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01/06/2015 | FRANCE | N°14NT02693

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 01 juin 2015, 14NT02693


Vu la requête, enregistrée le 21 octobre 2014, présentée pour Mme C...D...épouseB..., demeurant..., par MeA..., qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401402 du 2 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 avril 2014 par lequel le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer un titre de séjour et assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 11 avril 2014 ;

3°) d'

enjoindre au préfet du Calvados de statuer à nouveau sur sa situation, dans un délai de ...

Vu la requête, enregistrée le 21 octobre 2014, présentée pour Mme C...D...épouseB..., demeurant..., par MeA..., qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401402 du 2 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 avril 2014 par lequel le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer un titre de séjour et assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 11 avril 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Calvados de statuer à nouveau sur sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à rendre et sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

elle soutient que :

- l'arrêté contesté doit être annulé par voie de conséquence de l'annulation de la décision du 6 juin 2013 refusant de l'admettre au séjour au titre de l'asile ;

- l'arrêté contesté méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3, § 1, de la convention relative aux droits de l'enfant ;

- l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne a été méconnu ;

- la décision fixant le pays de destination n'est pas motivée ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du 14 janvier 2015 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes a admis Mme D...épouse B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 décembre 2014, présenté par le préfet du Calvados, qui conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est de nature à justifier l'annulation de l'arrêté du 11 avril 2014 ;

Vu l'ordonnance du 14 janvier 2015 fixant la clôture de l'instruction au 13 février 2015 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu l'arrêt Mukarubega (C-166/13) du 5 novembre 2014 de la Cour de justice de l'Union européenne ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mai 2015 :

- le rapport de M. Durup de Baleine, premier conseiller ;

1. Considérant que Mme D...épouseB..., ressortissante arménienne née en 1979, relève appel du jugement du 2 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 avril 2014 par lequel le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer un titre de séjour, assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de départ volontaire de 30 jours et fixé le pays de destination vers lequel elle pourra être reconduite d'office à l'issue de ce délai ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. Considérant, en premier lieu, que la requérante ne saurait utilement soutenir ne pas avoir été entendue avant que le préfet ne prenne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour dès lors que, ayant demandé l'asile et devant dès lors être regardée comme ayant demandé la délivrance d'un titre de séjour sur ce fondement, cette décision a été prise en réponse à une demande formulée par l'intéressée ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'arrêt Mukarubega (C-166/13) du 5 novembre 2014 de la Cour de justice de l'Union européenne que l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, qui ne s'adresse qu'aux institutions, organes et organismes de l'Union européenne et non pas également à ses Etats membres, n'est pas utilement invoqué dans une procédure relative au droit au séjour d'un étranger ; que si Mme D...épouse B...peut être regardée comme ayant plus largement invoqué l'atteinte portée au respect des droits de la défense résultant du fait qu'elle n'a pas été entendue avant l'édiction de la mesure d'éloignement prise à son encontre, il ressort des pièces du dossier qu'en sollicitant le bénéfice de l'asile, la requérante a demandé la délivrance d'un titre de séjour prévu à l'article L. 313-13 ou au 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle a été mise à même, dans le cadre de cette demande, de porter à la connaissance de l'administration l'ensemble des informations relatives à sa situation personnelle dont elle souhaitait se prévaloir ; qu'il n'est pas établi qu'elle disposait d'autres informations qu'elle aurait été empêchée de porter à la connaissance des services de la préfecture avant que soit prise à son encontre la décision portant obligation de quitter le territoire français qu'elle conteste et qui, si elles avaient pu être communiquées à temps, auraient été de nature à faire obstacle à l'édiction de cette décision ; que le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu doit, dès lors, être écarté ;

4. Considérant qu'il ressort des termes de l'arrêté attaqué qu'il comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait constituant le fondement de la décision fixant la destination d'une éventuelle reconduite d'office à l'issue du délai de départ volontaire de 30 jours ; que le moyen tiré de l'insuffisante motivation ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne :

5. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêt de ce jour, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté la requête formée par Mme D...épouse B...contre le jugement du tribunal administratif de Caen du 2 octobre 2014 rejetant sa demande d'annulation de la décision du préfet du Calvados du 6 juin 2013 refusant de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour au titre de l'asile ; qu'il en résulte que la requérante ne peut valablement prétendre que l'arrêté contesté du 11 avril 2014 devrait être annulé par voie de conséquence de l'annulation de cette décision du 6 juin 2013 ; qu'en outre, cet arrêté n'a pas été pris pour l'application de cette décision, qui n'en constitue pas non plus la base légale ; que, dès lors, le moyen tiré par voie d'exception de l'illégalité de la décision du 6 juin 2013 est inopérant ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier que la requérante ne séjourne en France, où elle est arrivée dans des conditions irrégulières, que depuis le 23 mai 2013, à l'âge de 34 ans ; que la demande d'asile qu'elle avait présentée a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 3 octobre 2013 ; qu'elle ne justifie en France d'aucune attache particulière ; que rien ne s'oppose à ce que la requérante et son époux, dont la demande d'asile a été rejetée et auquel le préfet du Calvados a également opposé un refus de lui délivrer un titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours, soient accompagnés par leurs trois enfants nés en 2000, 2002 et 2008 ; que, si la requérante souligne que les deux plus âgés de ses enfants sont scolarisés en France dans un collège, il ne ressort pas des pièces du dossier, ni même n'est allégué, qu'ils ne pourraient être scolarisés hors de France, notamment dans leur pays d'origine ; que rien ne s'oppose à la reconstitution de la cellule familiale dans ce pays ; que, dès lors, compte tenu en particulier de la durée et des conditions du séjour de Mme D...épouse B...en France, le préfet du Calvados, qui a procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressée et qui était au demeurant tenue de lui refuser la délivrance d'une carte de séjour temporaire au titre de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de la carte de résident prévue au 8° de l'article L. 314-11 du même code, n'a, en refusant de délivrer à l'intéressée un titre de séjour sur un autre fondement et en décidant de lui faire obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours, pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts dans lesquels ont été prises ces décisions ; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut, dès lors, qu'être écarté ;

7. Considérant, en troisième lieu, que l'arrêté contesté n'a ni pour objet ni pour effet de séparer les enfants de la requérante de cette dernière et de son époux, qui en assurent à titre habituel la garde, l'entretien et l'éducation ; que rien ne s'oppose à ce que ces enfants retournent avec leurs parents en Arménie, ou dans tout autre pays dans lequel ils seraient légalement admissibles, et y poursuivent leur scolarité ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à prétendre que l'arrêté contesté aurait, en violation des stipulations du § 1 de la convention relative aux droits de l'enfant, méconnu l'intérêt supérieur de ses trois enfants ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à prétendre, ni, que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français serait illégale en raison de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, ni que celle fixant le pays de destination serait illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;

9. Considérant, en cinquième et dernier lieu, que, si Mme D...épouse B...réitère à l'encontre de la décision fixant le pays de destination le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elle n'apporte en appel à l'appui de ce moyen aucun élément quelconque nouveau ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs énoncés, à bon droit, au point 10 du jugement attaqué ;

10. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme D...épouse B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution et que, par suite, les conclusions tendant à ce que, sous astreinte, il soit ordonné au préfet du Calvados de statuer à nouveau sur la situation de la requérante, ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement d'une somme à ce titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...épouseB... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...D...épouse B...et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet du Calvados.

Délibéré après l'audience du 11 mai 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Durup de Baleine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er juin 2015.

Le rapporteur,

A. DURUP de BALEINELe président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT02693
Date de la décision : 01/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Antoine DURUP de BALEINE
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : SELARL CHRISTOPHE LAUNAY

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-06-01;14nt02693 ?
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