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15/01/2016 | FRANCE | N°14NT02452

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 15 janvier 2016, 14NT02452


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite de rejet de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France confirmant le refus opposé le 26 juin 2012 par le consul de France à Istanbul à sa demande de visa.

Par un jugement n° 1211001 du 18 juillet 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 septembre 2014, M. D..., représent

par MeE..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nant...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite de rejet de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France confirmant le refus opposé le 26 juin 2012 par le consul de France à Istanbul à sa demande de visa.

Par un jugement n° 1211001 du 18 juillet 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 septembre 2014, M. D..., représenté par MeE..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 18 juillet 2014 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions contestées ;

3°) d'enjoindre au consul général de France à Istanbul de lui délivrer sans délai le visa sollicité, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision par laquelle le consul de France à Istanbul a rejeté sa demande de visa n'est pas motivée ;

- la décision consulaire est entachée d'erreur d'appréciation dès lors qu'il connait son épouse depuis 2009, que le maire, qui les a auditionnés, a considéré le mariage recevable, et qu'il établit la réalité et l'ancienneté de leur relation ;

- le jugement attaqué est entaché d'erreur de fait dès lors qu'il n'a pas été débouté de sa demande d'asile mais a retiré sa demande et a sollicité un titre de séjour après s'être marié, que son épouse lui a rendu visite régulièrement, qu'ils ont entretenu des contacts réguliers et qu'il n'a jamais soutenu que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France était liée par la recevabilité du mariage constatée par le maire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 février 2015, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 4 novembre 2015, le Défenseur des droits a présenté des observations, en application de l'article 33 de la loi organique du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Piltant, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. D..., ressortissant turc né le 1er août 1983, a sollicité la délivrance d'un visa afin de rejoindre en France son épouse, MmeC... ; que le refus de visa opposé le 26 juin 2012 par le consul de France à Istanbul (Turquie) a été confirmé par une décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ; que M. D... relève appel du jugement du 18 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, que la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France se substituant entièrement au refus initial pris par les autorités diplomatiques ou consulaires, les conclusions de M. D... dirigées contre la décision du consul de France à Istanbul sont irrecevables et ont été à bon droit rejetées pour ce motif par le tribunal administratif ;

3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Outre le cas mentionné au deuxième alinéa, le visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public " ; qu'il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français dont le mariage n'a pas été contesté par l'autorité judiciaire le visa nécessaire pour que les époux puissent mener une vie familiale normale ; que pour y faire obstacle, il appartient à l'administration, si elle allègue une fraude, d'établir que le mariage a été entaché d'une telle fraude, de nature à justifier légalement le refus de visa ;

4. Considérant que le rejet du recours formé par M. D... est fondé sur l'absence de maintien des liens matrimoniaux et le caractère complaisant du mariage contracté à des fins étrangères à l'institution matrimoniale dans le seul but de faciliter l'établissement en France du demandeur qui y a séjourné irrégulièrement à plusieurs reprises depuis 2008 ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. D... a épousé à Morschwiller-le-Bas, le 5 mai 2012, Mme B...C..., ressortissante française ; qu'il est constant que ce mariage n'a pas été annulé et qu'il n'est pas soutenu que M. D... représenterait une menace à l'ordre public ; qu'il ressort des pièces du dossier, dont certaines sont produites pour la première fois en appel, que M. D... était présent sur le territoire français antérieurement à son mariage, notamment en 2009 et 2010, que Mme C...a fait plusieurs voyages en Turquie en 2012 et qu'ils ont entretenu, avant et après leur mariage, mais antérieurement à la décision contestée, et notamment en 2010, 2011 et 2012, des relations dont témoignent les différentes photographies produites et les communications sur des réseaux sociaux ; qu'ainsi, contrairement à ce que fait valoir le ministre, M. D... établit avoir maintenu des relations avec son épouse avant et après leur mariage ; que, par suite, et alors même que M. D... aurait séjourné irrégulièrement en France et se serait soustrait en 2008 au service militaire en Turquie, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a, en rejetant le recours formé par M. D..., entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ; qu'en conséquence, M. D... est fondé à en demander l'annulation ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande en ce qu'elle tendait à l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

7. Considérant qu'eu égard aux motifs du présent arrêt, il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer la situation de M. D... dans le délai de deux mois à compter de sa notification ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sur le fondement de ces dispositions, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros que M. D... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 18 juillet 2014 du tribunal administratif de Nantes en tant qu'il rejette les conclusions de M. D...dirigées contre la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours et cette décision implicite sont annulés.

Article 2: Il est enjoint au ministre de l'intérieur de réexaminer la demande de M. D... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. D... la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au Défenseur des droits.

Délibéré après l'audience du 18 décembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bachelier, président de la cour,

- M. Francfort, président-assesseur,

- Mme Piltant, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 15 janvier 2016.

Le rapporteur,

Ch. PILTANTLe président,

G. BACHELIER

Le greffier,

C. GOY

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N° 14NT02452


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT02452
Date de la décision : 15/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BACHELIER
Rapporteur ?: Mme Christine PILTANT
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : FRANCOIS et SCHOTT AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-01-15;14nt02452 ?
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