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01/06/2015 | FRANCE | N°14NT01370

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 01 juin 2015, 14NT01370


Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2014, présentée, pour M. F...Haidara, demeurant..., agissant pour ses enfants I... Haidaraet J...E..., Mme C...Haidara, demeurant à Bamako (Mali)et domicilié..., demeurant à Bamako (Mali)domicilié... ;

Mme et MM. Haidarademandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1110864 du 3 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours co

ntre la décision du consul général de France à Bamako (Mali) du 8 novembre 2...

Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2014, présentée, pour M. F...Haidara, demeurant..., agissant pour ses enfants I... Haidaraet J...E..., Mme C...Haidara, demeurant à Bamako (Mali)et domicilié..., demeurant à Bamako (Mali)domicilié... ;

Mme et MM. Haidarademandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1110864 du 3 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours contre la décision du consul général de France à Bamako (Mali) du 8 novembre 2010 refusant de délivrer un visa d'entrée et de long séjour à Mme Haidaraet aux enfants I..., J... et L...E...;

2°) d'annuler cette décision implicite ;

3°) d'ordonner à l'Etat, à titre principal de délivrer un visa long séjour à Mme Haidaraet aux trois enfants ou, à titre subsidiaire, de réexaminer leur demande de visa, ces mesures étant prise dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2000 euros à son avocat, à condition que celui-ci renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

ils soutiennent que :

- le tribunal administratif a commis une erreur dans l'appréciation des documents d'état civil fournis pour MmeE... et pour les trois enfants ; l'existence de simples erreurs matérielles ne révèlent pas nécessairement l'existence d'une fraude ;

- les liens de filiation sont également établis par la possession d'état qui résulte de nombreux éléments et documents concordants ;

- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, la décision attaquée méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3.1 de la convention internationale de New York relative aux droits de l'enfant ;

Vu le jugement attaqué;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 novembre 2014, présenté, par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- les documents produits d'état civil produits pour Mme Haidaraet les trois enfants présentent de nombreuses irrégularités et ne permettent pas d'établir l'identité et la filiation avec M.Haidara ;

- les pièces produites pour établir la filiation à partir de la possession d'état datent essentiellement des années 2010 et 2011 et ne permettent pas d'établir que M. Haidaraa entretenu des relations constantes et fortes avec sa famille depuis son départ en 2002 ;

- l'identité de l'épouse et des enfants et les liens de filiation n'étant pas établis, la décision attaquée ne méconnait ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; en tout état de cause, M. Haidaraest libre de se rendre au Mali où résident son épouse et ses enfants allégués ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 avril 2015, présenté pour MM. et MmeHaidara, par Me Pollono ; MM. et MmeHaidaraconcluent aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu la décision du président du bureau de l'aide juridictionnelle près le tribunal administratif de Nantes du 24 mars 2014 accordant à M. Haidarale bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code civil ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mai 2015 :

- le rapport de Mme Rimeu, premier conseiller ;

- et les observations de Me Pollono, avocat de M.Haidara ;

1.Considérant que M. F...Haidara, de nationalité ivoirienne, a obtenu le statut de réfugié en France par décision de la commission de recours des réfugiés du 28 février 2005 ; que le 16 août 2007, Mme C...Haidaraet les enfants J..., L... et I... Haidaraont sollicité des autorités consulaires françaises à Bamako (Mali) la délivrance de visas d'entrée et de long séjour en France sur le fondement de la procédure dite de " famille rejoignante " d'un réfugié ; que ces visas ont été refusés par décision du 8 novembre 2010 ; que le recours formé contre ce refus devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a été rejeté par une décision implicite ; que M.Haidara, agissant pour ses enfants mineurs Goassouet FatoumataHaidara, MmeHaidaraet AliouHaidararelèvent appel du jugement du 3 janvier 2014 du tribunal administratif de Nantes rejetant leurs conclusions à fin d'annulation de cette décision implicite ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (Bamako (Mali)) La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil " ; qu'aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité " ; que cet article pose une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère ; qu'il incombe à l'administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question ;

3. Considérant que lorsque la venue d'une personne en France a été autorisée au titre du regroupement familial, l'autorité consulaire n'est en droit de rejeter la demande de visa dont elle est saisie à cette fin que pour un motif d'ordre public ; que figure au nombre de ces motifs l'absence de caractère authentique des actes d'état-civil produits ;

En ce qui concerne les enfants I... et L...E... :

4. Considérant que la seule circonstance qu'aient été produits pour établir l'état civil de I... et L... Haidarades extraits d'acte de naissance ivoiriens et non des actes intégraux n'est pas à elle seule de nature à établir l'absence de caractère authentique de ces actes ; que le ministre de l'intérieur ne soutient pas que ces extraits d'acte de naissance comporteraient des erreurs et incohérences ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ces extraits d'acte de naissance, dont les informations sont concordantes avec les autres documents fournis, seraient dénués de caractère authentique ; que dans ces conditions, les requérants sont fondés à soutenir que, s'agissant des enfants I... et L...E..., la décision litigieuse est entachée d'erreur d'appréciation ;

En ce qui concerne Mme Haidaraet l'enfantD... :

5. Considérant que s'agissant de Mme C...Haidara, ni l'extrait d'acte de naissance produit à l'appui de sa demande de visa, ni le jugement supplétif du 12 octobre 2005, qui comportent des irrégularités, ne permettent d'établir l'identité de l'épouse deHaidara ; que son passeport ne constitue pas un acte d'état civil mais un document de voyage, qui ne permet pas d'établir son identité ; que s'agissant deD..., d'une part l'extrait d'acte de naissance ivoirien produit laisse apparaître une incohérence et d'autre part l'acte émanant des autorités maliennes est dépourvu de caractère probant dès lors qu'il n'est pas précisé le registre dont les informations qu'il comporte sont extraites et qu'il présente également une incohérence ; que dans ces conditions, les documents d'état civil produits ne permettent pas d'établir le lien de filiation allégué entre Goassouet M. Haidara; que par ailleurs, les documents produits ne sont pas suffisants pour établir la filiation par la possession d'état ; que par suite, en estimant implicitement que l'identité de Mme C...Haidaraet la filiation de l'enfant Goassouavec son père n'étaient pas établies par les documents d'état civil produits, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'a pas, en ce qui concerne Mme C...Haidaraet GoassouHaidara, entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;

6. Considérant en second lieu, que dès lors qu'il n'est pas établi que Mme C...est l'épouse de M. Haidaraet que Goassouest son enfant, le refus de visa qui leur a été opposé n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

7. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les requérants sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, en tant qu'elle concerne la demande de visa long séjour de I... et L... Haidara;

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

8. Considérant qu'il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur, en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, de réexaminer la demande de visa long séjour de I... et L...E..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

9. Considérant en revanche, que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France en ce qui concerne Mme C...Haidaraet GoassouHaidara, n'implique à leur égard aucune mesure d'exécution ; que les conclusions à fin d'injonction s'agissant de Mme C...Haidaraet de GoassouHaidarane peuvent par suite qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1000 euros au bénéfice de Me Pollono, à condition que celle-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 3 janvier 2014 et la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France rejetant le recours formé contre le refus de visa opposé à la demande de visa long séjour de I... Haidaraet L... Haidarasont annulés en tant qu'ils concernent ces derniers.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de réexaminer la demande de visa de I... Haidaraet d'L... Haidaradans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Pollono, à condition que celle-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, la somme de 1000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. F...Haidara, à Mme C...Haidara, à M. AliouHaidaraet au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 11 mai 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- Mme Rimeu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er juin 2015.

Le rapporteur,

S. RIMEU

Le président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. GOY

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N° 14NT01370

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01370
Date de la décision : 01/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: Mme Sophie RIMEU
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : CABINET POLLONO

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-06-01;14nt01370 ?
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