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24/07/2015 | FRANCE | N°14NT00015

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 24 juillet 2015, 14NT00015


Vu la requête, enregistrée le 7 janvier 2014, présentée pour la société VSB Energies Nouvelles, dont le siège est situé 27 quai de La Fontaine à Nîmes (30900), par Me Balay, avocat, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202335 du 5 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du préfet de la région Centre du 12 décembre 2011 refusant de lui délivrer un permis de construire un parc éolien sur le territoire de la commune d'Epeigné-sur-Dême (Indre-et-Loire) et, d'aut

re part, de la décision implicite rejetant son recours gracieux ;

2°) d'annul...

Vu la requête, enregistrée le 7 janvier 2014, présentée pour la société VSB Energies Nouvelles, dont le siège est situé 27 quai de La Fontaine à Nîmes (30900), par Me Balay, avocat, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202335 du 5 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du préfet de la région Centre du 12 décembre 2011 refusant de lui délivrer un permis de construire un parc éolien sur le territoire de la commune d'Epeigné-sur-Dême (Indre-et-Loire) et, d'autre part, de la décision implicite rejetant son recours gracieux ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 12 décembre 2011 et la décision implicite rejetant son recours gracieux ;

3°) d'ordonner au préfet de se prononcer à nouveau sur sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à rendre ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- le projet n'est pas en situation de covisibilité avec la collégiale Saint-Michel et le tribunal administratif a, sur ce point, confondu ce projet avec celui de Dissay-sous-Courcillon ;

- l'impact du projet sur le village de Beaumont-sur-Dême et son église est très limité et ne peut légalement justifier l'arrêté contesté ;

- à cet égard, le jugement n'a pas apprécié la qualité des lieux et a dénaturé les pièces du dossier en estimant que les éoliennes seront en surplomb du village ;

- les paysages naturels environnants ne présentent pas un caractère remarquable ;

- le site d'implantation est situé dans une zone favorable au développement de l'énergie éolienne identifiée par le schéma régional éolien ;

- les autres moyens sont de nature à justifier l'annulation de l'arrêté contesté ;

- l'arrêté contesté n'est pas assez motivé ;

- il n'y a pas d'atteinte particulière pour les chiroptères ;

- le motif de rejet tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme procède d'une erreur de droit ;

- les risques pour les chiroptères ont été suffisamment étudiés et l'étude d'impact est complète sur ce point ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'intervention, présentée pour l'association Paysages ruraux, l'association Paysages paysans, M. D...A..., M. B...C..., qui demandent à la cour de rejeter la requête et de mettre à la charge de la société VSB Energies Nouvelles le versement à chacun de la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

ils font valoir que :

- la demande était irrecevable ;

- elle était tardive ;

- l'article 3 de la Charte de l'environnement justifie le rejet de la demande de permis de construire ;

Vu l'ordonnance du 13 janvier 2015 fixant la clôture de l'instruction au 6 février 2015 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 février 2015, présenté par le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité, qui conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir que :

- le préfet et les premiers juges n'ont pas méconnu l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ;

- le préfet aurait pris la même décision en se fondant seulement sur l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance du 9 février 2015 décidant la réouverture de l'instruction ;

Vu l'ordonnance du 5 mars 2015 fixant la clôture de l'instruction au 23 mars 2015 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juillet 2015 :

- le rapport de M. Durup de Baleine, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;

- les observations de Me Carpentier, avocat de la société VSB Energies Nouvelles ;

- et les observations de Me Thalineau, avocat de l'association Paysages ruraux et autres ;

Après avoir pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 10 juillet 2015, présentée pour la société VSB Energies Nouvelles ;

1. Considérant que, le 28 mai 2010, la société VSB Energies Nouvelles a demandé un permis de construire en vue d'implanter un parc éolien constitué de quatre aérogénérateurs d'une hauteur de 140 m en bout de pâles et d'un poste de livraison sur le territoire de la commune d'Epeigné-sur-Dême (Indre-et-Loire) ; que, par un arrêté du 12 décembre 2011, le préfet de la région Centre a rejeté cette demande ; que, par une décision implicite de rejet née le 5 mai 2012, il a rejeté le recours gracieux présenté le 5 mars 2012 par cette société contre l'arrêté du 12 décembre 2011 ; que la société VSB Energies Nouvelles relève appel du jugement du 5 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et de cette décision implicite de rejet ;

Sur les interventions :

2. Considérant que l'association Paysages ruraux, l'association Paysages paysans, M. A...et M. C...ont intérêt au maintien du jugement attaqué et de l'arrêté contesté ; que, dès lors, leurs interventions sont recevables ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté contesté comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait en constituant le fondement ; que, dès lors, le moyen tiré de ce qu'il ne serait pas motivé ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet de parc éolien dont l'arrêté contesté refuse l'implantation est localisé, au nord-ouest du territoire de la commune d'Epeigné-sur-Dême, sur des terrains dont la cote altimétrique varie de 124 à 127 m ; que les quatre éoliennes projetées sont situées à une distance comprise entre 2, 8 et 3, 8 km de l'église Saint-Pierre et de la collégiale Saint-Michel de Bueil-en-Touraine, dites également collégiale Saint-Michel et Saint-Pierre de Bueil, édifices distincts formant toutefois un même ensemble patrimonial, localisés au sud-ouest du site d'implantation de ces éoliennes, classés au titre des monuments historiques depuis 1912 et 1931 et implantés à une cote altimétrique d'environ 100 mètres ; qu'au moins depuis de nombreuses voies de circulation situées au sud, au sud-ouest comme au sud-est de Bueil-en-Touraine, la perspective paysagère se caractérise de manière essentielle par la présence de ces édifices protégés et constitue, ainsi, une perspective monumentale ; que les quatre éoliennes projetées, compte tenu de leur localisation au nord-ouest de Bueil-en-Touraine, de leur alignement du nord-ouest légèrement vers le sud-est, de leur hauteur et de l'altitude naturelle du site d'implantation, très supérieure à celle du bourg de Bueil-en-Touraine, sans qu'aucun élément naturel ou artificiel ne puisse constituer un écran visuel notable entre cette localité et ce site d'implantation, auraient, ainsi, un impact paysager très prononcé sur l'église Saint-Pierre et la collégiale Saint-Michel et, pour cette raison, seraient de nature à porter de manière excessive atteinte à la conservation, nécessaire, de la perspective monumentale sur ces édifices protégés, en en altérant une caractéristique essentielle ; que si la société requérante conteste à cet égard l'appréciation tant du préfet de la région Centre que des premiers juges, elle n'apporte toutefois, devant la cour, pas d'élément de nature à en établir le caractère erroné en se référant à plusieurs photomontages figurant dans l'étude d'impact dont était assortie sa demande de permis de construire mais dont, en fait, aucun ne figure l'impact de la présence du parc éolien d'Epeigné-sur-Dême sur l'église Saint-Pierre et la collégiale Saint-Michel de Bueil-en-Touraine et n'est ainsi propre à établir l'exactitude des énonciations de cette étude selon lesquelles, depuis l'est et le sud du bourg de Bueil-en-Touraine, " des co-visibilités entre l'église et le haut des pales des éoliennes existeront. Les vues seront toutefois ponctuelles et largement atténuées par la densité végétale du site ", énonciations d'ailleurs contredites par la carte des " potentialités de perception du site éolien en projet " ; que, si le projet refusé par l'arrêté contesté est situé dans l'une des zones identifiées par le schéma régional éolien du Centre comme favorable au développement de l'énergie éolienne, cette circonstance ne faisait toutefois pas obstacle à l'application de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, ce schéma indiquant, au demeurant, que la collégiale Saint-Michel de Bueil-en-Touraine est au nombre des enjeux identifiés dans cette zone ; qu'il en va d'autant plus ainsi que le schéma régional du climat, de l'air et de l'énergie dans lequel figure ce schéma régional éolien résulte d'un arrêté du préfet de la région Centre du 28 juin 2012, postérieur à l'arrêté contesté ; qu'ainsi, le préfet de la région Centre, qui n'a pas commis d'erreur de fait en estimant qu'il existera une " co-visibilité " entre ces deux monuments historiques et le parc éolien projeté et que ce dernier surplombera ces édifices, n'a pas, dans l'application des dispositions de cet article, commis l'erreur d'appréciation dont il lui est fait grief en estimant que ce projet est de nature à porter atteinte au caractère et à l'intérêt des lieux avoisinants ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ;

6. Considérant, en troisième lieu, que, si la société VSB Energies Nouvelles soutient que les incidences de son projet de parc éolien sur les autres éléments du patrimoine bâti et sur les paysages naturels ne sont pas de nature à justifier, sans erreur d'appréciation, l'arrêté contesté, il résulte toutefois de l'instruction que le préfet de la région Centre aurait pris la même décision en se fondant sur le seul motif tiré de l'atteinte au caractère et à l'intérêt de l'église Saint-Pierre et de la collégiale Saint-Michel de Bueil-en-Touraine ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que, si la société requérante soutient que, comme d'ailleurs l'ont estimé les premiers juges, le motif de l'arrêté contesté tiré de l'application des dispositions de l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme est erroné, elle ne conteste pas que, comme ils l'ont également estimé, le préfet de la région Centre aurait pris la même décision s'il n'avait retenu que le motif tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-21 du même code ;

8. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir opposées par les intervenants, la société VSB Energies Nouvelles n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la région Centre d'examiner à nouveau la demande de permis de construire présenté par la société VSB Energies Nouvelles ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme à ce titre ; que les conclusions présentées au même titre par l'association Paysages ruraux et autres, qui n'ont pas la qualité de parties au sens de ces dispositions, ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de l'association Paysages ruraux, de l'association Paysages paysans, de M. A...et de M. C...est admise.

Article 2 : La requête de la société VSB Energies Nouvelles est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par l'association Paysages ruraux et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société VSB Energies Nouvelles, au ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité, à l'association Paysages ruraux, à l'association Paysages paysans, à M. D... A...et à M. B...C....

Délibéré après l'audience du 3 juillet 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Durup de Baleine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 juillet 2015.

Le rapporteur,

A. DURUP de BALEINELe président,

H. LENOIR

Le greffier,

F. PERSEHAYE

La République mande et ordonne au ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT00015 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT00015
Date de la décision : 24/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Antoine DURUP de BALEINE
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : CABINET FIDAL BALAY

Origine de la décision
Date de l'import : 11/09/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-07-24;14nt00015 ?
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