Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la délibération du 24 janvier 2012 par laquelle le conseil municipal de Conlie (Sarthe) a approuvé le plan local d'urbanisme.
Par un jugement n° 1204309 du 3 avril 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête n° 1401464 enregistrée le 4 juin 2014 et un mémoire complémentaire du 24 juillet 2015, M.B..., représenté par Me Hay, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 3 avril 2014 du tribunal administratif de Nantes,
2°) d'annuler la délibération du 24 janvier 2012 du conseil municipal de Conlie approuvant le plan local d'urbanisme,
3°) de mettre à la charge de la commune de Conlie une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal a estimé à tort qu'il demandait une annulation partielle de la délibération litigieuse, alors qu'il en sollicitait l'annulation totale ;
- en méconnaissance de l'article L.300-2 du code de l'urbanisme, le conseil municipal n'a pas délibéré sur les objectifs poursuivis par la révision du plan local d'urbanisme ;
- en méconnaissance de l'article R. 123-22 de ce même code, le commissaire enquêteur n'a pas apporté de réponses précises et circonstanciées à ses observations ;
- le rapport de présentation omet d'analyser les conséquences de l'ouverture à l'urbanisation des terres agricoles ;
- cette ouverture à l'urbanisation, contraire au projet d'aménagement et de développement durable, représente au moins le double de la consommation d'espace estimée nécessaire par le rapport de présentation pour atteindre les objectifs de développement prévus ; la chambre d'agriculture et le représentant de l'Etat ont émis des avis défavorables ; l'extension de la zone artisanale, actuellement sous-occupée, apparaît inutile ; la création de la zone agricole AP dans laquelle l'implantation de bâtiments agricoles est interdite compromet le développement de son exploitation ;aussi la délibération litigieuse est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle est encore entachée de détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense enregistré le 8 septembre 2014, la commune de Conlie, représentée par son maire conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. B...une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 21 juillet 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 14 août 2015 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. François, premier conseiller,
- les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., substituant Me Hay, avocat de M. B...et de Me Boidin, avocat de la commune de Conlie.
1. Considérant que M. B..., exploitant agricole à Conlie (Sarthe) relève appel du jugement du 3 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 24 janvier 2012 du conseil municipal de Conlie approuvant le plan local d'urbanisme ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'en estimant que M. B...demandait l'annulation de la délibération du 24 janvier 2012 en tant qu'elle classait des parcelles lui appartenant en zone Ap, alors que le requérant sollicitait en première instance l'entière annulation de cette délibération, le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité ; que M. B...est fondé, pour ce motif, à demander l'annulation de ce jugement ;
3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions tendant à l'annulation de la délibération du 24 janvier 2012 du conseil municipal de Conlie présentées par M. B...devant le tribunal administratif de Nantes ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de la délibération contestée :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : " I - Le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale délibère sur les objectifs poursuivis (...) avant : a) Toute élaboration ou révision du schéma de cohérence territoriale ou du plan local d'urbanisme (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que la délibération du conseil municipal doit porter, au moins dans leurs grandes lignes, sur les objectifs poursuivis par la commune en projetant d'élaborer un document d'urbanisme ;
5. Considérant qu'il ressort de l'extrait du registre des délibérations du conseil municipal de Conlie que la délibération du 8 juillet 2009, complétant la délibération du 24 mars précédent et prescrivant à nouveau la révision du plan local d'urbanisme, a donné lieu à un exposé du maire faisant valoir "qu'il est nécessaire d'envisager une redéfinition de l'affectation des sols et une réorganisation de l'espace communal afin de dégager des terrains à bâtir proches du centre-ville " et " qu'il y a lieu de réviser entièrement le plan local d'urbanisme afin de permettre son adaptation à la conjoncture actuelle aussi bien pour l'habitat que pour les activités " ; que le conseil municipal après en avoir délibéré, a décidé de prescrire l'élaboration du plan ; qu'en évoquant la nécessité de disposer de terrains constructibles proches du centre- ville ainsi que de nouvelles zones d'habitat et d'activités correspondant à l'évolution de la conjoncture, il s'est ainsi prononcé, sur les objectifs poursuivis par cette révision, du moins dans leurs grandes lignes ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme doit être écarté ;
6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R.123-19 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : "Le projet de plan local d'urbanisme est soumis à l'enquête publique par le maire (...) dans les formes prévues par les articles R. 123-7 à R. 123-23 du code de l'environnement" et qu'aux termes de l'article R. 123-22 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le commissaire enquêteur (...) entend toute personne qu'il lui paraît utile de consulter (...) Le commissaire enquêteur (...) établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies(...) " ;.
7. Considérant qu'il ressort du rapport du commissaire enquêteur que ce dernier a d'une part répertorié les sept observations effectuées par M. B...au cours de l'enquête publique, leur apportant les réponses qu'il estimait adéquates, d'autre part, a fait valoir dans ses conclusions motivées que les exploitations agricoles situées près du bourg seraient préservées ; que, dès lors, le moyen tiré de la violation des règles de l'enquête publique doit être écarté ;
8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L.123-1-2 du code de l'urbanisme : " Le rapport de présentation (...) s'appuie sur un diagnostic établi au regard des prévisions économiques et démographiques et des besoins répertoriés en matière de développement économique, de surfaces agricoles (...). Il présente une analyse de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers (...) " ;
9. Considérant que le rapport de présentation du plan local d'urbanisme contesté indique notamment, quant aux conséquences de l'ouverture à l'urbanisation sur les terres agricoles, que les élus souhaitent encourager le développement démographique de la commune, dont la population a augmenté de près de 1% par an entre 1999 et 2006, en classant suffisamment de terrains en zones d'urbanisation à court, moyen et long terme ; qu'il précise que pour y parvenir, il convient de disposer de 11 hectares dans une hypothèse haute, chiffre qui a été doublé pour éviter toute spéculation foncière ; que le rapport de présentation ajoute, que si au total plus de 28 hectares sont classés en zones à urbaniser AU, en tenant compte de l'extension de la zone d'activité existante, la commune s'engage toutefois à ne les ouvrir que progressivement à l'urbanisation, en préservant en tout état de cause les zones dévolues à l'agriculture et les sièges agricoles, observant à cet égard que près de 70% du territoire communal est classé en zone agricole A, répondant à l'objectif de préservation des espaces agricoles posé par le projet de développement et d'aménagement durable ; qu'ainsi, le rapport de présentation, qui n'a pas omis d'analyser les conséquences de l'urbanisation souhaitée par les auteurs du plan sur le devenir des terres agricoles, a fait une exacte application des dispositions de l'article L.123-1-2 précité du code de l'urbanisme ;
10. Considérant en quatrième lieu, qu'il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction ; que leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur de droit, d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts ;
11. Considérant que les parcelles de l'exploitation agricole " Les Grands Champs " de M. B... cadastrées nos C 54, 55, 57, 58, 516, 517, 709, 1106, 1107 et 1108 sont limitrophes au nord de la zone urbaine périphérique UP ; que les auteurs du PLU les ont classées en tout ou en partie dans un secteur p créé au sein de la zone agricole A afin ne pas compromettre leur ouverture ultérieure à l'urbanisation, le règlement de secteur interdisant la construction d'installations agricoles classées pour la protection de l'environnement ; que, toutefois, le requérant exploite notamment un élevage de volailles sous le régime des installations classées ; que, par suite, l'interdiction de construction de bâtiments d'élevage résultant du classement litigieux, qui affecte une grande partie de ses terres, est de nature à compromettre le développement de son exploitation ; que, dans ces conditions, et alors même que le règlement de la zone A a été modifié à la suite de l'enquête publique par la suppression d'une règle de recul supplémentaire de 100 m au-delà du secteur Ap pour toute installation classée, la création de ce secteur est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'il convient dès lors d'annuler la délibération du 24 janvier 2012 du conseil municipal de Conlie approuvant le plan local d'urbanisme en tant qu'il a créé le secteur Ap ;
12. Considérant, enfin, que la seule circonstance que le maire de Conlie était également le président de la communauté de commune lors de l'approbation de la délibération litigieuse ne saurait caractériser un détournement de pouvoir ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à demander l'annulation de la délibération contestée entant qu'elle a créé un secteur agricole Ap ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions présentées par chacune des parties sur le fondement de ces dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n°1204309 du 3 avril 2014 du tribunal administratif de Nantes est annulé.
Article 2 : La délibération du 24 janvier 2012 du conseil municipal de Conlie approuvant le plan local d'urbanisme est annulée en tant qu'elle créé un secteur Ap.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. B...devant le tribunal et devant la cour est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et à la Commune de Conlie.
Délibéré après l'audience du 17 novembre 2015, où siégeaient :
- M. Millet, président,
- M. François, premier conseiller,
- Mme Buffet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 décembre 2015.
Le rapporteur,
E. FRANÇOISLe président,
JF MILLET
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT01464