La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/09/2015 | FRANCE | N°15NT00004

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 25 septembre 2015, 15NT00004


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...G...et d'autres requérants ont demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2013 par lequel le maire de la commune de Tours a délivré un permis de construire à la société SMC Promotion et la décision du 25 novembre 2013 rejetant leur recours gracieux.

Par un jugement n° 1400301 du 4 novembre 2014, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 2 janvier

2015 et le 17 juin 2015, l'association de l'Ilot du Moulin à vent, M. D...A..., Mme I...E...et M. B...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...G...et d'autres requérants ont demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2013 par lequel le maire de la commune de Tours a délivré un permis de construire à la société SMC Promotion et la décision du 25 novembre 2013 rejetant leur recours gracieux.

Par un jugement n° 1400301 du 4 novembre 2014, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 2 janvier 2015 et le 17 juin 2015, l'association de l'Ilot du Moulin à vent, M. D...A..., Mme I...E...et M. B...G..., représentés par Me Benoit, avocat, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 4 novembre 2014 ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Tours le versement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'arrêté contesté a été signé par une autorité incompétente ;

- l'arrêté contesté méconnait les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dès lors que le projet présente un risque pour la sécurité publique, le terrain d'assiette du projet étant traversé en sous-sol par une cave qui menace de s'effondrer, que le permis de construire ne prévoit aucune prescription relative aux études géotechniques complémentaires à mener ni aux dispositions techniques à prendre pour sécuriser la construction et que le procédé mentionné par le maitre d'oeuvre ne permettra pas de parer aux risques d'affaissement ;

- en sollicitant des permis de construire identiques sur la même parcelle, les sociétés CIM Promotion, SMC Promotion et IGH Promotion se livrent à des manoeuvres frauduleuses et portent atteinte au droit des requérants à un recours effectif, droit que le maire a méconnu en accordant ce permis de construire, par l'arrêté illégal du 21 mars 2014 ;

- leur requête a été valablement notifiée au pétitionnaire ;

- ils ont intérêt à agir en vertu de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ;

- le président de l'association a été habilité à agir par l'assemblée générale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mars 2015, la commune de Tours conclut au rejet de la requête et à ce que la cour condamne les requérants à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors que les requérants n'établissent pas avoir notifié leur requête au pétitionnaire et à la commune conformément aux dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, que les requérants, et notamment l'association de l'Ilot du Moulin à vent, ne justifient pas d'un intérêt à agir conformément aux dispositions de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme et que l'association ne justifie pas de la capacité pour agir de son président ;

- le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte n'est pas fondé et est irrecevable dès lors qu'en première instance les requérants n'ont soulevé aucun moyen de légalité externe ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 12 juin 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 30 juin 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Piltant,

- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public,

- et les observations de MeH..., substituant Me Benoit, représentant les requérants.

1. Considérant que, par arrêté du 16 juillet 2013, le maire de la commune de Tours a délivré à la société SMC Promotion un permis de construire un ensemble immobilier de 16 logements et un garage en sous-sol sur la parcelle cadastrée BZ 241 sise 4 rue de la Croix Montoire à Tours ; que l'association de l'Ilot du Moulin à Vent et les autres requérants relèvent appel du jugement du 4 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté et de la décision du 25 novembre 2013 du maire de la commune de Tours rejetant leur recours gracieux ;

Sur les fins de non recevoir opposées par la commune de Tours :

2. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que les requérants ont notifié leur recours à la mairie de Tours et à la société SMC Promotion par plis adressés le 2 janvier 2015 en recommandé avec accusé de réception ; que, par suite, la fin de non recevoir tirée de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme manque en fait et doit être écartée ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat (...) ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire (...) que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement (...) " ; que, d'une part, ces dispositions, issues de l'article 1er de l'ordonnance n° 2013-638 du 18 juillet 2013 et entrées en vigueur le 19 août 2013, ne sont pas applicables au recours formé par les requérants à l'encontre d'un permis de construire délivré le 16 juillet 2013 ; que, d'autre part, il ressort des pièces du dossier que le projet en litige prévoit la construction d'un ensemble immobilier de seize logements sur la parcelle BZ 241 située pour partie au dessus de la carrière de la Grande Bretèche au droit de laquelle le risque de mouvement de terrain est connu ; que les requérants, qui demeurent... ; que, par suite, la fin de non recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir des requérants doit être écartée ;

4. Considérant, enfin, que, dès lors que les autres requérants ont qualité pour agir à l'encontre de la décision contestée, la circonstance que le président de l'association de l'Ilot du Moulin à Vent n'aurait pas qualité pour agir est sans incidence sur la recevabilité de la requête ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

5. Considérant que, par arrêté du 31 mars 2008, modifié par arrêté du 7 avril 2008, le maire de la commune de Tours a donné délégation à M.F..., treizième adjoint, à l'effet notamment de signer " tous les actes, arrêtés, documents et correspondances " se rapportant aux " questions concernant l'urbanisme " ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 16 juillet 2013 manque en fait et doit être écarté ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation ou leurs dimensions, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. Il en est de même si les constructions projetées, par leur implantation à proximité d'autres installations, leurs caractéristiques ou leur situation, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique " ; qu'il appartient à l'autorité d'urbanisme compétente et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteintes à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement de ces dispositions, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la parcelle d'implantation du projet est située pour partie au dessus de l'ancienne carrière d'extraction de tuffeau de la Bretèche, d'une emprise de 3,8 ha ; qu'il ressort du rapport d'études réalisé le 4 mai 2012 par le syndicat intercommunal Cavités 37 que la carrière présente de très fortes traces de dégradations, de nombreux piliers étant éclatés et n'assurant plus leur fonction de portance initiale, que, si le risque d'effondrement ponctuel généralisé est quasiment nul, il n'est pas à exclure que l'évolution potentielle de la carrière peut conduire à des affaissements locaux ou généralisés suite à des ruptures de piliers, auquel cas les terrains de recouvrement se déformeraient et entraineraient des déformations pouvant atteindre en surface un ordre de grandeur pluri décimétrique, et que le bâtiment projeté en bordure de la rue du Moulin à Vent est réalisé dans la zone d'influence de la cuvette d'affaissement ; qu'il ressort en outre des rapports réalisés les 14 janvier et 1er décembre 2014, postérieurement à la décision contestée, par M.C..., géologue et expert judiciaire, que la carrière de la Bretèche, abandonnée et disposant d'un historique d'effondrement, est reconnue comme source de risque de mouvement de terrain et motive une surveillance régulière depuis plus de 10 ans, que le risque de mouvement de terrain sur la parcelle en cause est important et que " le risque d'un affaissement qui pourrait survenir à la faveur d'une déstabilisation de la carrière conduirait à une déformée de surface pluricentimétrique voire décimétrique, qui provoquerait une rupture de fondations non adaptées à cette situation et en conséquence, la ruine de l'ouvrage construit " ; que le rapport de présentation du plan local d'urbanisme de la commune de Tours mentionne le risque identifié d'effondrement au droit de la carrière de la Bretèche et le long processus d'effondrement, et indique que " si la constructibilité d'un terrain n'est pas incompatible avec la présence d'une cave, il convient de vérifier si la construction ne va pas développer une dégradation de la cave (surcharge, maitrise des eaux) et inversement, si l'évolution naturelle de la cave ne pose pas de problème sécuritaire pour l'ouvrage " ; que, le 4 mai 2012, le syndicat intercommunal Cavités 37 a émis un avis défavorable au projet, conseillant d'une part, d'éviter toute construction dans la zone d'influence de la cuvette d'affaissement et d'autre part de réaliser des fondations sur micropieux avec dalle portée par des micropieux et proscrivant la solution de fondation superficielle ou radier ; que si, le 3 septembre 2012, le même syndicat intercommunal a émis un avis favorable au projet, cet avis était conditionné à la réalisation d'études géotechniques d'avant-projet (G12) et de projet (G2) destinées à identifier les aléas majeurs et les principes généraux pour en limiter les conséquences en matière de fondations ; qu'ainsi, et compte tenu du risque d'affaissement du terrain environnant que comporterait la construction de l'immeuble projeté sur la parcelle en cause, le maire ne pouvait délivrer le permis de construire en litige sans l'assortir de prescriptions précises destinées à prévenir les effets d'un tel risque ; que l'information du pétitionnaire sur l'existence de ce risque, l'avis du syndicat intercommunal Cavités 37 du 3 septembre 2012 visé par l'arrêté contesté et le courrier du 18 juin 2012 du bureau d'études géotechniques Sogéo, joint au dossier de demande de permis de construire, qui proposait au maitre d'ouvrage deux solutions en matière de fondations sans toutefois indiquer, les études géotechniques n'ayant pas été réalisées, quels ouvrages devaient être réalisés, ne pouvaient tenir lieu des prescriptions requises ; qu'il ne ressort en outre d'aucune pièce du dossier que le pétitionnaire se serait engagé à réaliser les études géotechniques conditionnant l'avis favorable du syndicat intercommunal ; que, par suite, en délivrant le permis de construire en litige, le maire de la commune de Tours a méconnu les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et commis une erreur manifeste d'appréciation ;

8. Considérant qu'en l'état du dossier aucun des autres moyens n'est de nature à entraîner l'annulation des décisions attaquées ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge des requérants, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme sollicitée par la commune de Tours ; qu'il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Tours le versement d'une somme globale de 1 500 euros aux requérants au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 4 novembre 2014 du tribunal administratif d'Orléans est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 16 juillet 2013 par lequel le maire de la commune de Tours a délivré un permis de construire à la société SMC Promotion et la décision du 25 novembre 2013 rejetant le recours gracieux formé par les requérants sont annulés.

Article 3 : La commune de Tours versera à l'association de l'Ilot du Moulin à Vent, à M. D...A..., à Mme I...E...et à M. B...G...une somme globale de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Tours au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'association de l'Ilot du Moulin à Vent, à M. D...A..., à Mme I...E...et à M. B...G..., à la commune de Tours et à la société SMC Promotion.

Délibéré après l'audience du 4 septembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- Mme Piltant, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 septembre 2015.

Le rapporteur,

Ch. PILTANTLe président,

H. LENOIR

Le greffier,

F. PERSEHAYE

La République mande et ordonne au ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 15NT00004


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT00004
Date de la décision : 25/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: Mme Christine PILTANT
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : BENOIT

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-09-25;15nt00004 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award