques et psychiatriques graves en lien avec des événements traumatisants vécus dans son pays et qui rendent impossible son retour ; ces éléments caractérisent des circonstances humanitaires exceptionnelles qui justifient la délivrance du titre de séjour demandé ;

- l'arrêté contesté porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il a le centre de ses intérêts en France et n'a plus de famille en Algérie ; le refus de titre de séjour porte atteinte à son état de santé et sa situation sociale en le plaçant dans un état de précarité ;

- le refus de titre de séjour méconnait également les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car un retour dans son pays d'origine entraînerait pour lui des traitements inhumains et dégradants tant en raison de l'inaccessibilité du traitement médical qu'en raison des persécutions subies qui l'ont contraint à fuir ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnait les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile car son état de santé fait obstacle à son éloignement ;

Par un mémoire en défense enregistré le 3 juin 2015, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête et s'en rapporte aux moyens développés en première instance.

M. B... A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale au titre de cette instance et Me C...a été désigné pour le représenter par une décision du 15 avril 2015.

Par ordonnance du 29 mai 2015 la clôture d'instruction a été fixée au 15 juillet 2015 en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Specht a été entendu au cours de l'audience publique :

1. Considérant que M. A..., ressortissant algérien né le 2 juillet 1977, déclare être entré en France le 14 septembre 2011 muni d'un visa de court séjour valable jusqu'au 23 septembre 2011 ; qu'il a sollicité la reconnaissance du statut de réfugié auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides qui, par une décision du 17 avril 2012 a rejeté sa demande ; que, par un arrêté du 31 juillet 2012, le préfet de la Loire-Atlantique a pris à son encontre un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. A... a sollicité le 1er décembre 2013 son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a ensuite déposé le 20 mars 2014 une demande de certificat de résident pour motif de santé sur le fondement du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien de 1968 ; qu'après avoir recueilli l'avis du médecin de l'agence régionale de santé le 19 mai 2014, le préfet de la Loire-Atlantique a, par un arrêté du 21 août 2014, refusé la délivrance du certificat de résident sollicité et a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. A... relève appel du jugement du 9 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de l'arrêté contesté du 21 août 2014 :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7° au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) " qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...). / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. / (...). / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / L'étranger mentionné au 11° de l'article L. 313-11 qui ne remplirait pas la condition de résidence habituelle peut recevoir une autorisation provisoire de séjour renouvelable pendant la durée du traitement. " et qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : (...)/ Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé. / Par ailleurs, dès lors que l'intéressé porterait à la connaissance du préfet des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, le préfet saisit pour avis le directeur général de l'agence régionale de santé, qui lui communique son avis motivé dans un délai d'un mois " ;

3. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé venant à l'appui de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, la disponibilité du traitement approprié dans le pays de renvoi en application des stipulations précitées de l'accord franco-algérien ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

4. Considérant que, que par un avis du 19 mai 2014, le médecin de l'agence régionale de santé des Pays de la Loire a estimé que l'état de santé de M. A...nécessitait une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il n'existait pas de traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé, et que les soins devaient être poursuivis pendant un an ; que le préfet de la Loire-Atlantique, qui n'était pas lié par cet avis, a toutefois refusé de délivrer à M. A... le titre de séjour qu'il demandait sur le fondement des dispositions précitées du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien au motif qu'il n'était pas établi que le traitement approprié à la pathologie de l'intéressé n'était pas disponible en Algérie ;

5. Considérant que le préfet de la Loire-Atlantique a justifié de la possibilité pour M. A... de bénéficier effectivement des soins que nécessitait sa pathologie psychologique par la production de documents relatifs à l'offre de soins en Algérie en matière de santé mentale, portant, contrairement à ce que soutient le requérant, sur des données récentes et notamment les informations publiées par l'Office des migrations internationales ou les informations extraites du recueil " Vidal " ; qu'il en ressort que les structures de soins et les médicaments nécessaires au traitement de la pathologie du requérant existent dans son pays d'origine et que M. A...peut bénéficier d'un traitement approprié ; que, ni devant le tribunal ni devant la cour, M. A... n'a contesté, par une argumentation étayée, la teneur de ces documents ; que M. A..., qui n'a fait état d'aucune circonstance humanitaire exceptionnelle lors de sa demande de titre de séjour, ne justifie pas davantage de telles circonstances en se bornant à invoquer en termes généraux les difficultés financières d'accès aux soins en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'enfin, le requérant n'établit pas que son état de santé serait lié à des événements traumatisants vécus dans son pays d'origine et que cette circonstance ferait obstacle à son éloignement en application du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite le préfet a pu légalement s'écarter de l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé et refuser de délivrer à l'intéressé le titre de santé sollicité, en l'obligeant à quitter le territoire ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que M. A... ne peut utilement se prévaloir des énonciations de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur, relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière, qui ne présente pas de caractère règlementaire ;

7. Considérant, enfin et pour le surplus, que M. A... se borne à invoquer devant le juge d'appel, sans plus de précisions ou de justifications, les mêmes moyens que ceux développés en première instance ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges et tirés de ce que l'arrêté est suffisamment motivé, de ce que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation, de ce que l'arrêté contesté ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce que la décision fixant le pays de destination ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la même convention ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant au bénéfice des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 11 février 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Specht, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 mars 2016.

Le rapporteur,

F. SpechtLe président,

I. Perrot

Le greffier,

A. Maugendre

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15NT01126


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT01126
Date de la décision : 03/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Frédérique SPECHT
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : RODRIGUES-DEVESAS

Origine de la décision
Date de l'import : 17/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-03-03;15nt01126 ?
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