Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 24 octobre 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a rejeté sa demande de réintégration dans la nationalité française et la décision implicite de rejet de son recours gracieux.
Par un jugement n° 1204644 du 11 février 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 9 avril 2015, MmeC..., représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 11 février 2015 ;
2°) d'annuler les décisions contestées ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui accorder la nationalité française dans le délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son avocat en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les décisions contestées sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle a travaillé durant de nombreuses années, qu'elle perçoit le revenu de solidarité active en raison de son impossibilité à, retrouver du travail, qu'elle est désignée tierce personne pour s'occuper de son fils tétraplégique, que les faits pour lesquels elle a été condamnée sont anciens et que, si sa responsabilité a été engagée dans le cadre d'un accident de la route, elle a commis des blessures sans l'intention de les donner et que cette condamnation n'entre pas dans les cas visés par l'article 21-27 du code civil.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mai 2015, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le moyen tiré de ce que la requérante satisfait aux conditions posées par l'article 21-27 du code civil est inopérant ;
- le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation n'est pas fondé.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 août 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- la loi n° 91-647du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Piltant.
1. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 49 du décret susvisé du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte le degré d'insertion professionnelle et d'autonomie matérielle du postulant ainsi que les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ;
2. Considérant que, pour rejeter, par la décision contestée du 24 octobre 2011 confirmée implicitement, la demande de réintégration dans la nationalité française présentée par MmeC..., le ministre chargé des naturalisations s'est fondé sur le fait que cette dernière n'a pas de revenus personnels, ne subvient à l'essentiel de ses besoins qu'avec l'aide de prestations sociales et qu'elle a été l'auteur de blessures involontaires avec interruption temporaire de travail supérieure à trois mois en conduisant un véhicule le 12 août 2001, faits pour lesquels elle a été condamnée à deux mois d'emprisonnement avec sursis le 17 juin 2009 ;
3. Considérant qu'à la date des décisions contestées, MmeC..., née en France le 10 juin 1952 de parents algériens, ne justifiait d'aucune activité professionnelle et bénéficiait du revenu de solidarité active ainsi que de l'aide personnalisée au logement ; qu'il ressort du relevé de carrière qu'elle a produit qu'elle n'a pas exercé d'activité salariée entre 1983 et 2000 hormis trois périodes limitées et qu'elle ne justifie d'aucune autre activité rémunérée au cours de ces années ; que si elle allègue devoir s'occuper de son fils tétraplégique à la suite d'un accident de la circulation le 2 novembre 2000, elle ne justifie ni de l'étendue de la prise en charge matérielle de son fils ni de l'impossibilité dans laquelle elle serait d'exercer une activité professionnelle ; qu'ainsi, en estimant qu'elle ne justifiait pas d'une autonomie matérielle pérenne et en rejetant pour ce motif sa demande de réintégration dans la nationalité française, le ministre n'a pas entaché la décision contestée d'erreur manifeste d'appréciation ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la requérante a fait l'objet d'une condamnation par arrêt du 17 juin 2009 de la chambre des appels correctionnels de Paris à une peine de deux mois d'emprisonnement avec sursis pour blessures involontaires ayant occasionné une incapacité totale temporaire supérieure à 3 mois par la conduite d'un véhicule le 12 août 2001 ; qu'eu égard à l'ancienneté des faits qui se sont déroulés près de dix ans avant la date de la décision contestée, le ministre ne pouvait, sans entacher son appréciation d'une erreur manifeste, se fonder sur ces faits pour prononcer le rejet de la demande de réintégration ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que le ministre aurait pris la même décision en se fondant seulement sur l'absence d'autonomie matérielle pérenne de la postulante ;
5. Considérant que les décisions contestées ne déclarent pas irrecevables la demande de réintégration présentée par Mme C...; que, par suite, le moyen tiré de l'article 21-27 du code civil est inopérant ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions présentées à ce titre par Mme C...ne peuvent être accueillies ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que Mme C...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 6 novembre 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- Mme Piltant, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 27 novembre 2015.
Le rapporteur,
Ch. PILTANTLe président,
H. LENOIR
Le greffier,
F. PERSEHAYE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT01141