Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2013 du préfet d'Indre-et-Loire portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant la République Démocratique du Congo (RDC) ou tout autre pays où elle est légalement admissible comme pays de destination ;
Par un jugement n° 1401972 du 18 septembre 2014, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 20 novembre 2014, Mme B..., représentée par Me Goudeau, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 septembre 2014 du tribunal administratif d'Orléans ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 20 novembre 2013 du préfet d'Indre-et-Loire ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Indre-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour mention " salarié " " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale " ou à titre exceptionnel et humanitaire, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat de la somme de 1 200 euros sur le fondement des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, moyennant la renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour en application des dispositions de l'article L 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le refus de séjour est entaché d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article L 315-15 du même code et d'une erreur de fait ;
- elle pouvait bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 2 bis de l'article L 313-2 de ce code ; il appartenait au préfet d'examiner sa demande au regard de ces dispositions alors même qu'elle ne remplissait pas l'un des critères fixés par ce texte ; le préfet n'a pas examiné sa situation personnelle ;
- le préfet n'a pas examiné sa demande de titre de séjour au regard des dispositions de l'article L 313-14 du code ; l'arrêté contesté ne vise d'ailleurs pas cet article ; elle justifie de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens de ces dispositions ;
- l'arrêté contesté mentionne, de façon erronée, qu'elle est célibataire sans enfant ; elle est mère d'un enfant né le 3 novembre 2014 ; elle vit avec M. A...qui est le père de cet enfant et avec lequel elle a conclu un pacte civil de solidarité le 29 novembre 2014 ; M.A..., qui est également le père d'un enfant français, a une carte de résident valable jusqu'en 2022 ; l'arrêté contesté porte donc une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale ; il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ; il méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant;
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 janvier 2015, le préfet d'Indre-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés et que la requérante résidant désormais dans le département de l'Essonne, il n'est plus compétent pour statuer sur sa demande.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 22 octobre 2014.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Buffet,
-les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public.
1. Considérant que Mme B... relève appel du jugement du 18 septembre 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 novembre 2013 du préfet d'Indre-et-Loire portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant la République Démocratique du Congo (RDC) ou tout autre pays où elle est légalement admissible comme pays de destination ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des actions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
3. Considérant que, si la légalité d'une décision s'apprécie à la date à laquelle elle a été prise, il appartient au juge de tenir compte des justifications apportées devant lui, dès lors qu'elles attestent de faits antérieurs à la décision contestée, même si ces éléments n'ont pas été portés à la connaissance de l'administration avant qu'elle se prononce ; que l'arrêté du 20 novembre 2013 litigieux précise que Mme B... est " célibataire sans enfant" et que " dans ces conditions, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale en application de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " ; que, toutefois, Mme B... est la mère d'un enfant né le 4 novembre 2013 ; que M.A..., qui est le père de cet enfant ainsi que d'un enfant de nationalité française dont il a la charge, est titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 29 juin 2022 ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de l'extrait de naissance produit, que Mme B... et M. A...ont reconnu leur enfant le 25 mai 2013 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'autorité administrative aurait pris la même décision si elle avait tenu compte de la situation réelle de l'intéressée au regard, notamment, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le préfet d'Indre-et-Loire a ainsi, par l'erreur de fait qu'il a commise, entaché d'illégalité sa décision portant refus de titre de séjour ; que, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont elles-mêmes entachées d'illégalité ; que, par suite, l'arrêté du 20 novembre 2013 contesté doit être annulé ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date à laquelle la cour est amenée à statuer, que Mme B... a sa résidence dans le département de l'Essonne ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de l'Essonne, territorialement compétent, de réexaminer sa demande dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991:
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par Mme B...et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 18 septembre 2014 du tribunal administratif d'Orléans et l'arrêté du 15 novembre 2012 du préfet d'Indre-et-Loire sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Essonne de réexaminer la demande de titre de séjour de Mme B...dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Goudeau, avocat de MmeB..., la somme de 1 200 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation de celui-ci à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera adressée au préfet d'Indre-et-Loire et au préfet de l'Essonne.
Délibéré après l'audience du 1er septembre 2015 à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. Millet, président-assesseur,
- Mme Buffet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 septembre 2015.
Le rapporteur,
C. BUFFET Le président,
A. PEREZ
Le greffier,
S. BOYERE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
''
''
''
''
1
N°14NT02939 2
1