La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/12/2015 | FRANCE | N°15NT00539

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 22 décembre 2015, 15NT00539


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 6 avril 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a rejeté sa demande de naturalisation.

Par un jugement n° 1204535 du 19 décembre 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 février 2015, M. B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 19 décembre 2014 ;

2°) d'annuler la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 6 avril 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a rejeté sa demande de naturalisation.

Par un jugement n° 1204535 du 19 décembre 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 février 2015, M. B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 19 décembre 2014 ;

2°) d'annuler la décision du 6 avril 2012 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de procéder au réexamen de sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la qualité et la compétence du signataire ne sont pas mentionnées dans la décision contestée ;

- la décision contestée est insuffisamment motivée ;

- cette décision méconnaît les dispositions des articles 21-15 et 27 du code civil ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; la réalité de l'irrégularité de son séjour n'est pas établie ; la preuve du défaut de présentation à la convocation adressée par les services de police dans le cadre de l'enquête réglementaire liée à sa demande de naturalisation n'est pas rapportée ;

- les premiers juges n'ont pas pris en considération le caractère non fondé des faits répréhensibles allégués par le ministre ;

- la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article 21-17 du code civil ;

- cette décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 avril 2015, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé et demande à titre subsidiaire, que soit retenu, par substitution, le motif tiré de ce que l'intéressé a effectué des déclarations contradictoires quant à sa date d'installation en France et manifeste une volonté de dissimuler la réalité de sa situation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Millet,

- les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public,

1. Considérant que M. B...relève appel du jugement du 19 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 avril 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a rejeté sa demande de naturalisation ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 49 du décret susvisé du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ;

3. Considérant que, pour rejeter, par la décision contestée du 6 avril 2012, la demande de naturalisation présentée par M.B..., le ministre chargé des naturalisations s'est fondé d'une part sur l'irrégularité du séjour de l'intéressé et d'autre part sur la circonstance que ce dernier n'a pas déféré à la convocation qui lui avait été adressée par les services de police dans le cadre de l'enquête réglementaire liée à sa demande de naturalisation ;

4. Considérant que si le ministre peut, sans erreur de droit, opposer le motif de l'irrégularité du séjour pour rejeter ou ajourner la demande de naturalisation du postulant, il ne saurait, en l'absence de toute autre circonstance, retenir ce seul motif lorsque l'ancienneté des faits est telle qu'elle est de nature à entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...a déclaré être entré en France le 3 mai 2003 muni d'un titre de séjour délivré par les autorités italiennes lui permettant de circuler dans l'espace Schengen ; que, dès lors que M. B...n'a obtenu son premier titre de séjour que le 6 avril 2004, l'intéressé s'est nécessairement maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà de la durée limitée à trois mois de son titre de séjour et a méconnu, par suite, la législation relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France ; que, toutefois, ces faits, dont le terme remonte à huit ans par rapport à la date de la décision contestée, sont anciens ; que, dans ces conditions, en fondant sa décision sur ce premier motif, le ministre a entaché cette dernière d'une erreur manifeste d'appréciation ; que si le ministre soutient par ailleurs que l'intéressé n'aurait pas déféré à une convocation adressée par les services de police dans le cadre de l'enquête réglementaire liée à sa demande de naturalisation, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur ce deuxième motif, alors au surplus que M. B...conteste ces allégations et soutient avoir fait l'objet d'une audition à son domicile par les services de renseignements ;

6. Considérant qu'en appel, le ministre demande qu'aux motifs erronés initialement indiqués par la décision contestée, soit substitué le motif tiré de ce que M. B...aurait effectué de fausses déclarations lors de sa précédente demande de naturalisation du 17 avril 2008 et à l'occasion de son recours gracieux du 23 septembre 2009 ; qu'il ressort cependant des pièces du dossier que si M. B...a déclaré être entré sur le territoire français le 15 février 2004 puis au cours du mois de mai 2004, et le 15 août 2003, ces discordances de dates sont insuffisantes à elles seules pour caractériser une intention délibérée de dissimuler la réalité de sa situation ; que, par suite, la demande de substitution de motifs doit être écartée ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant que l'annulation prononcée par le présent arrêt implique que le ministre chargé des naturalisations procède au réexamen de la demande de naturalisation de M. B...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à M.B... ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 19 décembre 2014 du tribunal administratif de Nantes et la décision du 6 avril 2012 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de procéder à un réexamen de la demande de naturalisation présentée par M. B...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. B...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- M. François, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 décembre 2015.

Le rapporteur,

J. MILLETLe président,

A. PEREZ

Le greffier,

S. BOYERE

La République mande et ordonne au ministre l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 15NT00539


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT00539
Date de la décision : 22/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Jean-Frédéric MILLET
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : TOMEH

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-12-22;15nt00539 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award