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26/06/2015 | FRANCE | N°14NT01212

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 26 juin 2015, 14NT01212


Vu la requête, enregistrée le 6 mai 2014, et le mémoire complémentaire, enregistré le 21 juillet 2014, présentés pour M. et Mme B...D..., demeurant ... et l'association Les Amis du Noireau, dont le siège est au 7 rue Vaullegeard à Condé-sur-Noireau (14110), représentée par son président, par Me Castéra et Me C...avocats au barreau de Paris ;

M. et Mme D...et l'association Les Amis du Noireau demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301616 du 1er avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de

l'arrêté du 9 juillet 2013 par lequel le maire de Saint-Pierre-du-Regard (Orne...

Vu la requête, enregistrée le 6 mai 2014, et le mémoire complémentaire, enregistré le 21 juillet 2014, présentés pour M. et Mme B...D..., demeurant ... et l'association Les Amis du Noireau, dont le siège est au 7 rue Vaullegeard à Condé-sur-Noireau (14110), représentée par son président, par Me Castéra et Me C...avocats au barreau de Paris ;

M. et Mme D...et l'association Les Amis du Noireau demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301616 du 1er avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 juillet 2013 par lequel le maire de Saint-Pierre-du-Regard (Orne) a délivré un permis de construire à la société Sodiflers pour la réalisation d'un entrepôt et de pistes de livraison dits " drive express " dans la zone d'activité de la Remaizière ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Pierre-du-Regard et de la société Sodiflers prises ensemble le versement à chacun d'entre eux d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

ils soutiennent que :

- la société Sodiflers et la société Bocadist, laquelle a obtenu sur le même terrain un permis de construire une station service ensuite transféré à la première nommée, ont délibérément contourné la réglementation afférente aux lotissements ou aux permis valant division ;

- le tribunal a écarté à tort comme inopérant le moyen tiré par voie d'exception de l'illégalité au regard de l'article L 122-2 du code de l'urbanisme de la révision du plan local d'urbanisme, alors que leur mémoire visait implicitement les dispositions pertinentes du plan précédent remises en vigueur, précisées en appel, et que par ailleurs leur argumentation est justifiée au fond ;

- le règlement de la zone AUz du plan local d'urbanisme n'autorise que les constructions à usage principal d'activités commerciales et non les entrepôts ; or le " drive " contesté doit être regardé comme un entrepôt et non comme un bâtiment commercial ;

- le dossier de permis est incomplet sur la prise en compte de la réglementation thermique ;

- relativement à la desserte des lieux, le permis contesté compromet l'aménagement de la zone AUz ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2014, présenté pour la société par action simplifiée Sodiflers, dont le siège est rue de la Chaussée à Flers (61100), représentée par son président, par Me Courrech, avocat au barreau de Toulouse , qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. et Mme D...et de l'association Les Amis du Noireau le versement d'une somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- M. et Mme D...sont dépourvus d'intérêt à agir en raison de la distance séparant leur parcelle du projet litigieux, de la présence de constructions entre ce dernier et cette parcelle et de la modicité du projet autorisé par le permis de construire ; l'association l'est également eu égard à son objet statutaire limité à la préservation de la rivière Noireau et de ses abords alors que la station service objet du permis en est éloignée ; les requérants agissent pour le compte d'une enseigne concurrente ;

- le moyen tiré de la violation de l'article L 122-2 du code de l'urbanisme est doublement inopérant : d'une part sur le fond, d'autre part en ce que les dispositions pertinentes du plan précédent remises en vigueur le cas échéant ne sont pas précisées par les requérants ;

- le moyen tiré de la violation de la réglementation afférente aux lotissements ou aux permis valant division n'est pas fondé ;

- un drive est un bâtiment dans lequel est développée une activité commerciale, ainsi qu'en dispose notamment la loi du 24 mars 2014 ;

- est de même infondé le moyen afférent à la méconnaissance par le permis contesté de l'aménagement cohérent de la zone AUz imposé par le plan local d'urbanisme ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 janvier 2015, présenté pour la commune de Saint-Pierre-du-Regard, représentée par son maire, par Me Le Guen, avocat au barreau de Rennes, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. et Mme D...et de l'association Les Amis du Noireau une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- M. et Mme D...sont dépourvus d'intérêt à agir dans la mesure où la construction projetée n'affectera pas les conditions d'occupation du hangar inhabité en leur possession et de l'absence de visibilité sur le projet depuis ce dernier ; l'association l'est également eu égard à son objet statutaire très vague ;

- le moyen tiré de la violation de l'article L 122-2 du code de l'urbanisme est inopérant à l'encontre d'un permis de construire, alors au surplus que la parcelle concernée est urbanisée depuis 1996 ;

- le moyen tiré de la violation de la réglementation afférente aux lotissements ou aux permis valant division n'est pas fondé ;

- la construction d'un " drive ", qui est un commerce et non un entrepôt, est autorisée en zone AUz du plan local d'urbanisme

- le moyen afférent à la méconnaissance par le permis contesté de l'aménagement cohérent de la zone AUz n'est pas fondé ;

- le permis modificatif ne peut être requalifié en permis nouveau ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 mai 2015, présenté pour la société Sodiflers, qui conclut aux mêmes fins que son mémoire en défense par les mêmes moyens qu'elle développe ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 mai 2015, présenté pour M. et Mme D..., et l'association Les Amis du Noireau, qui concluent aux mêmes fins que leur requête par les mêmes moyens ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 3 juin 2015, présentée pour M. et Mme D...et l'association Les Amis du Noireau ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juin 2015 :

- le rapport de M. François, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public ;

- et les observations de Me Castera, avocat de M. et Mme D...et de l'assocation Les Amis du Noireau ;

- les observations de Me Le Guen, avocat de la commune de Saint-Pierre-du-Regard ;

- et les observations de MeA..., substituant Me Courrech, avocat des sociétés Sodiflers et Bocadist ;

1. Considérant que M. et Mme D...et l'association Les Amis du Noireau relèvent appel du jugement du 1er avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 juillet 2013 par lequel le maire de Saint-Pierre-du-Regard (Orne) a délivré un permis de construire à la société Sodiflers pour la réalisation d'un entrepôt et de pistes de livraison dits " drive express " dans la zone d'activité de la Remaizière ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme : " Constitue un lotissement la division en propriété ou en jouissance d'une unité foncière ou de plusieurs unités foncières contigües ayant pour objet de créer un ou plusieurs lots destinés à être bâtis " ; que l'article R.421-19 du même code dispose que : " Doivent être précédés de la délivrance d'un permis d'aménager :a) Les lotissements :-qui prévoient la création ou l'aménagement de voies, d'espaces ou d'équipements communs internes au lotissement (...)" ; qu'au nombre des dispositions dont l'autorité qui délivre le permis de construire doit assurer le respect figurent celles qui concernent les lotissements ; qu'il suit de là qu'un permis de construire ne peut être légalement délivré pour une construction à édifier sur un terrain compris dans un lotissement non autorisé ;

3. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date du 9 juillet 2013 à laquelle a été délivré le permis de construire contesté ait été réalisée ni même envisagée une division de l'unité foncière commune au " drive express " autorisé et à la station service autorisée par un permis de construire du 18 février 2013 en deux lots destinés à être bâtis ; que si ce dernier permis, dont était titulaire la société Bocadist, avait été transféré le 9 avril 2013 à la société Sodiflers, laquelle avait ensuite obtenu le 3 juin 2013 un permis modificatif ayant pour objet de ramener de 73 901 à 63 977 m2 la superficie totale du terrain d'assiette commun au " drive express " et à la station service, cette circonstance n'a pas eu pour effet de créer une division en propriété de l'unité foncière concernée ; que, par ailleurs, si la société Sodiflers avait déposé le 20 décembre 2012 une première demande de permis afférente à un " drive express " sur une partie de cette unité foncière, puis avait retiré cette demande le 27 mars 2013 avant de la réitérer le 29 mai suivant ,cette seconde circonstance ne saurait à elle seule révéler une volonté de contourner les règles posées par les articles L.442-1 et R.421-19 précités du code de l'urbanisme ; qu'au demeurant, aucune disposition de ce code ne s'oppose à ce que la station service et le " drive express ", dont le même bénéficiaire est titulaire des permis, partagent la même assiette foncière ; que le terrain concerné n'ayant pas vocation à être divisé en propriété ou en jouissance, il n'est pas davantage établi que la délivrance successive des permis précités ait manifesté une volonté délibérée de contourner les règles attachées aux permis de construire valant division parcellaire énoncées par l'article R.431-24 du code de l'urbanisme ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme : " Dans les conditions précisées au présent article, dans les communes qui ne sont pas couvertes par un schéma de cohérence territoriale applicable, le plan local d'urbanisme ne peut être modifié ou révisé en vue d'ouvrir à l'urbanisation une zone à urbaniser délimitée après le 1er juillet 2002 ou une zone naturelle. / Jusqu'au 31 décembre 2012, le premier alinéa s'applique dans les communes situées à moins de quinze kilomètres du rivage de la mer ou à moins de quinze kilomètres de la périphérie d'une agglomération de plus de 50 000 habitants au sens du recensement général de la population. A compter du 1er janvier 2013 et jusqu'au 31 décembre 2016, il s'applique dans les communes situées à moins de quinze kilomètres du rivage de la mer ou à moins de quinze kilomètres de la périphérie d'une agglomération de plus de 15 000 habitants au sens du recensement général de la population. A compter du 1er janvier 2017, il s'applique dans toutes les communes. (...) " ;

5. Considérant que les requérants se prévalent par voie d'exception de l'illégalité de la création de la zone à urbaniser AUz du plan local d'urbanisme dans laquelle est inclus le terrain d'assiette des projets contestés ; qu'il est constant que la commune de Saint-Pierre - du - Regard n'est pas couverte par un schéma de cohérence territoriale ; qu'il ressort par ailleurs des pièces du dossier que la création de cette zone, dans laquelle sont autorisées les constructions à usage principal d'activités secondaires et tertiaires, est issue de la révision du plan d'occupation des sols valant plan local d'urbanisme, approuvée le 16 octobre 2006 par le conseil municipal ; que, dans ces conditions, et alors que la commune de Saint-Pierre-du-Regard est située à plus de quinze kilomètres de la mer et à plus de quinze kilomètres de la périphérie d'une agglomération de plus de 50 000 habitants, les dispositions de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme, interdisant en l'absence d'un tel schéma l'ouverture à l'urbanisation de zones naturelles ou de zones à urbaniser délimitées à compter du 1° janvier 2013 et jusqu'au 31 décembre 2016, n'étaient pas applicables au projet litigieux ;

6. Considérant, en troisième lieu, que l'article AUz 2 du règlement du plan local d'urbanisme n'autorise, dans le sous secteur AUza, que les constructions à usage principal d'activités commerciales ; que l'autorisation litigieuse portant sur la réalisation d'un " drive express ", comportant un entrepôt et quatre pistes de livraison, doit être regardée comme portant sur une construction relevant d'une activité commerciale au sens des dispositions du plan local d'urbanisme de Saint-Pierre-du-Regard ; que dès lors le moyen tiré de ce que le permis litigieux méconnaît les dispositions de l'article AUz 2 du règlement du plan local d'urbanisme doit être écarté ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'il n'est pas contesté que la température du bâtiment autorisé demeurera inférieure à 12°Celsius; que par suite, en application des dispositions de l'article R.111-20 du code de la construction et de l'habitation et contrairement à ce que soutiennent les appelants, il n'est pas soumis à la nouvelle réglementation thermique applicable à partir de 2012 ;

8. Considérant, enfin qu'aux termes de l'article AUz 2 du règlement du plan local d'urbanisme : " l'opération doit être compatible avec un aménagement cohérent de la zone conforme aux orientations d'aménagement et ne pas compromettre et ne pas rendre plus onéreux (...) l'aménagement du reste de la zone (...) " ; que le moyen tiré de ce qu'en méconnaissance de ces dispositions, le projet litigieux compromettrait la desserte et le développement des parcelles voisines n'est assorti d'aucun élément de nature à en établir le bien-fondé ; que les requérants ne peuvent utilement soutenir que l'accès à leur terrain serait devenu impossible dès lors qu'il ressort des plans joints à la demande de permis que ce dernier est desservi par un chemin rural ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées en défense, que M. et Mme D...et l'association Les Amis du Noireau ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui n'est entaché d'aucune omission à statuer, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Saint-Pierre-du-Regard et de la société Sodiflers, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, le versement à M. et Mme D...et à l'association Les Amis du Noireau de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge, d'une part, de M. et Mme D..., d'autre part, de l'association Les Amis du Noireau, une somme de 250 euros chacun au titre des frais de même nature exposés par la société Sodiflers, ainsi qu'une somme de même montant au titre des frais supportés par la commune de Saint-Pierre-du-Regard sur ce même fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme D...et de l'association Les Amis du Noireau est rejetée.

Article 2: M. et Mme D...et l'association Les Amis du Noireau verseront chacun à la commune de Saint-Pierre-du-Regard d'une part, et à la société Sodiflers d'autre part, une somme de 250 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...D..., à l'association Les Amis du Noireau, à la commune de Saint-Pierre-du-Regard et à la société Sodiflers.

Délibéré après l'audience du 2 juin 2015, où siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. François, premier conseiller,

- M. Pouget, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 26 juin 2015.

Le rapporteur,

E. FRANÇOISLe président,

A. PEREZ

Le greffier,

S. BOYERE

La République mande et ordonne au ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT01212


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01212
Date de la décision : 26/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Eric FRANCOIS
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : SELARL OLIVE-AZINCOURT

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-06-26;14nt01212 ?
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